AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
EAN : 9782823619928
256 pages
Editions de l'Olivier (07/10/2022)
3.44/5   8 notes
Résumé :
Débrouille-toi avec ton violeur est un recueil de textes écrits et traduits par des femmes révoltées, fortes, indignées par l'injustice et la laideur. Miaki Ono s'insurge contre la bestialité de tout acte sexuel et la mise en condition des filles pour qu'elles acceptent comme étant naturel d'être pénétrées par des mâles. Molly Hurricane, plus politique, est en révolte contre les vainqueurs éternels et leurs mensonges, contre ceux qui ont le pouvoir. Maria Soudaïeva,... >Voir plus
Que lire après Débrouille-toi avec ton violeurVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Grandes traductions : trois textes insurgés de femmes post-exotiques. Cinglant, intense et magique.

Sur le blog Charybde 27 : https://charybde2.wordpress.com/2024/04/05/note-de-lecture-debrouille-toi-avec-ton-violeur-infernus-iohannes/

Une fois n'est pas coutume, le 46ème ouvrage du corpus post-exotique « officiel » commence par un avant-propos qui en précise les contours critiques. Publié en octobre 2022 chez L'Olivier (la maison qui publie par ailleurs les textes non destinés à la jeunesse de Manuela Draeger), « Débrouille-toi avec ton violeur » voit aussi apparaître, pour la première fois depuis 2008 et l'arrivée de Lutz Bassmann, un nouvel hétéronyme, Infernus Iohannes étant le nom de plume retenu par un collectif d'autrices et de traductrices s'inscrivant dans le mouvement post-exotique. le recueil, en sus de son savoureux et hautement amorçant avant-propos, regroupe trois textes insurrectionnels de femmes : Miaki Ono dénonce la présence inamovible du viol, préhistorique et reptilien, dans le coït, quels que soient les étais, vagues ou décidés, que la polis, la société, la psyché ou l'amour tentent de dresser sur son chemin, Molly Hurricane dénonce l'abus de pouvoir permanent de tous ceux qui prétendent représenter et diriger nos destins (autrement que par le commander en obéissant des néo-zapatistes), Maria Soudaïeva (qui rejoint ainsi officiellement, par Infernus Iohannes interposé, le corpus post-exotique dont elle était, depuis la première parution de « Slogans », une compagne de route déterminante, au statut resté néanmoins ambigu jusqu'ici) jette ses dernières forces, politiques et chamaniques, dans l'ultime bataille, celle qu'enfin il ne faudrait pas perdre – même si sa nature finale et définitive ne se laisse pas identifier si facilement.

Comme le laissait plus qu'entendre le magnifique avant-propos, si ce recueil est du domaine de l'insurrection, il est sans doute avant cela encore de celui de la langue et du langage – de leur traduction et de leur performance. Mine de rien, le collectif anthologiste Infernus Iohannes nous propose ici une gradation, voire une authentique escalade : feignant volontiers de délaisser les nomenclatures et les taxinomies du « Nom des singes » ou les listes et les pondérations du « Post-exotisme en dix leçons, leçon onze » (même si leurs réseaux souterrains d'irrigation continuent ici leur travail comme dans tout le reste du corpus post-exotique), « Débrouille-toi avec ton violeur » s'immisce en profondeur dans le choix des registres à retenir pour ces luttes, luttes de plus en plus proches de l'ultime, à mesure que s'approche l'échéance de l'opus n°49 de l'ensemble de l'oeuvre.

Miaki Ono disserte, de manière obsessionnelle en apparence, tant il lui faut affirmer sa thèse contre les dizaines d'objections (non formulées ici directement, mais terriblement présentes), et met dans l'exercice de plus en plus d'énergie à mesure qu'elle réalise – intellectuellement et donc charnellement – la résistance reptilienne qu'elle rencontre nécessairement dans sa dénonciation d'un enracinement si profond du viol. Molly Hurricane hausse le ton d'un cran voire de plusieurs : sa colère s'incarne vite en diatribe, en imprécation et en flot tempétueux, multipliant les points d'exclamation, les injonctions et les phrases raccourcies par l'urgence de faire partager, ici et maintenant, ce rejet radical de la domination politique indue. Maria Soudaïeva, enfin, proposant une affirmation poétique plus intense encore que celles de ses deux soeurs de lutte, prend immédiatement le chemin de la pure scansion, du tambourinage chamanique cher aussi à « Kree », la guerrière fantomatique racontée par Manuela Draeger, là où la rage se fait consigne et mot d'ordre, là où le combat se fait impératif apocalyptique.

