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EAN : 9782251799872
256 pages
Les Belles Lettres (08/03/2006)
4.18/5   11 notes
Résumé :
Témoignage des racines anglaises du mouvement romantique, La Duchesse d’Amalfi est la plus importante tragédie de John Webster (1580-1625). Elle tient une place de choix parmi les « tragédies sanglantes » de l’époque élisabéthaine, à cause de l’horreur tragique qui s’en dégage, de la force du dialogue et du grandiose relief des personnages.

La pièce de Webster met en scène l’histoire vécue de la Duchesse d’Amalfi : remariée secrètement à son intendant... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (6) Voir plus Ajouter une critique
S'il est vrai que lorsqu'on parle "théâtre anglais", Shakespeare éclipses très rapidement tous ses compatriotes dramaturges. Son contemporain, John Webster, s'il a pu intéresser quelques metteurs en scène dans les années 1960-1970 ne fait pas exception à cette règle.

Si on retrouve quelques archétypes shakespearien dans cette pièce, Websterse démarque clairement de son prédécesseur dans son choix de thématique et sa vision résolument plus pessimiste et plus violente.
Afin de critiquer, sans en avoir trop l'air, la Cour et le pouvoir corrompus de Jacques Ier, le dramaturge met en scène des personnages tous plus hypocrites les uns que les autres. Chacun pour des motivations différentes s'arroge le droit de juger la Duchesse d'Amalfi car celle-ci brave sa condition de "simple" femme en choisissant d'épouser en seconde noce un homme qu'elle aime et qui est d'un rang inférieur au sien.

Si la prose de John Webster est parfois moins belle que celle de Shakespeare, certauns passages ont une résonance qui reste très moderne aujourd'hui.

Une bonne découverte.
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John Webster est peu connu en France. Et ceux qui le connaissent ont tendance à l'assimiler un peu rapidement à un grand-maître de l'horreur, sorte de Shakespeare tragique de série B. La Duchesse d'Amalfi, ancêtre du Grand-Guignol? examinons les faits.

L'intrigue a une filiation directe avec la tragédie shakespearienne, et Webster cite d'ailleurs ses sources : de même que le passage que je cite évoque clairement Macbeth, d'autres se réfèrent à Hamlet et à Othello, et bien entendu à Romeo et Juliette. En effet, Webster redessine habilement l'histoire d'un amour impossible, dont les protagonistes, séparés pour raison de famille, sont destinés à mourir. Et dans les deux pièces, les femmes ont la main. C'est en effet Juliette qui décide, spontanément, de résister à son père. de même, la Duchesse brave l'interdit lancé par ses frères en organisant son mariage secret, sous la forme d'un contrat dicté par elle-même et rédigé par son futur époux, et le mot qu'elle emploie ("will") désigne à la fois contrat de mariage et testament...... à moins que le dramaturge n'ait voulu faire allusion au prénom de Shakespeare!
Si grand-guignol il y a, ceci concerne à la fois La Duchesse d'Amalfi et Romeo et Juliette, dont le dernier acte se déroule dans un tombeau dont le texte spécifie qu'il est éclaboussé de sang par un duel à mort... . Et Macbeth, dans ce registre, présente une violence encore bien plus choquante, si l'on suit le texte. La seule différence entre le macabre shakespearien et son équivalent webstérien est que le sang versé est remplacé par le cadavre et le tombeau, ce qui fait écho à un thème fréquent dans l'art baroque : la vacuité de l'existence et l'impossibilité de définir la notion d'identité : tantôt masque social, "persona" vide et interchangeable, tantôt la trace d'une existence autonome et complexe, rebelle à toute forme de contrôle. On connaît le nom de la femme dont Roméo est amoureux, alors que celui de l'épouse d'Antonio nous reste caché : c'est "La Duchesse", c'est-à-dire une persona sociale. Et pourtant, cette Duchesse anonyme existe. Elle s'oppose avec succès à sa fratrie, elle se marie, a plusieurs enfants, une confidente. Elle affirme au seuil de la mort rester la Duchesse d'Amalfi : "I am Duchess of Malfi still".
La persona a donc bien une substance... promise à la dissolution. Mais où va-t-elle? Une autre différence avec Shakespeare est d'ordre théologique : si Webster reprend à son compte les hésitations d'Hamlet quant à l'existence du Purgatoire, le doute est bien plus profond. Les personnages avouent souvent leur incertitude, voire leur ignorance, quant à leur sort dans l'au-delà. Ce qui compte pour eux, semble-t-il, c'est l'inéluctabilité de la mort, autant que sa théâtralité : il convient de ne pas rater sa sortie! Rien d'étonnant donc si la Duchesse d'Amalfi a effectivement un aspect grand-guignolesque.
Ce qui est plus intéressant, c'est que cette tragédie signale l'émergence de genres littéraires comme le fantastique et le romantisme. de plus, Webster peut être considéré comme l'inventeur, ou l'un des inventeurs, du théâtre psychologique. Les personnages tragiques shakespeariens déclament ou agissent dans un cadre politique. Les exceptions à cette constante (en particulier dans le Roi Lear) nous rapprochent justement de la Duchesse d'Amalfi, dont les personnages, dépolitisés, sont en prise avec les troubles de la conscience, et osons le dire, du subconscient.
Dans une scène émouvante, à sensibilité pré-romantique, Antonio erre dans un cloître en ruines où subsiste un tombeau. Il a été banni par les deux frères de la Duchesse et la croit morte, alors qu'elle n'est encore qu'emprisonnée. Et le mur du cloître lui renvoie en écho une partie de ses lamentations, lui signalant sa propre mort et celle de sa femme....échos qu'il se refuse à considérer comme prophétiques.
Webster décrit également les ravages de la dégradation psychologique des deux frères, dévorés d'une culpabilité que le texte situe explicitement à l'intérieur d'eux-mêmes. Ils sont en fait prisonniers d'un ego marmoréen, statufiés en la pose de Leader autoritaire qu'ils se sont construits pour échapper à toute culpabilité, et même à tout sentiment humain.
L'effet de cette culpabilité sur le Cardinal peut être rapprochée de certains personnages d'Edgar Allan Poe, tels que William Wilson ou Roderick Usher, qui sont torturés par les crimes qu'ils ont commis. Un doute plane sur la nature de leurs visions hallucinées : s'agit-il d'évènements surnaturels ou de visions délirantes? Il en va de même pour le Cardinal dans la citation choisie. Lorsqu'il prétend voir au fond de l'eau un homme armé d'un trident, il se pourrait qu'il soit victime d'hallucinations dictées par son sentiment dévorant de culpabilité, mais il se peut également qu'une intervention surnaturelle ait lieu.
Le cas de Ferdinand ressemble plus à une étude clinique de la folie. Il s'applique (consciencieusement !) à tyranniser sa soeur, puis il la fait assassiner par son espion Bosola. Devant son corps sans vie, son choc psychologique apparaît d'une manière bouleversante, en quelques mots martelés :

