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sur 859 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
« S'abandonner à vivre » est une manière, pour Sylvain Tesson, de résumer le « pofigisme », un mot venu de Russie désignant un état d'esprit, une philosophie. Cela consiste à accepter « l'absurdité du monde » et « l'imprévisibilité des évènements », à se laisser porter par la vie sans chercher à lutter car le combat est perdu d'avance. Pour autant, il n'y a rien de déprimant dans cette résignation, au contraire ! Dès lors qu'elle est acceptée, la vie peut être vécue pleinement et avec une réelle jouissance.


C'est ce que s'efforce de mettre en pratique les personnages de ce recueil composé de dix-neuf nouvelles qui nous font voyager à travers le monde. Dix-neuf histoires pour un ouvrage de 221 pages, c'est beaucoup, néanmoins Sylvain Tesson réussi, grâce à la justesse de son ton et à la finesse de sa plume, à créer juste ce qu'il faut d'intérêt et de plaisir pour que le lecteur ne se sente jamais frustré par la brièveté des différents récits. On y croise des amoureux transis, des amants intrépides, des immigrés plein d'illusions, des guerriers célèbres, des aventuriers, des amateurs de sensations fortes, des solitaires et tant d'autres qui partagent, le temps d'un instant, un bout de leur vie.


L'écriture est riche, travaillée, exigeante et offre un excellent moment de lecture. Plus d'une fois j'ai été saisie par cette narration captivante et soigneusement élaborée. Bien sûr, comme dans tout recueil de nouvelles, c'est toujours un peu inégal et certaines histoires sont parfois en dessous des autres, mais le charme de l'ensemble reste intact et offre une très jolie découverte !
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« "Pofigisme" n'a pas de traduction en français. Ce mot russe désigne une attitude face à l'absurdité du monde et à l'imprévisibilité des événements. le pofigisme est une résignation joyeuse, désespérée face à ce qui advient. Les adeptes du pofigisme, écrasés par l'inéluctabilité des choses, ne comprennent pas qu'on s'agite dans l'existence. Pour eux, lutter à la manière des moucherons piégés dans une toile d'argiope est une erreur, pire, le signe de la vulgarité. Ils accueillent les oscillations du destin sans chercher à en entraver l'élan. Ils s'abandonnent à vivre. »

Ce pofigisme − néologisme inventé par l'auteur − est le fil conducteur de ce recueil de nouvelles.
Je reproche souvent à ce genre d'ouvrage d'être assez décousu, de n'être qu'une juxtaposition de textes sans grand rapport les uns avec les autres. Mais ici, on trouve une réelle unité, ce qui n'empêche pas les nouvelles d'être très différentes les unes des autres, chacune ayant son caractère, son contexte, son style, ses personnages.
Ce fil rouge fait de ce livre une sorte de grande réflexion philosophique sur l'existence, ou plus précisément, sur la façon de faire face aux difficultés de l'existence.
Car le pofigisme, ce n'est pas baisser les bras et ne rien faire ; c'est utiliser l'élan, l'impulsion donnée par le destin, au lieu de chercher en vain à prendre une autre direction. C'est ne pas gaspiller inutilement son énergie physique ou morale, ne pas gesticuler dans tous les sens lorsque l'on est dans des sables mouvants mais chercher la façon la plus intelligente de s'en sortir.

J'ai vraiment apprécié cette lecture, que j'ai dégustée par petits morceaux pour mieux en profiter. Sylvain Tesson sait très bien utiliser le format court de la nouvelle. Il arrive en peu de pages à déployer efficacement son ironie, son imagination, sa pensée foisonnante. Il varie le style et le ton. Certains textes sont légers, d'autres plus profonds : tour à tour, il nous amuse, nous surprend, nous fait réfléchir.

Chaque nouvelle est dotée d'une citation en préambule, que j'ai pris beaucoup de plaisir à relire après coup alors qu'elle prenait tout son sens et éclairait le texte.
J'ai aimé retrouver dans ce recueil ce que j'aime chez Sylvain Tesson : un grand amour de la nature, un regard sans concession sur les humains, une imagination sans limites, une vivacité d'esprit éblouissante, une originalité toujours étonnante, des convictions fortes et assumées.
Je ne suis certainement pas objective, je ne peux pas l'être avec cet écrivain que j'adore !
Allez, je le concède : comme c'est habituellement le cas dans ce style d'ouvrage, certaines nouvelles sont moins réussies que d'autres, mais l'ensemble se lit avec bonheur.
Attention : le format court est trompeur, et le propos est moins léger que cela peut sembler à première vue. Il y a de la matière, il y a du contenu, pour peu qu'on prenne le temps de faire une lecture autre que superficielle et au premier degré.

