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EAN : 9791031204314
187 pages
Editions Ateliers Henry Dougier (28/05/2020)
3.95/5   11 notes
Résumé :
Le trajet physique et psychologique d'un réfugié afghan de Kaboul à Marseille... Une histoire vraie, tristement ordinaire.

Safi Mohammad a traversé près d'un quart du globe. Soixante-dix jours passés à marcher, dans des bus ou dans la benne d'un pick-up, qui vont marquer sa vie et le changer à tout jamais. De Kaboul à Marseille en passant par Téhéran, Istanbul, Sofia, Belgrade, Vienne, Milan, Nice, ce jeune Afghan a parcouru près de 10 000 km, sans le... >Voir plus
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2015. Crise des migrants en Europe.

Ça fait les gros titres des journaux.
A la télévision, on nous inonde d'images, on nous parle de la jungle de Calais et de Lampedusa. On nous parle des afghans, des syriens, des comoriens qui arrivent en masse. Nos chefs d'état se rencontrent, ratifient des traités et font semblant de se congratuler pour les décisions qu'ils prennent en espérant discrètement que ces fameux migrants préféreront se rendre chez le voisin plutôt que chez eux.

Il y a des élans solidaires que la politique et la justice répriment.
Il y a des idées nauséabondes d'un autre âge qui veulent profiter de la crise.
Il y a des gens qui secourent, qui viennent en aide et qui font des miracles avec les moyens dont ils disposent, des héros dont on ne connaîtra jamais les noms.
Il y a nous devant nos télévisions ou la tête dans nos journaux, à nous dire que c'est bien triste tout ça, que le monde est bien triste.
Mais au fond, est-ce que ça nous empêche de dormir? Une fois qu'à un dîner entre amis on a clamé haut et fort notre indignation et notre solidarité, on s'est resservi un verre ou une part de dessert et on est passé au dernier film vu au cinéma, à nos problèmes de boulot et aux potins du moment.
Et les migrants ne resteront que des anonymes aux visages à peine entraperçus dans un reportage lapidaire, indissociables les uns des autres. Individus, fondus et oubliés dans la foule, qu'on croisera peut-être un jour dans le bus ou le métro mais dont on ne saura rien. C'est plus confortable de ne rien savoir, ça fait moins mal, ça pousse moins à la remise en question aussi.

Heureusement, il existe des hommes comme Giovanni Privitera. Ce dernier est professeur à Sciences Po Aix-en-Provence et bénévole au centre d'accueil pour demandeurs d'asile de Saint-Charles à Marseille où il a rencontré Safi Mohammad, jeune afghan qui a dû quitter son pays et les siens, pour échapper aux talibans. Les deux hommes se sont liés d'amitié, assez en tout cas pour que Safi confie ses rêves au professeur: des rêves tout simples comme celui de s'intégrer, de tomber amoureux et de fonder une famille... Et celui aussi de voir un jour son histoire racontée dans un livre, pour faire comprendre que derrière les chiffres et l'anonymat des reportages se cachent des êtres humains avec un passé, un coeur, des souffrances, de l'espoir. Pour montrer aussi aux autres migrants qu'ils ne sont pas seuls avec leur histoire.

C'est ainsi qu'est né "Exil Ordinaire d'un jeune afghan", d'une rencontre, de l'amitié et du travail de ces deux hommes.

Le récit raconté à la première personne s'attache aux pas et aux sensations, au vécu de Safi Mohammad et suit un cours chronologique. C'est sa voix qui chemine jusqu'à nous, son histoire, ses pensées qu'il a confié à Giovanni Privitera. Ce dernier a parfois intercalé entre les différentes étapes du "voyage" de Safi Mohammad des paragraphes revenant sur leur ouvrage à quatre mains, leur façon de travailler qui apportent un éclairage inédit au récit, une manière supplémentaire de l'appréhender autant que de l'enrichir.

L'histoire de Safi ressemble sans doute à beaucoup d'autres, mais c'est la sienne et rien que pour cela, elle mérite d'être racontée, connue. C'est un exil "ordinaire", sans torture ni bateau laissé à la dérive sur la Méditerranée et pourtant il est tout aussi violent et tragique... Des premières pages qui évoquent les menaces des talibans et le choix de partir quand on sait que c'est probablement pour toujours, aux différentes étapes qui jalonnent ce voyage sans retour, on suit Safi et ses compagnons qui cherchent à partir pour un avenir meilleur, on prend conscience de l'épuisement qui a dû être le leur, de leur courage immense. On mesure les dangers et le coût de l'exil, l'ambivalence des passeurs et la crainte des forces de police. On effleure les angoisses, les insomnies, la méfiance, les amitiés d'un jour... On a le coeur qui se serre devant ce refus conscient de penser à sa famille pour ne pas avoir trop mal et cet espoir d'arriver à bon port. On frémit quand on se rend compte qu'après le voyage, il reste encore la bataille administrative et le regard de ceux qui trient les bons des mauvais migrants. C'est bien connu qu'il y en a de bons et de mauvais, hein...
A la dernière page, on se sent tout petits face à un tel voyage et une telle force.
On a les yeux ouverts aussi. Sur le monde et sur les hommes surtout. C'est exactement ce qu'il nous fallait pour ne plus baisser les yeux en passant devant les foyers de demandeurs d'asile et pour ne plus oublier une fois la télévision éteinte et le journal refermé.

