C'est tout à fait par hasard que je suis tombée sur cet album petit format consacré à la rousseur. Car il ne s'agit pas à proprement parler d'une bande dessinée. Il n'y a pas d'histoire. Ce serait plutôt une étude dédiée à cette particularité physique.
L'auteure m'étant inconnue, je ne peux me livrer qu'à des suppositions. J'imagine donc qu'elle est rousse elle-même, que cela l'a stigmatisée et qu'elle évoque des situations qu'elle a vécues. Mais son livre n'est pas du tout une simple collection d'anecdotes plus ou moins personnelles. Elle s'est adonnée à une réflexion en profondeur dont témoigne la riche bibliographie qui figure en fin de volume. Elle s'est penchée sur l'art, l'histoire, la littérature.
Pour ma part, je dois bien dire que je n'aime pas les gens qui montrent du doigt, insultent, rejettent quelqu'un en raison d'une couleur de peau, de cheveux, d'une orientation sexuelle, bref, ceux qui refusent systématiquement tout ce qui est différent.
Lire certaines phrases imbéciles avec lesquelles on apostrophe notre (jolie) jeune fille, me donne des frissons de dégoût : « Tu rouilles sous la pluie ? », « T'as regardé le soleil à travers une passoire ? ». Je me souviens avoir lu avec tristesse des ouvrages tels « Poil de carotte » et je pensais qu'une attitude aussi affreuse et ridicule datait d'une époque révolue. Je me trompais.
Charlotte Mevel explique : « Si tout ça s'était adressé à moi, j'y serais sans doute restée indifférente », mais, à partir du moment où elle met au monde un petit garçon qui a hérité de ses cheveux, elle l'imagine en butte aux moqueries dès le berceau. On lui raconte même des blagues atroces qui font peur !
Elle commence donc par remonter le temps, se rappelant les avanies qu'elle a subies dès l'enfance (traitée de sorcière, prise comme cible des lancers de ballon), ses tentatives d'y échapper en changeant de couleur. Elle relate de terribles faits divers dans lesquels des enfants harcelés ont fini par se suicider.
En revanche, elle passe en revue des personnalités qui ont fait de leur rousseur un atout.
Hélas, si on remonte à l'Antiquité, « le roux est assimilé au renard, rusé, fourbe, voleur... et au cochon, animal sale et lubrique ». Chez les anciens Égyptiens, le dieu du mal est roux et les roux sont persécutés. Au Moyen âge, on les considère comme des sorciers et le roi Saint Louis promulgue un édit qui assimile cette teinte de cheveux à la prostitution. Bien entendu, la cruauté ne se limite pas aux humains : quantité d'animaux (chats, renards, écureuils...) en sont aussi les victimes. Ce que je ne savais pas. Je pensais que seuls les félins noirs avaient souffert de cette bêtise de nos semblables, qui, malheureusement n'a pas encore disparu de nos jours !
Mais elle relève aussi quelques (rares) exemples où le héros est roux, tel David, dans la Bible.
Il y a, heureusement, des tableaux qui mettent les femmes rousses à l'honneur. Pour ma part, j'adore ceux de
Dante Gabriel Rossetti, et j'ai toujours admiré ses modèles, de vraies beautés. Il existe également les
poèmes d'
Apollinaire ou de
Baudelaire.
J'ai beaucoup aimé ce petit volume plein de sagesse et d'humour. J'ai trouvé les dessins originaux et magnifiques. Et, bien sûr, la dominante de couleur orange met du soleil et du dynamisme à toutes les pages.
Une très belle découverte pour moi.