Ah Norge, c'est tout un pan de mon enfance.
Au même titre que
Prévert ou
Maurice Carême, et sans doute davantage Carême et Norge comme auteurs belges. Je me souviendrai toujours de ma professeur à l'école primaire qui déclamait 'Ennemis' de Norge et j'adorais la lente montée paroxystique vers la violence, qu'elle utilisait comme appel à la tolérance. Ou encore Poltron, ou encore...
Enfin lisez, Norge, c'est truculent, c'est goulu. Ce n'est pas du tout collet monté, il n'a pas toutes les bonnes manières, c'est du terroir, du pur terroir de chez nous.
J'ai adoré enfant, j'ai adoré assez pour le représenter à douze ans comme le Poète que j'aimais à l'école des grands et j'aime toujours le relire aujourd'hui. C'est dire.
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Que savez-vous sur les oignons ? Lisez
Norge. Voici ce qu'il nous dit sur le sujet.
Si les oignons font pleurer, c'est à cause du respect humain. Dans l'ancien temps, les oignons faisaient rire et chacun les respirait afin de trouver la gaîté. Un sage blâma ce rire dénué de fondement et les oignons en furent humiliés. Ils comprirent que les larmes seules sont tolérables sans motif.
Et sur la fraise des bois, les pélicans, l'âge du capitaine ? Tout cela est expliqué par
Norge, dans des petites histoires merveilleuses, à la fois contes philosophiques, boutades et poèmes. le monde entier s'y promène, telle, par beau temps le long des haies, la fable chère à
André Hardellet.
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Il est difficile de ne pas être emporté par la vitalité des poèmes de Géo
Norge (Georges Mogin, né à Bruxelles le 2 juin 1898 et décédé à Mougins le 25 octobre 1990), à la longévité et à la créativité remarquables puisqu'en 1988 paraissait
le Stupéfait dont on trouve des pièces de choix à la fin de l'anthologie réalisée et préfacée par
Lorand Gaspar pour la collection
Poésie Gallimard. Difficile aussi d'en extraire des poèmes dans le florilège exposé tant les formes et l'inspiration diffèrent tout en se complétant. Prose, poèmes rimés, vers brefs, aphorismes parlent des choses et des hommes avec humeur et humour.
Norge s'ancre dans la réalité pour mieux approcher le mouvement cosmique qui l'anime, ainsi du poème intitulé « Elsa la mouche » inclus dans le recueil
Les quatre vérités : « Son chant soyeux, ses ailes de mica/Ne vibrent plus parmi les choses rondes/Et songez-y, comètes et polkas,/Tout comme vous, Elsa tournait au monde. » La métaphysique a partie liée avec le réel.
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Logie teinpure ticrée
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LES QUATRE VÉRITÉS
Insectes et mouches
FOURMI
Une fourmi
Fait un trajet
De cette branche
À cette pierre,
Une fourmi,
Taille ordinaire
Sans aucun si-
Gne distinctif,
Ce matin, juin,
Je crois le sept ;
Elle porte un
Brin, un fétu.
Cette fourmi,
Taille ordinaire,
Qui n’a pas la
Moindre importance
Passe d’un trot
Simple et normal.
Il va pleuvoir,
Cela se sent.
Et je suis seul ;
Moi, seul au monde
Ai vu passer
Cette fourmi.
Au temps des Grecs
Et des Romains,
D’autres fourmis
Couraient ainsi
Dont rien jamais
Ne parle plus.
Cette fourmi,
Taille ordinaire
Sans aucun si-
Gne distinctif,
Qui serait-elle,
Comment va-t-elle ?
Et toi et moi,
Qui sommes-nous,
Et comment tour-
Nent les planètes
Qui n’ont pas la
Moindre importance ?
Que fait l’histoire
Au fond des cœurs
Et comment battent
Ces cœurs d’hommes
Qui n’ont pas la
Moindre importance ?
Que font les four-
Mis de l’esprit
Ce matin, juin,
Je crois le sept,
Sans aucun si-
Gne distinctif.
Il va pleuvoir,
Cela se sent ;
Cela fera
Du bien aux champs.
― Et ta fourmi,
Taille ordinaire,
Qu’en as-tu fait ?
Que devient-elle,
Crois-tu qu’elle é-
Tait amoureuse,
Crois-tu qu’elle a-
Vait faim ou soif,
Crois-tu qu’elle é-
Tait vieille ou jeune
Ou triste ou gaie,
Intelligente
Ou bien quelconque ?
