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3,89

sur 456 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Ce polar double canon tisse brillamment deux histoires apparemment très indépendantes : au Cap en Afrique du Sud, une enquête menée par la brigade des Hawks ( département de police criminelle sud-africain ) autour de la mort mystérieuse d'un ancien flic devenu garde du corps ( accident, suicide, assassinat ? ) avec une hiérarchie qui fait tout pour enterrer l'affaire ; en France, sur les traces d'un ex-combattant de la branche militaire de l'ANC qui se voit confier une dernière mission.

Deon Meyer prend le temps de poser ses deux arcs narratifs en blocs autonomes proposés à tour de rôle. Puis, à mesure que le récit avance, l'alternance s'accélère en chapitres de plus en plus courts, presque saccadée. La précision millimétrée de la construction est admirable, riche en rebondissements et révélations qui relancent l'action de façon très pertinente. L'auteur parvient à maintenir la tension dans les deux intrigues et à les amener à un paroxysme simultané jusqu'à une connexion inattendu et pleinement réussie.

C'est brillant de maîtrise. Mais ce qui m'a frappé dans ce roman, c'est à quel point l'auteur fait entendre sa voix, celle d'un homme en colère contre les dérives politiques que connait son pays. Deon Meyer se fait presque historien du contemporain en s'emparant de la période 2009-2018 de la présidence de Jacob Zuma. Jamais nommé mais il ne parle que de lui , comment cette figure de la lutte anti-Apartheid a trahi ses idéaux et bafoué l'héritage de Nelson Mandela pour faire sombrer l'Afrique du Sud dans la corruption la plus crasse.

Toute ressemblance avec la réalité est tout à fait volontaire. Avec un oeil à l'acuité aguisée et sans concession, La Proie met à nu la kleptocratie du système mafieux du State Capture qui a mis à genoux l'économie du pays et fragilisé la jeune démocratie sud-africaine : pots-de-vin, blanchiment d'argent, racket, Russie de Poutine à l'affut, infiltration de tous les rouages publics par la famille Gupta qui détournent des fonds à son profit, tout cela avec la complicité de Jacob Zuma et de ses sbires.

Cet arrière-plan politique omniprésent donne beaucoup d'épaisseur à l'intrigue. J'ai cependant regretté le duo d'enquêteurs très lisse et au final pas très intéressant ( déjà vu, déjà lu ). En fait, le personnage passionnant, c'est Daniel Barret qui leur vole la vedette. C'est par lui qu'arrive la complexité psychologique, lui, le soldat de l'ANC qui a raccroché après la victoire de Mandela et qui se voit contraint par les circonstances à reprendre du service dans une tentative quasi désespérée de sauver son pays.
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L'Afrique du Sud est une nation complexe. Je connais mal son histoire, mais j'ai bien conscience de la diversité d'origine de sa population et de la multiplicité de ses langues. J'avais suivi avec bienveillance les espoirs ouverts il y a une trentaine d'années par la fin du régime de l'apartheid et par les valeurs incarnées par Nelson Mandela. Des espoirs malheureusement déçus dans un pays restant affecté par la pauvreté, les inégalités, la violence et un marasme économique entretenu par une corruption au plus haut niveau de l'Etat, tout particulièrement jusqu'en 2018, sous la présidence de Jacob Zuma, un ancien compagnon de route de Mandela.

Une corruption et une compromission de très grande ampleur, que l'écrivain Deon Meyer pose en pierre angulaire de la plupart de ses romans policiers. Son dernier ouvrage, La Proie, publié en afrikaans en 2018, est l'histoire fictive d'un projet d'assassinat du président de la République.

Des vétérans de l'ANC, anciens camarades de lutte du président, considèrent qu'il a trahi « la Cause », qu'il donne une image désastreuse de l'Afrique du Sud et qu'il est responsable des difficultés économiques dont le pays n'arrive pas à s'extraire. Ils ont appris qu'à l'initiative d'hommes d'affaires proches du pouvoir et en contrepartie de commissions colossales, l'Etat est sur le point de confier la construction d'une centrale nucléaire à la Russie, laquelle cherche à étendre son influence sur le continent. Il faut mettre un terme à cette « kleptocratie », estiment-ils. Une prochaine visite officielle du président en France pourrait être l'occasion de mettre leur projet à exécution.

Ils sollicitent un autre vieux camarade, un ancien tueur de ce qui était la branche armée de l'ANC, soutenue à l'époque par le KGB et la Stasi. Reconverti depuis trente ans sous une fausse identité dans une petite vie tranquille en France, à Bordeaux, cet homme hésite à participer à cet acte de terrorisme. Est-il d'ailleurs encore physiquement et mentalement apte ?

