J'ai déjà écrit deux trois conneries sur les livres de Krishnamurti. Elles s'appliquent encore à ce livre.
Les livres de Krishnamurti ont tous la même substance. Les variations ne concernent que la forme que prend la parole qui les énonce.
J'aime toujours autant son antidogmatisme, sa remise en question des croyances, son invite à nous désiler pour voir la réalité dans une nouveauté renouvelée. Ça me fait penser à l' « être sans mémoire, sans désir et sans compréhension » de Bion. Purement christique.
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Je vois que je suis responsable, totalement responsable de l’ensemble de la conscience. Je vois que lorsque j’explore la peur, j ’aide la totalité de la conscience humaine à atténuer cette peur. Alors, la mort prend un sens complètement différent. Je n’ai plus le phantasme de m ’asseoir à côté de Dieu ou d’aller au ciel en traversant une certaine nébuleuse. Je mène une vie qui n’est pas ma vie propre. Je vis une vie qui est celle de toute l’humanité et si je comprends la mort, si je comprends la douleur, je purifie l’ensemble de la conscience humaine. C’est pourquoi il importe de comprendre le sens de la mort et peut-être de découvrir que la mort a une grande signification, une grande relation avec l’amour. Car lorsque vous mettez fin à quelque chose, il y a amour. Quand vous mettez fin complètement à l’attachement, alors l’amour existe.
Sachant que la pensée est limitée, soyez conscients de cette limite et ne la repoussez pas, car elle sera encore limitée, aussi loin que vous la repoussiez. Alors que si vous observez une rose, une fleur sans les mots, sans en donner la couleur mais en ne faisant que la regarder, alors, ce regard vous apportera une grande sensibilité, éliminera cette impression de lourdeur du cerveau et vous donnera une extraordinaire vitalité. Il existe une toute autre sorte d’énergie quand il n’y a que la perception pure qui n’est reliée ni à la pensée ni au temps.
Exprimons-le différemment : de l’expérience, nous retirons du savoir et du savoir, nous retirons de la mémoire : la pensée est la réaction de la mémoire, puis l’action découle de la pensée, grâce à cette action vous en apprenez plus et c’est ainsi que le cycle se répète. C’est le schéma de notre vie. Cette façon d’apprendre ne résoudra jamais nos problèmes car elle est répétitive. Nous acquérons plus de savoir, ce qui peut conduire à une meilleure action mais cette action est limitée et nous ne cessons de la reproduire. L’activité qui découle du savoir ne résoudra pas du tout nos problèmes humains. Nous ne les avons pas résolus, c’est absolument évident. Après des millions d’années, nous n’avons pas résolu nos problèmes, nous nous entr’égorgeons, nous rivalisons les uns avec les autres, nous nous haïssons, nous voulons réussir. Tout ce schéma se répète depuis que l’homme existe et nous n’en sommes pas encore sortis. Faites ce que vous voulez en suivant ce schéma-là et aucun problème humain ne sera résolu, qu’il soit politique, religieux ou économique, parce que c’est la pensée qui est à l’œuvre.
Si l’on écarte l’attitude intellectuelle, l’attitude romantique ou sentimentale à l’égard des religions, on peut alors commencer à se demander sans aucune naïveté mais avec sérieux : qu’est-ce que la religion ? - sans en rester au sens superficiel du mot mais en s’interrogeant profondément. Dans les temps les plus reculés, l’homme a toujours pensé qu’il devait y avoir quelque chose au-delà de notre vie quotidienne ordinaire, au-delà de la misère, de la confusion et des conflits habituels de la vie de tous les jours. Dans sa recherche, il a inventé toutes sortes de philosophies, créé toutes sortes d’images - depuis celles des anciens Egyptiens et des anciens Hindous jusqu’à celles des temps modernes apparemment toujours prisonnier de toutes sortes d’illusions. Il s’illusionne et crée toutes sortes d’activités à partir de ces illusions. Si l’on pouvait balayer tout cela, sans s’hypnotiser, en étant libre de l’illusion, on pourrait alors commencer à examiner, à s’interroger très profondément pour savoir s’il existe quelque chose au-delà de toute la contamination de la pensée, de toute la corruption du temps ; s’il existe quelque chose dans l’espace et le temps au-delà de notre existence habituelle ; s’il existe un chemin pour y conduire ou non, comment l’esprit peut l’atteindre ou y parvenir. Si l’on se pose ces questions sur soi-même, alors comment va-t-on s’y prendre ? Une préparation est-elle nécessaire - de la discipline, des sacrifices, du contrôle, une certaine période de préparation et puis on progresse ?
J’aimerais répéter que nous n’essayons pas de vous convaincre de quoi que ce soit - cela doit être clairement compris. Nous n’essayons pas de vous persuader d’accepter un certain point de vue. Nous n’essayons pas de vous infuencer en quoi que ce soit, ni de faire de la propagande. Nous ne parlons d’aucune personnalité, ni de qui a tort ou raison, mais nous essayons plutôt de réfléchir sérieusement, d’observer, ensemble, ce qu’est le monde et ce que nous sommes, ce que nous avons fait du monde et de nous-mêmes. Nous essayons d’examiner ensemble, à la fois l’homme intérieur et extérieur.
Extrait du livre audio « Un esprit calme et silencieux » de Jiddu Krishnamurti, traduit par Colette Joyeux, lu par Jean-Philippe Renaud. Parution numérique le 30 août 2023.
https://www.audiolib.fr/livre/un-esprit-calme-et-silencieux-9791035413361/