Pour reprendre l'expression si heureuse de Dominique Soulès dans son ouvrage de 2017 (dont on vous parlera prochainement sur ce blog), c'est bien l'affolement des langues qui prévaut ici. Et l'on comprend donc parfaitement que le principal porte-parole du post-exotisme, Antoine Volodine, puisse déclarer, à propos de « Débrouille-toi avec ton violeur » : « J'aime ces plaintes horrifiées, ces appels, ces chants poétiques, ces fulgurances. Personnellement, je n'ai aucune raison de mettre des bémols à ces puissantes clameurs. »

Les images illustrant cette note de lecture sont issues du travail du grand Mathieu Colloghan, dont l'art si incisif de la fresque irrigue toutes nos luttes, encore et partout. Vous pouvez visiter son blog ici et y trouver des moyens de le soutenir, il mérite toute votre attention !
Lien : https://charybde2.wordpress...
Commenter  J’apprécie          50
Le titre, accrocheur, est un peu trompeur parce qu'il ne représente qu'un tiers du livre, le premier. Je pense que l'ensemble est plus que cela. J'ai ressenti trois mouvements. Pamphlet. Terrorisme. Combat. de l'idéologie à la guerre, peut-être.
Trois styles différents, aussi. Polémiste. Provocateur. Partisan. Je ne sais pas.
En lisant, je pensais à de la Science-Fiction. Les échos d'une grande guerre des sexes, divulgués longtemps après le conflit nucléaire. Des bribes de textes par les survivantes, défaites après le conflit, traductrices universelles, emprisonnées dans un quartier de haute sécurité. le tout est suffisamment décousu pour que chacun y trouve son interprétation. Infernus ne propose pas un récit mais une collection surréaliste en trois mouvements. Les deux premiers sont assez abordables. Radicalisme féministe de militantes psychotiques. le sperme et le sang. le troisième est plus obscur. Commandements hermétiques, plutôt lyriques, des êtres de l'au-delà? Ou pas.
Quel est l'impact de tout ça? Un radicalisme qui ne laisse pas indifférent. La haine du violeur. du maître des lois. de l'homme au masculin. Pourtant, si tout est viol, alors le viol n'existe pas. Si tout est tripes, alors le monde n'est plus que ça. Pénis. Matrice. Éjaculat.
Réducteur, ne pensez-vous pas? Je ne sais pas.
Le texte a une véritable énergie intérieure. de l'écriture enivrée sous stupéfiants. Crachats. Vomissements. Rien pour assurer la concorde entre les sexes. Tout pour accroître la faille entre hommes mâles et femelles femelles. Peut-être qu'on a besoin de ça avant de partir au combat. Vous serez violées que vous le vouliez ou pas.
patrickorly.com
Commenter  J’apprécie          10
Misandrie, absence de fond et de forme. 1er texte Répéter des dizaines de fois les mêmes choses ne les rendent pas plus vraies et remplacer le mot sexe par viol n'est pas un argument pour dire que le sexe est violent.
2eme texte, trop brouillon et embrouillé, c'est dommage, il y avait une ambiance et une plume, mais on sent que c'est destructuré exprès. Est-ce pour faire original ? Ou pour masquer l'absence de cohérence et de profondeur de l'univers dépeint ?
3ème - simplement incompréhensible et de peu d'intérêt.
Commenter  J’apprécie          10

