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EAN : 9782271132192
224 pages
CNRS Editions (11/03/2021)
4.5/5   1 notes
Résumé :
" Chacun sait que la publicité cible prioritairement notre cerveau reptilien. " L'affirmation issue des colonnes d'un grand quotidien français témoigne du succès de la notion proposée par le neuroscientifique américain Paul D. MacLean au tournant des années 1960. Elle s'inscrit dans une théorie générale du cerveau qui rapporte à une part archaïque de notre héritage évolutif un ensemble d'attitudes " primaires " : instinct sexuel, défense du territoire, agressivité..... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Avertissement : il ne s'agit pas d'un livre de biologie ou de neurosciences, mais de sciences de l'information, qui analyse (très bien) les discours issus de l'idée fausse de « cerveau reptilien ».

Méthodologiquement, c'est à mes yeux un des meilleurs livres que j'ai lus en analyse des discours (domaine encore émergent en France) : il est à la fois précis (basé sur un corpus riche et varié), sans être fastidieux.

Les trois principaux sujets que ce livre éclaire sont :

- [épistémologie des sciences] Comment une idée nait, se développe, et continue à se propager dans le monde scientifique alors qu'elle est pourtant très vite disqualifiée. Lemerle démontre que « le monde scientifique » n'est pas un tout homogène : il a son orthodoxie, basée sur des règles rigoureuses (la reproduction des expériences par les pairs), qui tue très vite dans l'oeuf le concept hasardeux de cerveau à 3 étages. Mais il a aussi ses « électrons libres », en marge pour des raisons méthodologiques, politiques, ou par recherche de l'éclairage médiatique (j'avoue que mes doutes concernant Henri Laborit, qui m'a pourtant donné le goût des neurosciences, se sont trouvés confirmés dans les plus grandes dimensions – ce qui ne retire rien à certaines de ses fulgurances). Et surtout, il y a tout le monde « para-scientifique » qui s'appuie sur des discours, des schémas - Molière dirait un charabia – inspiré des sciences mais très vite transformé au gré des motivations diverses de ceux qui l'exploitent.

- [sociologie] L'utilisation par différents champs (ici, le cinéma avec Resnais, le marketing politique ou d'entreprise, et surtout le développement personnel) est approfondie de manière très détaillée.

- [rhétorique, pédagogie] le principal intérêt du « mythe » du cerveau reptilien, et Lemerle l'explique (trop brièvement ?) dans sa conclusion, est sa valeur métaphorique. L'existence d'une valeur rhétorique et pédagogique d'une métaphore est soulevée mais peu développée. C'est le seul reproche que je ferais à cet ouvrage que je trouve, par ailleurs, remarquable – dans son domaine, certes particulier.

Si je devais critiquer l'ouvrage, ce serait sur deux points :

- dans la partie épistémologie, il passe sous silence la dimension nécessaire de l'erreur en sciences : pas de référence à Karl Popper par exemple. Or il me semble que l'approche essai-erreur est inhérente à la science. de plus une hypothèse fausse démentie par l'expérience est en soi une nouvelle connaissance scientifique. Il est dommage que Lemerle n'ait pas exploré cet aspect, par exemple par un entretien avec Jean-Pierre Changeux qui a pu brièvement se référer à Koestler, avant de rejeter le cerveau triunique.

- dans l'analyse de discours sur le développement personnel (*), on sent l'effort pour préserver une apparente neutralité. C'est là une difficulté courante des analyses de discours : comment être neutre sur une pseudo-science pour qui l'auteur (à raison) ressent certainement le plus grand mépris ? En choisissant de ne pas aborder la question frontalement, Lemerle piège le lecteur : l'ironie qu'il ressent est-elle voulue par l'auteur ou le résultat de ses propres préjugés ?

(*) Catherine Aimelet-Périssol, et un certain « C. M. » (« formateur en médiation »)
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critiques presse (1)
LeMonde
02 avril 2021
Le sociologue Sébastien Lemerle analyse la persistance, dans la culture savante comme populaire, d’une notion scientifique qui fut pourtant rapidement invalidée.
Lire la critique sur le site : LeMonde
Citations et extraits (1) Ajouter une citation
[96%]

Les métaphores théoriques sont souvent réemployées dans les discours de vulgarisation, y compris lorsqu’elles sont tombées en désuétude, comme celle du cerveau-ordinateur en neurosciences. Tel est le cas de la métaphore du cerveau reptilien, réutilisée par certains chercheurs en toute connaissance de cause pour bénéficier de la familiarité que l’évocation de la notion, qu’ils reconnaissent dépassée, suscite dans le public. On se rapproche alors du deuxième type d’usage des métaphores dans les discours scientifiques, l’usage pédagogique.

Celui-ci consiste à évoquer des objets, dispositifs ou situations supposés connus, voire relevant de la vie quotidienne. Dans ce cadre, il n’est pas nécessaire que les rapprochements soient rigoureusement justes afin de faire comprendre le schéma général d’une structure, d’un processus, d’une fonction remplie par certains éléments à un public de non-spécialistes. Il s’agit d’une pratique centrale dans les discours de vulgarisation scientifique, consistant à bâtir son discours en prenant en compte l’expérience courante du public. Elle vise à donner un sentiment de familiarité avec les concepts, les expériences ou les phénomènes présentés, à défaut d’une réelle compréhension. De fait, MacLean a aussi recouru à des métaphores de type technologique et machinique, comme celle de l’écran de télévision, ou zoologiques, comme celles du crocodile et du cheval, dans un contexte de vulgarisation ou de semi-vulgarisation. La figure même du reptile, au-delà de son rôle de métaphore théorique, peut être vue comme facilitant la compréhension de ce que la zone cérébrale désignée par l’expression est censée commander en termes de comportements agressifs.
[…] Elle [l’étude] conduit à prêter une attention renouvelée aux métaphores, y compris celles qui se rapportent aux savoirs les plus légitimes, dans la mesure où elles pourraient conditionner en grande partie le passage des connaissances scientifiques dans cet espace.
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