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Philippe Delamare (Traducteur)
EAN : 9782259188944
323 pages
Plon (27/08/1999)
3.12/5   4 notes
Résumé :
Carl Gustav Jung fut le disciple, puis l'adversaire le plus célèbre de Freud. Sa théorie des mythes, des archétypes et de l'inconscient collectif a définitivement modelé la culture universelle. Dans ce livre, Richard Noll évoque les soixante premières années de sa vie et révèle un homme habité par l'occultisme, le mysticisme, le néo-paganisme et l'antisémitisme. Dans sa clinique de Zurich, avec ses adeptes qu'il analyse et subjugue, Jung va fonder une nouvelle relig... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Le moment le plus agréable, lorsque l'on admire quelqu'un au point de ne plus pouvoir voir le monde autrement qu'à travers son être, c'est lorsque l'idole se renverse enfin. Ce qui semblait si haut s'éparpille au sol et se mélange à la poussière. On peut repartir le coeur libre et l'esprit léger pour se trouver une nouvelle idole ou pour n'en plus jamais avoir, sinon soi-même si l'on y tient vraiment. C'est la démarche à laquelle nous invite Richard Noll avec ce bouquin.


Parlant de sa lecture de « Ma vie » de Jung, il écrit : « C'est un livre impressionnant, et je me rappelle combien il m'avait abasourdi lorsqu'à dix-sept ans je l'ai lu pour la première fois. » Mais beaucoup d'entre nous détestent être possédés. Par la suite, RNoll semble ne s'être plus livré qu'à « des années de lecture critique de Jung et de recherches historiques sur sa vie » dans le but de prouver, si jamais on en doutait, que son humanité le rendait en fait « effroyablement imparfait ». RNoll est un admirateur déçu et broyé par sa propre ambivalence, balançant entre le besoin de savoir que Jung n'était pas un dieu et le sentiment d'avoir été trahi par un « génie incontestable, dont le système des complexes et des types psychologiques avait apporté une contribution essentielle à la théorie et à la pratique de la psychothérapie ». Il écrit que « son humanité, et non sa semi-divinité, [le] rend beaucoup plus intéressant » même si tout ce qu'il écrira ensuite sera un appel à une circonspection critique qui devrait inéluctablement conduire à la désertion.


Je ne suis pas contre l'idée que l'on détruise mes idoles. Introduire un peu de circonspection dans la fascination permet d'éviter la calcification. Qui est perdant ? Ni l'idole, qui peut enfin souffler un coup, ni l'admirateur, qui ne se sent plus possédé par une idée qui n'aurait – il le ressentait de plus en plus – fait rien d'autre que perdre de plus en plus de sa réalité.


RNoll part de l'idée fantaisiste que Jung aurait nourri l'ambition de devenir un Christ aryen, malgré toutes les contradictions que cela peut impliquer. Sa fascination pour les spiritualités païennes allant de pair avec celle du personnage christique, RNoll avance que Jung aurait aimé être le messie christique d'une nouvelle religion païenne. Ce n'est pas tant la démesure de cette ambition que lui reproche RNoll que d'avoir embrouillé ses fidèles disciples en présentant d'abord ses idées sous des métaphores chrétiennes jusqu'à ce que, ayant acquis du pouvoir et de l'argent grâce à ses riches disciples américaines, il ait enfin décidé de révéler l'horizon völkisch de ses idées.


Bref : RNoll nous dit que Jung avait tout manigancé depuis le début et que tous ses livres, que toute sa pratique, que toutes ses conférences, n'auront servi qu'à un épuisant et interminable processus d'algèbre intentionnelle.


Certes, quelques aspects de la vie de Jung semblent manifester un certain goût pour le traficotage, mais qui ne profiterait pas des dons du ciel – si le ciel les lui présentait ? RNoll revient sur la cour de femmes riches et célibataires qui tournaient autour du maître et qui l'aidèrent à développer matériellement son activité par l'achat d'immeubles lui permettant de donner des conférences et de loger des séminaristes, et de pratiquer la psychologie analytique dans un cabinet aménagé à l'intérieur de ces bâtiments.