Citations et extraits (35) Voir plus Ajouter une citation
Dans notre quartier de haute sécurité, de nombreuses langues se sont croisées en permanence. Nous n’avions fait allégeance à aucune nation particulière, nous nous réclamions systématiquement du cosmopolitisme, et l’abondance des langues qui étaient murmurées ou criées d’une cellule à l’autre indique à quel point notre guerre révolutionnaire avait touché l’ensemble des régions du monde. Parmi ces langues, aucune n’était privilégiée, par souci de ne pas recréer à l’intérieur des murs l’impérialisme linguistique qui régnait et règne encore à l’extérieur. Nous avions pris l’habitude de mélanger les vocabulaires et les syntaxes afin de brûler, au cœur de nos annonces, de nos proclamations, de nos poèmes, de nos romånces ou de nos plaintes, ce qui aurait pu apparaître comme un drapeau. Un drapeau !… Un bout de chiffon misérable, mais aussi le rappel féroce d’une culture exclusive et de crimes. Refuser tout drapeau était pour nous une attitude sainement internationaliste. Pas de « Ma patrie, c’est la langue » pour nous autres. Nous avons ainsi longtemps et avec délectation échange en un sabir que nos gardiens comprenaient mal – et qui était aussi une manière d’afficher notre hostilité épidermique à leur égard -, un sabir où s’entremêlaient des bribes de coréen, de russe des camps, de l’anglais catastrophique, du peuhl, du japonais, du français académique volontairement massacré, de l’allemand de QHS, du chinois de laogai, du mongol des camps, du guarani, de l’argot portugais. Et bien d’autres, car la liste est nettement plus longue.
La langue dans laquelle nos porte-parole ont diffusé nos écrits au-delà des murs a été principalement une langue de traduction. Une langue de traduction littéraire qui toujours se refusait à porter le lourd héritage culturel dissimulé sous les mots, les expressions et même le rythme des phrases. Nous avons toujours cherché à extirper de la langue ce qui renvoyait directement ou secrètement à des traditions religieuses, poétiques, folkloriques et littéraires, nous avons déshérité la langue de son héritage. Accomplissant ainsi un travail minutieux de censure et d’autocensure. Travailler sur une phrase traduite exige une grande vigilance sur ce que l’on va confier à la langue d’accueil, mais nous nous astreignions à la même vigilance lorsque nous composions un texte collectif à partir des rêves et des brouillons qui surgissaient spontanément dans les coursives de notre prison. Nous nous exprimions en procédant au même travail d’élagage que si nous avions devant nous un premier texte à métamorphoser en deuxième texte. Avec le même souci de ne pas en faire un objet à usage patriotique ou intellectuellement chauviniste. Nous avions les mêmes préoccupations de taille et d’ébranchage idéologique. D’où cette revendication de langue de traduction même lorsqu’il s’agissait d’un texte original. Qu’ils aient été ou non l’objet d’un passage d’une langue à l’autre, la langue des livres que nous offrons à nos sympathisants ou aux lecteurs et lectrices de librairie a été en général coupée de ses racines nationales. Elle a été neutralisée. Il y a eu des ratages et des contradictions, bien sûr, dans ce projet. Mais l’intention a été là, toujours.
La langue neutre que nous avons le plus souvent essayé d’utiliser a été un outil pratique. En même temps, nous ne nous sommes jamais interdit d’user de sa richesse. Aussi serait-il absurde d’y voir une langue de qualité inférieure. Que l’on annule ou non les références à une tradition portée souterrainement ou au grand jour par la langue, mille nuances et mille formes restent possibles. Censurer, arracher ou défigurer certaines racines ne signifie pas attenter au génie spécifique de la langue. Lorsque nous décidons, par exemple, d' »écrire en français une littérature étrangère », la formule n’exprime pas du tout un mépris ou un rejet de la langue française dans laquelle nous faisons connaître un livre, c’est seulement un constat, qui rend compte d’un travail quasi maniaque, d’un travail de tous les instants pour que la littérature post-exotique ne soit pas troublée par des proximités culturelles et des non-dits idéologiques dont elle n’a que faire.
Commenter  J’apprécie          00
DÉTRUIRE L’ISSUE
273. DESTRUCTION DES ISSUES !
274. FERMETURE IMMÉDIATE DES MATRICES !
275. À L’ENTRÉE D’UNE MATRICE, NE CHERCHE AUCUN PASSAGE !
276. SI TU RESTES OUBLIÉE SUR LA VOIE, TRANCHE À LA HACHE CE QUI TE RETIENT AU MONDE !
277. SI TU SORS D’UNE MATRICE, NE CHERCHE AUCUN PASSAGE !
278. ANNULATION DES MATRICES OBSCURES !
279. FIN DES MATRICES GOTHIQUES !
280. HORS DES MATRICES, REGROUPEZ-VOUS !
281. RECOUVERTES DE TERRE, REGROUPEZ-VOUS !
282. DANS LA FUMÉE, REGROUPEZ-VOUS !
283. MÉPRISE LES MATRICES, MÉPRISE L’ISSUE !
284. OUBLIE LE PASSAGE TORTUEUX, COUPE CE QUI TE RETIENT AU MONDE !
285. CARABES D’OR, TRAHISSEZ, REGROUPEZ-VOUS, FRAPPEZ !
286. LOUVES ROUGES DE LA TROISIÈME VAGUE, FRAPPEZ !
287. LOUVES BLANCHES DU MONDE NUMBER ONE, OUBLIEZ LE PASSAGE TORTUEUX, PASSEZ EN FORCE, FRAPPEZ !
288. ENFANTS DES NAINES NUMERO DVA, REGROUPEZ-VOUS HORS DES MATRICES, NE PARLEZ PAS, FRAPPEZ !
289. DÉTRUIS L’ISSUE, DÉTRUIS LE PASSAGE TORTUEUX, ET ENSUITE : NITCHEVO !
(Maria Soudaïeva, « Slogans »)
Commenter  J’apprécie          20
Derrière les mots charmeurs et doux, derrière les aveux romantiques et en deçà du long baiser par lequel monsieur Kato scelle son union amoureuse avec mademoiselle Morita et la met dans de bonnes dispositions pour une pénétration imminente, se glisse soudain un écho des commandements ancestraux qui prend la forme d’une phrase vulgaire : « Attends, ma salope, tu vas passer à la casserole, j’arrive, ma petite, t’as intérêt à écarter, je vais te la mettre. »
La phrase n’a pas franchi les lèvres de monsieur Kato et, dès qu’elle a surgi à la surface de sa conscience, il a eu le bon goût de la faire redescendre vers son obscurité personnelle, mais il l’a entendue, cette phrase.
Quels que soient les efforts, les louables efforts que font les mâles animaux pour imposer à leur conscience amoureuse le bon goût, l’abnégation chevaleresque et la tendresse à l’égard de leur femelle compagne, la vulgarité révoltante des commandements préhistoriques cherche son chemin depuis leur obscurité personnelle vers la surface de leur conscience.
Le sous-langage du rut cherche son chemin vers la surface de leur conscience et, à un moment ou à un autre, il crève la fragile pellicule qui séparait l’obscurité d’un côté, la pensée consciente de l’autre, et immédiatement il devient une brusque poussée d’ordures mentales.
Il devient du langage de violeur, la musique mentale du viol qui ramène à la sauvagerie primitive du coït. Du langage de rut, du langage de queue.
Qu’il soit censuré ou non, que le mâle humai s’applique ou non à le repousser vers une obscurité intérieure non consciente, le sous-langage du rut accompagne la séance sexuelle dès le début de la danse nuptiale et jusqu’à l’amollissement post-coïtal. (Miaki Ono, « Débrouille-toi avec ton violeur »)
Commenter  J’apprécie          00
CHANTS MINEURS
133. SOUS LES NUAGES AVEUGLES, NE CHANTE PAS DES CHANTS MINEURS !
134. APRÈS LA GLU, NE CHANTE PAS DES CHANTS MINEURS !
135. SI TU ENTENDS DES CHANTS MINEURS, ENFERME-TOI ET ORDONNE TES ORIFICES !
136. SI TU ENTENDS QUE TU CHANTES DES CHANTS MINEURS, PENDS-TOI AVEC TA CEINTURE !
137. CHAQUE NUIT AU TREIZIÈME COUP, DIS DES CLAMEURS ETRANGES, CHANTE !
138. AVANCE MASQUÉE, FRACASSE, CHANTE, AVANCE, TUE !
(Maria Soudaïeva, « Slogans »)
Commenter  J’apprécie          20
La nature encourage la femelle à se préparer au viol et à l’attendre. Pendant la danse, la femelle se prépare et accepte. Quand la danse se termine, le rituel de l’acceptation dansée se brise presque instantanément et la nature devient plus âpre. Que tu acceptes ou non ce qui vient, que ce soit douloureux ou non, un mâle te domine, un mâle te force, un mâle enfonce en toi un tube rigide, frénétique, et s’agite convulsivement pour te remplir de liquide.
Commenter  J’apprécie          20

