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Au milieu des ruines hantées par l'ours géant génétiquement modifié, il faut bien survivre, tant bien que mal. Et comprendre peut-être ce qu'est Borne, l'étrange petite créature trouvée un jour comme par hasard. Jeff VanderMeer au sommet de son art et de sa création, maître comme jamais des ruses du langage et des représentations.

Sur le blog Charybde 27 : https://charybde2.wordpress.com/2024/03/14/note-de-lecture-borne-jeff-vandermeer/

Jadis florissante cité scientifique dédiée principalement à la biotech, autour de l'imposant siège social et des nombreux laboratoires souterrains de la Compagnie, la Ville s'est effondrée, comme le reste de la civilisation. Ours géant survitaminé intellectuellement et manipulé génétiquement, ayant depuis longtemps échappé à ses créateurs corporate, Mord, avec ses centaines d'adeptes et d'auxiliaires, règne sur ses ruines cernées par le désert – qui menace chaque année de progresser. Une forme d'opposition au pouvoir de Mord semble exister, plus ou moins souterrainement, incarnée par la Magicienne et ses troupes discrètes d'enfants ensauvagés et quelque peu modifiés. Dans les interstices, une économie charognarde subsiste, friande de pièces détachées et d'artefacts biotech plus ou moins bien identifiés : on y trouve notamment Wick, bio-ingénieur renégat de la Compagnie, chassé en son temps dans des circonstances mal élucidées, et son associée et compagne, Rachel – qui est aussi la narratrice de ce roman, et bien davantage que ce qu'elle semble initialement laisser voir.

Lorsqu'un beau jour, peut-être par hasard, Rachel met la main sur une bien étrange créature qu'elle décide d'appeler Borne (il y a là un jeu de mots largement intraduisible en français autour de born et borne, naturellement), créature dont le développement imprévisible bouleversera peut-être bien ce petit monde en apparence si figé dans sa déliquescence presque terminale.

Au moins depuis « Veniss Underground » (2003, non traduit en français) et « La Cité des Saints et des Fous » (2001), Jeff VanderMeer nous a amplement démontré, bien au-delà de cette étiquette littéraire du « new weird » qu'il a tant contribué à façonner, aux côtés de son épouse Ann, de Neil Gaiman ou de China Miéville, qu'il compte aujourd'hui parmi les plus grands créateurs artistiques contemporains. Son audace perpétuelle a trouvé une juste consécration avec la trilogie du Rempart Sud en 2014(« Annihilation », « autorité » et « Acceptation »), dont le premier tome a fourni la carburant conceptuel du magnifique film éponyme d'Alex Garland, en 2018, avec Natalie Portman et Jennifer Jason Leigh.

Publié en 2017, traduit en 2020 par Gilles Goullet chez Au Diable Vauvert, « Borne » nous introduit avec ruse et flamboyance à un nouvel univers. Au milieu de ces gravats minés de pièges biologiques et technologiques, rebuts précieux et souvenirs délétères, ruines en perpétuel mouvement sous l'effet de la danse de l'ours, il se joue quelque chose comme une tragédie à huis clos, toute de chants et de contre-chants, de manigances innocentes et de non-dits menaçants. Il y a beaucoup de mensonges, de dissimulations, de travestissements et d'omissions dans ce magnifique roman de récupération, où affirmer toute forme de destin semble relever de la gageure absolue pour ses protagonistes, tous claudiquants à divers degrés.

En parfaite filiation avec son travail au sein de la trilogie du Rempart Sud, Jeff VanderMeer déploie ici toute sa puissance dans la création d'êtres et de lieux, mais oriente qui plus est son inventivité foisonnante du côté des frontières poreuses entre naturel et artificiel (« Par-delà nature et culture » dirait-on en une virevolte avec Philippe Descola), du côté de la mise en forme discrète d'une diplomatie apprenante (et Baptiste Morizot ne serait alors peut-être pas si loin) et du côté, en matière d'éducation et d'apprentissage « humains », de l'identité et de ses manifestations, éventuellement conflictuelles. Aussi insaisissable et protéiforme que le « Palafox » d'Éric Chevillard, Borne est comme lui un extraordinaire révélateur de contradictions et d'attentes à déjouer, par la création d'une langue et d'une écriture conçues bien à dessein – et c'est ainsi que la science-fiction, l'imaginaire, le new weird, comme toute littérature, se recréent toujours poésie efficace, perpétuellement hors d'atteinte des modèles de langage dont la statistique portée à échelle inimaginable se voudrait éventuellement souveraine.
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Borne de Jeff VanderMeer aux éditions Au diable vauvert

