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Joseph Antoine (Traducteur)
EAN : 9782253126423
380 pages
Le Livre de Poche (29/04/2009)
3.72/5   169 notes
Résumé :
Lorsque, par un soir brumeux de 1898, le jeune peintre Samuel Godwin pousse les grilles de la propriété de Fourwinds, il est immédiatement envoûté. Engagé pour enseigner l'art aux deux filles de Mr Farrow, il ignore encore que cette luxueuse demeure sera pour lui le décor de ses plus belles peintures. Intrigué par la personnalité ombrageuse du maître des lieux, séduit par les jeunes demoiselles, Marianne et Juliana, désarçonné par Charlotte Agnew, leur gouvernante e... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (48) Voir plus Ajouter une critique
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Très gros coup de coeur pour ce roman que je regrette de ne pas avoir lu avant.
Linda Newbery réunit ici tous les éléments pour un bon roman : nous sommes à la fin du XIXe siècle, en pleine campagne anglaise, dans une très bon manoir avec une famille qui cache pas mal de secrets. C'est tentant n'est-ce pas?

Samuel et Charlotte sont deux personnages que j'ai beaucoup aimé et qui alterne en temps que narrateur. de plus l'auteure intercale des lettres qui donne du dynamisme au roman et à l'intrigue.

Les secrets sont révélés petit à petit, le roman devient de plus en plus noir et prend des tournures parfois inattendues. Les révélations tombent et font tomber les masques avec les gentils et les méchants ne sont pas toujours se que l'on croit!

La fin où le suspense est intense est impossible a lâcher et j'ai aimé découvrir ce qu'était devenu les personnages bien des années après.

Avant de finir ma critique, je voulais juste dire que la couverture des éditions livre de poche est très belle et va vraiment très bien avec l'histoire. Il s'agit d'une peinture de Charles Courtney Curran.
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J'ai adoré ce roman, incapable de le lâcher avant la dernière page.
La plume de Linda Newberry est très agréable, rappelant les classiques de la littérature gothique anglaise. Elle entretient le mystère et distille habilement les indices au fil du récit jusqu'à l'épilogue assez sombre qui vient contrebalancer le happy-end.
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J'ai lu dans certaines discussions dans Babelio, l'expression “lecture doudou“.
C'est un peu l'impression que j'ai eu pour ce roman. Bien qu'il y ait des secrets cachés et une inquiétude sourde quant à la santé des deux jeunes filles de ce manoir, la description de cette belle demeure, la présence au centre des préoccupations de ses habitants de la sculpture et de la peinture en ont fait pour moi une lecture réconfortante. Les relations entre les habitants de cette maison, complexes, également. Même si le prologue augure d'une amère déception.

Samuel Godwin a suivi une formation de peintre. Il répond à une annonce recherchant un précepteur artistique pour deux jeunes filles. Contre toute attente, il est agréé et quitte la maison de Londres où il vit avec sa mère et sa soeur pour un manoir en pleine campagne. Arrivé plus tard que prévu, il est accueilli dans le parc par une jeune fille affolée, l'une de ses futures élèves, à la recherche du Vent d'ouest.
Ce Vent d'Ouest est la sculpture manquante d'un ensemble qui décore le manoir Fourwinds.
Cette absence est au centre du mystère de cette famille que ressent assez vite le jeune artiste.

La relative originalité de ce roman est qu'il donne alternativement la parole à deux personnages, Samuel et Charlotte, la dame de compagnie assez récente des deux jeunes filles. Avec parfois une lettre. Nous voyons ainsi évoluer la compréhension des secrets par ces deux personnes qui n'ont pas été témoins des évènements.
Les révélations se suivent certaines faciles à deviner, d'autres moins.
Je suis contente d'avoir fini mon année de lecture avec ce roman, le second de Linda Newbery que je lis. Cette phrase le résume bien “Comme vous voyiez, il règne sous ce toit une grande confusion des rôles.”