Videos de Antoine Volodine (43) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Antoine Volodine
Rencontre animée par Pierre Benetti
Depuis plus de trente ans, Antoine Volodine et ses hétéronymes (Lutz Bassmann, Manuela Draeger ou Eli Kronauer pour ne citer qu'eux), bâtissent le “post-exotisme”, un ensemble de récits littéraires de “rêves et de prisons”, étrangers “aux traditions du monde officiel”. Cet édifice dissident comptera, comme annoncé, quarante-neuf volumes, du nombre de jours d'errance entre la mort et la réincarnation selon les bouddhistes. Vivre dans le feu est le quarante-septième opus de cette entreprise sans précédent et c'est le dernier signé par Antoine Volodine. On y suit Sam, un soldat qui va être enveloppé dans les flammes quelques fractions de seconde plus tard, quelques fractions de seconde que dure ce livre, fait de souvenirs et de rêveries. Un roman dont la beauté est forcément, nécessairement, incandescente.
À lire – Antoine Volodine, Vivre dans le feu, Seuil, 2024.
Son : Axel Bigot Lumière : Patrick Clitus Direction technique : Guillaume Parra Captation : Claire Jarlan
+ Lire la suite
autres livres classés : post-exotismeVoir plus
Les plus populaires : Littérature française Voir plus


Lecteurs (33) Voir plus



Quiz Voir plus

Les emmerdeuses de la littérature

Les femmes écrivains ont souvent rencontré l'hostilité de leurs confrères. Mais il y a une exception parmi eux, un homme qui les a défendues, lequel?

Houellebecq
Flaubert
Edmond de Goncourt
Maupassant
Eric Zemmour

10 questions
562 lecteurs ont répondu
Thèmes : écriture , féminisme , luttes politiquesCréer un quiz sur ce livre

{* *}