Pourquoi, pourquoi,
Pourquoi, pourquoi
Ça n’a-t-il pas
Plus d’importance ?
p.147-148-149
DU TEMPS
Dans l'eau du temps qui coule à petit bruit,
Dans l'air du temps qui souffle à petit vent,
Dans l'eau du temps qui parle à petits mots
Et sourdement touche l'herbe et le sable ;
Dans l'eau du temps qui traverse les marbres,
Usant au front le rêve des statues,
Dans l'eau du temps qui muse au lourd jardin,
Le vent du temps qui fuse au lourd feuillage
Dans l'air du temps qui ruse aux quatre vents,
Et qui jamais ne pose son envol,
Dans l'air du temps qui pousse un hurlement
Puis va baiser les flores de la vague,
Dans l'eau du temps qui retourne à la mer,
Dans l'air du temps qui n'a point de maison,
Dans l'eau, dans l'air, dans la changeante humeur
Du temps, du temps sans heure et sans visage,
J'aurai vécu à profonde saveur,
Cherchant un peu de terre sous mes pieds,
J'aurai vécu à profondes gorgées,
Buvant le temps, buvant tout l'air du temps
Et tout le vin qui coule dans le temps.
(extrait de "Cris...") - p.189
LES QUATRE VÉRITÉS
D’enfance
D’ENFANCE
Dieu, qu’elle était belle
Nue à la chandelle,
Ma sœur !
Elle attendait son
Aimable garçon-
Brasseur.
Dieu, qu’elle était nue,
Rosement charnue,
Adèle,
Au moment hélas
Qu’elle soufflait la
Chandelle.
Ténèbres bien faites
Pour ces longues fêtes
Et pour
Ces luttes, ces rages,
Ces fleuves, ces nages,
D’amour !
Je n’ai su jamais
Comment ils s’aimaient,
Ô drames !
La vie et la mort
Faisaient un seul corps
En flammes.
Jamais plus au monde
Je n’écoute rien,
Rien comme
Ces cris de ma blonde
Sœur et du vaurien,
Son homme.
Derrière la porte,
Le ciel commençait,
Torride !
Mon âme, sois forte,
Tout, sauf l’amour, c’est
Le vide.
p.146-147
DU TEMPS
Dans l'eau du temps qui coule à petit bruit,
Dans l'air du temps qui souffle à petit vent,
Dans l'eau du temps qui parle à petits mots
Et sourdement touche l'herbe et le sable ;
Dans l'eau du temps qui traverse les marbres,
Usant au front le rêve des statues,
Dans l'eau du temps qui muse au lourd jardin,
Le vent du temps qui fuse au lourd feuillage
Dans l'air du temps qui ruse aux quatre vents,
Et qui jamais ne pose son envol,
Dans l'air du temps qui pousse un hurlement
Puis va baiser les flores de la vague,
Dans l'eau du temps qui retourne à la mer,
Dans l'air du temps qui n'a point de maison,
Dans l'eau, dans l'air, dans la changeante humeur
Du temps, du temps sans heure et sans visage,
J'aurai vécu à profonde saveur,
Cherchant un peu de terre sous mes pieds,
J'aurai vécu à profondes gorgées,
Buvant le temps, buvant tout l'air du temps
Et tout le vin qui coule dans le temps.
p.189
LA MER
Il est difficile de peindre la mer, mais il est simple de peindre des vagues. Toutes les couleurs conviennent, elles sont toujours justes, car il existe des vagues de toutes les couleurs. Voilà pourquoi l'artiste dessine beaucoup de vagues, puis il étend des jaunes, des bleus, des verts, des gris, des bruns même. Enfin, il peint le sentiment. C'est le plus important pour la mer.
Jeanne Moreau - Chanson à Tuer
Plante ce couteau, minette
Mais droit au coeur s'il te plaît
La besogne à moitié faite
Et les meurtres incomplets
Font horreur à l'âme honnête
Qui n'aspire qu'au parfait
Qui n'aspire qu'au parfait
Parfait, parfait, parfait
Les couteaux à cran d'arrêt
N'ont cure des pâquerettes
L'homme dort comme un boulet
Plante ce couteau, minette
La nuit saoule de planètes
Ne se souviendra jamais
Ne se souviendra jamais
Jamais, jamais, jamais
Droit au coeur, au coeur discret
Qui dans son profond palais
Sait mourir sans chansonnette
Plante ce couteau, minette
La nuit saoule de planètes
Ne se souviendra jamais
Ne se souviendra jamais
Jamais, jamais, jamais
Ne se souviendra jamais
Paroles: Norge
Musique: Michel Philippe-Gérard
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