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EAN : 9782081389199
128 pages
Flammarion (17/08/2016)
3.74/5   95 notes
Résumé :
Vincent König est le dépositaire des archives de l’écrivaine suisse Esther Montandon. En ouvrant par hasard une chemise classée « factures », il découvre des dizaines de pages noircies, qui composent un récit intime. Esther a donc tenu un « journal de deuil », dans lequel elle a pour la première fois évoqué la mort de sa fille Louise et l’aberrante « vie d’après ». Les souvenirs comme les différents visages de la douleur s’y trouvent déclinés avec une incroyable jus... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (40) Voir plus Ajouter une critique
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Non seulement " Une femme qui n'a jamais existé peut être l'auteure d'un livre qu'elle n'a pas écrit ", mais surtout dix-huit jeunes auteur-e-s suisses peuvent réussir le pari d'écrire ensemble un récit de pure fiction sur un thème qu'ils n'ont pas vécu eux-mêmes, la perte d'un enfant, à une époque, les années soixante, qu'ils n'ont pas connue étant tous nés entre 1982 et 1992.
« Vivre près des tilleuls » ou comment faire magistralement la preuve que l'écriture n'a pour limite que celle de l'imagination et de l'audace des écrivains.

Pari gagné grâce à un récit court et sobre, d'une vérité, d'une justesse et d'une unité de ton tout à fait impressionnantes pour le collectif L'Ajar, association de jeunes auteur-e-s romandes et romands créé en 2012 pour explorer la création littéraire en groupe. Toute référence à Emile Ajar, célèbre pseudo de Romain Gary, semble donc fortuite puisque le sigle a sa propre signification…Je ne peux m'empêcher cependant de voir ici malgré tout un astucieux clin d'oeil à leur illustre homonyme dans leur façon d'écrire ensemble pour le compte d'un auteur de leur invention, Esther Montandon, poussant même le raffinement jusqu'à lui créer une page Wikipédia.
Evidemment, on ne manquera pas de s'interroger sur leurs procédés d'écriture, et j'avoue être curieuse de leurs éventuels interviews en cette rentrée littéraire - j'imagine ( et j'espère ) déjà les 18 sur le plateau de la Grande Librairie par exemple.

Originalité donc de la forme, mais le fond, puissant, a une qualité littéraire indéniable qui m'a plue, c'est bien l'essentiel.
Revenons au livre. L'avant-propos avertit du contenu de l'ouvrage : « Un recueil d'impressions, de faits, de pensées et de souvenirs. Une petite sociologie du deuil », il trace un rapide portrait d'une femme écrivain, Esther Montandon, auteur réelle - mais bien fictive - de ce parcours douloureux de mère.
De courts et denses chapitres égrènent ensuite à la première personne du singulier ses réflexions intimes, chagrin, incompréhension, douleur, bêtise involontaire de l'entourage, éloignement…bien sûr, mais aussi les petites lucarnes de souvenirs heureux, les sursauts de vie qui accompagnent toute tragédie. L'ensemble aboutit à un témoignage très maitrisé, peut-être un peu trop par moment, mon seul petit bémol pour ce parcours de deuil.

« Le temps s'épaissit…L'espace se réduit. »
« C'est à la façon d'une libellule qui frôle les eaux dormantes que je me déplace dans le quotidien. Je reste à la surface des choses pour ne pas souffrir, je ne m'approche de rien. »

Vous l'aurez compris, j'ai beaucoup apprécié ce « premier roman » de L'Ajar et j'espère qu'ils ne s'arrêteront pas en si bon chemin, près des tilleuls…
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Tout d'abord un grand merci à Babelio et aux éditions Flammarion pour l'envoi de ce petit livre touchant et émouvant...
Esther Montandon a perdu sa fille de 3 ans lors d'un terrible accident domestique. Ecrivain, elle n'a jamais écrit un mot sur sa douleur et sur son difficile travail de deuil. Vincent König est en charge d'archiver l'ensemble des ses documents et il va retrouver le récit des jours et des années qui suivront cet instant où tout bascule...
Ce roman est l'oeuvre d'un collectif de jeunes auteurs et il est plutôt réussi. Sur un thème si dur que la perte d'un enfant, ils mettent des mots sur l'avant, les souvenirs, les instants de bonheur et sur l'après, le vide, la solitude et la vie qui s'arrête. Il n'y a pas de larmes versées, le pathos n'alourdit pas les pages mais on est touché par cette mère, ce couple, cette famille qui partent en morceaux...
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Voilà un texte d'une grande beauté , au style épuré, pudique et saisissant, criant de vérité, lu d'une traite, sur le sujet douloureux du deuil , écrit par un collectif de très jeunes auteurs : L AJAR .
L'écriture très touchante, succession de courts chapitres rythment la lecture et accentuent l'intensité émotionnelle .
Sur le fil sensible, ténu d'une intense douleur mesurée, c'est aussi un vibrant hommage au travail d'écriture : une véritable prouesse.
Tout en délicatesse et finesse, depuis les prémices de l'enfantement, la joie d'être mère à l'inénarrable arrachement du deuil d'un enfant et le ressenti de sa mère écrivaine !
Une femme brisée dans l'incapacité à vivre après l'inimaginable ......
Un texte original écrit à plusieurs voix au charme fou, nostalgique et ciselé , troublant de sensibilité, qui chavire le coeur et laisse son empreinte en nous !
Une ode à la littérature !
Merci à Marylin, mon amie de la Médiathéque .
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" La fiction n'est absolument pas le contraire du réel". C'est ce qu'affirme très justement le collectif d'auteurs , L'Ajar (pour rendre hommage aux différentes identités de Romain Gary), ayant écrit ce livre. Initiative originale et enthousiasmante, le résultat est fort positif.

