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Ultrasensibles : une histoire de famille » est une BD de 170 pages éditée dans un format pratique à emporter partout (correspond à un format A5).
Les dessins de
Nathalie Prioux sont plutôt à mon goût car les traits sont nets, et les personnages ont un côté enfantin tout en étant relativement réalistes. Deux défauts toutefois : la taille des yeux du personnage principal et le fait qu'on ne distingue pas assez la différence d'âge entre les personnages (pourtant importants pour comprendre les rôles de chacun). Les dessins sont pleins de couleurs et nous invitent à une reconnexion avec la nature.
L'histoire se déroule au Québec, notamment à Montréal, et cela peut forcément convoquer des souvenirs lorsqu'on y a mis, comme moi, les pieds dans sa jeunesse.
Voilà ce que j'ai le plus apprécié dans ce livre. Pour le reste, ça se corse :
En couverture, deux femmes. Ce qui laisse à penser que l'ouvrage s'adresse plutôt à un public féminin. Ce qui se confirmera à la lecture… Comme si l'ultrasensibilité était un problème plutôt féminin. Au contraire : parce que nos sociétés enseignent aux garçons à ne pas montrer leur sensibilité, je pense que l'ultrasensibilité est plus difficile à vivre chez les hommes que chez les femmes*.
L'histoire :
On assiste à une dispute entre une mère et sa fille car celle-ci lui impose d'accueillir un réfugié pacifiste russe à la maison Les disputes étant apparemment fréquentes entre les deux, la mère consulte une thérapeuthe… on assiste à quelques entretiens (pas très poussés). La mère finit par passer un test pour déterminer si elle est ultrasensible, test proposé par sa fille qui lui a révélé qu'elle l'est également. On apprend que la fille a appris tardivement l'existence de son père en Angleterre. Elle va vouloir le rejoindre, pendant que la mère va, elle, faire évoluer sa vie.
Raconté comme ça, ça ne semble pas passionnant… et ça ne l'est pas !
Beaucoup de passages m'ont paru inutiles. Ils n'apportent rien à l'histoire. Quelques expressions québécoises sont présentes sans doute pour rendre le texte plus amusant, mais je les ai plutôt trouvées gênantes. Des références à la guerre en Ukraine cherchent sans doute à rendre le texte plus actuel, mais là encore, ça ne me paraissait pas très utile.
Pire, quelques problématiques sont balancées sans réflexion et sans suivi dans l'histoire. L'histoire survole les sujets et ne descend jamais en profondeur. Des passages sont véritablement problématiques. Quelques exemples :
- quand on apprend que la mère n'a révélé l'existence du père à sa fille qu'à l'adolescence : rien de plus ! On ne comprend pas pourquoi.
- quand la fille déclare au réfugié russe si elle a un petit ami, elle répond : « je suis asexuelle » et ça s'arrête là.
- quand la mère écrit dans son journal intime « Mon cher journal… voilà que j'écris comme Anne Franck, si sensible elle aussi » : franchement déplacé !
Le titre de l'ouvrage «
Ultrasensibles : une histoire de famille » laisse entendre que les liens familiaux en lien avec l'origine de l'ultrasensibilité seront abordés : il n'en est rien (pas de psycho-généalogie ici).
Le sujet est sérieux et n'a été, pour moi, qu'effleuré dans cette BD. le tout avec un fond d'ésotérisme un peu « cucu » (on retrouvera des références au tarot divinatoire, à l'ère du Verseau, etc.) qui est en contradiction avec le traitement scientifique qu'on se doit d'avoir sur un sujet de psychologie !
On apprend dans ce livre quelques caractéristiques des personnes hypersensibles (au travers d'un test) notamment le lien entre la sensibilité sensorielle (goût, odeurs, lumière, bruit, etc.) et la sensibilité relationnelle (lien aux autres). L'importance du lien avec la nature ou encore de la distance (physique ou sentimentale) entre les gens (au travers du lien mère-fille, du lien avec un étranger qui vient habiter à la maison…). Je me suis d'ailleurs reconnu sur certains points. de ce point de vue, c'est toujours agréable de lire un livre qui donne l'impression de nous comprendre.
Il est difficile pour moi de faire une critique sur cet ouvrage sans évoquer « le jour où… », une série de BD de Beka Marco et Cosson, qui abordent des sujets équivalents. Si les prétentions sont les mêmes, dans le cas de cette série, on ne retrouve pas les défauts d' « Ultrasensibles » car les sujets y sont développés avec plus de délicatesse, de sérieux et en exploitant réellement les connaissances scientifiques en psychologie. J'ai eu l'impression dérangeante à la lecture d' « Ultrasensibles » d'une sorte de copie de mauvaise facture.
En résumé, pour les dessins j'accorderais 4 étoiles mais pour le scénario/le texte seulement 1 étoile. Ce qui fait une moyenne de 2,5.