J'ai été surprise d'apprendre dans un petit appendice que les principaux personnages et spécialement Samuel Godwin étaient des personnes réelles.
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1920

Dans une salle d'exposition, les aquarelles et les huiles du peintre Samuel Godwin sont célébrées en sa présence. Un sourire de façade, une amabilité un peu forcée, il répond aux louanges des uns et des autres, s'astreignant à commenter et à objecter les interprétations personnelles des visiteurs.
"- Accordez-moi votre attention avant d'être pris d'assaut ! Je suis si curieuse… Dites-moi…"
Tous des poulpes, à le tirailler par la manche, à droite, à gauche…
"- La Sauvageonne. Elle m'intrigue beaucoup. Qui est-ce ?"
Samuel se retourne vers son tableau, il est absorbé par lui. Il pense…
" A l'autre bout de la galerie, dans son cadre d'ébène, ma Sauvageonne m'observe. Son expression est gravée dans la cire brûlante de mes pensées, c'est mon pinceau qui a formé chaque nuance de ses traits, et pourtant je ne puis la regarder sans éprouver à chaque fois une nouvelle morsure de chagrin. Sur ses épaules tombent ces cheveux dont j'ai pris tant de plaisir à reproduire les reflets extraordinairement riches – couleur de châtaigne fraîche offerte à la lumière dans sa bogue encore entrouverte, de feuilles de hêtre jonchant la neige, de piécette patinée par le temps, d'aile de faucon. Ses yeux, ni vraiment verts ni vraiment bleus, s'accrochent aux miens avec une expression jubilatoire qui semble un appel. Voilà pourquoi je l'ai peinte : pour retenir à jamais cet instant, et les promesses qu'il contenait."
Se retournant vers l'inquisitrice…
" Elle est elle-même… Quelqu'un que j'ai connu il y a de longues années."

Juin 1898, Fourwinds

Samuel Godwin se retrouve face à la grille d'une propriété ; Fourwinds. La nuit est sombre et les arbres sont des tentacules menaçants. le portail en s'ouvrant prononce un grincement oxydé.
Jeune étudiant en peinture, d'une famille devenue modeste suite au décès du patriarche, il doit subvenir à ses besoins en travaillant. Dans cette demeure, il aura la tâche d'apprendre le dessin et la peinture aux deux filles de son nouvel employeur Monsieur Ernest Farrow, un veuf très fortuné, séduit par le talent prometteur du jeune homme.
La première rencontre avec l'une d'elles est violente. Dans l'obscurité, il perçoit un cri d'horreur qui le glace. Essayant de se maîtriser, il avance lorsqu'un corps le percute.
C'est une silhouette vêtue d'une cape qui s'accroche à lui brutalement et lui demande de l'aide d'une voix apeurée et hystérique.
" Vous l'avez vu ?… Je ne peux pas arrêter de chercher tant qu'il rôde par ici… le Vent d'Ouest ! Il faut le trouver… le capturer et le mettre à l'abri !"
Frappé de stupeur, Samuel hésite, essaie de définir les contours de la jeune fille noyée dans l'ombre.
Elle se nomme Marianne, a seize ans. Etre fantasque, talentueux et indiscipliné, elle oscille entre la folie, des extravagances et une docilité. Sa beauté n'est pas classique, elle est sauvage, solaire.
Arrivé dans la maison, où la décoration lui semble parfaite dans sa modernité et son esthétisme, il fait la connaissance de la soeur aînée, Juliana. Au contraire de sa cadette, elle est une jeune fille de dix-neuf ans douce, timide, effacée, presque translucide. D'après son employeur, elle serait douée pour le dessin, avec une approche très académique.
Les présentations sont faites par la gouvernante-dame de compagnie de ces demoiselles, Miss Charlotte Agnew. La jeune femme est depuis quinze mois le soutien et l'équilibre des habitants de Fourwinds. Malgré son jeune âge, elle se dévoue avec sagesse et réserve, ayant parfois un regard et des gestes maternels pour ses protégées.
Samuel est troublé, l'heure est tardive, cela expliquerait certainement l'opacité des regards qui l'entourent.
Après sa première nuit de rêves tourmentés, Samuel s'aventure dans le jardin jusqu'à un lac. Il est rejoint par Marianne dont les propos décousus le laissent perplexe…
" …vous devez savoir que tant de beauté vous fera souffrir, car vous ne pourrez jamais la capturer, ni la retenir."
Les lieux sont enchanteurs, il les visitent avec une vision d'artiste. Face à la maison, il en distingue toute la splendeur architecturale et découvre des sculptures. Aux points cardinaux, des bas-reliefs ornent la demeure. Ils représentent les sentiments des quatre vents, dans un art "classique et païen".
Le Vent du Sud a l'image d'une femme, symbolisant l'assouvissement, la béatitude et la générosité. le Vent du Nord porte les stigmates de la faiblesse et de l'abattement, c'est un vieillard. le Vent d'Est est un jeune homme craintif dont l'effroi fait frissonner le spectateur. le Vent d'Ouest… Il n'y est pas. Disparu ou non taillé, il manque et fait défaut.
" Il rôde en liberté… Où est passé le Vent d'Ouest ? On ne le retrouvera jamais ?"
Samuel questionne, se passionne pour ces oeuvres d'une beauté absolue, admire l'auteur. A ses interrogations, les réponses sont évasives. L'artiste, Gidéon Waring, aurait disparu suite à une querelle avec Monsieur Farrow et n'aurait pas honoré la dernière partie de la commande.
Dés les premiers jours, une sournoise impression de malaise se plaque au ressenti de Samuel. L'hospitalité de la maison laisse une saveur amère. Ce monde est un huis clos qui souffre d'un mal indécelable mais qui sature l'ambiance avec des miasmes malsains.
Marianne est un feu follet, irrésistible, séduisant, qui fuit un monde réel. Juliana est un modèle de jeune fille, douée pour la musique, la broderie, patiente, conciliante, qui parfois sombre dans la mélancolie et a la pâleur d'une convalescente. Charlotte, la parfaite employée, consciencieuse, austère, se révèle être très secrète et possessive. Ernest Farrow, l'employeur généreux, charmeur, amateur d'art qui sympathise avec facilité mais qui garde au fond des yeux une froideur et une prétention aristocratique. A tous ces personnages mystérieux et instables, s'ajoute un autre, le fantôme… celui de Constance Farrow, mère et épouse, décédée.
Avec Samuel, nous évoluons aussi dans l'histoire avec les perceptions et les comptes-rendus de Charlotte. Leurs récits s'alternent en chapitre et ainsi se succèdent des révélations. Comme une enquête, ou les énigmes se distillent petit à petit, Samuel et Charlotte s'évertuent à trouver le petit grain qui enraille les relations à Fourwinds. Là, où tout y est mascarade et artifice.
Le dénouement, lorsque la dernière pièce du puzzle sera trouvée, laissera un goût de cendre.

