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EAN : 9782868536228
93 pages
Le Temps qu'il fait (17/02/2017)
5/5   1 notes
Résumé :
L'auteur nous plonge dans le monde des villages, "monde de labeur et de saisons rudes", monde hors du temps car de tous les temps. Ce sont deux récits venus de l'enfance et écrits dans une sorte de fièvre qu'elle articule ici comme les volets d'un diptyque puissamment archaïque. Sa fascination communicative pour des personnages vibrants de passion et de rupture contenue élève ses histoires au rang de paraboles, et glorifie l'arrachement au despotisme des peurs et de... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Commande à la Librairie Périple2 - Boulogne-Billancourt- le 23 novembre 2022

****Gros, gros coup de coeur !

Après l'enthousiasme sans réserve ressenti à la lecture de son recueil de nouvelles " Avec John Fante", je me suis empressée de commander cet ouvrage, publié par le même éditeur, "Le Temps qu'il fait", que je salue et remercie pour l'excellence de ses choix !

Ce livre contient deux textes, d'inégale longueur, le deuxième:"L'Obscur royaume" étant le plus conséquent et le plus dense...Celui qui m'a autant captivée que secouée des plus fortes émotions !

Le cadre pour les deux nouvelles reste le monde rural, la vie âpre des paysans, ainsi que la vie très figée des villages. le premier texte, "Gaspard et Georgina" met en scène deux enfants: un garçon et une fille, tous les deux malmenés par leurs camarades d'école; Georgina essaye de se défendre et de défendre Gaspard, comme elle le peut... Lui, Gaspard, se bat avec les mots et promet à ses "persécuteurs" qu'il écrira un jour un livre sur eux et sur tout le mal qui lui ont fait subir.

Georgina et Gaspard habitent hors du bourg, mais face à face, mais personne ne se parle.... Les enfants "suivent" les comportements "étriqués" des adultes... Et pourtant Georgina, qu'est-ce qu'elle aimerait bien être en compagnie de Gaspard, discuter avec lui, le questioner sur son "projet de Livre".... Mais rien de tout cela...Il est question de "cruauté entre les enfants"...mais aussi de la toxicité des adultes silencieux ou cancaniers...où chacun épie son voisin, sans lui adresser la parole....

Le monde des enfants n'est pas plus réjouissant qe celui des Grands !...

Le second texte, celui qui m'a vraiment saisi à la gorge, bouleversée, semble tirée d'une histoire vraie, celle de Reine, à qui le livre est dédié "in memoriam"....

Jean, agriculteur, placide et travailleur, se démène avec l'exploitation de sa ferme...en supportant vaille que vaille son épouse, Léone, femme aussi acariâtre que malveillante. Cette dernière empêche la "maisonnée" de respirer, dont sa fille, Reine, dont elle détruira l'existence, l'empêchant de réaliser ses souhaits de faire des études pour devenir "infirmière"....

Jusqu'à lui empoisonner la vie pour qu'elle ne puisse pas se rendre au mariage d'une amie, comme témoin, dans le Sud de la France. Reine rêvera, préparera des mois durant ces deux "malheureuses petites journées de fête", elle ira jusqu'à dessiner sa robe, la réalisera à la main, de nuit, en cachette
( pour éviter le bruit de la machine à coudre)...
Sa mère déploiera moult tracasseries pour l'en empêcher, dont un état souffreteux sûrement imaginaire...

La robe rêvée réalisée pour cette échappée tant attendue restera "enfouie" avec les espoirs de Reine. Une robe de conte...dans une existence qui est loin d'en être un !!! Une vie âpre, empêchée, sacrifiée, sclérosée, figée, mortifère...massacrée par une figure maternelle des plus toxiques...

Reine aura des fureurs, des rages intérieures terribles... qu'elle réprimera...Elle tentera d'oublier tout ce qu'elle souhaitait "devenir", se sentant inévitablement coupable de vouloir quitter sa mère. Cette dernière jouera habilement sur cette corde sensible de "la culpabilité filiale" !!!
Le seul soleil de Reine sera la naissance de sa fille unique, Lucie...

