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EAN : 9782919067206
72 pages
Éditions Vagabonde (17/10/2015)
3.29/5   7 notes
Résumé :
C'est simplement normal, un signe des temps. Les gens perdaient complètement toute notion de leur identité. Personne ne semblait savoir qui était qui. Les gens devenaient de simples ombres, des mouvements, des jumeaux de lumière et d'obscurité dans une vague danse de valeurs d'échanges et de conflits d'intérêts. Même la notion d'intégrité personnelle était minée par cette diminution.
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Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
Non pas fenêtre sur cour, mais fenêtre sur avenue et sur couloirs : dans un coin de Chicago, Hank Stone observe, écoute, imagine et décode d'incertains fragments de réel.

Sur le blog Charybde 27 : https://charybde2.wordpress.com/2023/04/09/note-de-lecture-hank-stone-et-le-coeur-de-craie-carl-watson/

De sa chambre donnant sur une avenue banale de Chicago, Hank Stone écoute et regarde. Les bruits de l'immeuble, la nuit et le jour, les occupations des voisines et voisins, les incongruités sonores à peine identifiables, ou bien celles laissant la place à plus d'un doute. Mais aussi les rixes sur les trottoirs avoisinants, les querelles de couples ou d'étrangers, le manège des prostituées et de leurs souteneurs – ou de personnes qui, de part et d'autre, y ressemblent étrangement. Chicago bruisse de mystères anodins ou non, exprimés par de brusques hurlements comme par d'assourdissantes sirènes, par d'incompréhensibles dialogues comme par des chansonnettes surgies de nulle part ou presque. Hank Stone entend, observe, subodore et imagine. À travers lui et ses filtres quotidiens aux accents magiques – sous leurs dehors on ne peut plus prosaïques -, quelque chose s'élabore, une signification possible se dégage, même si elle allie l'improbable, l'ésotérique, le farfelu et le ridicule, le cas échéant : la vie matérielle pourrait-elle prendre ici des orientations – fût-ce en direction d'un inéluctable triomphe de l'entropie -, n'en déplaise à la routine absurde des choses – ou au contraire, en parfaite complicité avec elle ? Comment le savoir réellement puisque : « Dans ce quartier, les choses ont une manière bien à elles de s'inscrire dans le temps. Comme la pluie et le coeur de craie dans la rue. La pluie commence à effacer le coeur de craie. le coeur disparaît peu à peu. »

J'ai déjà évoqué précédemment, à propos de l'auteur de « Hôtel des actes irrévocables » (1997), de « Une vie psychosomatique » (2008) et du recueil de nouvelles « Sous l'empire des oiseaux » (1997), sa rare capacité à éclairer la vie des bas-fonds américains contemporains (ou presque), ou plutôt de leur orée, de leur frontière ou de leur ligne de partage des eaux, d'une lumière bien particulière, qui se démarque spectaculairement (sans qu'on puisse toujours identifier les coutures de cette démarcation, justement) de plumes pourtant aussi justement célébrées que celles de Charles Bukowski, bien entendu, mais plus encore peut-être de Larry Fondation, de Eric Miles Williamson ou de Jerry Wilson. Dans le choc permanent des boules de billard abandonnées sur le tapis (une image qui prendra toute sa puissance ultérieurement, dans « À contre-courant rêvent les noyés », prochainement sur ce blog), Carl Watson questionne avec ferveur, patience et insolence la couche toujours mince de signification et de langage – d'histoire et d'imaginaire – que nous construisons juste au-dessus des faits pour repousser le désespoir qui s'avancerait sinon jusqu'au bout. Cet « Hank Stone et le coeur de craie » de 2011, traduit en 2015 par Brice Matthieussent, toujours aux précieuses éditions Vagabonde, constitue une stèle particulièrement marquante au sein de ce véritable jeu de pistes de la littérature auquel nous invite l'auteur, oeuvre après oeuvre.