J'ai aimé ce livre et vous le conseille vivement. Il a l'essence des écrits gothiques où le romantisme exacerbe l'esprit des personnages. Des secrets, des pulsions excessives, des jeunes gens beaux, vulnérables, un mystère à défaire, des lieux enchanteurs et menaçants, qui font vibrer le lecteur transporté à Fourwinds. L'écriture est belle, prenante, poétique et la fin, surprenante. Les Vents de pierre souffleront les cendres d'un passé accablant, et la renaissance fleurira.
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J'ai adoré découvrir cette histoire et la plume de Linda Newbery. C'est un petit coup de coeur que je vous recommande absolument.

Qualifié de roman gothique et romantique, et au vu des bonnes critiques comptabilisées, c'est avec hâte que j'ai entamé cette histoire. Finalement, ce n'est pas tant l'ambiance ou les décors qui donnent cet aspect sombre au roman mais bien le côté dérangeant et malsain de l'intrigue. La magnifique demeure de Fourwinds cache en réalité un passé bien triste.
J'ai passé un excellent moment de lecture à essayer de démêler le vrai du faux en compagnie de Charlotte et de Samuel. Je ne m'attendais pas du tout à une telle chute, je dois bien l'avouer. Même si le dénouement connaît quelques longueurs, il ne gâche en rien la qualité globale du récit.