.Sa jeune vie s'éteindra progressivement... Reine se mariera avec Richard, prétendant sans pécule, mais travailleur et volontaire. Il plaira à Jean, le père de Reine, car pour une fois dans sa vie, le père se sentira épaulé.... en sachant que le "vrai fils" est parti il y a bien longtemps, a fui cet univers mortifère... et ne donne que bien rarement de ses nouvelles...

"Pourtant, ce n'était pas "fils" que Jean murmurait en silence quand il évoquait Richard (***son gendre). Son fils était celui dont le visage hilare s'inscrivait sur un ciel de carte postale immuablement bleu, celui qui revenait si peu souvent et à chaque fois tellement et toujours plus à contre-coeur que de ce mot même de "fils" suintait désormais l'absence et le dédain. Richard était là lui, présent dans ce monde de labeur et de saisons rudes, en compagnon, en frère. Il arrivait dans le même dénuement que Jean trente ans plus tôt mais avec des façons plus volontaires et cette voix qui laissaient espérer que, peut-être, il saurait s'emparer des rênes du domaine."

Cet "Obscur royaume" l'est en effet, dans lequel les personnages sont englués dont Richard, qui aurait bien partir, voulu sortir son épouse du cercle maternel vénéneux...mais de cet endroit ...ON NE PART PAS !

"(...) cet espoir de partir, même pour deux jours, parce qu'ici on ne partait pas, tu sais, jamais ! La foire et les parents à visiter une fois l'an, c'était tout. "

Comme toujours, les livres de cet éditeur sont, en plus, des petits joyaux , à l'oeil !...Là, le choix d'une peinture d'une artiste contemporaine, Armonia Gouguet est en osmose parfaite avec l'atmosphère "inquiétante" et sombre des deux histoires; couverture illustrées d'un ciel en colère dans un paysage totalement déserté des humains !

Une vraie tragédie féminine... dans l'âpre univers de la terre, des travaux et des jours, qui n'est pas sans rappeler l'atmosphère des romans de Ramuz...
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Citations et extraits (10) Voir plus Ajouter une citation
Et agripant le regard de sa fille, répétait qu'elle n'était pas folle et qu'elle devait la croire, elle qui vivait au milieu de ceux que l'on dit fous, fatiguée simplement, tellement fatiguée...Parfois elle pleurait et Lucie prenait les mains sans rien dire, elles restaient assises l'une contre l'autre, reliées par tous ces mots qu'elles ne disaient pas, qu'elles ne diraient jamais, infiniment et désespérément proches et étrangères.

(p. 67)
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L'Obscur royaume

Pendant des années au domaine, en s'éveillant dans la haute chambre glaciale dont le plafond mouluré s'écaillait inexorablement, elle avait songé à une maison moderne en plein coeur du bourg de T. "Moderne" insistait-elle et ce mot évoquait une demeure à dimensions humaines avec " des tas de fenêtres et presque pas de murs" comme dans cette chanson de Brel qu'elle avait entendue un jour à la radio et qu'elle n'avait eu de cesse de réentendre parce qu'elle lui parlait d'elle et du profond de sa vie avec une économie qui lui convenait à elle, la silencieuse.

(p. 47)
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L'Obscur royaume

Pourtant, ce n'était pas "fils" que Jean murmurait en silence quand il évoquait Richard (***son gendre). Son fils était celui dont le visage hilare s'inscrivait sur un ciel de carte postale immuablement bleu, celui qui revenait si peu souvent et à chaque fois tellement et toujours plus à contre-coeur que de ce mot même de "fils" suintait désormais l'absence et le dédain. Richard était là lui, présent dans ce monde de labeur et de saisons rudes, en compagnon, en frère. Il arrivait dans le même dénuement que Jean trente ans plus tôt mais avec des façons plus volontaires et cette voix qui laissaient espérer que, peut-être, il saurait s'emparer des rênes du domaine.

(p. 52)
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Gaspar et Georgina

" Toujours", c'est un mot terrifiant, le mot de toutes les obscurités, de toutes les fatalités.
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Gaspard et Georgina

De l'autre côté de la route-fleuve-désert, une lumière brille à l'étage de la maison, Gaspard est en train d'écrire le livre d'où la vérité viendra, elle éclatera telle la foudre qui ouvre des palais scintillants dans le ciel vide.

(p. 31)
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