Ce livre aurait pu lui aussi se nommer " Vingt ans après ", car Gérard de Sède revient sur son succès de 1967 : "L'or de Rennes"
Autant dire que l'ouvrage est essentiel, incontournable pour qui se passionne pour cette histoire. Gérard de Sède est, après tout, celui qui connaît le mieux le coeur même de cette aventure à laquelle il a consacré de nombreux écrits.
Le livre se structure donc autour de quatre parties.
La première expose à nouveau les faits.
N'hésitons pas à dire que cette nouvelle présentation n'est guère plus objective ou étayée que la première . Ces vingt ans passés n'ont guère aiguisé la prudence ou le sérieux de M. de Sède. En introduction, il revient par exemple sur son explication étymologique du Bugarach, montagne qui devrait son nom aux bulgares venus prêcher le néo-manichéisme, selon lui ! Alors que le nom était donné près de cinq siècles avant leur présence dans le midi !
Il continue étrangement à confondre les photos d'Alfred et de Bérenger Saunière et, raisonnant sur les premières, nous ressort la visite à Paris chez un Emile Hoffet qui, gamin de 18 ans en 1891 au mieux, devait être peu " au fait " des subtilités des codages de tout aussi improbables parchemins ! de sède ne veut pas plus croire que les cadavres exhumés dans la propriété de Marie Denarnaud soient ceux de maquisards espagnols et nous ressort l'attentat imaginaire contre la DS de Buthion ! En réalité les propos les plus intéressants restent ceux concernant le passé minier de la région. Gérard de Sède se fait exhaustif, précis et l'on se prend à reconsidérer une très possible redécouverte de filons d'or conséquents dans la région.
C'est sans nul doute la seconde partie qui s'avère la plus captivante car Gérard de Sède révèle clairement que la plupart des documents que " L'or de Rennes " inclut pourtant dans sa bibliographie, étaient de vulgaires et très mauvais faux avec à leur tête " le fameux Serpent rouge ". Leurs procédés grossiers de fabrication reposant toujours sur le même mécanisme : pseudonymes empruntés à des morts en signataires, et rattachements bidonnés à l'histoire du Razès ou à l'histoire de France. La démonstration de Gérard de Sède, redevenu brillant et drôle, est sans appel.
On le sent blessé, outré et il ne ménage pas ses manipulateurs. Pierre Plantard y est qualifié de névrosé au plein sens freudien du terme et son obsession d'une paternité mérovingienne de substitution passe par toutes les falsifications misérables qu'il a produites et auxquelles on accorde encore aujourd'hui benoîtement de l'intérêt.
Mais Gérard de Sède ne s'en veut-il pas au fond d'avoir laissé avec aussi peu de discernement du crédit aux propos incohérents d'un dément ?
Il règle en voie de conséquence aussi leur compte au trio de fantaisistes intéressés que furent MM. Baigent, Leight et Soskin propagateurs irresponsables d'une pseudo descendance christique issue de Marie-Madeleine et implantée dans le Razès.
Il pousse enfin dans les oubliettes de la raison un pauvre David Wood inventeur délirant du Pentagramme gynécologique et sacré de Rennes-le Château dans son ouvrage " Genesis " ou encore la fantasque Elisabeth van Buren créatrice avant l'heure du " refuge pour l'Apocalypse " pour tous les illuminés de la terre dans la région de Rennes-les-Bains, le Château ou du Bugarach. Il est d'ailleurs hilarant de lire qu'en 1987 déjà, vinrent se réfugier à Rennes le château des personnes ayant décrypté dans les calendriers mayas la fin du monde à cette année là !
Restent les hypothèses et elles sont aujourd'hui bien connues.
La première étant le trafic de messes qu'écarte Gérard de Sède pour le motif qu'il eut fallu un nombre improbable de messes pour arriver à combler les immenses dépenses du curé et qu'il ne pouvait toutes les dire. Arguments biaisés car nous savons que justement il ne célébra pas toutes les messes demandées. D'autres part, c'est bien vite rejeter tout le reste : regroupements de messes par le biais de congrégations, revente d'objets archéologiques, de vins, de cartes postales , d'engrais, regroupements de dons de riches personnalités, jeux et loteries, visites, regroupements de salaires des Denarnaud, élevages à rentabilité…
L'hypothèse d'une découverte trésoraire (trésor des wisigoth et de Jérusalem) étant peu défendable car tout objet d'art est difficilement négociable.
A propos des parchemins nous n'apprendrons malheureusement rien de plus.
Reste les aventures picaresques de l'abbé Saunière autour d'un mystérieux document impliquant les Habsbourg et sûrement encore mois plausibles que tout le reste, dernière bouée de ce pauvre Gérard de Sède, largué !
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Une fois refermé le dossier que nous venons de présenter, une seule question se pose, certes difficile à résoudre mais fort simple dans sa formulation : d'où le cure Bérenger Saunière, arrivé fort pauvre à Rennes-le-Château, tira-t-il les ressources qui lui permirent de dépenser en vingt ans plus de 23 millions de francs actuels ?
Ils n'avaient pas soupçonné que ce qui pouvait bien cacher quelque chose, c'était précisément l'excessive absurdité de ce livre, contrastant avec tout ce qu'on sait de l'intelligence de l'auteur et avec le reste de son oeuvre : dans certains cas, ce qui semble sot est sceau.
Citant Charles Cros :
"Dans ces meubles laqués, rideaux et dais moroses,
Danse, aime, bleu laquais, ris d'oser des mots roses."
Citant Joseph De Maistre :
"Les dialectes, les noms propres et de lieux me semblent des mines presque intactes et dont il est possible de tirer de grandes richesses."
Citant Oscar Wilde :
"L'Art tend son miroir à la Nature."