« L'Europe de Schengen est peuplée de hamsters affairés qui, dans leur cage de plastique tournant sur elle-même, ont oublié les vertus de l'acceptation du sort. » : la comparaison est cruelle, mais elle est tellement vraie !
Alors, cessons un peu de pédaler et de faire tourner nos roues de hamster. Prenons un peu le temps de voir le monde qui nous entoure et soyons un peu plus dans la réflexion que dans l'action effrénée.

Et parfois, sachons être dans l'acceptation.

S'abandonner à vivre ? Je ne sais pas.
Mais s'abandonner à lire Tesson, certainement !
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Je viens de découvrir l'univers de Sylvain Tesson à travers ce recueil de nouvelles. J'ai passé un très bon moment et appris pas mal de choses sur certains pays. Une large part est faite à la Russie où il situe plusieurs de ces nouvelles. On sent qu'il aime ce pays difficile. le point commun entre toutes les péripéties et interrogations de ses personnages semble être leur chute innattendue et à chaque fois surprenante. Certains de ces textes apportent un questionnement sur l'humain et les différentes quêtes existentielles de chacun. On sent chez l'auteur une sensibilité réelle envers l'absurdité de la vie mais aussi une volonté de pointer et dénoncer les inégalités de toutes sortes.
Ce livre me fait également penser à "Autour du monde" de Laurent Mauvigné, par sa volonté affichée de situer l'action de ses personnages dans des pays et sociétés différentes. Un trait de notre époque où nous recevons des informations des quatre coins du monde, qui nous sont donc de moins en moins étrangers et où nous voyageons de plus en plus. Mais , comme Mauvigné, Tesson le fait magnifiquement.
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Vingt nouvelles ou autant de croquis distillés dans un style personnel, parsemés de ricochets qui suspendent un instant notre pensée, d'images neuves qui rencontrent étonnement, acquiescement, d'observations humaines lucides qui suscitent la réflexion.
Certaines nouvelles plaisent plus que d'autres? Celles que j'ai particulièrement aimées ne rencontreront peut-être pas celles que vous avez aimées ou aimerez.
La vibration est personnelle.
L'auteur s'y entend pour attiser la curiosité (cf. l'histoire "vraie" dans la nouvelle "Les égards"), pour nous entraîner dans le voyage avec le Transsibérien ou parcourir des lieux qu'il connaît bien, pour nous faire palpiter avec les héros du "Téléphérique" et "redescendre" avec eux dans un terre à terre si... petit.
Le concept russe de "pofigisme" -le titre prend alors toute sa signification- développé dans "Le train", ne serait-il pas une bonne manière d'accueillir ces nouvelles?
Même si l'on sait qu'un grain de sable va se glisser, l'effet de surprise est néanmoins garanti à chaque fin d'histoire.
Me marqueront-elles? Peut-être pas.
M'en souviendrai-je? Pas en détail. Mais j'en garderai un bon moment de belle littérature.
"S'abandonner à vivre".
Et si cette affirmation rencontrait le "s'abandonner à lire"?
Peu importe le fond, la forme comble haut la main le délice de la lecture.
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Ce recueil de nouvelles est ma première incursion dans l'oeuvre de Sylvain Tesson.
Et j'y ai trouvé exactement ce à quoi je m'attendais. Une langue vive et soutenue. Un humour un brin rugueux. Des lieux exotiques.

L'auteur ne fait pas de cadeau à ses personnages, volontairement stéréotypés - voire pratiquement interchangeables. Avec pour effet de montrer qu'ils pourraient être l'un d'entre nous (version upgradée socialement et culturellement). Leurs mésaventures amusent donc le lecteur, mais invitent tout de même à se remettre en question. Ou pas, selon son humeur.