Dans un monde post-apocalyptique, Rachel est récupératrice dans une ville en ruine où les hommes se battent pour survivre. Un jour lors d'une mission auprès de Mord l'ours géant volant, elle découvre une chose vivante, sorte de masse gélatineuse, qu'elle ramène chez elle, la nomme Borne et s'y attache comme à un enfant. Mais la créature douée de parole et de réflexion grandit et menace l'équilibre précaire régnant dans la ville... 🐻

J'ai fait une erreur avec VanderMeer, j'ai débuté par Astronautes Morts (que j'ai beaucoup aimé ceci-dit).
J'aurais dû commencer par lire Borne qui met en place le monde apocalyptique où les deux histoires se déroulent.
On y découvre la ville détruite, la Compagnie et ses expériences aux effets dévastateurs, les monstres qui y ont été créés par biotechnologie... On y croise Mord l'ours gigantesque volant faisant régner la terreur dans la ville, la Magicienne manipulant des enfants défigurés, des renards intelligents (pas encore bleus), ainsi que les fameux astronautes morts... 👨
L'histoire y est cette fois-ci linéaire, jonglant entre science fiction et fantasy. On s'attache à Rachel la narratrice, à Wick, son compagnon ayant travaillé pour la Compagnie, ainsi qu'à Borne qui découvre le monde, la vie, les sentiments et la violence...
L'écriture est fluide et addictive, belle et poétique, l'univers weird à souhait, le bestiaire foisonnant et toujours malaisant. Un roman d'apprentissage glauque et attendrissant, dans lequel il ne faut pas toujours chercher à comprendre ce qu'on lit...
Difficile pour moi par contre de ne pas me mélanger avec les événements du livre suivant (tant pis 🤷).

Et merci à la Bibliothèque de l'Espace Maurice Carème pour le prêt. 📚 (et à ma fille pour les peluches 🦊🐻, même si on a pas trouvé d'astronaute mort pour illustrer 😁 )
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Lors d'une sortie en vue de trouver de quoi survivre, Rachel tombe sur un être bizarre, étrange. Elle ne sait pas ce que c'est, ne peut même pas bien dire à quoi cela ressemble. Mais elle s'attache immédiatement à cet être. Elle lui trouve un nom, « Borne ». Puisqu'en quelque sorte, c'est elle qui l'a amené à la vie en le trouvant (« born » signifie « naître » en anglais, pour ceux qui, comme moi, ont un niveau dans cette langue assez limite). Avec lui, avec cet « hybride d'anémone de mer et de calmar », Rachel va ouvrir les yeux sur son monde.

Cet auteur, cela fait un moment que je tourne autour. J'avais regardé sa trilogie du Rempart Sud à la médiathèque. J'ai entamé sa très curieuse Cité des Saints et des Fous. Mais le moment n'était pas adéquat et je l'ai rapidement abandonnée, en me disant que plus tard… Enfin, vous connaissez ça. Et puis j'ai découvert le titre du roman qui paraît en ce mois de septembre : Astronautes morts. Coup de foudre. Mais je me suis rapidement aperçu que ce récit prenait place dans un univers déjà décrit dans une autre oeuvre. Or, je déteste débarquer au milieu d'un spectacle déjà commencé (la même mésaventure m'est arrivée cet été pour la lecture de la mer de la tranquillité d'Emily St. John Mandel). Chacun d'entre nous a ses lubies. Donc, j'ai laissé de côté mes astronautes pour aller vers Borne.

