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EAN : 9782330072056
432 pages
Actes Sud (12/10/2016)
4.25/5   4 notes
Résumé :
Un carnet d'adresses hante son propriétaire. Il le nargue et refuse de livrer ses secrets. Philosophie et ironie imprègnent ce roman où un homme d'affaires polonais d'aujourd'hui parcourt les pages de son vieux calepin dans l'espoir d'y retrouver l'essentiel de sa vie. En dressant le portrait en creux de l'homme sans qualités du XXIe siècle, déchiré entre la tentation de la modernité et les assauts du passé, Mysliwski, avec son art du récit élégant et singulier, nou... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
Un livre intéressant où l'auteur polonais Wieslaw Mysliwski engage un dialogue avec les universaux de l'existence humaine, partant d'un carnet d'adresse . Carnets d'adresses devenus aujourd'hui anachronisme total, vu que nous avons tous désormais un ordinateur, Internet, un portable. Des carnets d'adresses qui renferment des noms, prénoms, adresses et numéros de téléphone scrupuleusement notés d'amis, parents, connaissances…. dont certains sont déjà sortis de nos vies ou disparus, et certains dont on peine à s'en souvenir. Ici, en l'occurrence le carnet d'adresse d'un homme qui suite à un accident banal, se pose et y cherche la clef de sa vie sans vraiment savoir ce qu'elle lui permettrait d'ouvrir. Il y cherche les traces d'un passé qui combleraient le sentiment de vide qui habite son existence , à travers des noms et des cartes de visites. Un passé, dont on ne sait trop bien s'il en a la nostalgie ou y est totalement indifférent tant il semble que ses sentiments se sont émoussés, s'ils ont jamais existé. Un vide que même les femmes dont la fameuse Maria semblent n'y avoir pu y remédier. Mal avec lui-même, mal avec les autres, il relève de nombreuses réflexions lucides et claires sur la vie, la mémoire et l'amour , où chacun s'y retrouvera à sa façon. « Je me demande seulement ce que vaut cette vie pour qu'on soit sans cesse obligé de le remplir » dit-il avec ironie , « Or on ne peut remplir que le temps, et le temps n'est pas une mesure de la vie » 😊 !

Une histoire ayant comme images de fond la Pologne d'antan et celle actuelle, un pays balloté entre divers guerres et puissances et qui retrouvera un peu de sa personnalité massacrée qu'après 1980 avec le mouvement Solidarnosc et son chef Lech Walesa, un mouvement qui contribuera à faire tomber le rideau de fer en remportant un très large succès aux élections de juin 1989, avec Walesa élu l'année suivante à la présidence de la république. Tandis que les communistes d'antan se reconvertiront en vitesse en businessmen , « vous vous souvenez de Chmura, le secrétaire du parti ? Il porte maintenant le baldaquin devant le curé …..Vous n'avez pas choisi un métier ? - le métier aujourd'hui , c'est faire de l'argent, monsieur Radzikowski ». le narrateur lui-même sans métier fixe , ex-peintre, apprenti couturier, étudiant aux Beaux Arts, joueur de poker, étudiant en psychologie …..apparemment devient riche aussi en se convertissant en businessman, commerces et transactions, sur lesquelles l'auteur reste assez flou, comme sur son nom et son âge, bien qu'on peut aisément deviner ce dernier. Un homme à femme qui gagne sa première voiture au poker, un homme qui n'a pas perdu son temps bien qu'il en pense strictement le contraire 😁!
Mysliwski combinant réflexions et anecdotes , dont parmi celle sublime de son tableau des pendus, nous donne un livre pétillant de vie foisonnant de détails, où l'humour est la cerise sur le gâteau, par commencer avec le titre du roman, qui se réfère à la dernière partie de poker faite avec le cordonnier, sur sa tombe, pour combler une dette , même si c'est sur le tard 😊, ou quand avec son oeil d'apprenti couturier il compare l'homme à un rassemblement de morceaux traversés de grosses coutures, dont parfois l'autre moitié est toute décousue, truculent ! Un grand auteur absolument à découvrir !


