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EAN : 9782916032252
178 pages
Editions L'Instant Présent (31/07/2012)
5/5   2 notes
Résumé :
Par l'auteur de La Fessée : Questions sur la violence éducative
La violence, contre les personnes, la violence des guerres, la violence sociale et politique, nous environne et nous inquiète : elle est l'objet de débats passionnés ainsi que de nombreuses recherches en sciences humaines.
Cependant, l'une de ses formes principale reste ignorée, oubliée : la violence éducative.
À travers l'analyse approfondie d'un vaste ensemble d'ouvrages, Olivier ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Olivier Maurel est un homme que j'admire beaucoup depuis des années, depuis que je suis devenue mère et que je me pose des questions sur l'éducation des enfants. Éducation qui se définit dans un consensus tacite comme le fait de faire entrer un être non civilisé, irrationnel, pulsionnel, dans un moule social, quelque soit l'immaturité mais aussi les particularités qui peuvent être siennes.
L'idée même d'éducation semble dans sa définition impliquer une forme de violence couramment admise et encouragée, qu'elle soit directement agressive (maltraitances physiques, violences voir torture) ou simplement répressive, voire manipulatrice.

Complètement transformé par la lecture d'Alice Miller, psychanalyste qui a mis au jour ce questionnement dans les années 1980 notamment avec son livre "C'est pour ton bien", Olivier Maurel, professeur de lettres, a construit au fil des ans une réflexion approfondie et structurée sur ce thème. Il a mené des recherches, publié plusieurs ouvrages et s'est engagé concrètement par la création de l'observatoire des violences éducatives ordinaires.

Aujourd'hui encore il écrit, publie et s'engage par ses prises de position dans certaines polémiques.
J'admire vraiment le courage d'Olivier Maurel, dans cette démarche de vérité intellectuelle, de cohérence, et je regrette qu'il ne soit pas mieux connu et reconnu. Mais pourrait il en être autrement ?

Est ce que la mission d'éduquer les enfants implique forcément d'assumer une forme de violence ? La question se pose pour de nombreuses familles qui remettent en question les sous jacents de violence ordinaire qui leur sont présentés comme acceptables. Mais pour mener une réflexion sur les limites de l'éducation entre violence et laxisme, les références manquent car bien peu d'auteurs s'intéressent à la violence éducative.

C'est le constat que fait Olivier Maurel, stupéfait de voir que la plupart des livres écrits par des psychologues, sociologues, psychiatres, psychanalystes... sur le sujet de la violence et de ses origines ne parlent pas réellement des enfants et de leur condition, très rarement des violences faites aux enfants qui pourraient pourtant expliquer bien de choses.

Ces auteurs ne remettent pas vraiment en cause non plus l'idée d'une nature humaine originellement mauvaise, qu'il faudrait dresser "pour son bien", quelques soient les moyens. Pourtant rien ne permet d'affirmer que la nature humaine soit mauvaise et les récents acquis de la science démontrent plutôt le contraire. Par contre le péché originel de la violence éducative existe dans le fait que l'enfant maltraité reproduira ce qu'il a vécu, ayant intégré le logiciel de la Violence éducative dans son disque dur, et il fera peut être bien pire.

Dans ce livre qui se lit rapidement et facilement, Olivier Maurel balaye et analyse une importante bibliographie française exclusivement. Il propose également un questionnement tant sur l'origine de la violence éducative que sur celle de sa mise à l'écart dans la réflexion de la plupart des quelques 90 auteurs qu'il a lus. L'influence de la psychanalyse et de ses hypothèses parfois improbables voire délirantes est souvent dénoncée.

Ce livre est un plaidoyer convaincant et plein de justesse. Il mérite d'être mieux connu et surtout lu !
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Ce livre m'a énormément ouvert les yeux, il m'aide à comprendre la violence généralisée de l'humanité actuelle.