En même temps, deux officiers des « Hawks », une unité d'élite de la police criminelle d'Afrique du Sud, sont amenés à enquêter sur la mort violente d'un ancien policier, disparu au cours d'un trajet dans un train de luxe. Son corps est retrouvé quelques jours plus tard dans une zone désertique, près de la voie ferrée. Accident, suicide ou meurtre ?

Fort de ses savoir-faire bien connus en matière de guerre numérique et d'empoisonnement indécelable, le FSB, le Service secret russe qui a succédé au KGB, fera tout pour déjouer le complot. Il en est de même, au Cap, pour la direction de la Sécurité nationale, compromise avec le pouvoir et toute puissante pour imposer sa volonté. Mis en cause par le Défenseur des droits pour captation de patrimoine public, les proches de pouvoir crient aux fake news répandues par des ennemis de la révolution nationale démocratique, à la solde du « capital monopolistique blanc ».

La narration est consacrée alternativement aux deux intrigues qui se développent séparément, l'une en Afrique du Sud, l'autre en Europe, à Bordeaux, Amsterdam et Paris. L'auteur s'étend agréablement sur la vie privée compliquée des principaux personnages et sur la description des lieux dans lesquels ils évoluent. Peu à peu apparaît le lien entre les deux actions et le suspens devient captivant.

Certains pourront se sentir perdus dans les longs méandres de la narration et désemparés par l'énonciation de régions ou de villes dont les noms n'évoquent rien, en tout cas pour ceux qui ne sont jamais allés en Afrique du Sud. Il en est de même pour certains prénoms et patronymes, dont la diversité est représentative des origines ethniques des personnages.

La Proie n'en reste pas moins un thriller passionnant et instructif. Il mêle corruption, criminalité et politique internationale dans un tableau dont le réalisme et l'actualité ne font pas de doute.

Lien : http://cavamieuxenlecrivant...
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À Bordeaux, Daniel Darret porte secours à une artiste agressée par une bande de loubards. Quelques temps plus tard, il est contacté par ses anciens amis de la lutte anti-apartheid en Afrique du Sud.
Au Cap, les inspecteurs Benny Griessel et Vaughn Cupido se voient confier un dossier pourri : l'enquête sur la mort d'un ancien policier, reconverti comme garde du corps, qui semble avoir été balancé hors d'un train de luxe.

Objectivement, j'ai lu de meilleurs Deon Meyer, comme par exemple En vrille ou 13 heures.
L'écriture est toujours aussi efficace : simple et directe, rythmée par l'alternance entre deux intrigues que rien ne semble relier et par des chapitres assez courts.
Les personnages, qu'ils soient récurrents comme les policiers, ou occasionnels; sont bien trempés : ils ont leurs lignes de forces, leurs doutes, leurs fissures et leurs zones d'ombre. La consistance, physique, relationnelle et psychologique, des personnages est l'une des caractéristiques des romans de l'auteur.
Ce sont plus les intrigues, qu'on ne verra converger qu'à la toute fin, qui paraissent décevantes. On peut admettre que des anciens de l'ANC, déçus, complotent contre un président corrompu. Mais s'en remettre à un ancien tireur d'élite plus que quinquagénaire, reconverti dans le menuiserie depuis plus de 10 ans... Sans compter les nombreuses incohérences dans la façon dont Daniel Darret est suivi. La partie sud-africaine du roman paraît plus crédible, si l'on accepte que, chez les policiers, l'honnêteté l'emporte toujours sur la fidélité.
Un thriller efficace, qui n'égale cependant pas les meilleurs de l'auteur.


