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EAN : 9782370553492
128 pages
Le Tripode (09/03/2023)
3.78/5   230 notes
Résumé :
Abandonné par sa mère, un enfant se retrouve confié à son vieux grand-père, un paysan vivant seul dans une petite ferme provençale. Depuis cette scène, si simple, Mathieu Belezi réussit à dire la vérité d’un monde. L’indifférence répétée des saisons, la cruauté, l’absurdité des destins, la violence des désirs, le besoin d’amour, tout est là et brûle dans ce bref roman, dont la beauté et la puissance font écho à celles d’Attaquer la terre et le soleil, Prix littérair... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (72) Voir plus Ajouter une critique
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Premier roman publié en 1998 sous le pseudonyme de Mathieu Belezi, le petit roi accède enfin au devant de la scène grâce au succès l'an dernier d'Attaquer la terre et le soleil et à la décision du Tripode de commencer à rééditer les précédents ouvrages de l'auteur. Dans un récit d'allure faussement autobiographique - « Je fuis comme la peste l'autofiction. A trop parler de soi, on en oublie d'imaginer. Et que devient la littérature si le souffle de l'imagination ne bouscule pas le lecteur ? » déclare-t-il dans une interview pour le journal Libération -, l'écrivain met en scène Mathieu, un garçon de douze ans dévasté par les déchirures parentales qui ont mené sa mère à le confier à la garde de son grand-père. le vieil homme qui, en ce milieu des années soixante, subsiste en solitaire, dans une vie simple et rude au plus près des saisons, sur sa petite ferme d'altitude en Provence, a beau déployer en silence toute son impuissante tendresse, le pré-adolescent écorché vif, qui se sent abandonné et pense que « rien n'est là pour qu'il vive heureux », n'est plus que rancoeur et s'en prend violemment à lui-même autant qu'à la terre entière, dans des accès de cruauté où s'expriment sa révolte et sa colère.


L'écriture âpre et sans concession ne commente ni n'enjolive. Ses traits ciselés comme à vif dans la matière brute des réminiscences se contentent de raconter simplement, la sobriété de ton amplifiant encore la violence d'une narration coup de poing qui vous laisse assommé et interdit de tant de fulgurance et de souffrance rentrée. Car le jeune Mathieu, abandonné par ses parents après les avoir vus se déchirer dans un paroxysme de haine et de fureur, se punit autant qu'il se venge de leur manque d'amour en faisant mal à son tour. Réfléchissant en miroir la violence vécue, la victime se fait alors bourreau de plus faibles, animaux ou garçonnet fragile, en un crescendo de scènes brutales et cruelles. Lui, qui, au fond, se sent « coupable de tout », se défend en adoptant la stratégie bravache du même pas mal, et, tâchant de se convaincre que « n'est coupable que celui qui veut l'être », « [s]e venge de la désinvolture du monde à [s]on égard » en se faisant tortionnaire en retour. Dans ce chaos affectif, seul surnage le lumineux miracle de la tendresse taiseuse du grand-père, un début possible de pansement qui laissera pourtant plus que jamais la plaie à vif lorsque, comme si tout attachement ne servait qu'à vous piéger pour mieux vous meurtrir ensuite, le cours inéluctable de la vie l'arrachera sans prévenir.


Troussé sans ménagement dans une langue aussi cinglante que poétique, mêlant tendresse et sadisme en une combinaison détonante et dérangeante, ce court texte magnifiquement écrit et travaillé a l'éclat sombre de son personnage, un petit roi lancé à corps et coeur perdus dans un apprentissage sauvage et solitaire, aux couleurs de la rage et de la frustration. Un grand coup de chapeau à la petite maison d'édition du Tripode pour avoir su révéler cette oeuvre injustement méconnue.