Ce court roman se joue des codes habituels. Outre le fait qu'il est écrit à mains multiples, il mêle le vrai et le faux, puisqu'il présente le faux journal fragmenté d'une fausse romancière, exhumé des archives par un faux dépositaire, le tout écrit par de vrais auteurs...

Cela donne un texte très émouvant, authentique par son intensité, sa justesse. Car les notes retrouvées d'Esther, l'auteure, touchent à un drame terrible: la perte d'un jeune enfant, le deuil impossible, celui de la petite Louise.Les mots pour dire ou ne pas savoir dire le chagrin, le manque, sont rendus avec beaucoup de pudeur et de profondeur." Petit à petit, Louise se cache dans un coin de ma chambre, derrière des voiles blancs,loin de la vue de tous.Là, elle pourra continuer d'être ma fille."

Ce roman fait vibrer, on entre en résonance avec les pensées, la souffrance , d'Esther.Et on trouve magnifique l'osmose des auteurs, pour transcrire son ressenti.

Une bien belle expérience, qui prouve qu'il est possible d'associer des talents, de croire en " l'infiniment plus que moi, le tellement plus que nous"...
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Il m'est des livres difficiles à commencer, des livres dont je relis les premières pages pour m'imprégner du sens. Il en est d'autres dans lesquels je plonge la tête la première pour n'en ressortir, essoufflée, qu'au point final. ″Vivre près des tilleuls″ fait partie de ces derniers.
La lecture du prologue m'a happée et je suis allée au bout d'une traite, sans respirer, avec avidité. Ce petit opus, 119 pages et 63 chapitres – très courts, donc, entre trois mots et trois pages – raconte l'histoire d'un deuil.
Mais pourquoi ai-je tant aimé cet ouvrage ? Les qualités d'écriture n'y sont pas étrangères : petites phrases harmonieuses d'une simplicité presque enfantine, dignes d'une rédaction en école élémentaire, jolis mots entrelacés, ″chapitre 41 : le pain lève sur le rebord de la fenêtre. L'eau bout dans la grande casserole pour le sirop de sureau. La porte du balcon est entrouverte sur le soir, l'attrape-mouche bouge dans la brise, on entend les engoulevents et les voitures″. C'est pur, clair, léger et tellement beau. Et je ne parle pas du plaisir de découvrir au détour d'une réflexion des mots tirés du vocabulaire suisse – des catelles de la cuisine aux courses à la ″Migros″ - appris au fil du temps grâce à un fils travailleur frontalier.
J'ai beaucoup aimé également le sujet : le douloureux deuil d'une mère, Esther Montandon écrivain, évoquant la mort de sa fille Louise et la difficulté à vivre les jours d'après. La manière dont il est traité, avec une sensibilité hors du commun, une retenue émouvante, un grand sens du respect de soi et des autres en fait un récit à la fois émouvant, poignant mais aussi empli d'amour. Ce n'est jamais larmoyant, toujours empreint de douceur et du rire des souvenirs joyeux.
Et la postface est arrivée, qui m'a complètement ébaubie. Sans vouloir divulguer quoi que ce soit à ceux qui, comme moi, refusent toute information sur un livre avant d'en prendre connaissance, je dirai que j'ai été ″bluffée″ par les circonstances dans lesquelles a été écrit ce roman. C'est une aventure fabuleuse, curieuse, inouïe, une histoire d'amitié, un défi incroyable, une idée brillante qui m'a laissée bouche bée, éberluée, fascinée. Découvrir cet ouvrage c'est entrer dans un monde particulier où la fiction ne s'avère pas obligatoirement le contraire du réel. En un mot… ou plusieurs, c'est une incroyable réussite, un véritable coup de coeur pour ce qui me concerne.
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Citations et extraits (29) Voir plus Ajouter une citation
Lorsque Esther Montandon m’a laissé la responsabilité de ses archives, en 1997, je me suis trouvé face à une masse de documents divers : cartes postales, pièces administratives, courriers, coupures de journaux… À quoi s’ajoutait le lot commun de tous les écrivains dont la recherche fait son miel : brouillons griffonnés épars, pages dactylographiées avec ou sans annotations autographes, et trois carnets de notes.
Reconnaissant de cette marque de confiance, je me suis attelé à la tâche avec un enthousiasme qui n’a cessé de décroître devant l’ampleur du travail. Même si la mort de l’auteure, l’année suivante, a ravivé un temps l’intérêt du public pour ses écrits, l’œuvre est peu à peu tombée dans l’oubli.
