AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

Pauline Verduzier (Autre)
EAN : 9782843379895
Anne Carrière (30/10/2020)
4.39/5   18 notes
Résumé :
La classification sociale des femmes en fonction de leur sexualité réelle ou supposée opère une distinction entre les « convenables » et les « indécentes ».
Du côté des mauvaises filles, on trouve notamment les travailleuses du sexe. Des personnes invisibilisées ou représentées de manière stigmatisante, a fortiori en temps de pandémie. Il y a aussi les clientes du travail du sexe, qui existent et qui remettent en question le marché traditionnel de la séducti... >Voir plus
Que lire après Vilaines fillesVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (4) Ajouter une critique
C'est quoi une fille « normale », une fille « bien », « gentille » ?
Et qui sont les mauvaises femmes ? Et moi, où est ce que je me situe entre la « maman » et la « putain » ?
Je vois dans sa remarque une forme de rappel. Une manière de me dire : Ne nous observe pas avec un regard surplombant si tu veux écrire à notre sujet, car nous ne sommes pas si différentes que cela. Et qui es tu au juste pour t'intéresser à tout ça ?"

Celle à qui on demande qui elle est, c'est Pauline Verduzier, journaliste trentenaire, spécialiste des questions de genre et de sexualités.

Dans son dernier essai, "Vilaines filles : Les travailleuses du sexe, les clientes et la journaliste" paru fin octobre dernier aux éditions Anne Carrière- dans leur nouvelle collection Sex Appeal- cette membre du collectif de journalistes indépendantes "Les Journalopes" questionne les stéréotypes liées à la prostitution.

En rencontrant une cinquantaine de travailleuses du sexe, mais également des clientes (attention : pas des clients, renversant la conception hétérnormée de la prostitution) elle dresse un état des lieux assez édifiant des normes sexuelles du monde d'aujourd'hui .

Prostituée de rues, mais aussi escorts girls, dominatrices, masseuses érotiques, qu'elles exercent leurs activités dans une maison close suisse, une rue à Paris ou une maison close lesbienne d'Amsterdam , toutes ces travailleuses de sexe dans l'ensemble de leur corporation ont droit à la parole dans ce livre-enquête très fouillé sur la question.

Ce livre rejoint un peu en quelque sorte, mais dans une veine plus journalistique que romanesque, le travail amorcé par Emma Becker avec La Maison.

Comme Emma Becker, Pauline Verduzier n'hésite pas à se mettre en scène dans son livre; non pas comme travailleuse du sexe mais en interrogeant constamment son propre vécu sexuel et ses représentations sur la question.

La journaliste s'empare d'un sujet souvent trop caricaturé par les médias en donnant en priorité la parole aux premiers concernés et en n'hésitant pas à politiser son sujet

Voulant à tout prix contourner les stigmatisations trop facile, Pauline Verduzier parvient à combattre la représentation sociale dominante, issue de la culture patriarcale capitaliste traditionnelle, qui aurait tendance à classer les femmes selon leur non respectabilité en fonction de leur comportement et position par rapport au sexe.