J'ai apprécié l'écriture et les valeurs un peu surannées de Sylvain Tesson. Cela m'a donné l'agréable impression de lire un classique.
Une expérience concluante que je ne manquerai pas de renouveler : si vous avez des suggestions de titres à découvrir, je suis preneuse !
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Sylvain Tesson - S'abandonner à vivre – nouvelles
nrf Gallimard (17,90€ -221 pages)
La propension de Sylvain Tesson à faire usage des citations se retrouve dans le copieux exergue et au début des 19 nouvelles (Cioran,Fitzgerald, Bukowski), dont une en anglais: « To muse, to creep, to halt at will, to gaze » du poète Wordsworth. Je pense en effet qu'elles « révèlent l'âme de celui qui les brandit », comme le justifie l'auteur dans un roman précédent.
L'écrivain, bourlingueur, alpiniste chevronné, campe ses dix-neuf nouvelles dans les lieux qu'il a gravis, sillonnés, arpentés, depuis Paris, la Bretagne, la Chine (Le Yunnan) à la Lettonie et Russie, en passant par l'Algérie. Certaines plus viriles rendent hommage aux pionniers de la conquête de sommets mythiques, à ceux qui ont accompli des exploits de l'extrême, y perdant parfois la vie. Les pitons évoque les ascensions communes du narrateur avec Jack (double de l'auteur), « alpiniste américain », et les exploits de ce dernier devenu « le poète des cimes ».
Sylvain Tesson met en exergue cette fraternité née dans l'effort,concluant par cette remarque: « La distance est l'ingrédient des amitiés rares ».
Il étrille les sportifs du dimanche: « Vingt mille hamsters échappés de la cage... ».
Le jogging étant devenu « la névrose d'une société qui n'avançait plus ». Par contre Jack est convaincu des bénéfices de la marche pour stimuler l'inspiration. Dans Paris, « il partait chalouper le fond de son crâne » « attendant la fécondation par l'effort ».

Dans ces nouvelles,on croise des figures féminines: Marcella, la compagne de Jack, envers qui celui-ci « ne se sentait contraint à aucune fidélité ». Marianne, « une biche avec un coeur d' hyène », rencontrée dans un vernissage. Marianne , au coeur d'une scène qui tourne au vaudeville, quand le mari de retour plus tôt que prévu cause la fuite de l'amant, escaladeur aux mains nues. Valia, dont Jack avait aimé le « corps blanc, beurré ». Venda dont les déhanchements aimantaient Ivan. D'autres couvertes de fourrure.Viéta, « une femme-icône » faisant penser aux vahinés de Gauguin. Quant à Greta, elle engraissait ses convives, abusait de crème, débordait de tendresse.

On découvre le quartier de Riga , « aux façades lascives », avec le protagoniste, qui y débarque à Noël, avec l'intention de faire une surprise à Olga, aux «  yeux altaïques » dont il s'était entiché, un an plus tôt. Son plan tourne au fiasco, car il avait oublié que Noël, dans le calendrier orthodoxe n'était qu'en janvier.
Dans la nouvelle le bar, quatre russes s'entretiennent des coutumes des pays, pensant que « Ce n'est pas une infamie de se conformer aux usages des gens ».
L' auteur géographe sait nous embarquer dans des pays lointains et nous faire partager l'enchantement des protagonistes devant la beauté d'une nuit sibérienne, un barrage « titanesque » alors que « D'habitude, voyager c'est faire voir du pays à sa déception ». D'autres nouvelles renvoient à la triste réalité des guerres (Afghanistan).
Si Christian Bobin et Charles Juliet déplorent qu'on ne s'écrive plus, dans 2 nouvelles de Sylvain Tesson, les protagonistes envoient des lettres. L'auteur met en lumière l'écriture , « processus mantique qui entraîne une cascade karmique », la correspondance qui « s'inscrit dans le solfège de l'existence » et le travail des facteurs, « messagers du destin », qui en « battent les cartes » .
Sylvain Tesson laisse deviner ses craintes quant à l'avenir de la planète. Il s'insurge contre « la côte massacrée par le surpeuplement » et « l'enlaidissement par les baraques à frites ». Il ne cache pas sa désapprobation de voir des femmes ramper « écrasées de culpabilité d'exister». En globetrotter habitué au dénuement et dépouillement, il fustige notre société de consommation à l'époque de Noël, cette bombance qu'Ernst et Karl avaient décidé de fuir car elle « heurtait leur protestantisme ». Un brin de nostalgie chez Émile pour les nuits à la bougie.