Lien : https://leslecturesdecanneti..
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Le petit roi manque d'amour et d'empathie. La violence intra-parentale a détruit son humanité, le remplissant de haine au point que la souffrance qu'il inflige aux autres est seule capable de l'apaiser. Pourtant dans la magnifique campagne provençale cet enfant est aimé. À sa façon certes, un peu rugueuse et silencieuse, son grand-père veille sur lui. Mais rien ne saurait effacer la douleur d'un enfant. Celle d'avoir vu ses parents se déchirer. Celle d'avoir une mère qui l'a abandonné, à lui-même et à ses tourments.
Aussi fort que dérangeant, un premier roman qui pèche parfois par quelques maniérismes d'écriture.
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Une voiture qui s'éloigne et un enfant des villes que sa mère laisse à la campagne, chez son grand-père, paysan rugueux et taiseux, pour deux ans, trois ans, qui sait ? L'enfant s'appelle Mathieu… Dans le Petit Roi, Mathieu, 12 ans, nous raconte son séjour chez son Papé, dans une ferme paumée, loin de tout, des commerces, de l'école, même de la ferme « voisine ». Il nous raconte la découverte des beautés de la campagne ainsi que l'affection distante et discrète qui se développe entre son grand-père et lui. Il entrecoupe son récit de retours en arrière qui surgissent impromptus, comme un flot que l'enfant ne maîtrise pas, et qui nous plongent au coeur de la violence entre les parents, violence dont il est le témoin médusé et impuissant. Il ne sait comment exprimer son chagrin, sa peur, sa colère, son désespoir autrement que par la violence, lui aussi. Pris d'irrésistibles pulsions de vengeance, il brutalise le chat, éventre un rat d'eau, brûle une poule. Il harcèle un élève de sa classe qu'il a lâchement choisi (il en est conscient) parmi les plus faibles. À son désarroi s'ajoute l'éveil de sa sexualité qui s'exprime aussi par la violence. L'enfant livre ses émotions crûment, brutalement, sans égard pour lui-même. Quelques respirations, pourtant, au milieu de cette noirceur : un cadeau de Noël inattendu et la nature parfois brièvement consolatrice. Ce magnifique premier roman de Mathieu Belezi est une formidable découverte, de l'élusif premier paragraphe au bouleversant final. L'écriture est déjà maîtrisée, riche, originale, précise, poétique… elle a toutes les qualités des oeuvres plus récentes. le Tripode entreprend la réédition de tous les romans de Mathieu Belezi. À suivre sans hésiter !
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Ténu, d'une beauté fragile, d'une poésie folle, ce texte est un bijou. Les mots ne servent pas à extraire du sens. Ils ne rassemblent rien. Ils posent avec justesse l'ambivalence d'une volonté quand seule la cruauté à l'égard de ce qu'on aime peut vous sauver.
A la fin des années 50, Mathieu est confié à son grand-père dans une campagne de mistral. le portrait qui se dessine de ses parents l'abandonnant dit le charme puissant et l'égoïsme foncier, la folie de leurs sentiments exacerbés pour l'autre, jamais pour l'enfant, les coups, les intrusions. L'irruption de la folie adulte dans les attentes de Mathieu qui ne peut plus en avoir rien d'innocent.
Il n'y aura pas de rédemption chez le grand-père, pas de résurrection dans une nature paradisiaque. Des virées à vélo pourtant. Un ami. Pour ce qu'on est capable d'être amis. Des souvenirs aigus de cerises cueillies, de fêtes estivales où les adultes boivent trop. Une entente et une belle estime entre le grand-père et l'adolescent égratigné. Tout un monde de sensations qui accompagnent la fin d'une enfance. Mais de ces amours, juste assez de vie pour qu'ils brisent.
Et un texte élégant, à la beauté ciselée, parfaite pour dire la précision de la douleur, l'impossibilité d'en faire quoi que ce soit sinon du mal. Et malgré sa cruauté, la candeur de cet enfant, son précieux désir qui commence déjà de ne savoir se dire que tortueux. Les turpitudes qui en jailliront comme autant de messages brouillés.
Le roi est celui des tragédies. Celui qui est au centre, dont la volonté est au coeur du drame et qui se trouve pourtant ligoté d'inextricables noeuds. Impuissant à autre chose qu'à se débattre et à participer de l'engrenage mortifère.
Un des plus beaux écrit que j'aie lu depuis très longtemps.
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« Il faudrait que ma mère me prenne dans ses bras »

C'est un petit livre par la pagination, mais un livre puissant par son contenu. de ces textes qui marquent, interpellent, font réagir et réfléchir. C'est le Petit roi, de Mathieu Belezi, que le Tripode a l'heureuse idée de republier après la redécouverte récente de cet auteur à la renommée tardive. Mais pas volée.

L'histoire du petit Mathieu, c'est une histoire d'enfant et d'abandon ; d'envies et d'obstacles ; de révoltes intérieures qui parfois s'exportent à l'extérieur ; de violences et de vengeances, gratuites et injustes. Encore que… Faudrait d'abord s'entendre sur ce qui est juste dans la vie de Mathieu.

Et puis c'est une histoire d'amour, celle de Mathieu et de son Papé qui l'a recueilli et qui l'élève. Son modèle, son refuge, sa bouée, son guide pour appréhender la nature, qui ne demande qu'à apaiser sa propre nature.

Pas suffisant toutefois pour contrebalancer les blessures du passé, l'absence et la tendresse d'une mère. le vide qui fait s'effondrer le petit garçon les rares moments où il lâche prise. C'est là que Brigitte Giraud aurait dit, « Et si… ».

En refermant le livre, le lecteur sera confronté à l'option du jugement manichéen, qui lui promettra de longues heures d'échanges et de confrontations avec d'autres, sur la violence excusable, compréhensible ou insupportable ; sur le conditionnement, la prédestination, l'impossible rédemption. Sur l'emballement ou le rejet.

