Nuits appalaches

Les collines des Appalaches, hostiles sauf pour ceux qui y sont nés. Et qui y mourront. On démarre ce court roman rythmé avec un traumatisme de guerre et un inceste. On poursuit avec des malformations infantiles qui n'ont rien à envier à Délivrance, et avec elles la condescendance des services sociaux. Puis avec quelques bornes dans un pick-up de contrebandier et une chicane par la taule. Enfin, forcément, on termine dans le jaillissement des douilles. Malgré le décor majestueux, chez Chris Offutt, la bouteille est frelatée et râpe la gorge comme un couteau de chasse. Ce fin fond de Kentucky est un exemple canonique du "réalisme sale" américain, noir si noir, où rien jamais n'allège le drame social.

Chris Offut a écrit un roman intense, noir qui se déroule aux confins du Kentucky aux Etats-Unis de 1954 à 1971. Là où il a grandi dans une commune isolée de deux cent habitants.
Dès le premier chapitre on sent la véracité de ses personnages, au travers des dialogues de qualité au ton juste, des descriptions de la nature, de la forêt si présente comme un abri calme et rassurant et des Appalaches.
Avec le personnage complexe de Tucker l'auteur met en scène la violence et la dureté d'un homme prêt à tout pour rester loyal envers sa famille sans oublier de montrer ses faiblesses, celles qui peuvent le rendre vulnérable. le lecteur entre dans son intimité et çà marche! Il est touché en plein coeur! Tout paraît si réaliste et si terrible en même temps dans ce roman que je pourrais qualifier de "social" décrivant les gens oubliés du pays, de la guerre de Corée.
Au détour des lignes j'ai pensé plusieurs fois à l'écriture d'un John Steinbeck si fluide, directe, intense qui immortalisait les opprimés de son pays et dénonçait la misère des hommes. Alors même après avoir tourné la dernière page originale, celle de l'épilogue on pense encore à tous les personnages de Nuits Appalaches. Un grand roman inoubliable.

De retour de la guerre de Corée, Tucker, un jeune vétéran de 18 ans, rentre chez lui en espérant apaiser la violence de ses souvenirs. Il croise Rhonda, une adolescente de 15 ans, qu'il sauve des griffes de son oncle. Les deux jeunes gens tombent amoureux et finissent par fonder une famille malgré leur précarité. Mais leur avenir et celui de leurs enfants finissent par être remis en question.
Pas besoin de 500 pages pour raconter une belle histoire. Quand on sait écrire, les mots parlent d'eux mêmes !
Je ne saurais que trop vous conseiller ce livre qui parle de la vraie vie dans cette Amérique profonde au coeur des villages perdus et qui, j'en suis sûre, vous laissera un souvenir intense.
Lien : https://collectifpolar.com/

1954-1971
Chris Offutt nous offre 17 années de la vie de Tucker et Rhonda son épouse.
De leur union naîtront des enfants, des déboires, de l'amour, des malheurs, mais surtout un respect pour la fragilité, un engagement auprès des siens.
Une vie chiche au coeur de la ruralité américaine où à la peine, l'impuissance face à l' État s'adjoignent des arrangements et trafics divers.
Des êtres simples et rugueux pour lesquels le respect de l'engagement ne saurait supporter la trahison.
L'auteur dresse le portrait de personnages simples, doux, fragiles, manipulateurs, dangereux, bons, à la personnalité parfois complexe mais sachant toucher mon coeur.
J'ai refermé ce livre émue par ces trajectoires de vies.

Ces collines du Kentucky semblent offrir peu de perspectives. Pour les garçons c'est souvent l'armée ou bien la contrebande et la case prison. On y croise des jeunes femmes, à peine trentenaires, et déjà mères de 5 ou 6 enfants. Les services sociaux et le shérif adjoint sont là mais ne sont pas très recommandables...
Pour autant il y a du beau dans ce polar. Les Appalaches bien sûr, au coeur du roman. le rapport à la nature de façon generale. le lien familial très fort, la filiation, l'amour.
Un court roman très réussi qui parvient à rendre très attachants ces personnages déshérités.

Jusqu'où peut-on aller pour défendre son honneur, protéger ce qu'on a de plus cher et obtenir ce qui nous revient de bon droit ? Dans le Kentucky des années 50, cette question est sensible, et se règle d'abord entre hommes, et de préférence avec des armes à feu. Mais il ne faudrait pas réduire ce magnifique roman de Chris Offutt à un simple règlement de compte entre personnalités à l'honneur chatouilleux. Il y est surtout question d'amour, d'hommes et de femmes droits dans leurs bottes, dont les actions, même quand elles sont condamnables en elles-mêmes, sont toujours justifiées par une raison supérieure.