Mais je connaissais la réputation de cet auteur. Et le peu que j'en avais lu, associé aux premières lignes de ce roman proposées par Zoé sur son blog que je suis activement, m'inquiétait un peu. Et je n'ai pas été déçu. On parle de weird science, et ce terme convient tout à fait. Comme chez Jeff Noon (serait-ce une affaire de prénom ? Jeff ?), dans Un homme d'ombres par exemple, tout prend des proportions étranges. Même ce qui pourrait être banal, courant, ne l'est pas. Et là, de toute façon, pas de banalité. Car Jeff Vandermeer met en place un monde hors norme, empli de ses visions. La trame peut en sembler assez classique : scène post-apocalyptique, plusieurs clans s'affrontent, les héros sont au milieu de tout cela et tentent de survivre, un ou deux bons gros secrets pimentent le tout et leur révélation apporte un nouveau regard sur l'histoire. Mais la façon dont l'auteur met tout cela en scène et, surtout, les images qu'il y ajoute ! Je ne suis pas certain que j'aimerais pénétrer l'esprit de M. Vandermeer.

Car tout change de forme. Sortir de son refuge est synonyme de mise en danger. le moindre être vivant semble n'exister que pour faire peur, faire mal, piéger. Même la rivière qui traverse la ville est empoisonnée, repoussoir atroce malgré la soif qui se fait sentir en permanence. En avançant dans les rues, on trouve des « pendus aux lampadaires brisés », des « cadavres mutilés et brûlés ». Car la ville est le terrain d'une guerre. Entre la Compagnie, qui semble avoir créé nombre des horreurs qui tuent encore, malgré sa déchéance, et un groupe dirigé par la Sorcière, dont on ne sait pas grand-chose au début du roman. Et surtout, la ville est sous le pouvoir de Mord, créature créée par cette même Compagnie : un « ours géant » capable, lui, de boire sans dégât dans la rivière empoisonnée ; dont les griffes et les crocs sont capables d'« éviscérer et éliminer en un éclair » n'importe quoi ; qui vole au-dessus de son domaine et tue, sans pitié, sans même s'en apercevoir tout et n'importe quoi. Un monde de folie où survivent, on ne sait comment, plusieurs individus. Dont Rachel.

Rachel, qui forme avec Wick, un couple étrange mais stable. Ce dernier a été lié à la compagnie. On ne sait pas bien comment au début. Juste qu'il semble avoir été un inventeur, un créateur. Et qu'il continue, avec ses faibles moyens. Mais à la Vandermeer. On n'est pas dans un labo design. Non. Wick a une piscine où nagent ses embryons de création. Tout est monstre, de toute façon. Et, la plupart du temps, monstre menaçant de par sa propre nature. Face à cette hostilité permanente, Rachel reste en grande partie humaine. Mais une humaine affûtée, réduite à sa part animale, qui se méfie de tout et est prête à se battre, même contre ses congénères, afin d'obtenir de quoi tenir encore quelques temps. L'arrivée de Borne va tout changer. L'équilibre est rompu : Rachel délaisse un peu Wick, son mentor, son amant, au profit de Borne, son « bébé ». La voilà mère, aux prises avec les affres de l'éducation. Car Borne grandit et veut apprendre. Et cela va tout changer.

Je ne me frotte pas si souvent que cela au genre New Weird, mais j'en sors souvent plutôt satisfait. Et cette plongée, improvisée, dans le monde de Borne ne fait pas exception à la règle. Si je ne sors pas transcendé par cette lecture, j'ai passé un moment très agréable, occupé à mettre des images sur les mots de Jeff Vandermeer, regrettant parfois de l'avoir fait ; à me demander si tout finirait comme je l'avais prévu (en grande partie, malgré quelques surprises qui m'ont étonné) ; à observer l'irruption de ces astronautes morts dont je vais bientôt lire le roman.
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J'avais entendu dire que ce roman de science-fiction post-apocalyptique était vraiment inusité, alors je m'attendais à être étonnée, déstabilisée, voire choquée, par ma lecture. Peut-être est-ce parce que mes goûts littéraires sont déjà trop bizarres en-soi, mais je n'ai pas trouvé ce livre vraiment étrange. Certes, certains éléments de l'histoire sont fantaisistes – notamment la présence d'un ours volant godzillesque hors de contrôle détruisant tout sur son passage! –, mais ça me semble aller un peu de soi lorsqu'il est question de littérature de l'imaginaire...