Pour construire et irriguer cette si singulière Fenêtre sur rue et sur couloir, alors que s'accumulent et se dérobent simultanément les indices d'un monde organisé, face aux lumières, au coin, du Stratford Arms, hôtel, bar et restaurant à la gloire résolument enfuie, c'est peut-être du côté du Quentin Leclerc de « La ville fond », de l'Adrien Lafille de « La transparence » ou du Pierre Barrault de « Clonck et ses dysfonctionnements » que l'on trouvera peut-être, si loin pourtant des ombres glauques de Chicago, les échos et les résonances les plus sensibles. Car les nombreuses scènes d'un monde malade rassemblées sous le regard de Hank, dans leurs variations répétitives aux subtiles improvisations, sont bien, avant tout affaire de construction mentale et langagière. Si les sociologues peuvent se tromper, l'artiste Carl Watson propose à leur place une furieuse lucidité, rêveuse et implacable.
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J'ai reçu ce livre dans le cadre de l'opération Masse critique et je remercie les éditions Vagabonde ainsi que Babelio pour cette découverte.

Cette lecture est pour le moins singulière. Cela n'a rien à voir avec les fictions traditionnelles, auxquelles je suis habituée.
Ici, il n'y a pas d'histoire précise. le lecteur se glisse dans la tête de son "héros", Hank Stone, trentenaire habitant Chicago. le terme de "héros" en lui-même est mal choisi car, bien qu'étant le personnage principal du livre et étant donc constamment sur le devant de la scène, la vérité est qu'il ne se passe rien durant toute l'histoire, il n'arrive absolument rien au "héros". On est au coeur de ses pensées, de sa passivité, de sa non-existence.
Les sens sont mis en exergue (d'abord le goût avec les avocats, la vue puisque Hank Stone passe son temps à regarder ce qu'il se passe par la fenêtre...). Mais celui qui est mis en avant, jusqu'à l'extrême, c'est l'ouïe. Qu'il s'agisse des klaxons des voitures, des hurlements des voisins, des disputes dans la rue... le bruit est assourdissant à la lecture de cette soixantaine de pages ; il est omniprésent dans chacune des scènes décrites. C'est épuisant. Hank passe tout son temps à analyser chaque bruit, à en deviner la provenance, à repérer les faits et gestes de ses voisins, qu'il ne connaît absolument pas. Il nous décrit le Stratford Arms, une pension située juste en face de chez lui "exclusivement réservée aux fous, aux drogués et aux ivrognes", nous dit-il. Mais Hank, qui critique ces individus, ne semble pas être au-dessus d'eux, ne paraît pas être plus sain d'esprit. On ne sait que très peu de choses sur sa vie : un job de nuit, un collègue ami, un goût pour le plateau d'échecs... Mais qui est-il vraiment ?

En toute sincérité, cet écrit m'a dérangée. Et il m'a agacée. C'était trop lent, trop vide, trop absurde aussi. J'attendais que ça décolle, qu'il y ait une rencontre, une explication sur le coeur de craie, une décision de prise. Mais les choses stagnent, le "héros" s'empêtre et on se demande bien ce qu'il peut advenir de lui dans le futur, lui qui dit dès la dixième page qu'il pense au suicide depuis longtemps mais qu'il "n'a pas trouvé les circonstances adéquates, le décor convenable".
Peut-être que je n'ai pas su saisir le sens profond du texte, que j'y suis restée insensible. J'ai dans tous les cas l'impression d'être passée à côté...
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Hank est seul. Sa personnalité l'agace et plane en surface sur sa peau. Il l'observe comme si elle ne faisait pas partie de lui. Il est seul dans un appartement, il teint des tee-shirts en vert, il prête attention aux bruits de la ville, du carrefour, qui l'entourent, mais finit par ne même plus regarder au dehors ce qu'il se passe. Les sons l'empêchent de dormir, des disputes, des énièmes disputes, il ne compte plus les jours il ne compte plus les nuits, qui défilent à toute vitesse et s'accélèrent, s'accélèrent, s'accélèrent. Hank Stone découvre un nouveau graffiti. Un coeur à la craie avec des inscriptions.

Quand Hank Stone prend des comprimés oranges pour dormir, il rêve de choses étranges. L'ambiance est bizarre, sordide, angoissante, inquiétante dans son étrangeté, alors que l'action est somme toute banale… voire inexistante. Quoique, un homme observant scrupuleusement la ville est-il inactif ? Hank Stone semble être le prétexte parfait pour observer de loin la ville tumultueuse qui nous entoure et qu'on ne remarque plus.
Il s'imagine des histoires en regardant les voitures, et s'invente être ce type qui connaît le moindre détail de son quartier, du nombre de voitures qui passent à leurs destinations, du moindre poil sur les visages des prostituées.