« Je me demande seulement pourquoi l'être humain est à ce point en manque de soi. »

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Un livre au charme suranné regorgeant de profondes et riches réflexions philosophiques entrelacées de multiples anecdotes parfois poétiques, parfois décalées, toujours sincères et justes.

Et tout part d'un carnet d'adresses. Un gros carnet d'adresses. Rempli de noms, de prénoms, de numéros de téléphone et d'adresses scrupuleusement notés au fil des décennies. Un objet quelque peu désuet, on en sentirait presque les effluves de feuilles jaunies ainsi que leur léger craquement quand on en tourne précautionneusement les pages. Si truffé de cartes de visites et si fatigué qu'il est maintenu par un élastique, prêt à craquer. « Enlever l'élastique de mon carnet fait penser au désamorçage d'une mine ».
Y faire de l'ordre serait nécessaire. Sauf que.. Sauf que certaines personnes ont disparus, et d'autres ne lui disent plus rien du tout. Alors il le parcourt ce carnet, indécis, et émerge de cette errance des tranches de vie, des souvenirs, des réflexions. le carnet, source de digressions flamboyantes. Nous découvrons, malgré ce que laisse croire ce carnet bien rempli, un homme seul, un homme sans nom, sans âge, qui n'arrive pas à s'attacher, ni aux gens, pas même aux femmes, ni aux lieux. Un homme solitaire qui médite avec sincérité et sans fard sur la constitution complexe de l'identité, sur la fragilité de la mémoire, sa volatilité, sur la valeur des souvenirs et le rôle salvateur de l'imagination. Méditations où Mysliwski ne s'encombre pas de marqueur d'époque, de marqueur de lieu, ce qui en fait un roman étonnamment atemporel et universel.

« Faire le tour de sa vie. le doute m'envahit à nouveau : est-ce seulement possible ? Cet ensemble de hasards, sans ordre ni lien, comme tous ces prénoms, adresses et numéros de téléphone dans mon carnet, peut-il se plier à notre volonté ? Malgré tout, j'essaie, car je suis sûr d'une chose : se contenter de vivre n'est pas suffisant. Il y a une différence entre vivre et être conscient ».

Ces réflexions philosophiques entremêlées d'anecdotes m'ont par moment comme asphyxiée, troublée, presque angoissée. Ce n'est pas une lecture gaie, c'est une lecture profonde, qui touche à l'intime, au profond en nous, à nos questionnements existentiels. Pourtant le ton n'est jamais larmoyant, encore moins versé dans le pathos. L'humour est même bien présent, en filigrane. Mais c'est un miroir abrupt sur le devenir de tout être humain confronté à la solitude les années passant. La solitude de la dernière partie de notre vie. le carnet est le lien avec ce passé qu'il appréhende à la fois avec nostalgie et indifférence. C'est un miroir implacable qui m'a à la fois apaisée et angoissée. Balancier lucide entre accueil résigné du déclin, cet état naturel du monde, et peur de l'inéluctable au crépuscule de toute vie. Avec une question principale : « Je me demande seulement pourquoi l'être humain est à ce point en manque de soi ».

Le narrateur, ancien peintre, tailleur de costumes, et étudiant en psychologie, s'interroge sur la mémoire à l'aune de ce carnet d'adresses, pilier du souvenir. Peut-il pour autant lui apporter la vérité ? le souvenir est-il vérité ? Tout n'est-il pas reconstruction du monde, représentation ? Une illusion ? La mémoire n'est-elle pas mensonge ? D'anecdotes en anecdotes, ces questions surgissent tout au long du récit.

