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EAN : 9791091555395
592 pages
Atelier des Cahiers (11/12/2017)
3.75/5   4 notes
Résumé :
Le roman De morte paru en 1975 fait partie de ces oeuvres-monuments qui jalonnent et grandissent les littératures nationales par les portes qu’elles ouvrent avec plus ou moins de violence et de radicalisme stylistique et idéologique à l’image du Voyage au bout de la nuit de Céline en France, du Finnegan’s Wake de Joyce en Irlande, ou de l’Infinite Jest de David Foster Wallace aux États-Unis. Situé dans un no-man’s-land où vivent en parfaite réclusion d’étranges moin... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Le narrateur est un personnage étrange, un pseudo-moine vagabond, qui raconte son arrivée à Yuri, un no man's land désert où vivent reclus quelques vieux moines et des maîtresses-nonnes. Arrivé à Yuri, le narrateur se dénude, explore ce désert dans lequel il va vivre quarante jours alors qu'il est âgé de trente-trois ans. Pendant ce séjour, il évoque le passage du bardo, la réincarnation.
Une lecture étrange où langages grossiers, poésie, sexualité débridée, crimes, côtoient la religion dont le narrateur évoque des passages bibliques et bouddhistes. Pour l'écriture de de morte, Park Sang-Ryung s'est inspiré du séjour de quarante jours dans les limbes décrit dans le Livre tibétain des morts dont des passages sont cités.
Lors d'un sermon devant une assemblée importante, le narrateur, notre pseudo-moine vagabond, commente des passages de la Bible en parallèle avec le bouddhisme ésotérique, le livre des Nombres, le Livre tibétain des morts, le livre de l'Apocalypse ... Cette partie nécessite une relecture à l'humble lectrice que je suis.
Une lecture pas facile qui ne laisse pas indifférent, enrichissante et qui invite le lecteur à se poser pas mal de questions.
Kim Simon, traducteur, enseignant et chercheur à l'université Korea à Séoul, a travaillé plus de dix ans sur la traduction de de morte.
En ce qui concerne l'objet-livre je trouve la couverture très belle et le papier est d'excellente qualité.
Le bandeau Un polar métaphysique en terre de Bouddha prête à confusion : le sujet principal étant la métaphysique, les crimes évoqués ne donnant pas lieu à enquêtes, les lecteurs de polars n'y trouveront pas leur bonheur. Avis personnel.
Je remercie les éditions L'Atelier des Cahiers pour ce magnifique ouvrage et Babelio pour l'organisation de cette Masse critique.
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Ce que j'aime avant tout dans les masses critiques organisées par Babelio (que je remercie au passage ainsi que tous les éditeurs qui y participent) c'est la part de rêve au moment du choix et plus encore l'opportunité de découvrir de nouveaux coins dans son propre jardin secret intérieur, petits endroits magiques qui seraient autrement restés inexplorés. Aussi en janvier avais-je coché trois livres d'auteurs coréens, non pas à cause des jeux olympiques mais plutôt par le souvenir très poétique de L'impossible conte de fées si bien écrit par Yu-joo Han. Un trouble rare demandant une attention soutenue et l'acceptation de se laisser emporter vers l'inconnu. Pub : https://www.babelio.com/livres/Han-Un-impossible-conte-de-fees/935741
Enfin la Corée une évidence suite au contexte géopolitique non pour juger, non pour comprendre, pour ... approcher.

De morte : je ne l'ai pas compris, je n'en ai pas les bases mais je l'ai approché, oui, un peu, oui. La traversée fut longue, quarante jours dans le désert, oui, exigeante, oui, déroutante, oui. J't jure quand t'as rie put'accrocher, pas d'Tao, pas d'Bouddha, pas d'maîtresse-nonne pou't défouler. Putain te commence à t'figurer enfin que 69 est le symbole du Yin et du Yang : découverte !!! Enfin, respirer... l'écriture est dérangeante par moments, par d'autres éblouissante. Je ne connais rien au Bouddhisme et donc je vois des symboles passer, des références : elles sont belles, je ne les comprends pas. (Une pensée pour mon ami Bernacho que je ne croise plus ici, lui peut-être ? C'est-il métamorphosé ?) Elles sont riches, elles me soufflent de ces choses métaphysiques, oui, je les ressens. je les ressens...

