C'est une anecdote racontée par sa grand-mère qui, certainement, fit naître l'amour de l'Histoire dans le coeur d'enfant de Théodore Gosselin.
Bien des années plus tard, ses ouvrages seront signés G. Lenôtre.
Pourquoi ce nom ?
Peut-être par amour du passé car sa grand-mère était la dernière descendante de l'illustre architecte des jardins de Louis XIV ...
Âgé de 19 ans, le jeune Théodore entre au ministère des finances.
Il ne semble pas y souffrir de monotonie puisqu'il y fait et refait des additions sans jamais parvenir au même résultat.
Mais les heures de bureau terminées, Lenôtre s'abandonne à la poésie du passé.
Versailles, Fontainebleau ou la Conciergerie sont devenus ses habituels lieux de pèlerinage.
Ses soirées sont consacrées à dévorer de vieux mémoires dénichés sur les quais.
Un jour qu'il se trouvait en vacances à Bouillon, il dormit, une nuit, dans une vieille chambre poussiéreuse où Napoléon III passa sa première nuit de captivité ...
Presque par hasard, avant d'ouvrir la première page de "Nos français", j'ai découvert, dans un vieux numéro* du journal de Tintin, un récit complet en bande-dessinée de quatre planches qui évoquait la vie du grand historien G. Lenôtre.
Le scénario y est écrit par Y. Duval et les dessins sont réalisés par Liliane et Fred Funcken.
Quel plaisir de déguster une petite friandise avant de découvrir ce douzième volume de la formidable série "La Petite Histoire".
Si comme dans les contes, quelque enchanteur eût favorisé G. Lenôtre du pouvoir de vivre une heure - une heure seulement - dans le passé, il aurait choisi, durant la révolution, une rencontre avec Danton.
Si je bénéficiais du même cadeau, je choisirai d'être guidé, comme un prince d'autrefois, dans le vieux Paris, par cet historien à qui l'on a dit un jour qu'il avait haussé la petite Histoire à la hauteur du génie.
En attendant que ce dernier sorte de sa bouteille, je me suis offert le plaisir de découvrir, dans cette galerie de portraits, quelques discoureurs de café, quelques stratèges de ruelles, quelques gobe-mouches, le premier grenadier de France, une carte de restaurant, un soldat révolutionnaire, le chevalier de la Houssaye, l'oncle du communard et bien d'autres curieux personnages exhumés de l'ombre de l'Histoire ...
C'est écrit avec talent, passion et élégance.
C'est une magistrale et passionnante leçon d'Histoire qui se joue des apparences, de l'habitude et de l'ordinaire ...
*n°874 de l'édition française paru le 22.07.1965
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Si, comme dans les contes, quelque enchanteur me favorisait d'un talisman m'investissant du pouvoir de vivre une heure - une heure seulement - dans le passé, bien des spectacles, certes, solliciteraient ma curiosité.
Supposé que cette bonne fortune m'arrive, j'ai bien réfléchi et fixé mon choix : je demanderais la révolution ; et au lieu d'aller passer une heure dans le tumulte de la Convention ou des Jacobins, je préférerais pénétrer chez Danton, par exemple le trouver en pantoufles, sortant de table, assis dans son fauteuil, au coin de son feu, et faisant sauter ses enfants sur ses genoux, - ou encore suivre Camille Desmoulins, marchant avec Lucile sous les charmilles de Bourg-la-Reine et donnant des carottes à ses lapins ...
Je n'avais jamais éprouvé une admiration des plus vives pour Collot d'Herbois, qui fut un cabotin sinistre, l'un de ceux qui, à l'époque de la révolution, ne préconisaient, comme seuls moyens de gouvernement, que la charette et le panier de son.
Sans en être encore à réclamer pour ce personnage les honneurs du Panthéon, je me surprends aujourd'hui à le regarder avec une certaine indulgence ...