“C'est à la fois parfaitement planifié et trop arbitraire - la manière dont la lumière est à la fois une onde et une particule. Les évènements ont un sens, mais ils sont soumis au hasard. Ce sont des histoires et ce n'en sont pas.” – p.26

Carl Watson décrit un univers réel et cruel, cruellement empli de vérités de la réalité des rues dans la nuit.
Son histoire est celle des bruits de la ville, une immersion objective de ce qu'il se passe à Stratsford Arms.
Ce sont les sirènes qui se croisent et les passants qui, vus du ciel, mêlés aux voitures de police, forment le SEX qui pue dans les rues et ruelles la nuit.
Ce sont les rythmes de la ville, on croise sans arrêt du monde sans y prêter trop d'attention, on décrit, on regarde de loin, on ne vit pas la chose. C'est une écriture qui retranscrit bien ce monde fascinant de la ville, qui nous entoure et qu'on regarde à demi-mots à demi-oeils sans forcément s'inventer la vie privée de chacun. On s'attarde sur quelques détails, puis on passe son chemin. Autres détails, autres chemins. On rentre.

Quelle grande solitude dans ces rues bondées.

C'est le temps qui passe et file, et va de plus en plus vite, se saccade entre les paragraphes, file entre nos doigts et nos yeux. On passe d'un jour à une semaine plus tard, puis d'un soir à un peu plus tard ce soir-là, la matinée suivante.
Mais le temps ne s'arrête pas bien sûr, et nous non plus.

Nous sommes les yeux de Hank qui observe et ne joue rien dans la tumulte de cette ville.

Livre reçu par les éditions Vagabonde dans le cadre de masse critique Babelio, il sera difficile de trancher complètement dans le vif pour donner un avis. C'est une lecture qui marque, non pas tant pour son histoire, mais pour les ressentis et les lumières flottantes dans le noir de la ville assourdissante, les échos, les cris, les étincelles, les reflets sur l'asphalte, qui hantent l'esprit encore quelques jours plus tard. Un livre à découvrir si l'on veut s'immerger dans ce décor, le temps d'une petite heure, et, peut-être, s'interroger sur notre rapport personnel à la ville, à ses mouvements incessants et à ses détails éphémères, qui vont, viennent, repartent et reviennent, à l'image de ce coeur de craie qui s'efface peu à peu sur le goudron.
Lien : https://horspistes.wordpress..
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Depuis la fenêtre de son appartement de Chicago, Hank assiste au ballet orchestré par une routine citadine à la dimension déshumanisée. Les silhouettes entrant ou sortant des immeubles, les véhicules qui passent ou stationnent, comme mus par un obscur impératif supérieur et mécanique, le hurlement régulier des sirènes qui rythme cette froide chorégraphie : contempler ce spectacle occupe la majeure partie du temps libre de ce veilleur de nuit qui mène une existence solitaire.

La solitude est d'ailleurs l'inévitable corollaire de cet univers riche de lumières artificielles et de mouvements mais complètement dépourvu de chaleur humaine. Les individus anonymes qui peuplent cet environnement communiquent peu, et la plupart du temps de manière conflictuelle, voire très agressive, ou pour se poser des questions qui n'attendent pas de réponses.

Hank lui-même ne connait pas ses voisins, et son quotidien s'apparente à une longue succession de gestes vains et répétitifs. L'intuition du non sens de cette existence, le vague regret d'une autre vie possible affleurent parfois, pour disparaître de manière aussi fugace. Hank est ramené à son statut d'observateur détaché de ce monde qu'il contemple sans le comprendre, comme il semble détaché de son propre corps et de ses propres émotions.

"Hank Stone et le coeur de craie" est un texte court, composé de brefs paragraphes, séquences se suivant comme à l'infini, sans repère temporel, hormis ce sentiment d'une précipitation de plus en plus grande, les jours s'avalant les uns les autres, puis les semaines... comme pour souligner la nature impersonnelle et cyclique de ce théâtre de la vie moderne et urbaine. Ce qui s'y déroule est à la fois insignifiant et entêtant, l'évocation de scènes de violence est entourée d'une brume de grisaille et d'imprécision, l'ensemble nous ramène à un puissant sentiment d'absurdité, face à ce monde qui, s'il peut paraître un reflet caricatural du nôtre, n'en génère pas moins un fort malaise.