"Les étoiles semblaient bien plus profondes que le plein jour comme si cela dépendait de leur sagesse, et elles scintillaient à intervalles réguliers dans le ciel bien sombre. Toutefois, quand bien même les rayons du soleil seraient ne serait-ce qu'un peu similaires, ces myriades d'éclats de sagesse perdraient forme telle des âmes en partance pour l'au-delà, et tout bien considéré le soleil expulse tout pour prendre possession du ciel, et ce n'est pas pour apporter la paix qu'il se lève, mais pour apporter l'épée. Le soleil, par conséquent, n'est probablement pas une métaphore appropriée pour la sagesse." p.437

Je me rapproche, je me rapproche...
"D'un côté on s'efforce par tous les moyens d'incarner une ""force magique invisible", et de l'autre, on entend nier jusqu'à l'existence même de cette racine après l'avoir démolie par tous les moyens. D'un côté on cherche la plénitude, et de l'autre on veut parvenir au vide. Cela semble difficile à comprendre. Mais si l'on regarde le soleil, il vide le ciel en le remplissant, et en évidant le ciel, il le remplit à ras bord." p.440

Park Sang-Ryung et son traducteur Simon Kim en collaboration avec Choi Yun-ju font preuve d'un remarquable travail stylistique. Un travail sur la langue au point que le héros, moine errant en pénitence à la foi criminel et son propre policier, finira par se la couper. J'ai beaucoup aimé l'ironie utilisée à bon escient, les métaphores que j'adore. Mais bien d'autres procédés donnent une ambiance toute à fait particulière à ce long roman où je me suis souvent perdu dans les brumes et la bruine de Yuri. Pour finir dans la canopée écoutant un autre chant du corbeau d'Egar Allan Poe que Nevermore.

Alors voici ce que j'y ai pêché dans cette steppe immense :
"Là-dessus, je commençai enfin à savoir que telle était la vie. Un poisson nageant dans l'océan de la mort." p.179
Métaphysique, oui ?
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Un vieux moine de 92 ans chemine comme un mendiant sur les routes de Corée. On « sentait dans ses paroles quelque chose d'un mari cocu...à l'image de Cheoyong », ce personnage qui, découvrant sa femme en train de le tromper dit qu'il voit bien « quatre jambes, deux appartenaient à (son) épouse (mais) à qui étaient les deux autres ?» La légende de Cheoyong parcourt le roman.

Le jeune bonze, personnage central, vrai-faux moine errant, qui a fait la rencontre du vieux moine « marchait en comptant (ses) pas comme on égrène un chapelet » : force méditative de la marche.

Le vieux moine « crache des glaires sanguinolentes » tout en s'adressant au jeune moine, le narrateur. Il lui recommande de gagner le village de Yuri, dans une région humide « où même les branches ont des douleurs aux articulations ».
On croit voir et déchiffrer des peintures chinoises où sont présents la montagne enveloppée d'écharpes de brume, « à la cheville », ou bien « au genou » ou « à la taille », (on se rappelle que la brume, dans les peintures asiatiques, concrétise l'union du Ciel et de la Terre) ; puis une voiture à boeuf sur un chemin, l'animal qui peine, les pics qui se succèdent, un vieillard qui chemine.

Une autre histoire fabuleuse anime le récit, celle de Shimcheong (P.12), la jeune fille qui s'est vendue puis jetée à la mer dans le royaume du dieu des océans pour faire recouvrer la vue à son père (culte des ancêtres, respect des parents).

Le chemin illustre l' « anneau et la ficelle, la chaîne des réincarnations, qu'est-ce que c'est douloureux ! » (P15)

Le vieillard meurt, le visage sous son chapeau de paille semblait avoir avalé la terre. le bonze se reconnaît dans ce visage : « quoi qu'il en soit, j'étais déjà mort de vieillesse. »

Le maître du jeune bonze, autre vieillard, l'exhorte à se séparer de lui car « il faut vivre par soi-même ».

Voici quelques éléments de ce très foisonnant roman, qui mêle l'épopée, la marche méditative, l'érotisme, la crudité du langage, les réflexions entremêlées sur le bouddhisme, la Bible, le Tao, le Livre tibétain de la mort, les légendes coréennes.

Une lecture exigeante, intéressante, poétique qui privilégie la métaphysique par rapport au roman policier (le bandeau induit en erreur). Mais dont on se fatigue aussi à la fois à cause de la surabondance de connotations sexuelles ou scatologiques ; et enfin en raison d'une traduction constellée de fautes (imparfaits du subjonctifs prétentieux mais ratés, accords du participe passé etc.) quoique elle ait nécessité dix ans de travail, ce qu'on respecte.