Un essai aussi salutaire que donnant un point de vue original sur ce sujet qui reste assez tabou dans la société occidentale traditionnelle.
Lien : http://www.baz-art.org/archi..
Commenter  J’apprécie          260
Vilaines Filles, un essai qui éclaire vraiment sur les questions éthiques et sociétales de la prostitution, sur le ressenti des travailleuses du sexe (et travailleurs d'ailleurs même si minoritaires) et même sur les client-e-s. J'ai appris beaucoup de choses, que ce soit sur certaines pratiques mais surtout sur le ressenti de tous ces protagonistes.
Néanmoins, je trouve que ça dépeint, dans certains paragraphes, un côté trop « sympa » de la prostitution, comme un métier typique, qui serait l'adage de personnes très libres sexuellement, avec des clients respectueux et parfois même attentionnés. Et ce côté positif du travail du sexe me dérange car déjà la majorité des travailleurs du sexe sont des gens très précaires qui n'ont pas le choix, et par « pas le choix » j'entends que ce métier est mieux payé que la plupart des travails dit alimentaires, et que le salaire est horaire attire une partie de la population « par défaut ». J'ai trouvé beaucoup de passage trop optimistes, trop enjolivés, de ce type de métier très dangereux voire parfois dégradant.
De plus la fin du livre, qui parle un peu plus des violences et des difficultés (même si pas assez à mon goût), aborde le féminisme en disant qu'il tend parfois à culpabiliser les femmes qui auraient des comportements « qui ne font pas avancer le féminisme », idée avec laquelle je peux être d'accord à l'échelle individuelle (idem lorsque l'on blâme une personne écolo parce qu'elle va se faire un kebab !) mais à celle d'identité publique qui pour moi se doit de montrer l'exemple.
Dernier point de critique c'est l'aspect parfois trop subjectif de certains passages, trop personnels, je pensais plus lire un essai objectif et davantage sourcé, pour inciter à lire une ribambelle de livres sur le même sujet.

Néanmoins, je dirai que même si j'ai beaucoup de choses à dire, à critiquer, avec lesquelles je ne suis pas d'accord, j'ai tout de même énormément apprécié ce livre que j'ai trouvé intéressant, approfondi et qui me fait me questionner. A lire à mon sens pour cheminer!
Commenter  J’apprécie          20
Dans son premier livre, la journaliste Pauline Verduzier part à la rencontre des « vilaines filles » : les travailleuses du sexe et les clientes féminines des TDS. L'autrice m'a fait voir le travail du sexe sous des angles que je n'avais encore jamais envisagés, en interrogeant par exemple une directrice d'agence de TDS lesbiennes ou une domina qui oblige ses soumis à se repentir de la colonisation. Elle interviewe également quelques TDS non binaires. En outre, elle fait une distinction très claire entre la prostitution et la traite des êtres humains. Elle n'omet pas les répercussions de la pandémie de COVID-19 et de la pénalisation des clients, les conditions précaires de certaines TDS, ainsi que leurs féminicides passés sous silence (ce qui m'a d'ailleurs fait penser au dernier clip de Stromae qui met en scène l'enterrement fictif d'une prostituée au Cinquantenaire à Bruxelles).

La neutralité est impossible à envisager quand on traite d'un sujet comme la prostitution mais Pauline Verduzier réussit presque à l'atteindre en donnant la parole à des concernées d'horizons divers. En outre, son style se rapproche du journalisme narratif, elle s'intègre dans son enquête en y apposant sa propre expérience des rapports sexuels hétéros parfois monnayés sans qu'on le conscientise. Elle admet également ses propres contradictions. Sa posture est très humble. En apposant son histoire à celle des autres femmes (j'ai d'ailleurs beaucoup apprécié sa manière de restituer les interviews en gardant une position très neutre et en les citant constamment, même dans ses reports d'évènements comme un collage dans la rue), elle se situe au même niveau qu'elles.

J'ai eu un coup de coeur pour « Vilaines filles » et je ne peux que le vous conseiller. Pour ma part, cette lecture m'a donné envie de me pencher sur des ouvrages plus théoriques comme ceux de Françoise Gil ou Lilian Mathieu, que Pauline Verduzier cite dans son livre.
Commenter  J’apprécie          00
La façon dont cette journaliste dépeint la réalité de ce phénomène est très incisive, constructive et révélatrice. On alterne entre ses pensées, et des témoignages tous plus éclectiques les uns que les autres, entres escorts boy, hôtesse en maison close, dominatrices et masseurs tantriques, on plonge dans l'intimité profonde de ces indivus qui exercent le travail du sexe, du charme.
Ce livre aide à remettre en cause son propre système de croyance sur la condition humaine, tant féminine que masculine.
Commenter  J’apprécie          60

Citations et extraits (5) Ajouter une citation
"C’est quoi une fille « normale », une fille « bien », « gentille » ?
Et qui sont les mauvaises femmes ? Et moi, où est ce que je me situe entre la « maman » et la « putain » ?