Cette production exigeante a parfois été jugée trop mince – Esther Montandon n’a publié que quatre livres de son vivant. On la réduit par ailleurs souvent au seul Piano dans le noir (1953), le premier et le plus connu de ses textes. C’est sous-estimer les richesses que recèlent ses trois autres ouvrages. Il n’y a qu’à relire Bras de fer (1959), portrait acide et jubilatoire d’une Suisse hésitant entre tradition et modernité, ou Trois grands singes (1970), nouvelles dans lesquelles l’auteure revendique son engagement féministe en dépeignant sans concessions une société patriarcale. Enfin, la gerbe de ses souvenirs d’enfance, magnifiquement nouée dans les fragments des Imperdables (1980), offre dans un style épuré un aperçu poétique et documentaire du Rwanda et de la Suisse des années 1930. En dehors de cela, il n’y a rien.
L’ensemble du fonds Esther-Montandon ne contient que la matière relative à son activité depuis le début des années 1960. Tout ce qui précède – cahiers, brouillons, manuscrits, projets en cours, dont atteste sa correspondance – a disparu dans l’autodafé qu’elle a commis à la suite de la mort accidentelle de sa fille Louise, le 3 avril 1960. De cette tragédie, inaugurant dix ans de silence éditorial dans la vie de l’auteure, on ne trouve trace ni dans Trois grands singes ni dans Les Imperdables. Jamais Esther Montandon n’a écrit sur la perte de sa fille. C’est du moins ce que l’on a longtemps cru.
Comment donc décrire mon émotion lorsqu’un matin d’hiver 2013, en mettant de l’ordre dans les cartons qu’elle m’avait confiés, je découvre une pochette étiquetée « factures », pochette que j’ai dû manipuler vingt fois sans jamais l’ouvrir – renfermant une petite liasse manuscrite.
Et tout est là, miraculeusement préservé. (Avant-propos)
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Le chagrin est moins un état qu'une action. Les heures d'insomnie, puis le sommeil en plomb fondu sur les paupières, la prostration dans le noir, la faim qui distrait la douleur, les larmes qu'on ne sent plus couler : le chagrin est un engagement de tout l'être, et je m'y suis jetée. On me dit de me reprendre, de faire des choses pour me changer les idées. Personne ne comprend que j'agis déjà, tout le temps. Le chagrin est tout ce que je suis capable de faire.
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"Le chagrin est moins un état qu'une action.
Les heures d'insomnie, puis le sommeil en plomb fondu sur les paupières, la prostration dans le noir, la faim qui distrait la douleur, les larmes qu'on ne sent plus couler : le chagrin est un engagement de tout l'être , et je m'y suis jetée.."
"Le chagrin est tout ce que je suis capable de faire ".
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Au premier plan, un paysan manœuvre le soc d'une charrue tirée par un cheval alezan. La terre est rendue en nuances de brun, le relief en est lissé, le peintre ne s'y est manifestement pas attardé. Les plantes et les arbres, en revanche, sont détaillés jusqu'aux minuscules feuilles presque noires. En contrebas de la colline où le paysan laboure son champ, un berger appuyé sur son bâton regarde le ciel. Autour de lui paissent des moutons. Deux sont noirs. Un chien veille. Dans le coin en bas à droite du tableau, un troisième personnage, accroupi, lance quelque chose dans l'eau. Une ligne, un hameçon peut-être.
Le reste du panneau est couvert de mer et de ciel. Une ville au loin, blanche et rose, portuaire, antique. Des rochers dans l'eau, des bancs de sable et un navire aux voiles largement déployées. Du milieu de la mer semble pulser un cœur de lumière, alors que le soleil, tout au fond, plonge sous la ligne de flottaison. Peut-être aussi qu'l se lève. Moi je crois qu'il plonge. Au ciel, la lumière est un dôme renversé qui éclabousse toute la scène, la mer et les montagnes, la ville et les hommes.
Je recule d'un pas. Je m'apprête à poursuivre ma visite. Quelque chose me retient. Je scrute encore les formes, les espaces, les couleurs, tout ce que l'eau, près du navire, à trois brasses du rivage, deux jambes s'agitent dans l'écume. Le cheval ni les moutons, le laboureur, le berger ni le pêcheur ne le remarquent. Un homme est tombé, un homme meurt. Personne ne le remarque.
Je suis à Bruxelles, dans l'une des salles des Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique. Le tableau est de Brueghel l'Ancien. La Chute d'Icare, 1558, dit la notice. Il s'agit d'une copie. L'original a disparu.
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Le sang de ma fille en étoile sur le trottoir palpitait dans le printemps, les tulipes sans doute en nourrissaient leur bulbe. Le sang de ma fille s'est éteint lorsque, de guerre lasse, je l'ai regardé droit dans les yeux
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