Je vais vous faire une synthèse des points principaux :

- le bébé et le jeune enfant éprouvent naturellement de l'empathie pour les êtres avec qui il est en relation, ce qui leur permet de se rendre compte s'ils font souffrir un autre être vivant

- la "violence éducative" se caractérise par des violences physiques (gifle, fessée, martinet, fouet, règle, tirer les cheveux, les oreilles, coups divers, ...) infligées aux enfants par les parents, accompagnées le plus souvent d'injures et d'humiliations

- la "violence éducative" est caractérisée par son énorme extension : dans le temps (attestée dès le début de l'écriture, dans les langues et les proverbes), dans l'espace (le monde entier, sauf les chasseurs-cueilleurs et les peuples indigènes), et pour la presque totalité des enfants ; elle est constante et répétée tout au long de l'éducation, elle est vue par les parents, surtout le père, comme un dressage à l'obéissance, à la soumission (l'autorité paternelle ne doit jamais être en échec) ; ainsi, la violence éducative a une dimension individuelle, et aussi (et surtout) une dimension collective, sociale, civilisationnelle

- la "violence éducative" subie provoque le conditionnement à l'obéissance, à la soumission, pour l'enfant (c'est son objectif explicite), et ensuite pour l'adulte (résultat implicite)

- la "violence éducative" subie entraine une non-estime de soi : "je ne vaux rien, je suis nul"

- la "violence éducative" entraine chez l'enfant (et plus tard chez l'adulte) une coupure de ses propres émotions, par autoprotection, d'où une incapacité à ressentir de l'empathie, et donc une incapacité à ressentir la souffrance d'un autre, et une désinhibition à exercer la violence physique sur d'autres êtres (humains ou animaux)

- pour l'adulte ayant subi la "violence éducative" (soit presque tous), il y a le plus souvent oubli, refoulement, déni de la violence éducative subie, y compris pour des auteurs de travaux sur la violence, y compris pour des psychanalystes ; c'est une facette de l'autoprotection ; la violence éducative est un thème presque totalement occulté par les sciences humaines ; elle est tellement normale qu'elle en est invisible

- seule l'espèce humaine pratique à grande échelle la violence intra-spécifique : des adultes envers les enfants et donc entre adultes

- les grands singes, les chasseurs-cueilleurs, les peuples indigènes ne pratiquent pas la "violence éducative" ; elle n'est donc pas inscrite dans l'humanité (10 millénaires sont un court instant dans l'évolution de l'humanité)

- et surtout, il y a ce lien de causalité crucial :
"violence éducative" subie par l'enfant
=> "violence éducative" exercée par l'adulte sur ses enfants,
violence exercée sur d'autres adultes,
soumission, obéissance à l'autorité

Je vais donner un exemple d'application de ces notions :

Un enfant soumis à la "violence éducative", par son conditionnement à l'obéissance, est prêt à "consentir" à des agressions sexuelles, durant son enfance ou comme adulte, surtout les femmes.
Un "prédateur", ayant été soumis à la "violence éducative", ne ressent pas d'empathie pour sa proie, et n'a pas conscience de la faire souffrir, ne ressent pas son humanité, et la considère comme un objet.
Entrent dans ce cadre, où le prédateur et sa proie ont tous les deux subi la "violence éducative" : incestes père-fille, viols prêtre-religieuse, viols prêtre-enfant, détournements et viols de mineur(e)s, violences conjugales, agressions sexuelles avec abus de position dominante, ...

Vous allez vous-mêmes trouver d'autres situations de violence, où ces notions vont prendre leur place, par exemple :
- dictateur (battu durant son enfance) et peuple obéissant (battu durant son enfance)
- torture généralisée, rafles, violence policière : des personnes sans empathie obéissent aux ordres donnés par des supérieurs sans empathie
- tuer massivement des animaux élevés en batterie et les manger : c'est possible sans empathie
- guerre : soldats obéissants, sans empathie
- brutalité du libéralisme autoritaire : le récent procès de France Telecom, l'attitude du pouvoir par rapport aux Gilets Jaunes, le lobbying pour le glyphosate
- propagande du libéralisme autoritaire pour faire croire que l'action violente est plus efficace que l'action non-violente.

Il y a deux millénaires, quelqu'un a dit : "pardonne-leur car ils ne savent pas ce qu'ils font". Pourquoi ne savent-ils pas ce qu'ils font ? Parce qu'ils sont coupés de leur empathie, et parce qu'ils ont été battus durant leur enfance.

Mais observons des signes de baisse de la "violence éducative", par exemple :
- après trois guerres entre la France et l'Allemagne (1870, 1914, 1940), il n'y en a plus depuis 75 ans
- depuis Gandhi, on voit maintenant des actions politiques non-violentes, et de désobéissance civile (Extinction Rebellion, ANV COP21, Greenpeace).