Je vois dans sa remarque une forme de rappel. Une manière de me dire : Ne nous observe pas avec un regard surplombant si tu veux écrire à notre sujet, car nous ne sommes pas si différentes que cela. Et qui es tu au juste pour t’intéresser à tout ça ?"
Commenter  J’apprécie          40
La figure de la « femme émancipée» est un concept qui renvoie, encore une fois, à des injonctions paradoxales. D'un point de vue féministe, coucher à tout-va avec des hommes via Tinder est à la fois une liberté et une forme d'oppression, en ce que cela perpétuerait la soumission au regard consumériste masculin sur les corps féminins. Selon les points de vue, se dénuder est à la fois une conquête et un asservissement. Avec cet argument qui revient souvent que tel ou tel comportement féminin « ne tait pas avancer le féminisme». Coucher avec des hommes ou se marier avec eux, les faire payer pour coucher avec soi, montrer son cul, enfanter, se voiler, tapiner, être bonne sœur, femme au foyer, modèle de nu ou instagrameuse, « ça ne fait pas avancer le féminisme». Cet argumentaire m'est de plus en plus insupportable. Les femmes portent le poids des oppressions sexistes sur leurs épaules, mais sont aussi les garantes perpétuelles de leur propre émancipation, soupçonnées d'alimenter elles-mêmes l'oppresseur. Si le sexisme intériorisé est une réalité qui fait qu'on peut, en tant que personne dominée, reprendre à son compte le discours du dominant, il ne justifie pas ces accusations. Accuserait-on l'ouvrière d'être un suppôt du capitalisme parce qu' elle s'échine sur sa ligne de production pour nourrir sa famille?
Commenter  J’apprécie          00
[...] cette visite m'a fait toucher du doigt la question du trauma dans le travail sexuel. Epineux sujet qui parle, là encore, de ses représentations. Des études relèvent des taux importants d'antécédents de violences sexuelles chez les TDS. C'est par exemple le constat des travaux de la chercheuse, psychologue et militante américaine antiprostitution Melissa Farley, pour qui son exercice est lié à un stress post-traumatique consécutif de violences sexuelles vécues dans l'enfance. Ce type d'approche psychologique du travail du sexe postule que la plupart des prostituées se remettraient dans les conditions d'un traumatisme passé en se prostituant, et qu'elles ne supporteraient cette condition qu'en dissociant en permanence. Cest-à-dire en expérimentant un processus psychique de dissociation traumatique qui inhiberait les émotions négatives ressenties pour mieux supporter un nouveau traumatisme, en essayant cette tois-ci de créer un sentiment de contrôle.
Commenter  J’apprécie          00
Le féminisme consiste à respecter la parole et les besoins de chaque femme, qui sait ce qui peut l’aider dans son contexte personnel. Il s’agit d’entendre, d’écouter, de proposer l’aide ou les informations demandées et de ne pas dicter quoi que ce soit à l’autre quand ce n’est pas sollicité. Le féminisme, ce n’est pas vouloir libérer la femme à sa place, ce qui revient à une autre forme de contrôle.
Commenter  J’apprécie          00
Je ne juge pas qu’un comportement féminin soit plus féministe qu’un autre, parce que le seul féminisme qui vaille est celui de la solidarité avec les réalités de chacune. Je ne pense pas non plus qu’établir une unique façon de s’accomplir pour les femmes, une unique forme d’émancipation, soit réellement émancipateur.
Commenter  J’apprécie          00

autres livres classés : prostitutionVoir plus
Les plus populaires : Non-fiction Voir plus

Lecteurs (95) Voir plus



Quiz Voir plus

Les emmerdeuses de la littérature

Les femmes écrivains ont souvent rencontré l'hostilité de leurs confrères. Mais il y a une exception parmi eux, un homme qui les a défendues, lequel?

Houellebecq
Flaubert
Edmond de Goncourt
Maupassant
Eric Zemmour

10 questions
566 lecteurs ont répondu
Thèmes : écriture , féminisme , luttes politiquesCréer un quiz sur ce livre

{* *}