Lire un ptit Condie Raïs comme ça dans un moment de creux, y'a rien de tel. Le dernier ne m'avait pas complètement convaincu, mais il en fallait plus que ça pour m'arrêter, tant cette auteure a su me donner de nombreuses satisfactions par le passé.
Là, il s'agissait de mon job, alors je l'attendais au tournant. Mon job, que je soupçonne d'avoir été son job avant. Allez, je peux le dire : à ce stade, c'est plus que des soupçons.
La vie d'un prof du secondaire s'y trouve donc décortiquée, étape par étape, avec pour chaque chapitre une série de "conseils" numérotés, à prendre au second degré bien entendu, quand c'est pas au troisième.
J'avoue que là encore, je suis resté sur ma faim, surtout dans la première moitié. Il m'est même arrivé de lever les yeux au ciel, je pense, bien que je ne me sois pas filmé pour pouvoir le vérifier avec certitude. Un début poussif, quelquefois même un peu vaseux, avec beaucoup de citations prises un peu partout sur le web et pas toujours
très heureuses. Mais tout comme un bon sauvignon, le machin se décante (en disant ça, je ne sais absolument pas si le sauvignon se conserve, je n'y connais que pouic) et dans la deuxième partie, il devient plus intelligent, plus féroce, plus acéré, et sait toucher les points qui fâchent.
Or, la Condie est cet animal qui n'est jamais aussi efficace que quand elle touche les points qui fâchent.
L'hypocrisie du pédagogisme en prend pour son grade, de même que l'égalité des élèves à l'école (ou plutôt son absence), ainsi que les petites compromissions avec certains parents pour avoir une paix royale (j'avoue, j'en ai connu un certain nombre des comme ça).
En somme, un bilan en mi-teinte, qui me laisse à penser qu'avec un brin de réflexion supplémentaire, de réécriture des paragraphes les moins heureux, et d'excoriations, ce petit truc pourrait devenir un pamphlet formidable à mettre devant toutes les mirettes.
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Vous devez en revanche assister au discours du chef d'établissement. Non pas qu'il ait quoi que ce soit d'intéressant à dire - j'ai dit "assister", pas "écouter" - mais il s'agit de ne pas se faire mal voir dès le début. Donc installez-vous vers le fond de la salle et profitez-en pour consulter vos mails ou surfer sur Facebook. Mais après tout, vous étiez étudiant il n'y a pas si longtemps, donc ça devrait être dans vos cordes...
En revanche, décernez les notes les plus médiocres aux élèves issus de familles modestes, monoparentales et dont la profession des parents est moins glamour. Faites néanmoins quelques exceptions, totalement au hasard (...) mais veillez tout de même à mettre en valeur les "minorités visibles", histoire de ne pas vous encombrer d'un éventuel faux procès. (...)
De cette façon, vous contribuerez à votre échelle à une juste reproduction sociale, celle-là même qu'entretient l'Éducation Nationale depuis une bonne quarantaine d'années.
La règle est simple : réservez les meilleures notes aux enfants de cadres sup' et de parents issus de professions libérales. Ils ont fait de bonnes études, il y a donc toutes les chances pour que leurs enfants soient mieux éduqués et mieux suivis dans leur scolarité – en outre, ce genre de parents est le plus enclin à s'adresser à votre hiérarchie pour vous emmerder, parce qu'ils sont les plus sûrs d'eux.
Renoncez à tout commentaire négatif. Un élève n'est pas mauvais, il possède une marge de progression, quel que soit son niveau. Une copie n'est pas mal écrite, l'expression est perfectible. Des connaissances ne sont pas lacunaires, elles sont en cours d'acquisition.