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Politique et policier sans jamais aucun ennui voilà ce que le magicien Deon Meyer nous livre dans "La Proie".
On sent également tout l'amour (déçu?) que porte l'auteur à son pays l'Afrique du Sud. Je l'ai senti presqu'en colère pour nous parler de la corruption de son pays. La proie c'est deux histoires en parallèle qui, bien sûr, se croiseront. La brigade des Hawks, avec ses incorruptibles Griessel et Cupido, enquête sur le meurtre d'un ancien de leurs services jeté par la fenêtre d'un train de luxe. Pendant ce temps, un ancien de l'ANC, à Bordeaux, en France a tout fait pour se faire oublier et pour changer de peau. Ça ne fonctionne pas , un ancien camarade de combat le retrouve et lui demande un service. Énorme service.
Comme toujours avec Meyer c'est intelligent, documenté, plein d'informations et de détails mais c'est surtout incroyablement senti. Et ici, la critique de cette kleptocratie qu'est devenu l'Afrique du Sud est vive, brutale et en même temps, on la sent douloureuse.
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Bordeaux, une nuit caniculaire d'août, Daniel Darret est sorti se rafraîchir. Il surprend une femme en train de se faire agresser pas cinq individus. Son intervention musclée permet à l'inconnue d'en sortir sauve mais il craint d'avoir attiré l'attention des autorités et d'un passé sulfureux qu'il a fui…
A des milliers de kilomètres de là, en Afrique du Sud, les capitaines Benny Griessel et Vaughn Cupido se voient confiés un « docket » par le colonel des Hawk, Mbali Kaleni. Ce dossier renferme les éléments d'une enquête bâclée par la police locale, portant sur la découverte d'un corps sur une voix ferrées. D'après les constatations faites à l'époque, il s'agirait d'un suicide. Mais les premières investigations vont dévoiler la présence dans le train de deux vieillards à la fausse identités et par la suite un complot visant à éliminer « La Proie »…
Les deux histoires vont rapidement n'en faire plus qu'une.
Un récit limpide, un tempo infernal, Deon Meyer entraine le lecteur dans une aventure politico-policière rocambolesque.
Un très bon moment de lecture.
Traduction de l'afrikaans de Georges Lory.
Editions Gallimard, collection série noire, 563 pages.
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Les capitaines Benny Griessel et Vaughn Cupido sont chargés d'élucider le meurtre d'un ex-policier, chargé d'assurer la protection privée d'une vieille dame millionnaire, survenu dans le train le plus luxueux du monde, le Rovos qui assure la liaison entre le Cap et Pretoria.

Assez vite, les deux policiers vont se rendre compte qu'ils mettent le doigt dans un engrenage dont ils ne maitrisent pas toutes les nuances.

En même temps, et très loin de l'Afrique du Sud, dans le vignoble bordelais, un ancien de l'ANC va voir son passé revenir soudainement à la surface.

Dans tous les romans de Meyer, l'intrigue policière de départ est aussi et peut-être surtout, une excellente façon de nous parler de la société sud africaine, cette Afrique du Sud qui tente, tant bien que mal à retrouver un équilibre précaire et essayer d'effacer, en vain, les cicatrices liées à l'Apartheid tant les frontières économiques, sociales et bien évidemment raciales sont encore totalement palpables et gangrènent encore toute la société.

Dans « La Proie », jeu du chat et de la souris qui nous amène entre le Cap, Amsterdam Paris et Bordeaux- l'auteur nous chante son amour pour la France et la culture française, Deon Meyer soigne particulièrement ses effets et signe un thriller qui va à trois cent à l'heure, plus rapide que le train qui sert de point de départ à son intrigue.

L'art de Meyer, c'est en effet et avant tout de parvenir, tout en troussant des enquetes haletantes et pleine de rebondissements et de chausse trappe, de restituer aussi bien l'ambiance de la société sud-africaine, avec ses espoirs, ses trahisons, et ses déceptions.

Un thriller ­d'espionnage addictif à la visée internationale sous fond de trahisons d'idéaux, de blanchiment d'argent et de corruption.