RNoll poursuit en accusant la polygamie de Jung et sa manière de s'approprier les idées des autres sans les citer. Il dénonce le biais de ses recherches et sa fascination pour l'idée d'un inconscient collectif qu'il aurait valorisée au détriment de sa pratique avec l'analysant.


« Ce génie incontestable, dont le système des complexes et des types psychologiques avait apporté une contribution essentielle à la théorie et à la pratique de la psychothérapie, semblait si convaincu de la réalité d'un inconscient collectif qu'il était prêt à mentir pour protéger ses conceptions. Pour lui c'était l'alpha et l'oméga, la source authentique de tout mystère et de toute explication. le passé d'un patient et ses problèmes personnels n'étaient, disait-il, que « jeux d'enfants », dont il se déchargeait sur ses assistants. Jung voulait seulement que sa croyance en l'inconscient collectif fût continuellement renforcée par les visions et les rêves de ses patients. »


Enfin, il l'accuse d'avoir fait le jeu des opinions nazies de l'époque en avivant la flamme aryenne. Même si RNoll reconnaît à demi-mot que Jung n'a jamais été intéressé par la politique, il lui reproche toutefois de n'avoir pas vu qu'il participait indirectement à la propagande du régime nazi. L'accusation est à l'homme anachronique toujours aisée. Et parce qu'on retrouve à présent les idées de Jung « non seulement dans le national-socialisme et la philosophie fasciste en général, souligne le sociologue Heinz Gess, mais aussi dans l'occultisme moderne et dans la pensée New Age », RNoll nous assure que la lecture de Jung n'est rien d'autre que dispensable. Voilà un appel au bûcher bien regrettable. S'il est certes drôle de voir choir l'idole, il l'est encore davantage de s'emparer des morceaux brisés au sol pour les rassembler et voir renaître ce qu'on avait tant aimé.
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Après The Jung Cult paru aux Etats Unis en 1994 ce deuxième ouvrage de R. Noll (Université de Harvard) apporte un ensemble considérable d'informations mettant en évidence de façon définitive et rigoureuse l'imposture globale de la psychologie jungienne.

Les lecteurs de Guénon se souviendront que dans « Tradition et “inconscient” » celui-ci avait gravement mis en cause, dès 1949, la formation d'une « fausse spiritualité » à partir de la psychanalyse élaborée par Freud ; perspective que nous avons nous-mêmes prolongée dans la première partie de notre thèse ( Hermès trahi , Dervy, 1996). Or l'étude très documenté de R. Noll montre comment Jung, nettement hostile aux Religions du Livre, chercha effectivement à faire de la psychologie des profondeurs une nouvelle voie “initiatique” dont les prétentions “rédemptrices ” ressortent ici parfaitement. On découvre aussi, grâce à ce travail, que Jung croyait en la réincarnation, au spiritisme, qu'il fut influencé par le nietzschéen et freudien Otto Gross en tant que propagateur du « communisme sexuel » (p.88), que, partisan de l'évolutionnisme (p.113), Jung adhérait au mouvement völkisch néo-païen, raciste et antisémite ! Mais le plus incroyable concerne probablement l'auto-initiation ou déification de Jung lui-même (p.132) qui vers 1913 prétend s'identifier au dieu à tète de lion des mystère de Mithra ! L'assimilation fallacieuse de l'analyse à une « renaissance » ( Wiedergeburt ) devient de ce fait beaucoup plus clair (p.185)...

Véritable récupération psychique des réalités transcendantes, la théorie de l'inconscient collectif apparaît donc bien comme une redoutable parodie moderne de l'antique Tradition primordiale, ce qui expliquerait sans doute l'aversion courante des jungiens envers Guénon.