Un souffle glacial de Sibérie s'est infiltré dans quelques nouvelles, rappelant le roman précédent de l'auteur. On perçoit le ressac, les rafales qui « froissaient la lande », les « gifles de grésil » qui « crépitaient contre les vitres », le stridulations des insectes, « La rumeur du Mékong ». On hume la citronnelle.
Les comparaisons sont très imagées: « L'océan était une babine de chien, bavante », ou « le ciel qui virait au Turner ». « Les rues étaient meringuées de gel ».
L'infatigable promeneur, « poète aux semelles de vent » dépeint La Seine serpentant , « La malachite des colverts », les cours de danse « sous les jaunes larmes d'un saule », l'automne qui « caparaçonnait la ville de cuivre ». C'est avec le pinceau du peintre que l'auteur sublime certains paysages comme les « déchirures dans les cumulus bourgeonnant au-dessus des cimes » qui « laissaient entrevoir des pyramides couleur lavande »: un coucher de soleil pastel qui « léchait les glaces ». Ou « Le vert fluorescent des arpents de riz » se mouchetant « du fuchsia des turbans paysans ».

Sylvain Tesson nous initie au « pofigisme », cette forme de fatalisme dont les russes sont coutumiers, « une résignation joyeuse, désespérée face à ce qui advient », une façon de « s'abandonner à vivre », qui donne le titre à ce recueil.
L'auteur rend hommage aux personnalités ( athlètes battant des records) et aux livres qui ont jalonné son parcours, ceux de Cendrars, Toulet, Kafka, Drieu la Rochelle, Paul-Jean Toulet. Sans oublier Allexandra David-Néel, Mishima. Cette passion pour la lecture , l'ermite diariste l'assouvit l'année de son exil dans une cabane au bord du lac Baïkal. le fantôme de Lao-tseu habite la nouvelle intitulée le barrage.

On retrouve les qualités littéraires déjà présente Dans les forêts de Sibérie.
Le nouvelliste maîtrise l'art de la chute ( parfois fracassante), insuffle du suspense comme dans La gouttière et le téléphérique, surprend par le dénouement souvent imprévisible. Certains textes font penser à une fable et sa morale . le ton est tour à tour léger, drôle, grave. Un ouvrage qui mériterait le Goncourt de la nouvelle 2014.

Sylvain Tesson signe un recueil prodigieusement intéressant par son éclectisme, sa richesse, traversé par «  des chinoiseries », pétri de poésie et d'humour, truffé d'aphorismes que l'on a envie d'apprendre par coeur. A mettre dans son sac à dos pour s'abandonner à lire pour oublier « l'absurdité de la vie ».
Pour rester en compagnie de cet écrivain voyageur si apprécié, je vous conseille un petit opus très jouissif: Les anagrammes à la folie, encore plus percutantes
de Perry-Salkow & Sylvain Tesson ( Équateurs). Par exemple:
le titre: Dans les forêts de Sibérie devient de lentes braises froides.
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Recueil de nouvelles sur les errements de vie, sur des destinés qui claquent.
La notion de "pofigisme" slave ( terme Tessonien dans le texte ) semble être le socle de ces différents parcours d'hommes et de femmes ou cette façon d'appréhender les éléments qui nous assaillent de manière couperet sans notion de bien ou de mal mais avec l'idée d'un rebond éventuel, sans attentes particulières de possibles améliorations du court de l'existence.
L'humour est jamais loin venant ponctuer certains de ces chemins de vie.
Sympathique initiation à cet auteur dont un tas de bouquins m'attendent patiemment.
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On dit que le nombre de mots de la langue russe est 3 fois plus grand que celui de la française.
On dit aussi que le vocabulaire d'une personne utilisant une langue étrangère est pareil à celui de sa langue maternelle, qualitativement et quantitativement.
Alors, en lisant en français depuis 30 ans j'ai cru de ne plus avoir besoin de dictionnaire pour lire la prose contemporaine.
Eh bien, j'ai eu tort.
Sylvain Tesson m'a obligée de sortir de nouveau mon La Rousse...
C'est stimulant.
J'ai vu cet écrivain dans "La Grande Librairie" et j'ai aimé son discours et sa tête.
Je vais tout lire de lui.
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Sylvain Tesson propose de nous abandonner à lire ce recueil de textes courts. C'est ce que j'ai fait et j'ai passé un bon moment en écoutant l'auteur lire son livre à voix haute.
"S'abandonner à vivre" c'est une torpeur métaphysique qui atteint les russes, une façon d'appréhender sans agitation et avec fair-play l'absurdité du monde. C'est un peu la version slave de "Laisser le bon temps rouler" de Louisiane.
Comme j'adore la façon d'écrire de Sylvain Tesson je me suis régalée avec ses textes qui ne sont pas vraiment des nouvelles mais de petites histoires qui sentent le vécu, qui peuvent faire rire ou pleurer.
On retrouve l'écrivain voyageur avec plaisir parce qu'il sait faire le portrait des personnes qu'il aurait pu rencontrer sur la planète. D'ailleurs, la Russie qu'il connaît bien est très présente.
Comme les textes sont nombreux, je me suis prise au jeu d'en faire une petite liste. Voilà ce dont il est question :
-de deux amis qui forment un couple improbable s'aimant pour l'éternité,
-d'un voyage de noces dans le Yunnan avec un livre de Lao-Tseu visionnaire,
-d'un amant qui tombe par la fenêtre et qui se fait soigner par le mari cocu,
-du difficile parcours d'un migrant,
-d'une prostituée lettrée qui s'ennuie où qu'elle soit,
-d'une commémoration des guerres napoléoniennes en Russie qui se finit bien,
-d'une excursion entre copains en Sibérie,
-des exploits de trois hommes dans l'Himalaya, en Méditerranée et au Pôle Nord,
-d'un alpiniste en Algérie qui découvre qu'il n'est pas le premier à atteindre le sommet,
-d'un sniper djihadiste qui se sacrifie en tuant un gradé de l'armée française parce qu'au lycée il sortait avec une fille dont il était amoureux,
-d'une croisière sur la Lena d'un sismologue français qui travaille en Russie durant laquelle il découvre la vie d'un ermite,
-d'un facteur messager du destin,
-des pensées d'un homme durant une nuit d'insomnie,
-d'un promeneur qui marche sur les quais de la Seine pour trouver l'inspiration
-de russes adeptes du parachutisme qui se retrouvent dans un bar chez les Yankees
-d'un père Noël du calendrier orthodoxe
-du profidisme ou s'abandonner à vivre dans le train
-de la meilleur façon d'éviter une indigestion au réveillon de Noël en montagne
-d'un réveillon de Noël en Bretagne en compagnie des fées
Une vingtaine de textes dont le ton est différent mais avec Sylvain Tesson on apprend toujours quelques choses pour profiter de l'existence.