C'est avant tout un roman permettant de réfléchir sur ce que cela signifie que d'être humain. Dans un futur peuplé de créatures biotechnologiques et de mutants, la protagoniste en vient à s'interroger. Faut-il être humain pour être une personne? Où se trouve la ligne de démarcation? Et peut-on perdre son humanité à force de voir ou de commettre des atrocités? Est-on encore quelqu'un si on ne sait plus qui on est?

Même si je m'attendais à être davantage surprise par ma lecture, ça reste un livre intéressant. Des personnages crédibles et attachants dans un univers original et des questionnements existentiels : que demander de plus d'un roman de science fiction?
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Dystopie post-apocalyptique poétique, Borne est un roman atypique, inclassable, qui déstabilisera les repères des lecteurs de SF plus traditionnelle, surtout si ces lecteurs n'ont encore jamais fait d'incursion dans le genre New Weird, dont VanderMeer est l'un des porte-étendard.

Le New Weird est un genre de fiction expérimentale, mettant en scène des mondes étranges, cauchemardesques, bizarroïdes et inquiétants qui ne suivent pas les mêmes règles que notre monde. Les intrigues se concentrent généralement sur l'exploration de ces mondes étranges, les mystères qui les entourent, ainsi que sur les conséquences psychologiques et émotionnelles que cela engendre chez les personnages. Et s'il y a un New Weird, il y a forcément un Old Weird, et celui trouverait ses lettres de noblesse dans les oeuvres démentes de Lovecraft.

Ma première incursion dans ce genre littéraire, elle s'est faite avec un autre roman de VanderMeer, Annihilation. Ça a été un énorme coup de coeur - un coup de foudre dirais-je même. Aussi bien cinématographique que littéraire. Une véritable claque. J'ai été obsédée par le film (disponible sur Netflix), puis par le roman. Des jours durant. L'intrigue était complexe, désincarnée, bizarroïde. Terrifiante dans son étrangeté absurde.

Autant dire que j'avais des attentes plutôt importantes pour Borne. Dans ce roman-ci, on retrouve un univers fondamentalement halluciné, qui déstabilise dès les premières pages en évoquant l'hégémonie d'un tyran cauchemardesque sur l'ensemble des habitants d'une ville en ruines, un ours tueur géant aux proportions colossales. Puis, viendront s'ajouter pléthore d'éléments de décorum, étranges et bizarroïdes, à l'instar d'enfants mutants, de bio-tech à forme animale, d'astronautes morts et de Borne, personnage central du roman. Mais est-ce vraiment un personnage, une personne ? N'est-ce pas plutôt un objet, un animal, une technologie, un être vivant, ou bien toute autre chose dérangeante et inconnue ? Est-ce dangereux ou inoffensif ? Est-ce amical ou hostile ?

Il faudra lire le roman pour avoir les réponses... ou pas ? Dans les romans de VanderMeer, il faut accepter que les mystères n'obtiennent pas toujours des résolutions terre-à-terre. L'interprétation et les fins ouvertes ne doivent pas vous faire peur, au risque d'être frustré. Il faut également avoir l'esprit ouvert et suspendre son incrédulité, accepter que l'univers qui s'ouvre à vous - le monde, les personnages, le roman - ne suit pas les règles auxquelles nous sommes habitués. C'est bizarre, et c'est un euphémisme.

Mais, j'ai trouvé ce roman moins hermétique (je n'oserais pas dire plus accessible quand même) que Annihilation, car l'histoire s'incarne dans son trio de personnages et fait la part belle aux sentiments et aux émotions, là où Annihilation est complètement désincarné, les personnages n'ayant même pas de nom. Si dans Annihilation, le véritable protagoniste est la Zone X, environnement qui porte littéralement les trois romans de la trilogie, dans Borne, ce sont les personnages qui investissent la zone, ici la ville. C'est avant tout l'histoire des personnages qui nous est racontée, et à travers eux, celle de cette ville en déliquescence.