Un must du genre !
Lien : http://www.baz-art.org/archi..
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Au fil des romans qui le mettent en scène, Deon Meyer utilise le personnage de Benny Griesel, un policier dont la carrière a stagné à cause de son alcoolisme, pour nous présenter le quotidien en Afrique du Sud : le poids de l'apartheid, les discriminations ancrées dans la société, la pérennité des inégalités, les nouvelles responsabilités dévolues à des Noirs, etc. Griessel est un Blanc sympathisant de la cause des Noirs, mais qui se reproche de n'avoir pas fait assez à l'époque de la lutte pour la fin du régime de l'apartheid. Dans La Proie, Benny est abstinent depuis 8 mois et il est amoureux d'Alexa, rencontrée aux AA, qu'il projette de demander en mariage. L'Afrique du Sud de l'après Mandela le déçoit beaucoup et on comprend implicitement que c'est Jacob Zulma et ses affidés qui dirigent la « kleptocracie » qu'est devenu le pays : la corruption règne et les espoirs des anciens de l'ANC se perdent dans les pots-de-vin que touchent les dirigeants. Pire ! certains parmi ces derniers sont des anciens camarades de lutte… Heureusement, tous ne sont pas corrompus !
***
Deon Meyer construit La Proie en 5 parties et 81 chapitres, le dernier en forme d'épilogue. Il situe l'action durant tout le mois d'août et jusqu'au 3 septembre, autant dire qu'il va se passer beaucoup de choses dans un laps de temps assez resserré. L'auteur va nous présenter deux situations parallèles dont on comprend rapidement qu'elles vont se rejoindre. le récit commence à Bordeaux où l'on rencontre Daniel Darret, un Zoulou de très grande taille. Il travaille comme apprenti et homme à tout faire dans une ébénisterie où oeuvre le Génie, personnage autiste et ébéniste sans égal. Il faudra une bagarre de rue pour comprendre que ce géant sud-africain a un passé particulier. Les épisodes français vont alterner avec ceux qui se déroulent en Afrique du Sud. Nous y retrouvons la brigade des Hawks dont font partie Benny Griessel et Vaughn Cupido ainsi que Mbali Kalemi, leur cheffe.
***
Je n'ai pas éprouvé pour ce roman le même enthousiasme que pour L'Année du lion, mais c'est un bon roman ! J'ai parfois ressenti une certaine impatience quand je trouvais que nous perdions de vue trop longtemps une des deux situations, mais comme toujours avec cet auteur, je me suis régalée de l'enquête elle-même, bien sûr, mais tout autant de ce qui l'entoure : la situation politique dont il a déjà été question, la vie de Darret à Bordeaux, ses relations avec son patron et la peintre, la perte de poids de Mbali, la diète de Cupido comme son désir d‘impressionner son futur beau-fils et de lui prouver que tous les Hawks ne sont pas corrompus. Même si les romans qui mettent en scène Benny Griessel peuvent se lire indépendamment, il me semble préférable de ne pas commencer par celui-ci.
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Année après année, mois après mois, lecture après lecture, je tente - sans jamais y arriver - de combler le tonneau des Danaïdes de mes lacunes littéraires. Et Deon Meyer en est une, n'ayant jamais succombé à cet « auteur de polar préféré des Français », bien que voyant régulièrement passer des chroniques louangeuses sur ses livres. Bref, c'est chose rattrapée avec La Proie, traduit par Georges Lory. Et c'était plutôt pas mal !

Dans un montage classique mais maîtrisé où deux intrigues parallèles vont se rejoindre – la première sur la mort d'un ancien flic jeté par la fenêtre d'un train de nuit en Afrique du Sud ; la seconde sur le retour aux armes le temps d'un contrat, d'un ancien sniper rangé des assassinats – Meyer réussit à accrocher son lecteur grâce à deux atouts majeurs.

La mise en situation politique tout d'abord, avec un livre qui aborde en toile de fond l'incroyable gaspillage de l'héritage des années Mandela, par ceux de son camp qui lui ont succédé au pouvoir. Madiba n'a plus qu'à se retourner dans sa tombe : l'appât du gain et la corruption ont vite remplacé l'esprit de réconciliation nationale.

Le travail des personnages ensuite, avec deux flics récurrents de la brigade des Hawks, travaillés depuis plusieurs opus. Benny Griessel comme Vaughn Cupido, si flamboyants, proactifs et dynamiques dans leur facette professionnelle, apparaissent ici tellement vulnérables dans leur vie privée : l'un au moment de demander la main de sa compagne et l'autre tentant de se faire accepter par le fils de la sienne.

Chapitres courts et dialogues dynamiques : La Proie a tout du bon pageturner efficace, qui donne envie de pousser un peu plus loin dans l'oeuvre passée de Deon Meyer.
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L'année du lion fut mon premier Deon Meyer et j'avais hautement apprécié la rencontre.
Pourquoi, me suis-je dit, ne pas poursuivre la découverte de l'auteur à travers son personnage emblématique de l'inspecteur Griessel, même s'il s'agit déjà de sa septième enquête.

Le problème c'est que, quand on fait tout à l'envers, forcément l'exercice est périlleux et forcément, l'affect en pâtit un peu.

Tentons une approche objective …

A mettre au crédit de Deon Meyer, sa maîtrise structurelle du roman. Pour l'avoir rencontrée à maintes reprises, la construction du récit est classique mais elle fonctionne. Deon Meyer relate, en chapitres alternés, deux histoires parallèles : l'une en Afrique du Sud, l'autre à Bordeaux. L'alternance de chapitres se transforme en alternance de paragraphes à mesure que s'accélère l'intrigue. le dépaysement est assuré, le rythme est là, on ne s'ennuie pas. Un vrai piège pour les page turner.

Côté psychologie des personnages, Griessel m'a paru un peu mièvre et pathétique mais c'est sans doute le résultat de ses failles existentielles développées dans les six épisodes précédents. Difficile donc de juger de la profondeur du bonhomme mais il ne va pas faire tomber Adamsberg et Erlandur du podium de mes inspecteurs cabossés préférés, ça c'est sûr.
Deon Meyer crée par contre un beau personnage nommé Daniel, le bordelais de service. Son parcours, sa résilience le rendent attachant, j'ai eu peur pour lui.

