Apologie de
Philippe le Bel.
Le piège avec les biographies des hommes célèbres, c'est l'objectivité absolue (ou sa recherche effrénée): l'auteur ne prend pas position et se laisse guider par le déroulement chronologique de la vie de son héros sans se départir du surplomb que lui fournit la postériorité. Avec le duc de
Lévis-Mirepoix cet écueil nous est évité avec brio!
En effet, si l'historien fait preuve de rigueur dans l'analyse des faits, il est aussi bien présent dans son livre et vient défendre
Philippe le Bel en temps que grand roi de France. Il s'appesantit , comme il se doit, sur son action politique (rattachement de la Guyenne, guerre de Flandre, attentat d'Anagni, procès des Templiers). Il montre à chaque fois que son action a été guidée par un sens aigu du droit, il est "le premier juriste de France". Pourtant, il ne cherche pas à le rendre particulièrement sympathique. C'est un monarque froid, distant, austère, réfléchi, catholique orthodoxe, respectant la société féodale et faisant confiance à ses collaborateurs (Nogaret, Plaissians, Marigny), mais sachant arbitrer et trancher entre les différents avis. L'académicien nous montre aussi son rôle dans la durée, sa passion pour l'Etat central, son sentiment national, son attention pour l'état de droit et la diplomatie. Il n'hésite pas non plus à nous montrer le haut Moyen-âge comme une époque de foisonnement intellectuel où chercheurs, savants, poètes et philosophes font preuve d'une curiosité et d'une dynamique trop souvent négligée. C'est sur l'ensemble de ces points que l'historien s'investit à contre-courant de beaucoup de ses contemporains qui considéraient trop souvent que tout ce qui précédait la Révolution française se résumait à des âges obscures et négligeables de l'Histoire.
Enfin, il faut remarquer que la qualité des portraits et le plan chrono-thématique sont la signature d'une façon classique mais vivante d'aborder
L Histoire. Il manque peut-être, ici ou là, de repères chronologiques plus nombreux pour que notre plaisir soit complet. Cependant, cette approche personnelle et engagée du règne de
Philippe le Bel n'en est pas moins une grande réussite qui peut être considérée comme une référence.