J'ai trouvé ce roman plus poétique que cauchemardesque, même si ça reste une histoire angoissante et violente, où la mort rode partout, tout le temps. Je l'ai trouvé beaucoup moins nihiliste qu'Annihilation, avec une bonne dose d'espoir et d'optimisme, comme un rayon de soleil filtrant à travers les nuages noirs d'une tempête. C'est sombre, mais tout n'est pas perdu.

J'ai donc apprécié ma lecture, et je me suis attachée à Rachel, Borne et Wick - une sorte de famille dysfonctionnelle dont la survie de chaque membre dépend de la survie des autres. Je ne m'attendais pas à ce que l'amour soit si présent dans ce roman, et pourtant, à la fin, cela fait beaucoup de sens.

Bientôt, sortira Les astronautes morts, nouveau roman de l'auteur à paraître en France (ils sont si peu nombreux !) Et c'est une séquelle à Borne, prenant place dans le même univers. L'occasion (peut-être) d'avoir d'autres réponses aux questions qui sont restées en suspens. Je le lirai sans aucune hésitation.
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Enfin, j'ai lu Borne. Après une 1ère tentative loupée il y a deux ans, et la redécouverte de ce texte avec ses premières lignes, j'ai enfin vaincu. Est-ce que pour autant, ce fut le coup de foudre espéré ? Malheureusement, non. Ce fut une lecture globalement plutôt plaisante mais pas aussi bouleversante que je l'imaginais.

Alors oui, c'était plaisant, étonnamment. Je dis étonnamment, car les premières lignes m'avaient paru opaques, complètement WTF. Je m'étais alors fait une montagne de ce bouquin. Mais finalement, pas du tout. Ca se lit même tout seul, et c'est très facile d'accès. Pas de métaphores étranges en nombre, pas de récit complètement farfelu et labyrinthique. Au contraire : des chapitres assez courts, avec une entête qui nous explique ce dont il sera question, une narration au « je » et au passé, un récit linéaire.

J'ai adoré Borne, cette étrange créature, qui se métamorphose tout au long du texte. Il est une véritable éponge, un caméléon qui s'adapte à son environnement. Evidemment, les tentacules ne sont jamais loin, et les formes un peu étranges post LSD aussi. Borne est un texte profondément weird, brutal, corporel, basé sur les sensations, et en même temps c'est beau, vraiment beau. J'ai adoré le lien entre cette créature et Rachel qui « l'élève », lui explique la vie, l'humanité… Sans grand succès, il faut bien le dire. Mais certaines scènes sont particulièrement touchantes. Borne est un reflet absurde de ce que nous sommes, il nous montre nos travers, nos non-sens, nos contradictions les plus profondes.

Malgré tout, le roman m'a tout de même ennuyée une bonne partie de la lecture. C'est assez long, peu rythmé, et comme je le disais, linéaire. Borne est un post-apo davantage centré sur les relations humaines face à l'adversité. D'ailleurs, on ne croisera que très peu d'autres personnages, le roman reste très centré sur Rachel, Wick et Borne. Evidemment, leurs vies sont marquées par les deux antagonistes Mord et la Magicienne (dont j'ai eu du mal à saisir l'origine et les motivations, d'ailleurs). Sur ce plan, pas mal de choses restent floues pour moi. Alors j'ai aimé l'esthétique de ce roman, son message dans les grandes lignes, mais un peu moins son récit, finalement, et son univers peu marqué.
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Premier livre de Vandermeer que je lis et ce ne sera pas le dernier.
Je n'ai pas eu de coup de coeur pour le livre mais en revanche, je pense en avoir eu un pour la créativité de l'auteur. Sa capacité à créer un monde unique est indéniable, qu'on ait aimé ou non cette histoire, on ne peut que reconnaître son talent.