Cet ouvrage me conduit à une introspection et à un regard plus lucide :
- ai-je subi la "violence éducative" dans mon enfance ? quels en sont les signes aujourd'hui ?
- est-ce que j'ai pratiqué la "violence éducative" avec mes enfants ?
- suis-je coupé de mes émotions ? de mon empathie ?
- est-ce que je peux devenir violent dans mes relations ?
- ai-je une propension à l'obéissance à l'autorité ?
- mêmes questions pour les personnes de mon entourage familial, professionnel
- mêmes questions pour les personnes de l'oligarchie.

Je recommande chaudement cet ouvrage. J'en suis sorti transformé.


Lien : https://blogs.mediapart.fr/j..
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Citations et extraits (6) Voir plus Ajouter une citation
De même, la phrase de Freud que Gérard Rabinovitch met en exergue de son livre : "l'expérience nous l'enseigne: le monde n'est pas une chambre d'enfant" est supposée nous faire regarder la réalité en face, loin des « contes de fées », ceux dont on berce les enfants et ceux dont se bercent les idéalistes.
Mais quel crédit peut-on accorder à cette prétendue lucidité qui, après avoir aperçu les abus sexuels qui pouvaient se dérouler dans les chambres d'enfants bien réelles, en a nié la réalité, qui n'a jamais accordé grande importance aux corrections dont les mêmes chambres d'enfants étaient souvent le lieu et qui, pour couronner le tout, grâce à la théorie des pulsions, a fait retomber sur les enfants la responsabilité de toutes les violences ?
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Ce que subissent les enfants dans l'intimité familiale et à l'école se difuse de mille manières dans la vie sociale, politique et scientifique. La méconnaissance, voire le déni de l'influence de la violence éducative, mutilent notre approche de la réalité. Cette méconnaissance résulte elle-meme de la violence qui a modelé nos cerveaux à un âge où nous étions sans défense, Alice Miller avait avec justesse intitulé I'édition allemande originale de son livre L'Enfant sous terreur (Aubier Montaigne, 1993) : Tu ne t'apercevras de rien. Ainsi, la majorité de ceux qui devraient nous éclairer, les chercheurs, les scientifiques, « ne s'aperçoivent de rien », du moins dans ce domaine, et diffusent de vieux préjugés sous de nouveaux habit.
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Finalement, ce triple mécanisme - exclusion défensive, modèle interne opérant et re-direction - permet aussi de comprendre que, paradoxalement, la remise en question de la violence éducative ne puisse en général s'effectuer spontanément que chez les hommes et les femmes qui ne l'ont pas subie, qui n'ont donc pas eu à l'exclure de leur champ de vision ni à la rediriger vers d'autres cibles. Les autres ont en général tendance à la défendre ; à moins qu'ils n'aient eu la chance de rencontrer un « témoin secourable », selon l'expression d'Alice Miller, qui les ait rendus capables de cette remise en question.
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La relation éducative, dans les familles, dans les écoles, dans les institutions, même s'il s'y mêle de l'affection et de la bienveillance, est depuis des millénaires une une relation de pouvoir. Ce pouvoir se justifie lui-même par la responsabilité des éducateurs et l'immaturité des enfants. Il s'exerce à travers diférentes formes de contraintes dont beaucoup, Sinon toutes, sont des formes de violence que les adultes supportent très mal quand elles leur sont infligées, mais qu'ils jugent normal de faire subir aux enfants.
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Les interférences de la violence éducative avec les capacités innées des enfants, qu'il s'agisse de l'attachement, du mimétisme, de l'empathie ou de la soumission, ont donc en commun de les pousser à des comportements violents tout en leur donnant une propension à se soumettre à la violence.
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Videos de Olivier Maurel (4) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Olivier Maurel
Intervention d'Olivier Maurel sur la violence éducative et ses effets. Cet enregistrement est réalisé dans le cadre d'un colloque intitulé : "LA VIOLENCE ÉDUCATIVE ORDINAIRE". Il s'est déroulé les 14 & 15 Mai 2015 A LA FACULTÉ DES SCIENCES DE L’ÉDUCATION de Rabat au Maroc.
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