Merci mille fois à Babelio, aux ateliers Henry Dougier et à la masse critique " non fiction" pour le livre et pour ça. Merci à Giovanni Privitera et à Safi Mohammad d'exister et d'être ce qu'ils sont.





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Certes du point de vue littéraire ça ne casse pas trois pattes à un canard (de plus j'ai relevé quelques coquilles), mais l'essentiel et le remarquable dans ce livre-témoignage c'est l'authenticité du propos. le titre est éloquent « Exil Ordinaire », car il s'agit bien d'un voyage « ordinaire » malgré la tragédie humaine qui en est la cause. Un jour de 2015, Safi Mohammad menacé de mort par les Talibans, qui ont déjà assassiné son père, quitte son village d'Afghanistan pour le « paradis » européen (p.21 : parce que ce continent incarne tous les fantasmes de la jeunesse de mon pays). Il traversera, à pieds, en bus, dans des bennes de camion et même en taxi ; l'Iran, la Turquie, la Bulgarie, la Serbie et la Hongrie, passera par l'Autriche et l'Italie pour finir, 72 jours plus tard à Marseille. Il souffrira parfois de la faim et de la soif, endurera le manque d'hygiène, aura mal aux pieds et sera courbaturé, mal logé, puis incarcéré quelques jours ... Mais ne cherchez pas ici de noyades, de tortures ou de morts atroces. Si les réseaux de passeurs sont bien organisés, ils ressemblent plus à une « économie souterraine » (et humanitaire !) qu'à des mafias sanguinaires. On apprend aussi dans ce récit quelques anecdotes sur la culture des pays traversés (étrangement à rebours d'un de mes livres préférés : L'Usage du Monde de Nicolas Bouvier). Mais après cela on pourra toujours se poser la question : L'Europe et la France peuvent-elles acceuillir toute la misère du monde, en ont-elles vocation ?
À Marseille, Safi, qui travaille aujourd'hui dans la restauration, rencontrera Giovanni Privitera, italien et professeur à Science Po. Aix-en-Provence, qui recueillera son récit et l'aidera à le mettre en forme. 3* pour ce vivant témoignage et remerciements aux éditions Ateliers Henry Dougier (Qui ont pour mission de « donner la parole aux invisibles ») et bien sûr à la M.C. Babélio. Allez, salut.
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Il avait 23 ans, il se souvient du bruit de la kalachnikov qui a tué son père en pleine nuit . Il se remémore son enfance, ces demi-journées journées partagées entre l'école et le travail dans les champs, son entrée au sein de la police aux côtés des forces occidentales et les menaces de représailles des talibans. Pour eux, Safi était un traître, malgré l'assassinat de son père il ne se soumettait pas.

Pour protéger le reste de sa famille et se protéger lui-même, il lui faut quitter les siens et partir. Premiers contacts avec des passeurs, quelques 10 000 km sur des chemins semés d'embûches, la faim plus prégnante encore que la fatigue, le désespoir puis l'espoir, les amitiés de paille dans les camps de réfugiés… et son regard au loin depuis le haut parvis de la gare Saint-Charles à Marseille. Sa volonté plus forte que tout conduira Safi Mohammad vers ses rêves : apprendre le français, s'intégrer, travailler, fonder une famille… et transmettre son histoire.
Giovanni Privitera, universitaire et écrivain sera son ultime passeur, un ami, celui qui raconte, pas à pas, simplement «Une immersion authentique dans l'univers d'un migrant ordinaire, dans les méandres de l'exil et de l'impossible retour en arrière ».

Maintes fois pendant ma lecture, je me suis révoltée, maintes fois je me suis sentie coupable, installée confortablement pour lire une énième tragédie si bien écrite, comme celles qui font l'actualité, photos à l'appui. On parle maintenant de « l'exil ordinaire d'un jeune afghan »! Effectivement, le parcours de Safi Mohammad est ordinaire, il ne révèle pas de scènes de torture, pas de traversée dans un rafio qui va déverser son chargement en Méditerranée là où nous, touristes, nous baignerons avec délectation cet été, là où sur les plus beaux yachts ces mêmes touristes voyageront avant d'accoster, à quelques encablures des rives où des familles brisées seront débarquées avant d'être dirigés vers les camps de réfugiés.