Samuel Godwin, jeune artiste peinte en devenir est engagé par Ernest Farrow en tant que précepteur pour les deux jeunes filles de la famille. Après la perte récente de son père, Samuel ne peut plus financer sa prestigieuse école d'Art. Cette place en tant que précepteur chez une famille aisée est une opportunité inespérée pour lui. C'est donc avec enthousiasme qu'il débarque à Fourwinds. Petit à petit, déstabilisé par tant de secrets et par les sentiments ambigus qu'il développe à l'égard de Marianne, la cadette, il peine à trouver sa place. Malgré sa fascination pour la demeure et la gratitude qu'il ressent à l'égard de son employeur, Samuel n'est pas serein. Heureusement, il trouve en la personne de Charlotte Agnew, un pilier solide sur qui compter en toute occasion ainsi qu'une oreille attentive. Charlotte est entièrement dévouée à son travail et fait passer son devoir avant tout autre chose. C'est véritablement sur elle que repose l'équilibre de la demeure. Les deux jeunes gens, bien que de caractères très différents forment un duo que l'on prend plaisir à suivre. du début à la fin, on se demande comment va évoluer leur relation, qui oscille tout au long, entre respect, amitié et compassion.
A propos des deux autres figures principales, les filles Farrow, Julianna l'aînée et Marianne la cadette, ce sont deux personnalités intrigantes. Tandis que la première est plutôt mélancolique et passive, Marianne fait preuve d'une exubérance non dissimulée. En cela, elle m'a beaucoup fait penser à la Marianne imaginée par Jane Austen dans Raison et Sentiments. Voila l'une des nombreuses raisons qui m'ont fait aimé ce livre. On pourrait penser que c'est derrière ce caractère survolté que se cache la honte de la famille, mais c'est beaucoup plus compliqué que ça. Lindy Newbery alimente le mystère et les doutes au fil des chapitres et le récit s'enfonce au fur et à mesure dans la noirceur.

Outre le caractère palpitant de l'intrigue et les décors envoûtants, la plume est très agréable et parfaitement adaptée à l'époque représentée (toute fin du XIXème/début du XXème).
La structure narrative du livre est très intéressante. D'un côté, nous suivons le point de vue de Charlotte gouvernante dévouée à son travail, sérieuse et intelligente, de l'autre nous avons le point de vue de Samuel, dont la sensibilité artistique s'exprime à travers le regard qu'il porte sur la demeure de Fourwinds. D'ailleurs, l'Art que ce soit la peinture, la sculpture, l'architecture, la décoration ou même la musique est réellement mis à l'honneur ici. C'est un sujet que je ne maîtrise absolument pas, mais que j'aime beaucoup retrouver dans mes lectures. de pierre et de cendre est donc le roman idéal de ce point de vue là. Il aborde ces sujets d'une manière poétique sans trop rentrer dans des détails techniques qui pourraient être assommants. le nom même du manoir qui se traduit par les Quatre Vents est à lui seul une partie du scénario, mais je vous laisse tout le loisir de découvrir pourquoi... Grâce à cette alternance entre les points de vue des deux principaux intéressés, Linda Newbery crée une proximité forte entre son lectorat et ses personnages.
A travers le portrait réaliste de la société bourgeoise du XIXème, Linda Newbery tisse les fils d'une intrigue surprenante. En effet, cette famille qui a connu un drame bouleversant semble avoir de nombreux secrets. En s'improvisant détective et en fouillant le passé douloureux des Farrow, Samuel va se heurter à des dangers insoupçonnés. Heureusement, malgré toutes les mésaventures engendrées par sa vie au manoir, il croisera la route de l'homme qui détient les réponses, et qui deviendra son père spirituel. Charlotte va également enquêter de son côté, et à partir du moment où les deux jeunes gens confrontent leurs découvertes, nous réalisons que l'équilibre de Fourwinds va en être bouleversé à jamais. Cette tension sous-jacente qui ne cesse de monter en crescendo nous offre une fin renversante.

De pierre et de cendre est vraiment un très beau roman. Tour à tour touchant, palpitant, sombre mais pourtant bien ancré dans la réalité (pas de fantastique ici). En imaginant ce manoir de Fourwinds niché au coeur de la région du Sussex, Linda Newbery nous offre une fresque emplie d'émotions et de mystères. C'est donc les yeux fermés que je me plongerais à l'occasion dans son second roman intitulé Graveney Hall.