Cela en fait un roman déroutant, angoissant, glauque... j'ai aimé !
Lien : http://bookin-inganmic.blogs..
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"Hank Stone et le coeur de craie" est un ‘roman’ des plus déroutants, il faut bien l’avouer…
Carl Watson nous plonge sans pitié dans le monde de Hank Stone.
Hank vit seul dans un quartier pauvre de Chicago, l’Uptown Chicago. Il observe de sa fenêtre les gens, les bruits, les mouvements, bref la vie de la ville telle un film. Prisonnier de sa solitude et de son trouble d’exister, il n’est qu’un observateur inquiet, voire angoissé de ce qui l’entoure.
Carl Watson décrit la pauvreté qui isole et détruit son héros : Hank ne se parle plus qu’à lui-même et limite la communication avec les autres exclus au strict minimum.
Nous devons Hank, nous sommes ses pensées et vivons sa terrible solitude : une solitude que chacun connait à divers niveaux. Rapidement, une sorte de malaise s’installe au fil des pages, une mauvaise conscience d’ignorer l’autre dans le tumulte de nos vies citadines.
On ne ressort pas indemne de la lecture de ce roman qui nous interroge sur la vie intérieure de chacun dans une société où tout va plus vite et plus loin, sans se soucier de l’âme.
L’écriture de Carl Watson est un bijou de finesse et prouve qu’un roman peut être sans réelle histoire !
Une belle découverte littéraire ! Un grand merci à Babelio et aux Editions Vagabonde !
Lien : https://boulimielitteraire.w..
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Citations et extraits (9) Voir plus Ajouter une citation
Une nuit, Hank entend des cris qui le réveillent. Il est deux heures du matin. Il regarde par la baie vitrée et voit quatre hommes se disputer bruyamment devant l’immeuble voisin. Quoique bien habillés, ils semblent prêts à se battre. Une ambulance vient de se garer devant le Stratford Arms et les infirmiers observent la rixe non sans excitation. Ils décident finalement que tout va bien et ils se mettent au boulot, lequel consiste à transporter un brancard à l’intérieur du Stratford Arms. Au même instant, Hank perçoit une autre sirène sur Broadway. Contrairement à ce qu’il avait d’abord cru, ce n’est pas la même que celle de l’ambulance. Peut-être les deux sirènes n’en formaient-elles qu’une au début, avant de se séparer quelque part dans l’obscurité du nord au cours de cette étrange mitose d’origine paranoïaque. Et puis il y a une autre sirène, qui se dirige en effet vers le nord, vers l’endroit où les deux premières se sont séparées, comme pour tenter de rejoindre quelque territoire primitif.
Hank se recouche. Il entend d’autres cris, des voix différentes qui semblent s’assourdir et s’éloigner, comme si elles provenaient d’un seul point situé au bout du couloir. Puis les voix enflent en un crescendo pour diminuer ensuite vers l’autre extrémité du couloir. Dehors, sous la pluie, une bouteille explose sur le trottoir. Dedans, une autre bouteille tombe du haut du réfrigérateur et s’écrase sur le sol de la cuisine. Le temps passe. Hank entend un homme crier sous la pluie. Puis la pluie se met à tomber beaucoup plus fort et noie les cris. Puis une sirène perce le vacarme de la pluie. C’est la sirène conventionnelle que nous connaissons tous depuis l’enfance et Hank n’a pas peur. En fait, elle est presque réconfortante. Mais dès le lendemain, Hank entend une nouvelle sirène bizarre, un son qui n’est pas de ce monde. Il s’amplifie dans la lumière matinale et ne ressemble à rien de familier. Puis le son s’éteint lui aussi, avalé et bientôt réduit à rien. Ce son indique peut-être la naissance d’une nouvelle forme d’urgence, à moins que ce ne soit une distorsion ou une variation nouvelle des signaux d’urgence déjà existants. Cette sirène sauvage et violente adopte un rythme déséquilibré qui en soi pourrait pousser au crime ou à l’automutilation. C’est comme si les policiers et les médecins essayaient de se donner quelque chose à faire. Hank se dit que ce sont peut-être les sirènes qui engendrent le crime ; il pense que les sociologues se trompent.