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N°1746 – Mai 2023

S'abandonner à vivreSylvain Tesson – Gallimard.

Qu'il choisisse d'évoquer la rencontre cocasse d'un mari cocu avec l'amant, escaladeur de façades, de sa femme, qu'il nous parle de la fin tragique d'une mission britannique au Pôle ou qu'il dénonce avec délectation les Russes, leur addiction à la fornication et à la vodka ou la beauté et la sensualité de leurs femmes, Sylvain Tesson ne se départit pas de son style alerte et jubilatoire où les descriptions poétiques le disputent à la qualité de sa documentation, ce qui donne pour son lecteur un texte facile à lire et dont il se délecte jusqu'à la fin. A lire ses nouvelles il semble avoir un particulier attachement à la montagne et à l'escalade et il nous balade dans le monde entier, sous toutes les latitudes et dans tous les milieux. Sous sa plume, même la mort n'a pas cette dimension tragique et c'est entre les lignes qu'il conseille de privilégier la vie, même si celle-ci peut parfois réserver bien des surprises et pas toujours des bonnes.
Le titre a pourtant quelque chose de fataliste. En effet, pour notre auteur, il faudrait accepter le monde dans son absurdité, car il n'en manque pas, se laisser porter par la vie sans chercher à en combattre les évènements parce que ce combat est perdu d'avance, accepter le hasard qui fait partie de nos vies bien plus que nous voulons bien l'avouer, le sort ou la destiné selon le nom qu'on veut lui donner.
Quand nous naissons, c'est à dire quand nous sortons du néant, une hypothétique divinité ouvre à notre nom un livre dont nous tournons plus ou moins longtemps les pages. Quand nous retournons au néant, la Camarde en arrache une, la dernière, et range ce livre dans la grande bibliothèque de l'oubli. Alors, pourquoi pas accepter la vie telle qu'elle est, telle qu'elle vient, au jour le jour, sans se poser trop de questions. C'est une philosophie qui en vaut bien un autre et qui a au moins l'avantage de la simplicité, loin des interdits religieux censés nous valoir une incertaine éternité heureuse et les déductions oiseuses des supposés penseurs qui se targuent de nous servir de boussole.
Ce titre viendrait du mot russe « pofigisme » qui est intraduisible en français, qui est une sorte de philosophie, une torpeur métaphysique qui ferait partie de l'âme russe. C'est un peu l'attitude des personnages de ces dix-neuf histoires qui, avec une certaine forme d'humour, acceptent la vie comme elle vient, surtout quand le merveilleux et l'inexplicable, selon critères du cartésianisme, s'invitent dans nos vies.
J'avoue que je partage cette vision des choses.
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