Mais pourquoi diable a-t-il fallu que l'intrigue en Afrique du Sud soit aussi brouillonne, voire bâclée. J'ai ressenti un petit goût de « l'enquête a assez piétiné, on va faire expliquer tous les tenants et aboutissants de l'intrigue par un seul personnage qui avoue, ça sera plus simple ». Je n'en dis pas plus, je suis sûre que vous sentez mon agacement.

Heureusement, pour emporter mon adhésion, il y a le côté politique assumé du roman. Déon Meyer m'a fait découvrir les arcanes de la corruption omniprésente en Afrique du Sud. En tant qu'Européenne, ça m'a rappelé que l'image d'Epinal de Mandela libérant son peuple n'est plus d'actualité.

Bref, à défaut de sortir totalement charmée de la Proie, j'en ressors moins bête et ça, par les temps qui courent, ça vous protège mieux qu'un vaccin.

Merci aux éditions Gallimard et à Babelio pour cette découverte lors de la Masse Critique mauvais genres.
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Le succès de Deon Meyer de la part des lecteurs et des critiques n'est pas le fruit du hasard.

Son nouveau polar, La proie, ne fera que confirmer la donne, tant il y fait montre d'un talent, d'une maîtrise et d'un engagement qui force le respect.

Le lectorat français suit de près l'auteur sud-africain depuis ses débuts. Après le chef d'oeuvre post-apocalyptique qu'était L'année du lion, il revient au polar et à ses personnages récurrents, Benny Griessel et Vaughn Cupido (mais pas seulement).

Si vous vous interrogez sur le fait de devoir lire les précédents livres de la série avant celui-ci, ma réponse est claire : il faut lire de suite La proie, que vous connaissiez les personnages ou non. Il y a comme une urgence à se plonger dans cette intrigue, et le boulot est tellement bien fait que les « primo-lecteurs » ne devraient en rien être frustrés.

Il faut dire que ce roman est un peu comme une nouvelle page qui se tourne pour les personnages, comme un nouvel élan (qui les portera loin ou sera coupé, il faut le lire pour savoir).

Le récit repose sur le problème de la corruption en Afrique du Sud, endémique malgré l'éclaircie Mandela. Un polar politique, oui mais pas seulement, il serait faux de trop le catégoriser.

Pour preuve, l'action se déroule à la fois sur le continent africain et en Europe. Avec cette construction connue de deux intrigues parallèles pourtant très éloignées, et qui tendent à se rejoindre. L'une des deux se déroule en France, à Bordeaux, l'écrivain ayant d'ailleurs travaillé ces passages durant ses séjours dans cette commune.

Le succès de Deon Meyer n'est pas usurpé. Ce roman en est une preuve éclatante. Son élaboration et le cheminement de l'histoire sont classiques mais sont des modèles du genre. Un tel niveau de maîtrise et d'habileté est impressionnant.

L'écriture au scalpel, sobre, directe, brute, à la fois analytique et émotionnelle, renforce l'immersion du lecteur et son intérêt, autant pour l'histoire que pour ceux qui la vivent. Plongée dans le quotidien des Hawks, cette unité d'élite sud-africaine. Et virée auprès d'un ancien de la branche militaire de l'ANC, retiré des affaires. C'est d'ailleurs ce Daniel Darret qui vole la vedette, tant son parcours et sa situation présente touchent au coeur.

Deon Meyer est en colère. Aigreur face à cette corruption qui est repartie de plus belle, une désillusion qui se traduit par une peinture terrible du pays. Sans illusion sur le fait que la situation mondiale ne fait qu'empirer le problème et ne touche pas que le continent africain. La mondialisation de la corruption est en marche.

Oui colère, jusqu'à imaginer que certains de ses personnages décident d'une solution radicale pour tenter de détourner le pays de cette sanie qui le gangrène. Meyer, sous couvert d'une intrigue divertissante, tire dans le tas, éclabousse, jette des pavés dans la mare.

Le mélange prend merveilleusement bien et rajoute cette profondeur indispensable pour qu'un roman reste en mémoire.

La proie est un formidable polar, aussi politique que divertissant, aussi précis qu'émotionnellement touchant. Près de 600 pages qu'on ne voit pas passer, à coups de chapitres courts parfois avec le rythme du meilleur des thrillers.

Deon Meyer dénonce, mais n'oublie jamais qu'il est avant tout un conteur hors pair. Je le redis, son succès est amplement mérité et ce roman chaudement recommandé à tous.
Lien : https://gruznamur.com/2020/0..
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