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Citations et extraits (42) Voir plus Ajouter une citation
C'est en voyant la lune frissonner au-dessus des downs, que j'avais cédé à l'impulsion de finir mon voyage à pied. Quelle nuit superbe ! m'étais-je dit arrêté devant la gare, sous une lumière qui semblait un ruissellement argenté. Comment rester assis derrière une portière fermée par un rideau ? Je voulais profiter de cette bénédiction, pleinement et de tous mes sens - je voulais la vivre, la respirer, m'en imprégner.
Il avait été convenu avec mon nouvel employeur, Mr Farrow, qu'une voiture viendrait m'attendre à la gare, mais j'avais subi toute une série de contretemps. D'abord le train avait quitté Londres avec du retard. Ensuite j'avais raté ma correspondance. On avait dû penser finalement que je n'arriverais pas avant le lendemain. Et à cette heure, aucun moyen de transport n'était en vue. J'envisageais de passer le reste de la nuit dans une auberge, quand l'idée m'était venue de finir la route à pied. J'allai demander au chef de gare de mettre ma malle en consigne jusqu'au lendemain, et je lui expliquai que ma destination était Fourwinds, en lui montrant l'adresse.
- Quelque chose comme un mile en montant cette route, répondit-il. En haut de la colline, quand vous verrez le taillis, prenez le vieux sentier à gauche. Il vous conduira directement au portail.
Il semblait extrêmement préoccupé par ma requête concernant ma malle ; et c'est à contrecoeur qu'il entreprit de la traîner jusqu'au guichet.
- J'enverrai quelqu'un la chercher dans la matinée, lui dis-je.
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Quand se furent éloignés les bruits de l'auberge et les lumières de la gare, je me retrouvai seul et fort minuscule sous l'immense étendue de ciel étoilé. Venu de Sydenham, dans la banlieue de Londres, où j'avais toujours vécu, j'avais rarement rencontré une telle solitude, un tel silence. Encore ne s'agissait-il pas vraiment de silence, car je percevais dans cette découverte des environs le bruit régulier de mon pas sur les pierres de la route. Une chouette hululait quelque part. Une créature invisible filait sur le bas-côté. Les herbes, en se touchant, laissaient échapper des soupirs. La large route s'accrochait à la colline comme un ventre gonflé d'une bête préhistorique lourdement endormie. Si puissante était la clarté de la lune qu'elle jetait à côté de moi un compagnon de route silencieux, de sorte que je n'étais pas tellement seul, en définitive, et que je tirais même un plaisir enfantin à la présence de cet autre moi dont le pas se réglait sur le mien. Je distinguais sans peine le tournant dessiné là-haut, et le taillis d'un noir d'encre qui marquait l'endroit où je devais bifurquer.
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Elle n'avait pas tort. Ma version du Vent d'Ouest n'avait pas grand chose à voir avec la sienne. En dépit d'une technique malhabile, elle avait su saisir quelque chose du style de Waring - la pureté de la ligne, sa simplicité, la vie qui en émanait. Mon Vent d'Ouest n'était qu'un aimable zéphyr féminin, un être inoffensif auquel manquait le tempérament de ses frères et soeurs.
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Je n'étais plus dans mon univers. J'étais déracinée. On m'avait arrachée brutalement à ma pleine campagne pour me transplanter en ces lieux où la mer ne cessait de ronger l'Angleterre. Qui étais-je ? M'eut-on posé cette simple question, j'aurais peut-être été incapable d'y répondre. Les syllabes de mon nom n'étaient plus que du vent - des bulles d'air qui ne signifiaient rien.
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Sa force me surprit. Et sa ténacité. Je dus la forcer à lâcher prise. Presque avec violence. Mais elle était comme un chien devant le terrier du renard – elle tenait bon.
– Vous l’avez vu ? demanda-t-elle.
– Si vous vouliez bien accepter de reculer et de me laisser…
Elle m’interrompit par des cris :
– Non ! Non ! Je ne peux pas arrêter de chercher tant qu’il rôde par ici…
– Qui ? demandai-je en regardant de nouveau autour de nous.
– Mais le Vent d’Ouest ! s’exclama la jeune fille avec impatience.
Levant les yeux, elle projeta partout des regards angoissés, comme si une présence allait subitement se manifester au-dessus de nos têtes.
– Je vous demande pardon…
– Le Vent d’Ouest ! Il faut le trouver… le capturer et le mettre à l’abri !
La pauvre devait avoir l’esprit dérangé, je m’en rendais compte à présent. Elle faisait une crise. Elle avait peut-être des hallucinations. Qui sait si elle ne s’était pas enfuie de quelque établissement de soins… Quelle autre raison pouvait pousser une jeune fille d’âge tendre à s’éloigner des habitations et à poursuivre seule, en pleine nuit, une quête aussi fantastique ?
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