Un roman resserré sur un coin perdu du Kentucky, et une famille qui se construit tant bien que mal autour de Tucker, que l'on va suivre sur plusieurs décennies dans cette nature qu'il connaît sur le bout des doigts (et des autres sens!) et qu'il donne à partager : ainsi, dès la première page, une sauterelle verte est joliment mise en scène.
On cueille Tucker à son retour de Corée. le tout jeune vétéran rentre dans son Kentucky natal, juste heureux de retrouver "la terre qui lui avait tant manqué".
Ses premières rencontres, avec un conducteur qui l'avait pris en stop, puis avec l'oncle de sa future femme, montrent que malgré sa jeunesse et sa petite taille, son caractère ne le porte pas à parler pour ne rien dire et qu'il a appris à se battre!
En revanche, avec les femmes, il a tout à apprendre ; sa rencontre avec Rhonda le fait chavirer, et il sait immédiatement que c'est LA femme de sa vie.
Nous allons retrouver Tucker, Rhonda...et les enfants une décennie plus tard. Après l'éblouissement de la rencontre vient un quotidien difficile, auquel l'amour résiste.
La visite des services sociaux, en l'absence de Tucker, va le précipiter dans un engrenage que l'auteur va dérouler sur plusieurs années.
Les notations sur la flore et la faune, particulièrement les oiseaux, tiennent une place particulière dans le récit, comme un contrepoint de beauté gratuite face à un quotidien difficile, et quelquefois violent.

Roman fidèle à l'éditeur. Américain, de belles descriptions de la nature mais aussi de l'homme qui doit, pour survivre, la comprendre, l'observer et surtout la respecter.

Le personnage de Tucker est très attachant, loyal, respectueux de la famille et de la femme, bon père, ayant beaucoup de connaissances, humain car il travaille dans la facilité et donc pas très légal.

RHonda est très mystérieuse. Amoureuse éperdument de tucker, prends soin de ses enfants mais quand Tecker disparaît, elle s'étiole, devient folle, essaye de garder le Cap mais a vraiment difficile. J'ai été émue par ces petits délaissements. Peut-être montre elle à son homme qu'elle l'attend et qu'elle a besoin de lui. Quelle preuve d'amour.

J'aime la relation Jimmy- Tecker. L'anti héro qui donne toute la valeur à Tecker. Vraiment très chouette livre. Écriture poétique brassant également des problèmes de société et de précarité.

Voici un court roman noir que j'ai trouvé magistral. Oui, rien que ça. Prix Mystère de la critique 2020, Grand Prix du Roman Noir Étranger du festival de Beaune…
Une écriture efficace pour décrire un univers violent, âpre et sauvage de la vie d'une famille sur près de vingt ans en cinq dates clefs. Une famille qui s'aime, mais dont l'existence est bousculée par la malchance et l'injustice.

Décidément, j'aime beaucoup ce que publient les éditions Gallmester, comme "Absolute Darling" ou "Sukkwan Island", pour n'en citer que deux., ce genre de romans ruraux sur l'Amérique des grands espaces, des bagarres et des amitéis viriles. On sent, par l'écriture très visuelle, que l'auteur a travaillé pour le cinéma (scénariste de plusieurs séries télévisées parmi lesquelles True Blood et Weeds). On reste toujours sous tension en le lisant. On pressent qu'avec lui on va passer un mauvais quart d'heure ou un moment enchanteresque. Tout est possible, tout peut arriver, le meilleur comme le pire. Ici, pas de gentils, pas de méchants, mais des gens de condition modeste qui possèdent leur part d'ombre et de lumière comme tout un chacun dans la vraie vie pour parvenir à s'en sortir. Pas de morale qui tienne ! Chris Offutt sait trouver les mots, la réplique pour donner du nerf à ses personnages, pour leur donner la vie.
Vous l'aurez compris, l'auteur ne trempe pas sa plume dans de l'eau de rose. Bien que les sentiments soient là, aussi, la tendresse, une bouffée de poésie, on reprend haleine, prêt à remonter dans le pick up cabossé de Tucker et à l'accompagner là où il voudra nous emmener...
Haletant, vivant, poussiéreux, dur et émouvant.

"Tout le monde est au milieu, le plus souvent. Les gens savent pas à quel point ils ont de la chance jusqu'au moment où il en ont plus."
Tucker est de retour de la guerre de Corée. Il a dix-huit ans, et il rentre chez lui dans le Kentucky. Alors qu'il fait du stop, il sauve de peu Rhonda que son oncle allait violer. C'est le coup de foudre.
Le couple vit dans une précarité à la fois financière et sociale. Quatre des cinq enfants sont handicapés. Tucker est un père et un époux aimant et dévoué. A tel point que le jour où les services sociaux les menacent de leur retirer leurs enfants, il dérape….
Pour faire vivre sa famille, il n'est pas regardant sur la morale : il travaille pour un trafiquant d'alcool….
Ce roman est une histoire à suspense qui court de 1954 à 1971, et qui oscille entre la misère crasse des malchanceux et le mince chemin vers une incertaine rédemption.
Nuits Appalaches, nous parvient une vingtaine d'années après le bon frère qui m'avait fait forte impression et 2 recueils de nouvelles récemment retraduites. Chris Offut se fait donc rare chez les libraires. Il va à l'essentiel, à l'économie. Son écriture est à la fois brute et belle, sans fioritures, noire et désespérée ; à l'image ce coin des Appalaches en marge de tout.

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