C'est suite à ma lecture de "
La bibliothécaire d'Auschwitz" d'
Antonio G. Iturbe que j'ai appris que
Dita Kraus avait écrit sa biographie, que je m'étais empressée de noter avec quelques autres références à la fin de l'ouvrage. J'aurais mis le temps finalement à me la procurer, puis à trouver le bon moment pour l'ouvrir. Ce moment, je l'ai enfin trouvé ce week-end.
Si j'avais beaucoup aimé "
La bibliothécaire d'Auschwitz", je me rends compte aujourd'hui qu'il est vraiment un roman, historique et basé sur des faits réels, mais dont l'histoire se veut un peu "arrangée". Ce qui en faisait toute la trame, à savoir le quotidien dans le camp des familles, son amour pour les livres et les risques pris pour les protéger, n'est pas ce qui en ressort en premier dans cette biographie (cet épisode ne tient ici que sur un chapitre, sur les 54 que
Dita Kraus a écrits).
Ici, Dita nous relate toute sa vie, à commencer par son enfance en Tchécoslovaquie. La seconde partie évoque la période 1942-1945, de sa déportation à Theresiensdadt, puis à Auschwitz, Hambourg et Bergen-Belsen, jusqu'à la libération. La troisième partie, la plus conséquente, revient sur l'après-guerre, son mariage, son installation en Israël, sa vie de famille, sociale et professionnelle, sa reconstruction qui n'a finalement jamais cessé.
Dita est ce qu'on appelle une femme-courage. Toute sa vie, elle n'a cessé de se battre. Après avoir survécu à l'innommable dans les camps de la mort, après avoir perdu quasiment toute sa famille, il a fallu qu'elle rentre en Tchécoslovaquie, là où elle n'avait plus rien. Peu après, la situation politique a fait qu'elle a dû fuir, et immigrer en Israël avec son mari et son bébé. Là-bas, c'est la précarité qui les a d'abord accueillis, jusqu'à leur intégration dans un kibboutz, où elle ne s'est jamais vraiment sentie à sa place. Ils le quitteront au bout de quelques années, Otto ayant trouvé une place en tant que professeur d'anglais à Hadassim et où Dita y deviendra enseignante à son tour. Entre les problèmes d'ordre mental de son fils aîné, la maladie incurable de sa fille et les problèmes cardiaques de son mari, Dita n'a jamais fini d'en baver...
Dita, dès le départ, nous prévient qu'elle a eu du mal presque toute sa vie à parler des événements les plus durs aux personnes qui n'avaient pas vécu la même chose qu'elle, et notamment de tout ce qui concerne les événements dans les camps. Souvent d'ailleurs, elle digresse quelque peu, tout en en étant consciente. On l'excuse bien volontiers, mettre en mots de tels événements, partager ses ressentis du moment, n'est certainement pas chose facile. Pourtant, elle y arrive bien dans l'ensemble. Elle digresse oui mais reste cohérente. Avec tout ce qu'elle a enduré, pas une seule fois elle ne se plaint, pas une seule fois elle s'apitoie sur son sort. Toujours elle avance, toujours elle affronte, toujours elle assume, toujours elle se relève.
Les témoignages sont nombreux mais toujours aussi nécessaires, d'autant que les survivants sont maintenant peu nombreux. À nous de faire en sorte qu'ils ne tombent pas dans l'oubli.
Dita Kraus avait 89 ans quand elle a mis le point final à sa biographie. Elle a fêté ses 94 ans cet été et donne encore de temps en temps des conférences. Alors à défaut de l'écouter, lisez-la.
"Moi,
Dita Kraus,
la bibliothécaire d'Auschwitz" (titre quelque peu racoleur il faut bien l'admettre car pas du tout représentatif de ce qui nous est relaté dans cet ouvrage) est une biographie poignante et bouleversante d'une femme qui ne fait jamais dans le mélo malgré toutes les choses horribles qu'elle a vues et vécues.
Dita Kraus est une leçon de vie à elle toute seule.