Il pourra aussi choisir de ne rester que sur la beauté et la poésie du texte de Belezi, en pensant avec satisfaction aux textes oubliés qui restent encore à arriver…
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critiques presse (2)
Culturebox
04 juillet 2023
"Le Petit Roi" de Mathieu Belezi, réédité aux éditions Le Tripode, est le premier roman poignant, à l'écriture tendue, épurée et précise, de l'auteur aujourd'hui reconnu de "Attaquer la terre et le soleil". "Le Petit Roi" a été publié pour la première fois en 1998.
Lire la critique sur le site : Culturebox
LaCroix
31 mai 2023
Le puissant roman de Mathieu Belezi, publié une première fois en 1998 et réédité par Le Tripode, raconte le monde désespéré d’un adolescent de 12 ans où « rien n’est là pour qu’il vive heureux ».
Lire la critique sur le site : LaCroix
Citations et extraits (46) Voir plus Ajouter une citation
Mon grand-père s’est assis, les coudes sur la table. Il se chauffe les os.
Le chemin des éphélides sur ses bras mène au caillou nu de son crâne, à l’énigme d’un être qui s’occupe de moi sans m’avoir fait.
Il fixe le feu, la gigue sautillante des flammes, et ce qu’il voit, ce qu’il entend, je pourrais à présent l’inventer, en faire des phrases, c’est si facile ; mais en ce temps de l’enfance où tout est à apprendre, je bute contre le mystère de cet homme qui voit ce que je ne sais pas voir, qui entend ce que je ne sais pas entendre. La joue contre l’oreiller, sentant à mon front la chaleur du feu, j’enrage d’être encore dans l’âge qui ne comprend rien.
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Je vais à l'infirmerie, là où se retrouvent ceux que les maitres ennuient. Après tout, il suffit de peu, des maux de ventre, un filet de sang, et le tour est joué.
J'arpente avec lenteur les couloirs vides, cette paix miraculeuse des collèges pendant les cours, j'entends les oiseaux, le trafic de la rue, et le refrain connu des voix qui instruisent. Je tire vanité du temps que je vole, pendant qu'une infirmière panse ma plaie, déroule son sparadrap autour de mon pouce et me renvoie.
(p. 44)
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Mon grand-père s'est assis, les coudes sur la table. Il se chauffe les os.
Le chemin des éphélides sur ses bras mène au caillou nu de son crâne, à l'énigme d'un être qui s'occcupe de moi sans m'avoir fait.
Il fixe le feu, la gigue sautillante des flammes, et ce qu'il voit, ce qu'il entend, je pourrais à présent l'inventer, en faire des phrases, c'est si facile; mais en ce temps de l'enfance où tout est à apprendre, je bute contre le mystère de cet homme qui voit ce que je ne sais pas voir, qui entend ce que je ne sais pas entendre. (p.24)
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J’aurais voulu qu’il fit comme moi, qu’il s’agenouillât à côté d’elle pour lui demander pardon, et que tous les trois nous nous rassemblions dans une même haleine
Laisse ta mère tranquille
Je l’entendais me répéter cette phrase, et moi je secouais la tête et je ne lui obéissais pas, bien au contraire resserrais mon étreinte autour des épaules de ma mère
Maman !
Laisse ta mère tranquille
Maman !
Et comme il n’y avait pas de mots pour lui dire de prendre ma place et de faire avec ses bras ce que je faisais avec les miens, je me contentais de demeurer dans cette étreinte et de regarder par la fenêtre le jardin noyé de pluie, le ciel sans échappée et le toit d‘autres maisons où je savais que des enfants s’amusaient avec leurs jouets, tendaient leur front à des parents qui s’empressaient de les couvrir de baisers. Je n’arrivais pas à comprendre pourquoi on me privait de ces jeux et de ces tendresses, pourquoi on me condamnait à trembler et à pleurer jusqu’à ce que le sommeil voulût bien me soustraire à l’injustice de ce monde, dans mon lit d’enfant seul où les draps étaient bleus
Relève-toi, je ne t’ai pas fait bien mal

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Il y a des jours où j'ai envie de fuir. De courir la campagne jusqu'à la ville, d'aller sonner à la porte de l'appartement de ma mère.
Nous avons reçu une lettre. Elle vient d'Espagne ; de Ronda prétend mon grand-père, après avoir déchiffré à la loupe le cachet de la poste. Ma mère y raconte son voyage, et à la fin, dans le maigre espace qui lui reste, elle nous embrasse et espère venir nous voir à Noël.
Voilà ce que je voudrais faire. Sonner à la porte de l'appartement de ma mère et y demeurer jusqu'à ce qu'elle revienne. Peut-être les voisins me nourriraient-ils, peut-être me laisseraient-ils crever de faim.
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