J'ai ajouté 2 photos de la jeune rebelle russe arrêtée et en taule en 2012, vêtue d'un tee shirt significatif "¡ No pasarán !" en hommage à "La Pasionaria" Dolores Ibárruri Gómez (1895-1989) et son combat contre le fasciste Franco en Espagne. Pour
Nadejda Tolokonnikova sa bête noire c'est
Vladimir Poutine.
En lisant la biographie de Nadya Tolokno (comme la presse américaine l'a surnommé) on ressent quelques difficultés à s'imaginer que la cofondatrice du légendaire groupe punk rock "
Pussy Riot" n'a aujourd'hui toujours que seulement 31 ans. Une vie donc bien remplie d'initiatives et de misères.
Née près de Krasnoïarsk en Sibérie le 7 novembre 1989, Nadejda a commencé par connaître la solitude suite au divorce de ses parents comme môme de 5 ans. Onze ans plus tard à peine, elle collaborait au nouveau journal littéraire ("Novoye Literaturnoye Obozreniye") et à 16 ans elle devenait membre du mouvement contestataire "Vojna" (guerre).
À 17 ans elle s'est inscrite à la faculté de philosophie de l'université de Moscou et comme
Alexeï Navalny a participé à des marches de dissidents politiques.
En 2008, à 19 ans, elle s'est mariée avec un autre opposant au régime poutiniste, Piotr (diminutif Pétia) Verzilov, avec qui elle a eu la même année une fille qu'elle a baptisé Hera (comme la déesse grecque protectrice des femmes). le couple a divorcé en 2016.
C'est en octobre 2011 que Nadejda a créé avec Marija Aliokhina et Ekarerina "Katia" Samoutchevitch
Pussy Riot. Sur la base de l'ouvrage avec le nom du groupe féministe comme titre de la journaliste russo-américaine
Masha Gessen, j'ai rédigé un billet fort positif le 10 novembre 2020.
Dès le début
Pussy Riot, avec ses chansons anti-poutiniste virulentes et en faveur de la cause féminine, a eu des démêlés avec le pouvoir et l'église russe . le Patriarche Cyrille (Goundiaïev), depuis 2009 à la tête de l'Église orthodoxe, avant agent du KGB comme son pote au Kremlin et presque aussi riche grâce à son négoce d'importation de cigarettes, voit le féminisme comme un danger pour la cohésion familiale traditionnelle. Apparemment ce saint homme préfère le luxe, telles ses montres Breguet de 20.000 euros !
Après un happening probablement un peu trop osé par
Pussy Riot dans la Cathedrale du Christ Sauveur de Moscou en février 2012, les 3 chanteuses se trouvaient dès le 3 mars suivant en détention provisoire et condamnées, le 17 août, pour hooliganisme à 2 ans de camp de rééducation.
Notre Nadejda a eu la chance d'avoir été expédiée dans un camp de labeur épouvantable en république de Mordovie, à plus de 500 kilomètres à l'est de la capitale russe. La Mordovie qu'elle décrit comme "un pays de marécages et de camps de prisonniers. On y garde les vaches et les détenus".
Les prisonnières y étaient obligées de coudre des uniformes de police pendant 16 à 17 heures par jour avec une journée de repos toutes les 6 semaines. La nourriture y était carrément infecte à cause du trafic des gardiens.
Je laisse à notre
Pussy Riot le soin de vous brosser un portrait de ce paradis sur terre. Je veux juste signaler que dans la kleptocratie de Poutine et ses oligarques mafieux, Nadejda touchait le salaire mensuel généreux de 29 roubles, soit l'équivalent d'un dollar américain.
Avant d'être libérée la vieille de Noël 2013, elle a passé de nombreuses journées dans un cachot isolé et gelé comme punition pour ses actions visant l'amélioration des conditions de détention et son franc-parler. Si elles ont été mises en liberté à ce moment c'est par un coup de pub de Poutine en vue des jeux olympiques de Sotchi en 2014.
De cet environnement carcéral
Nadejda Tolokonnikova a entretenu une correspondance avec entre autres le philosophe slovène
Slavoj Zizek. Voir son ouvrage "
Lettre de Mordovie" paru en décembre 2013.
Outre cet ouvrage et "
Désirs de révolution", elle a aussi publié "Read and Riot : A
Pussy Riot Guide to Activism" et un "
Pussy Riot Guide to Protest".
En 2014, Nadejda et sa copine Marija ont reçu le Prix
Hannah-Arendt pour la pensée politique.
Le moindre que l'on puisse dire est que l'auteure ne mâche pas ses mots, surtout lorsqu'elle s'en prend à l'éternel Poutine et la corruption scandaleuse de la clique au pouvoir.
Ce que j'ai savouré particulièrement c'est de le considérable contraste entre les paroles des chansons des
Pussy Riot et leur interprétation dans les avis juridiques et dossiers judiciaires qu'elle cite dans son livre. Il est vrai qu'une prière punk des
Pussy Riot comme "Sainte Mère de Dieu, Vierge Marie, vire Poutine" n'est pas évident à interpréter correctement pour les éminents juristes du Kremlin et de la Loubianka (siège de la police politique).
Lors de son interrogatoire au cours de son procès en 2012, la juge Syrova demandait à
Nadejda Tolokonnikova si elle aimerait dire quelque chose au président Poutine, question à laquelle elle a répondu : "Non, franchement, pour moi, c'est un zéro."