Choisi à la Librairie Anagramme- Meudon- 15 juin 2022
Déjà 10 jours que j'ai lu ce très joli roman, qui fait un bien fou...qui démontre (si encore besoin était ?!!) que l'amour de l'art et de la culture est le meilleur ciment pour créer des liens et de la fraternité...Et que la Culture, l'Art sont des " besoins de première nécessité " comme l'eau, l'oxygène...
L'auteur que je lis pour la toute première fois nous immerge dans une magnifique histoire d'amitié, qui au demeurant, n'avait pas la moindre chance de survenir.
Milieu social aux antipodes, pays, civilisation, âge, aux antipodes également !
Demba, malien, ayant fui son pays pour la pauvreté , la violence mais pas seulement ! ( un drame intime avait fini de lui barrer la route de l'Espoir) décide de fuir sa terre;, il va souffrir toutes les épreuves d'un migrant, pendant trois interminables années, pour enfin parvenir à Paris, la ville rêvée...
Il travaille, se bat pour s'adapter et fuir ses fantômes...un concours de circonstances le fera rencontrer un intellectuel,
Mathieu, critique d'art, divorcé, à la vie lisse et confortable, dans une sorte de vide et de solitude sidérale, en dépit d'une existence protégée et à l'abri du besoin!
Ces ceux-là vont se croiser et la magie de la rencontre va opérer à travers l'amour de la peinture et avant tout, par l'intermédiaire des toiles de Picasso....
"Pour
Saint- Exupéry,aimer,c'est regarder ensemble dans la même direction.Devant un tableau,une sculpture, un lieu fort,un bel arbre,c'est ce qu'ils font.
Ils regardent la même chose même s'ils ne voient pas la même chose.Le savoir de l'un la virginité de l'autre, l'usure de l'un,l'enthousiasme de l'autre,la moitié de la vie déjà vécue de l'un, le quart de la vie de l'autre vécu seulement, les deux hommes se prolongent.(p.71)"
Je ne vais pas en dire plus...Une très belle rencontre de complicité par l'Art et les partages des beautés Culturelles...qui va guérir l'un, l'aider à se reconstruire, et pour
Mathieu, de faire le bilan de son chemin et de ce qui le maintient debout, entre autres L'Amour de l'Art qui n' a de saveur que lorsqu'il se vit dans le Partage, et que , lui, vit dans son Amitié avec Demba. ..
"
Mathieu réalise que l'intérêt de Demba pour l'art est peut-être un moyen de s'extraire de sa vie, de la vivre autrement. L'art lui est nécessaire, un baume, un soulagement, un baobab.Grâce à l'art, Demba résiste au banal, au triste, à l'avilissement. de l'art, il prend sa force.(...)Devant un tableau, face à une sculpture,un dessin,une photo, il est debout.L'art lui permet de rester debout. (p.105)"
Cette histoire très positive fait un bien fou dans ce monde dilué, secoué, malmené, mis à mal par les dictatures, les fanatismes multiples, les censures, les destructeurs de Liberté...aux quatre coins de la planète...
En plus de L'Art, qui aide à vivre, qui répare souvent et guérit chagrins et deuils...l'auteur fait une brève parenthèse en interrogeant ce que peut représenter la Culture lorsqu'on se bat pour juste "survivre"...Ainsi, Demba retourne rapidement au Mali pour revoir sa mère adorée et aussi régler des "comptes" avec un oncle malfaisant...il arrive dans son village natal.. veut partager à tout prix son enthousiasme pour l'oruvre de Picasso....Évidemment...il y a décalage de vie, de besoins et d'éducation...
"La grande majorité des villageois n'ont jamais vu de tableaux et ignorent comme le monde est vaste.Demba annonce que son ami s'appelle Picasso,
Pablo Picasso. (...)Demba constate que son public s'amuse mais ne comprend pas vraiment. Comment expliquer aux villageois qui n'ont jamais quitté leur terre, et qui doivent la travailler obstinément pour ne pas être encore plus pauvres, ce qu'est une oeuvre et à quoi elle peut servir ?(..)
Demba voulait expliquer qu'un tableau peut consoler, poser des questions, que c'est le miroir de celui qui le regarde.(p.136)"
"Ce Baobab bleu" est parti vers les rives suisses, pour enchanter, je l'espère , l'amie pour laquelle je l'ai choisi.
Une amie qui écrit avec beaucoup de talent et qui s'engage à fond, dans tout son quotidien, pour défendre tous les précieux métiers, visibles et invisibles, de la Culture...Elle se reconnaîtra !...