En lisant ce livre, il faut accepter d'être perdu.e. L'univers est si particulier, qu'il faut du temps pour l'appréhender et surtout pour comprendre ce qu'on lit puisque l'auteur ne donne pas vraiment de clé pour s'y retrouver.
On pourrait alors se dire qu'il faudrait se rattacher aux personnes mais même là, c'est compliqué même s'ils ne sont que 5. Rachel la narratrice (une jeune femme a qui il manque une partie de sa mémoire), son conjoint (un homme ultra secret) et 3 personnages que je n'arriverai pas à catégoriser.

Tout démarre donc avec Borne, ce personnage non identifié qui évolue tout au long de l'histoire, captivant autant qu'insaisissable. Il est aussi agréable qu'il inspire la peur parce qu'on ne sait rien de lui et de ses capacités.
Parallèlement à cette évolution, on suit la vie et les pensées de Rachel, le but étant de découvrir les mystères qui l'entourent elle mais aussi son compagnon pour pouvoir les saisir dans toute leur complexité.

Je n'ai pas saisi tous les détails de ce livre et une autre lecture serait peut-être nécessaire pour me donner un peu plus de visibilité mais je pense avoir compris l'essentiel.
La fin du livre nous permet de comprendre comment ce monde a pris forme et pourquoi on en est arrivé là. Mais ce qui m'a le plus marqué comme message est peut-être celui qui consiste à faire comprendre que rien n'est perdu et que tout peut se créer tant qu'on y met du sien.
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Comme dans la Trilogie du rempart Sud, Jeff Vandermeer nous plonge dans un univers cauchemardesque et étrangement beau, qui soulève de nombreuses questions et garde une grande part de mystère jusqu'aux dernières pages. On a ici affaire à une ville ravagée par la pollution, peuplée de créatures biotech fabriquées par la Compagnie, dont le métamorphe Borne, qui donne son nom au roman. L'évolution de cette créature et sa relation avec la récupératrice Rachel (sa « mère » adoptive peut-on dire) est le point que j'ai préféré dans le roman. J'ai été fasciné de voir Borne grandir et évoluer, apprendre à parler, changer son apparence, exprimer son besoin d'autonomie, influencé par l'éducation de Rachel et sa nature profonde (car, contrairement aux êtres humains, Borne a, semble t-il, été conçu dans un but précis, que je ne dévoilerai pas). Jeff Vandermeer en fait un personnage complexe et ambivalent, à la fois très proche (par son utilisation du langage, son éducation) et très éloigné du fonctionnement humain, attachant et dangereux. Cela se ressent d'ailleurs dans les sentiments de Rachel à son égard, qui naviguent de l'amour maternel à la prise de conscience du danger représenté par Borne, avec la tentation de le « sauver » de sa nature profonde. J'ai beaucoup aimé aussi la poésie des descriptions, des couleurs qui apparaissent à la surface de Borne pour exprimer des émotions, au surréalisme des créations biotechnologiques.
Avec toutes ces qualités, j'ai eu cependant du mal à avancer dans ce roman et à le terminer. La faute peut-être à une narration que j'ai trouvée trop statique et linéaire : malgré la beauté de l'univers, une grande part du roman se déroule aux Falaises à balcons (le domicile de Rachel, Wick et Borne). J'ai été frustré du manque d'exploration et de développement des personnages secondaires, notamment la Magicienne, ou de ne pas en apprendre plus sur l'ours géant Mord et ses intermédiaires, restés pour moi à l'état d'esquisse. J'ai aussi trouvé que cet univers n'avait pas la profondeur et le pouvoir de fascination de la zone X dans la Trilogie du rempart Sud. Ça reste malgré tout un roman unique, et un exemple pour moi des possibilités offertes par la littérature en terme de construction d'univers hors-normes, qui s'affranchissent des règles du réel pour offrir des expériences complémentent folles au lecteur.
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Un roman post-apo cyberbiopunk décapant et bien barré.
Rachel est une survivante dans une immense ville en ruine dont on a oublié le nom. La guerre, la misère et la pollution avait déjà dévasté la mégalopole avant qu'apparaisse Mord, un ours de 100métres de haut qui vole et est constamment en rogne quand il ne dort pas. Rachel est ce qu'on appelle une "récupératrice"(classique du genre); elle sort de sa planque pour ramasser de quoi manger, boire, se défendre bref: survivre. Elle est tellement expérimentée et intrépide qu'elle se permet même de fouiller la fourrure de Mord quand il dort. C'est là qu'elle découvre Borne, une biotech étrange qui ressemble à un poulpe à l'envers vert et violet. Elle le ramasse sans même savoir si c'est une plante, un objet, un animal ou un champignon. Petit à petit borne grossi, se met à parler, à éprouver des émotions et Rachel développe un lien maternel à son égard.
Rachel est cachée dans "les falaises à balcons" (on en déduit que c'est un énorme immeuble à moitié en ruine) avec Wick un autre survivant paranoïde qui troc des robots scarabées que les survivants mettent dans leurs oreilles pour lire les souvenirs qui y sont enregistrés (oui, c'est perché). Ce qui fait de Wick un genre de dealer puisque pouvoir échapper à une réalité si dure en consommant les souvenirs des scarabées devient vital pour beaucoup.
La solitude et la menace mortelle sont constante, Rachel parle très peu des autres humains ayant survécu, la plupart sont des enfants mutants sauvages avec des membres bioniques ou des familles faméliques. Il y a malgré tout des rapports de force et de territorialité qui étoffent encore la complexité des ruines, la "Magicienne" semble être un genre de parrain de mafia qui possède des technologies suffisantes pour asservir ses ouailles, certaine zone sont "sous le contrôle" de Wick et donc de Rachel. le reste est à Mord, qui dévore et détruit tout sur son passage. On entend également souvent parler de "la Compagnie" une entreprise de biotechnologie qui aurait fait la prospérité de la ville avant d'en faire la ruine, pour finalement laisser s'échapper Mord... Personne ne sait vraiment ce qu'il se passe encore dans le bâtiment de la firme mais une chose est sûr; ils ont complétement vrillé...