Certains passages dans ce livre, sublimes de beauté, resteront gravés en moi, comme cette brume sur le lac en pleine forêt au bord duquel il attend l'arrivée du soleil avec son chien.
« A cette heure matinale, le lac était couvert d'une nappe de brume, parfois si épaisse que le regard ne percevait pas depuis la haute rive le miroir d'eau en bas. C'est seulement lorsque le soleil, s'élevant sur l'autre berge, se mettait à dissiper la brume que le lac se dévoilait peu à peu. Cela avait quelque chose de merveilleux, ce soleil levant qui s'efforçait avec tant de peine de transpercer la brume agglutinée devant lui, comme dans un geste de défense ».

Magnifique également, cette dernière partie de poker avec son ami cordonnier sur sa tombe, de façon à régler une dette. D'ailleurs le titre « La dernière partie » peut être perçu comme un titre d'une grande gravité (la dernière partie de la vie d'un homme confronté à toutes ces questions existentielles) ou au contraire d'une grande légèreté à l'aune de cette scène incroyable, cette partie de poker jouée sur la tombe même de son ancien ami. Gravité et légèreté, nous frôlons tour à tour ces deux extrêmes tout au long de la lecture.

Et enfin, peut-être la clé de tout, la présence de Maria, l'amoureuse, via les lettres qu'elle lui écrit, lettres qui ponctuent le récit, amour déçu et inachevé dont on sent bien qu'il y a là l'origine du vide, la source du néant. Ce premier amour et sans doute le seul véritable amour du narrateur.
« L'amour, c'est peut-être la sagesse d'affronter ensemble le temps qui passe, comme si le monde passait avec nous. C'est ce qui nous unit au monde. »

« La dernière partie » est un livre empli de philosophie dans lequel tout lecteur peut venir puis revenir puiser la sagesse. Un livre avec lequel il est nécessaire de prendre son temps, ce récit se déguste, s'interrompt parfois pour pouvoir digérer et se nourrir de ses idées. Un récit qui reste simple tout en étant puissant.

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Je savais que ce n'était pas un livre à feuilleter entre deux stations de métro. Un roman de Wiesław Myśliwski se déguste dans le calme et le confort d'un canapé. J'ai donc profité des mes deux weekends pour commencer et terminer le dernier roman de cet auteur polonais et pouvoir ainsi l'apprécier à sa juste valeur. Je suis tombée sur sa version française tout à fait par hasard quand le nom familier et la belle couverture ont attiré mon attention dans ma librairie. J'avais dans ma bibliothèque son édition polonaise et je me suis dit que c'était une bonne occasion de me plonger dans sa lecture.

Dans "La dernière partie", tout comme dans son fameux "L'art d'écosser les haricots", une activité banale devient prétexte à soumettre ses réflexions sur la vie, la mémoire et l'amour. Certains des noms inscrits dans un vieux calepin, que le narrateur tente de mettre à jour, ravivent des souvenirs de ses jeunes années. Pour cet homme d'affaires sans attaches au crépuscule de sa vie c'est le seul objet de valeur, la seule trace de certaines personnes qu'il a pu croiser dont il ne garde plus aucun souvenir. Et d'autres, plus privilégiées, qui ont marqué sa vie et sont restées gravées dans sa mémoire.

Il s'agit d'un roman sur la défaillance de la mémoire, sa volatilité et son imprévisibilité. Un roman sur l'amour idéal et impossible. Il impressionne par la richesse et la justesse des réflexions qui, entremêlées de souvenirs et de lettres envoyées par Maria, son premier amour, forment une sorte de traité philosophique, accessible et agréable à lire. Un étonnant assemblage de sagesse, d'intelligence et de simplicité en même temps. Un excellent roman qui se savoure et donne envie de le relire, d'y piocher et de le partager. Ne passez pas à côté de ce remarquable auteur polonais et de sa prose universelle et intemporelle.