Espérons que cette étude accablante leur permettra d'ouvrir les yeux sur la nature exacte de cette désastreuse archétypologie, derrière laquelle se cachait l'ombre, faut-il s'en étonner, de la Société théosophique (p.280)...

Patrick GEAY

Lien : http://ladivinemorsureducina..
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Citations et extraits (13) Voir plus Ajouter une citation
[…] Otto Gross était l’un des hommes les plus dangereux de sa génération, une menace pour la société bourgeoise et chrétienne de l’Europe allemande. Non qu’il fût violent, bien au contraire. Mais il avait un inquiétant talent pour pousser les autres à agir gratuitement, à suivre leurs pulsions instinctives. Grand briseur de liens, émancipateur-né, adulé par une multitude de femmes qu’il avait rendues folles - fût-ce brièvement -, Gross entraîna l’une de ses amantes/patientes à se suicider, tandis qu’une autre de ses consultantes mourait un peu plus tard dans des circonstances semblables. Ses contemporains le disaient brillant, créatif, charismatique et détraqué. Ce médecin nietzschéen, psychanalyste freudien, anarchiste, grand prêtre de la libération sexuelle, organisateur d’orgies, ennemi juré du patriarcat, morphinomane et cocaïnomane forcené, était adoré et haï avec une égale passion : foyer de corruption pour les uns, agent de guérison pour les autres.
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Par « complexe » Jung entendait un ensemble d’images, d’affects et d’idées organisé autour d’un centre thématique qui, dans certaines circonstances, pouvait avoir un fragment de conscience personnelle et agir comme une personnalité distincte, par exemple dans les cas de personnalité multiple. Les complexes n’avaient alors rien de transcendant, d’héréditaire ou de surnaturel : ils exprimaient simplement les expériences personnelles d’un individu, les associations verbales illustrant quantitativement les phénomènes des complexes dans le fonctionnement de la mémoire humaine.
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Jung engagea ses assistants à recueillir des matériaux mythologiques auprès de leurs patients psychotiques, comme si chaque hallucination était une nouvelle espèce de flore ou de faune exotique à analyser et cataloguer. Avant que Jung ne leur eût confié ces recherches, il est probable que ces jeunes médecins ne disposaient d’aucune formation mythologique ou archéologique sérieuse. Aussi, armés de leur nouveau savoir, trouvèrent-ils exactement ce que Jung leur avait demandé de chercher : des dieux païens antiques dans l’inconscient de leurs patients.
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Que conclure de la période spirite de la vie de Carl Jung ? […]
Jung prit ces expériences spirites tellement au sérieux que les idées qu’il en retira conservèrent leur emprise sur lui plus longtemps que la plupart des notions apprises à la faculté de médecine. Il était sans aucun doute convaincu de recevoir, au travers des transes médiumniques de sa cousine, le savoir d’une source intelligente par-delà Helly elle-même. […] Si Jung finit par conclure qu’elles avaient sans doute souvent été les produits cryptomnésiques de Helly elle-même, son approche très personnelle des personnages fantasmatiques […] de Helly caractérisa ensuite sa conception de l’inconscient humain.
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Lorsque Jung eut succombé aux tentations de Gross, il envisagea très différemment la place de la sexualité et de la religion dans l’existence. Parce qu’ils dénigraient le corps et l’activité sexuelle – en dehors du mariage -, les dogmes du christianisme lui apparurent les ennemis jurés de la vie. Il était impératif de réconcilier la sexualité et la spiritualité. En 1912, Jung trouva un autre modèle – la spiritualité de l’antiquité païenne – qui considérait le sexe comme sacré. […]
Jung doit aussi à Otto Gross les concepts d’extraversion et d’introversion, notions fondamentales de la théorie des « types psychologiques » qu’il commença à élaborer en 1913 après sa rupture avec Freud […].
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