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Hank Stone habite Chicago. À trente-cinq ans, il en sait moins sur le monde que quiconque. Il passe le plus clair de son temps à poser des questions que personne n’entend. Par exemple pourquoi il vit, pourquoi ci, pourquoi ça. Pourquoi cette voiture qui fonce dans sa tête. Pourquoi cette boule de bowling qui roule sur la piste de moto verticale de son crâne. Il souffrait désormais de migraines presque quotidiennes. En fait, Hank avait souvent l’impression qu’il s’agissait d’une seule énorme migraine et qu’elle était toujours là – simplement, il oubliait parfois sa présence ou il la faisait disparaître à coups de sédatifs, de pensées distrayantes, ou encore d’amis ou d’ennemis. Il soupçonnait même ces migraines de faire partie d’une douleur plus élémentaire, plus primitive, qui au fond était la seule chose qu’il pouvait sentir. Peut-être créait-il cette douleur dans l’unique but de sentir quelque chose. C’était non seulement tortueux, mais plutôt désespéré ; il avait lu des articles sur ce sujet dans des revues psychiatriques, et c’était donc peut-être vrai.
Il se rappelle le jour où, alors qu’il rentrait de la nouvelle pizzeria du carrefour en se disant qu’il était content qu’une pizzeria vienne d’ouvrir dans le quartier parce qu’il en avait assez des hot-dogs, il s’était aperçu qu’il ne ressentait plus rien. Il ne sentait pas l’air froid sur son visage, cet air qu’autrefois il aimait et pour lequel il vivait. Il avait beau savoir que l’air était froid, il ne le sentait pas – car une chose moins immédiate l’obnubilait chaque jour davantage. Le printemps arrivait et il le ratait comme tous les autres printemps. Les feuilles étaient soudain apparues sur les arbres sans qu’il les ait vues venir. Tout à coup elles étaient là, un soir où il rentrait à pied de quelque endroit où il était allé. Il en avait été surpris. Si sa notion du temps continuait à évoluer de la sorte, pensa-t-il, il arriverait bientôt à al fin de sa vie sans s’être rendu compte de rien.
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Il est donc huit heures du soir par une journée monotone de début novembre. On entend l’écho de la fourchette et de l’assiette de Hank dans une pièce vide. On sent l’odeur de la poudre anti-cafards. Les services de désinfection étaient passés le matin même. « C’est ça, la solitude », pense Hank à propos des échos dans le couloir. Mais ce n’est pas si terrible. Ça vaut mieux que d’avoir l’Ange de la Mort pour petite amie. Hank était passé par là. Il avait connu cette femme fatale. Il en gardait une image : une grande et douce Celte aux yeux verts. Hank s’imagine parfois que l’Ange de la Mort habite son appartement. C’est une idée nouvelle et bizarre. En sa qualité de petite amie, elle a commencé à lui reprocher son manque d’enthousiasme pour la vie. « Je suis désolé », dit-il aux murs. Personne ne lui répond qu’il n’a pas besoin d’être désolé. Rien n’améliore son sort, pas même les confessions adressées aux fantômes.
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Une fois, une femme est descendue d’un taxi au carrefour vers trois heures du matin, puis elle a parcouru à pied la moitié du bloc en criant un nom d’une voix chantante. Hank n’a pas réussi à distinguer ce nom. On aurait cru qu’elle s’attendait à ce que cette personne soit là dans la rue. Mais les trottoirs étaient déserts. La femme est ensuite retournée au carrefour, mais le taxi était parti. Elle pensait apparemment que son taxi serait toujours là. Hank la voit ensuite bifurquer vers le nord sur Broadway, mais il ne compte pas sortir de chez lui pour la suivre là-bas. Il laisse l’histoire continuer sans lui. En fait, tout ce qu’il se rappelle c’est la nature désespérée, hésitante, insatisfaite, du bref périple de cette femme dans sa rue.
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Le printemps arrivait et il ratait comme tous les autres printemps. Les feuilles étaient soudain apparues sur les arbres, sans qu'il les ait vues venir. Tout à coup elles étaient là, un soir où il rentrait à pied de quelque endroit où il était allé. il en avait été surpris. Si sa notion du temps continuait à évoluer de la sorte, pensa-t-il, il arriverait bientôt à la fin de sa vie sans s'être rendu compte de rien.
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