Lien : http://edytalectures.blogspo..
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La dernière partie est une découverte toujours surprenante. Par l'histoire d'un homme qui tente de mettre de l'ordre dans son carnet d'adresse et le vide de son existence ainsi exposée, Mysliwski livre une réflexion profonde sur le temps, l'identité et toutes ses ombres et disparues qui nous constituent. Une lecture à conseiller absolument.
Lien : https://viduite.wordpress.co..
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Citations et extraits (15) Voir plus Ajouter une citation
De toute façon, nous existons tous à travers les autres, qui que nous soyons, nous ne sommes qu’une idée de nous-mêmes. Une idée qui ne cesse de se modifier, d’ailleurs, selon les circonstances, les événements, le temps, la mode, les conventions, ou tout simplement selon nos propres calculs. Nous ne rentrons pas dans une forme définie et invariable. Tout être humain est une existence plurielle en raison justement de cette multitude d’idées qu’il se fait de lui-même.
Pourtant, on dit bien “être soi-même”. On l’affirme avec une certitude impertinente, persuadé de la permanence de notre moi. En vérité, être soi-même ne veut strictement rien dire. Pour être soi-même, il faut déjà être quelqu’un, c’est-à-dire savoir qui l’on est. Perdus au milieu de représentations multiples et variables, comment pourrions-nous le savoir ?
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-Et qu’est-ce que vous lisez de si intéressant ?
— Rosa Luxemburg. La Révolution russe. Ah, sacrée bonne femme, et quelle intelligence !
- Et vous y croyez, Antoni ? Il marqua la page de son livre avec son couteau et leva sur moi ses yeux fatigués par la lecture.
-Et comment améliorer le monde si on n’y croit pas ? Parce que le monde, il faut sans cesse l’améliorer. Il ne sera peut-être jamais assez bien pour que les gens aiment y vivre. Mais il faut y croire. Sinon, qui voudrait l’améliorer, hein ? Surtout qu’on ne sait jamais, avant d’atteindre le but, si le changement va dans le bon ou dans le mauvais sens.
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Chacun ne porte en soi qu'une idée de lui-même, et qui varie de jour en jour. Parfois on en privilégie une, parfois une autre, mais plus on vieillit, plus on s'accroche au soi jeune. On aura beau rester devant la glace une journée entière, on ne saura jamais de quoi on a l'air, car on se regarde toujours à travers la représentation qu'on a de soi. D'ailleurs quoi que nous regardions, un meuble, un paysage, le monde, nous sommes incapables de dissocier notre imagination de ce regard. Par conséquent vouloir rendre la vraisemblance est une tâche proprement illusoire. Car n'est pas vrai ce qui prétend être vrai, mais ce qui ignore l'être.
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Les mots manuscrits sont différents de ceux tapés à la machine ou sur ordinateur. C'est comme un sceau marqué de son propre sang.
Quelle différence, pourrait-on dire, la machine à écrire est plus rapide, et l'ordinateur bien plus pratique encore. Et bien la différence est de taille. Dans une lettre manuscrite nous ne lisons pas seulement les informations qu'elle contient. Nous lisons aussi ce qui se cache dans la forme même des lettres et des mots, dans leur inclinaison, leur tracé, leur épaisseur. Nous pouvons voir si ces lettres tremblaient à l'écriture, si elles se laissaient faire, ou si, au contraire, elles opposaient une résistance, si elles émergeaient sur le papier à la hâte, survoltées ou aigries, ou bien étaient conçues avec peine. Cela nous en dit parfois plus long que le seul contenu de la lettre.
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D’ordinaire, l’avocat recevait tout le monde dans l’entrée. Il vivait dans un appartement modeste au 6 de la rue Moniuszko, appartement 47, quatrième étage. Une pièce unique, encombrée de livres. On avait l’impression qu’il dormait sur des livres, car son lit en était recouvert. Ils s’empilaient aussi sur son bureau qui ressemblait à un trou dans des amas de papiers, où il se glissait quand il devait lire ou écrire quelque chose.
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