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EAN : 9782130631262
224 pages
Presses Universitaires de France (29/04/2015)
3.5/5   3 notes
Résumé :

De quoi l'exode des Érythréens est-il le symptôme ?

Ils sont des dizaines de milliers, chaque année, à fuir leur pays. Pourquoi risquer sa vie dans le désert, aux mains des trafiquants du Sinaï ou de Libye, avant de traverser la Méditerranée, devenue « la route la plus mortelle du monde », pour rejoindre l'Europe ? Souvent décrite comme « la Corée du Nord de l'Afrique », l'Érythrée est l'un des derniers États totalitaires.

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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
La publication de l'ouvrage de Jean-Baptiste Jeangène Vilmer et Franck Gouéry coïncide avec une actualité tragique qui place ce pays méconnu sous les feux de l'actualité : l'afflux massif de réfugiés érythréens en Europe, la révélation de leurs terribles conditions de voyage à travers le Sahara et la Méditerranée, le démantèlement du camp de la Chapelle en juin 2015 où ils étaient majoritaires, l'attribution du prix Albert Londres au documentaire de Delphine Deloget et Cécilia Allegra Voyage en Barbarie …
Pourtant l'Érythrée connaît depuis de nombreuses années une dérive alarmante ignorée du grand public. Au point de compter, avec la Corée du Nord et le Turkménistan (auquel Jean-Baptiste Jeangène Vilmer avait consacré un ouvrage en 2010), parmi les pires dictatures au monde. Les auteurs documentent le naufrage de ce jeune État qui, au lendemain d'une indépendance durement acquise, avait porté les espoirs de la « renaissance africaine ». Las ! en quelques années Issayas Afeworki « va détruire la vie politique, le débat public et l'économie, faire la guerre à tous ses voisins, s'exclure de l'intégration régionale, s'aliéner la communauté internationale, emprisonner une partie de sa population et pousser l'autre à fuir le pays en masse » (p. 11).
La charge pourrait sembler trop lourde et les auteurs de parti pris ; mais le constat terrible qu'ils dressent est solidement documenté, s'appuyant autant sur les rapports des ONG que sur les enquêtes de l'Onu. le président Issayas a beau s'ériger en victime d'un complot américano-éthiopien, les faits sont têtus et révèlent l'ampleur du désastre. État de non-droit, l'Érythrée connaît les arrestations, les emprisonnements arbitraires, la torture. La conscription de masse à durée indéterminée incite les jeunes à l'exil : entre 5000 et 1000 Érythréens quittent leur pays chaque mois. le corps social est atomisé : les réunions sont proscrites, la délation est encouragée, la presse est bâillonnée. le secteur privé se meurt, laissant l'économie exsangue et la population affamée : 30 % de la population seulement a accès à l'électricité, 60 % souffre de malnutrition. Pour maintenir la société dans un état de soumission, Asmara entretient avec tous ses voisins un état de guerre permanent, avec le Soudan (1993-2003), le Yémen (1995), Djibouti (1996, 2008) et au premier chef l'Éthiopie (1998-2000). Elle a pour conséquence son exclusion des organisations régionales (il a quitté l'IGAD en 2006 et l'UA en 2007). Sur la scène internationale, l'Érythrée est sous le coup de sanctions onusiennes – même si la fin de son soutien aux chababs pourrait entraîner leur levée.
Les auteurs estiment que le régime est « en phase terminale ». Pourtant sa disparition est loin d'être acquise : aucune rébellion interne – comme l'a montré la tentative de coup d'État du 21 janvier 2013 – ni aucune invasion extérieure – l'Éthiopie a plus à perdre qu'à gagner dans une guerre de (re)conquête – n'en viendra à bout. Poser la question de l'avenir de l'Érythrée, c'est poser celle de l'après-Issayas (comme on posait celle de l'après-Mao dans les années 70 ou de l'après-Castro dans les années 90). L'homme a 69 ans. On le dit alcoolique, malade. Il n'a pas organisé sa succession, laissant augurer la mise en place d'une oligarchie autoritaire (comme dans l'URSS post-stalinienne ou dans la Chine de la Bande des Quatre). Elle sera condamnée à se réformer pour survivre : réduction de la durée du service national, réconciliation avec l'Éthiopie, libéralisation économique …. Mais, comme en URSS ou en Chine, la survie du régime signera paradoxalement sa faillite totalitaire : pour survivre, le régime devra renoncer au contrôle total de tous les aspects de la vie de ses citoyens.
C'est le double sens de « totalitarisme failli » sur lequel jouent les auteurs. La faillite peut s'entendre comme un échec, un naufrage. Elle peut s'entendre aussi comme l'imperfection d'un Idealtype. L'Érythrée est un État totalitaire doublement failli : Issayas a plongé son pays dans le chaos tout en échouant à en faire un État parfaitement totalitaire.
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Livre extrêmement documenté sur l'Érythrée et la dure réalité de ce pays qui sombre définitivement vers un régime autoritaire et l'une dictature les plus féroces du monde. Ce pays que je connais pour y avoir vécu et voyagé à 5 reprises est pourtant magnifique. Plus du tiers des érythréens ont déjà fui leur pays et le service militaire obligatoire et à durée indéterminée. CE pays est si peu connu en France là où les ressortissants réfugiés ne sont que quelques centaines. IL faut lire ce livre pour comprendre les rouages du systèmes au travers son histoire et sa géopolitique.
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