Om Mani Padme Hum : formule sanskrite du bouddhisme tibétain ; exhorte à l'aspiration à la libération pour soi-même et pour tous les êtres vivants. Mantra des six syllabes, le préféré du grand bodhisattva de la compassion. Om : joyau dans le lotus
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Citations et extraits (19) Voir plus Ajouter une citation
Et tel le poids de la mer se faisait soudain sentir le poids de la lumière, et la pensée me venait que j'étais bien semblable à un poisson mort. Il y avait toujours quantité de ces poissons qui, tout en étant morts calés au fond de l'eau, regardent le ciel avec des yeux abrutis comme s'ils étaient fermés. Ceux qui n'étaient pas morts depuis longtemps continuaient longtemps, longtemps de flotter emportés par le courant le ventre tourné vers le ciel. Là-dessus, perdant leurs écailles et poussés jusqu'au rivage, ils sont rejetés sur les bancs de sable avant d'y être enterrés. Les rayons du soleil leur donnent froid et ils scintillent pataudement ; c'est qu'ils sont en train de pourrir du fait de l'humidité des bancs de sable. Mais alors revient la marée, qui commence à tremper les bancs de sable, et si elle les recouvre, les poissons morts se remettent à flotter. Alors, leur flanc brûlé par le soleil, ils reposent sur le côté. Et à supposer qu'aucun oiseau marin ni aucun vairon ne s'attaque à ce corps, pendant que se répètent ce flottage et ce naufrage, le corps de ce poisson bourgeonne comme de la ouate et arrivé à ce stade le corps trempé s'alourdit et vient se déposer au fond de l'eau. De la sorte s'achève la mort par noyade. À présent je me sens seul.
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Il y a quatre sortes de naissances : la naissance par l'œuf, la naissance par la matrice ; la naissance miraculeuse ; la naissance par la chaleur et l'humidité. Parmi ces quatre, la naissance par l'œuf et par la matrice sont semblables.
Ainsi il a été dit, tu verras un homme et une femme s'unir. À ce moment, à cause de ton attirance et de ton aversion, tu entreras dans la matrice et deviendras cheval, oiseau, chien ou être humain ou quelque chose de semblable (178-156).

[NdA] Les pages entre parenthèses ... renvoient aux pages du Tibetan Book of the Dead dont sont tirés ces paragraphes. [NdT] Pour notre traduction, nous nous sommes également appuyés sur la version française du Bardo Thödol, Le Livre tibétain des morts, par Valdo Secretan, Éditions Dervy, 1991. Le second numéro de page correspond à cette édition française.
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— Mais comment s'est-il fait que ce « fils » se soit retrouvé tout d'un coup en face du déshonneur ? Selon certains sages, ce jour-là de fait, le tout premier homme et la toute première femme voulurent jeter un coup d'œil pour voir quel passé possédaient en fin de compte cet arbre et ce crâne à l'air sournois qu'ils avaient et qu'ils n'avaient pas, et après s'être adonnés à toutes sortes d'actes indécents, leurs yeux se sont soudainement ouverts, et aussitôt la conscience de ce que l'un avait en moins et de ce que l'autre avait en plus a dû provoquer ce sentiment de honte ; voilà jusqu'où sont parvenues leurs conjonctures, mais quoi qu'il en soit, la plus ancienne rumeur selon laquelle seul l'animal qui marche debout cache ses parties génitales s'entend ainsi.
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De toutes les manières, il me semblait avoir compris la raison pour laquelle ce doyen souhaitait entendre le sermon d'un moine errant pareil à un orphelin, n'appartenant à aucune secte ni à aucun ordre particulier. Ceci étant, il me semblait que ce qu'il fallait sauver avant tout, ce n'était pas les êtres humains qui ne peuvent vivre ni avec, ni sans les religions, mais les dieux eux-mêmes, car ceux-ci, sans nulle part où poser les pieds, chantent le chant de leur solitude affamée et errent d'un pas chancelant autour des communautés des hommes.
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Et puis la mort doit aussi tenir dans le fait que notre corps se retrouve allongé et sombre dans un profond sommeil dont on ne s'éveille jamais, que nous tombons comme des feuilles à l'automne, cela oui. Notre esprit a beau quitter le corps, il lui faut errer jusqu'à ce qu'il puisse s'infiltrer quelque part ailleurs, c'est encore une fois comme les feuilles mortes de l'automne, oui, cela, oui.
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