Le cycle de Lanmeur, tome 7 : La terre de promesse

Attention ! Avant d'aborder ce roman, il est préférable d'avoir lu auparavant « Les masques du réel ». Vous risquez d'être un peu largués autrement. Mieux, lisez le cycle de Lanmeur dans l'ordre :-).

Du temps a passé dans l'univers Lanmeurien. La planète elle-même n'a plus grand-chose à voir avec ce que l'on a connu auparavant. Son idéal de Rassemblement des humanités de la galaxie réalisé à grand renfort de mépris et d'arrière-pensée colonialiste lui est revenu en pleine gueule. On a l'impression de se retrouver à la fin du Vème siècle ap. J.-C., quand des Odoacre ou des Théodoric régnaient sur les braises de l'empire romain.
Mais voilà qu'une nouvelle crise affecte la sphère lanmeurienne : le réseau Firtain, qui permet les communications instantanées quelle que soit la distance, au mépris des lois de la physique – un peu comme l'ansible de l'univers d'Ender d'Orson Scott Card –, s'est éteint. Pour les gouvernants, une seule idée : envoyer un émissaire dans l'Irgendwo pour y dégoter la solution.
L'Irgendwo est une sorte d'univers virtuel très typé Matrix, développé justement pour simuler toutes les situations possibles et leurs modes de résolution, afin de constituer un réservoir d'idées face à l'imprévu. Des hommes, les Rêveurs, y sont ou y ont été connectés, l'alimentant d'imagination humaine, mais l'Irgendwo représente plus que leur somme.

Au travers de ce récit, Christian Léourier interroge le concept de réalité. Gald, l'émissaire lanmeurien, voyage dans l'univers virtuel, y rencontre de nombreuses civilisations qui, bien que survolées, comportent toutes ce petit grain d'originalité sociétale que je chéris chez l'auteur. L'objectif du voyage disparaît au fur et à mesure. Gald a beau s'arc-bouter sur sa certitude que la réalité, c'est Lanmeur et que l'Irgendwo n'est qu'un énorme jeu vidéo, ses sens ne cessent de lui plaquer le contraire sur la figure. Pour les gens qui l'accompagnent, Irgendwo est la seule réalité.
Et qu'en est-il pour le lecteur ? Au début on accepte le paradigme Lanmeur = réalité, Irgendwo = virtualité amis. Mais, suivant en cela Gald, on finit par comprendre que les deux constructions, finalement écrites dans notre réalité sur le même papier avec la même encre, ont pour nous le même niveau de réel. Que l'une ait créé l'autre ne change rien. Irgendwo est une sorte de monstre de Frankenstein qui a échappé à son créateur.

Ce roman vaut donc surtout pour les humanités étranges qu'il nous fait visiter et pour ces idées sur la question du réel, moins pour les explications qui concernent Lanmeur elle-même et qui m'ont laissé plutôt sceptique.
Le voyage est plus important que la destination.