En dénichant ce roman dans ma petite librairie, je suis longtemps restée hésitante, peu séduite que je le fus par cette couverture un peu kitschouille... Mais mon obsession pour la légende arthurienne a eu raison de moi et me voici m'embarquant dans la légende, racontée du point de Guenièvre (personnage que je n'ai pas en très haute estime, voire que je déteste. Qu'on se le dise)
Ce premier tome se lit d'une traite et il est prenant, facile à lire et la traduction plutôt joliment écrite si on excepte quelques (rares) maladresses qui m'ont fait dresser les cheveux sur la tête (Guenièvre expliquant à Arthur que prendre des décisions irréfléchies n'est « pas son style », c'est moche, c'est affreux, ça craint).
J'ai apprécié de goûter à la légende du point de vue de la reine, chose qui demeure rare me semble t-il. Guenièvre ici change un peu de l'image traditionnelle qu'on a d'elle. Plus garçonne, plus courageuse, elle n'est pas seulement une belle jeune femme qui attend d'être secourue.
Cependant,
Nancy McKenzie ne sacrifie pas complètement à la tradition et parvient à mêler à « sa » Guenièvre le modèle littéraire en lui conservant certains traits.
Autres points positifs : la volonté d'ancrer ce roman dans le monde celte de manière plus réaliste et historique que fantastique et magique, un peu comme ce que fit
Bernard Cornwell. La magie -par le biais de Merlin- est présente mais discrète et par ailleurs l'auteure fait la part belle à ce qu'on sait de la Bretagne des âges obscurs en évoquant, outre les cultes anciens, les différents clans (l'Orcanie, le Lothian...). J'ai enfin (et comme de coutume) beaucoup apprécié la fidélité à la trame de la légende dans ses lignes les plus essentielles et aimé que certains faits connus de la geste soient différents dans le livre mais que Guenièvre explique ensuite comment les bardes et les gens les ont transformés pour en faire ce qu'on sait ou croit savoir. Un parti pris résolument intéressant qui permet de s'éloigner de l'histoire originelle sans pour autant la trahir, une belle astuce narrative. Enfin, on a des personnages à la psychologie assez fouillée mais fidèles à eux-mêmes, un rythme soutenu et des personnages secondaires savoureux (Finn et Pellinor).
Des points plus faibles cependant : un certain manichéisme, notamment en ce qui concerne l'enfance et l'adolescence de la future reine qui est sans cesse victime de sa cousine et d'injustices, qui est toujours la plus belle, la plus aimée, la plus intelligente...Bon sang, que cela m'énerve !
Et -hélas, trois fois hélas- on n'échappe pas à des passages mièvres, dégoulinants (surtout ceux qui mettent en scène la reine avec le roi ou Lancelot dont le personnage aurait gagné à plus de nuances).
En somme, « Guenièvre, l'enfant reine » n'est pas un chef d'oeuvre littéraire mais une lecture divertissante et prenante qui apporte un éclairage nouveau sur la légende et rien que pour cela il vaut la peine d'être lu, si tant est que la thématique arthurienne passionne !Quant aux points faibles qu'on peut y trouver, ils sont certes bien présents mais pas assez rédhibitoires pour qu'on ne passe pas au second tome...