Les livres de Vandermeer sont très dépaysants, les mondes qu'il créé débordent de bizarreries. Tout y est coloré et bruissant de vie, à la fois menaçant et fascinant, quasi psychédélique. La nature et la technologie se sont hybridées en un carnaval foisonnant et foutraque. Ce future n'est clairement pas désirable mais qu'est ce qu'il peut être beau. L'odorat y est aussi omniprésent, Rachel décrit des odeurs quasi-inconcevables ce qui accentue l'étrangeté et la poésie de son monde. Les émotions et la psychologie des personnages sont très détaillés ce qui nous entraine au coeur de leur relations, de leurs défiance, de leurs espoirs. Vous l'aurez compris le récit de Rachel est un récit intime et viscéralement terrestre, Borne devient son enfant, elle l'aime mais tous ignorent ce qu'il est. Ce roman m'a fait passer par plein d'humeurs, c'est triste, enjouant, parfois révoltant. Je recommande chaudement, son écriture est riche et son imagination sans limite, c'est Jérôme Bosch qui rentre d'un voyage dans le futur sous LSD.
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C'est l'histoire d'un blob qui change le monde. Plus sérieusement, Borne, c'est surtout un ovni littéraire à découvrir.

Le début du livre est totalement obscur: on parle quand même d'un ours volant de plusieurs étages dans un monde post apo

Et pourtant, au fil des pages, l'histoire se transforme en une sorte de fable humaniste.

Une jeune femme prend sous son aile une créature et lui apprend à devenir une personne, à trouver un sens à son existence dans une société au bord du gouffre.

On va pas se mentir, l'écriture est un brin complexe et l'histoire est quand même totalement décalée et zarb.
Et pourtant, cette femme qui éduque cette créature comme un enfant a un côté touchant et unique qui est hyper réussi dans son étrangeté.

C'est le genre de roman qui vous marque parce qu'il y a de vrais messages sur la nature humaine qui résonnent chez tout le monde. Faut juste passer le cap de l'étrangeté

Si vous êtes déjà bon lecteur, ou que vous voulez tenter une lecture originale, Borne saura vous séduire.
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