Au-delà de me révolter contre moi-même de ma douce léthargie, je voudrais croire à nos gouvernants, croire à la force de l'Union Européenne, qui prennent tant de belles décisions pour aider les pays où règne la dictature…

Mon commentaire a finalement pris une autre tournure que le seul avis sur le livre bien documenté et très utile de Giovanni Privitera, mais la littérature, portée par ses lecteurs, a le pouvoir et la force de mener certains combats.

Merci aux écrivains passeurs et à Giovanni Privitera, aux ateliers Henry Dougier qui veulent briser les clichés en racontant la société contemporaine, en donnant la parole à des témoins souvent invisibles et inaudibles. Merci à Babelio pour ses masses critiques non fiction.



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Récit de trois années de luttes et de douleurs pour un jeune afghan, Safi, obligé de quitter son pays pour raisons politiques .
Jour après jour, nous suivons les 70 jours nécessaires à son parcours, à pied, voiture, taxi, train de Kaboul à Marseille où il vit . Nous découvrons le passeur en chef, celui de la ville de départ , en fait très bien organisé qui ne laisse qu'un numéro de téléphone et fait le relais avec les autres répartis sur la route. Safi a eu de la chance avec le sien : certes il coûtait très cher mais avait vraiment des contacts partout et ne l'a pas laissé tomber jusqu'à Vintimille.
Il a aussi évité les arnaqueurs, les tueurs dont on entend parler, mais le chemin a été rude jusqu'au port final, choisi un peu par hasard de connaissances migratoires .
Marseille où il vivra dans un camp, essaiera de se faire « dédubliner », les accords de Dublin forçant les migrants à s'enregistrer dans le premier pays où ils sont restés, souvent celui où ils sont arrêtés par la police !il s sont obligés de demander une annulation de cet enregistrement pour faire une demande de réfugié dans le nouveau pays.
L'aide de jeunes étudiants ou enseignants pour parler français , lire et écrire est capitale et au centre de l'intégration.
C'est en cela que le co auteur Giovanni Privitera a été utile à Safi et à d'autres, en les aidant à vivre dans un pays où ils ne maîtrisent pas la langue ni les codes.
Les dernières lignes du livre sont assez révélatrices ! Safi devient ami avec une jeune femme ! Chose totalement impossible dans son pays ni même inenvisageable ! Un pas vers la culture occidentale !
Pas de jugement dans ce livre témoignage, juste des constats et des récits d'épisodes de vie.
Peut être, nous, citoyens d'un pays, peut il nous aider à ouvrir les yeux, à regarder ces migrants d'un autre oeil, même si, au regard d'autres récits, Safi a eu de la chance de ne pas être une .. femme, ce qui rend la migration encore plus rudes et dangereuse !
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Safi Mohammad un jeune afghan fuit son pays l'Afghanistan pour la France, un exil forcé qu'il nous raconte humblement avec ses mots, ses peurs, ses doutes, ses espoirs... laisser ses racines, sa famille pour vivre ailleurs, mieux, mais seul. Un témoignage de réfugié touchant.
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Citations et extraits (2) Ajouter une citation
La vie se poursuivait ainsi au rythme des restrictions qui allaient crescendo.
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Parler de ses misères, se rendre compte que tout le monde a les siennes, ça fait du bien.
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Videos de Giovanni Privitera (4) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Giovanni Privitera
Safi Mohammad a traversé près d'un quart du globe. Soixante-dix jours passés à marcher, dans des bus ou dans la benne d'un pick-up, qui vont marquer sa vie et le changer à tout jamais. de Kaboul à Marseille en passant par Téhéran, Istanbul, Sofia, Belgrade, Vienne, Milan, Nice, ce jeune Afghan a parcouru près de 10 000 km, sans le choisir. Sur son chemin, il rencontre Giovanni Privitera, enseignant et bénévole au centre d'accueil pour demandeurs d'asile de Saint-Charles à Marseille. Les deux hommes se lient d'amitié. Ensemble, ils décident de faire de son histoire un livre. Ils retracent son périple, les raisons de son départ, les villes traversées, les paysages découverts, les passeurs et les compagnons de route rencontrés, la demande d'asile, sa nouvelle vie sur ce territoire inconnu, loin des siens. Un voyage à la fois dramatique et terriblement banal, peut-être aussi extrêmement formateur. Une immersion authentique dans l'univers d'un migrant ordinaire, dans les méandres de l'exil et de l'impossible retour en arrière.
Plus d'infos : http://ateliershenrydougier.com/exil_jeune_afghan2.html
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