Cover her face. Mine eyes dazzle. She died young.
(Couvre sa face. Mes yeux sont éblouis. Elle mourut jeune.)

C'est le début d'une autodestruction spectaculaire. Ferdinand sombre dans la folie, erre dans son palais et se croit devenu loup. Il perce son frère le Cardinal d'un coup de dague, et tombe sous les coups de Bosola, qui lui aussi a quelques troubles de conscience : en aidant les deux frères, il a participé à un crime odieux.

La carrière de Shakespeare s'étend sur de longues années, avec un nombre impressionnant d'oeuvres dramatiques. Celle de Webster tient en quelques pièces, mais la fulgurance baroque de la Duchesse d'Amalfi est sans exemple.





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La tragédie de la vengeance de John Webster (1614) est amusante, peut-être pas entièrement, ou alors au second – voire troisième - degré. C'est une tragédie, pleine de fureur et de de sang, de misogynie et d'abus. Mais il y a aussi un duc qui pense qu'il est un loup, un meurtre, une finale rivalisant avec l'effusion de sang dans la scène finale de Hamlet
La duchesse est pleine d'esprit, gentille et noble, elle refuse d'obéir à la demande de ses frères (demandes corrompues ou terrifiantes du cardinal et du duc) de ne pas se remarier. Car la duchesse tombe amoureuse d'Antonio son intendant et ils s'enfuient. le couple tente de mener sa vie une vie en secret, mais rien n'y fait, les deux amants sont poursuivis par Bosola, qui a été engagé par le duc Ferdinand pour espionner la duchesse. Dans l'intrigue sinueuse et vertigineuse qui s'ensuit à travers de multiples sauts dans le temps, la duchesse est assassinée, le duc tombe dans une folie lycanthropienne, et Bosola, le cardinal et Antonio partent chacun pour se venger. En fin de compte, les hommes finissent par s'entretuer pour cause d'erreur sur les personnes.
Ouf...
Cette pièce aussi splendide que gothique pourrait être un très bon sujet pour un cinéaste des dérèglements comme Tarentino...
Lien : http://holophernes.over-blog..
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Une fabuleuse tragédie, sanglante et dramatique avec des dialogues et des personnages magnifiques.
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Le destin d'une femme... Une femme pour le rôle-titre, rien que ça, ça donne envie non?
Des personnages complexes, sombres, le pouvoir, l'amour, la mort, la religion, trahison, manipulation, l'italie baroque ou tout est extrême, exagéré, tourné en dérision, pas de temps mort!
Lien : http://lecture-spectacle.blo..
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Citations et extraits (8) Voir plus Ajouter une citation
[...] le sommeil
Est une rouille qui ronge l'âme de l'intérieur,
Et de la même façon, l'inaction forcée engendre
Tous ces noirs malcontents qui, confinés en lieu clos,
Comme les mites dans du drap sans usage, font des
ravages.

(I,1)
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[...] il n'est jamais longtemps
en paix le royaume dont le prince est un soldat.

(I, 2)
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Je voudrais faire brûler leurs corps dans un four dont on aurait bouché la cheminée afin que leur exécrable fumée ne puisse s’échapper vers le ciel ; ou imprégner de poix et de soufre les draps de leur lit, les envelopper dedans, et y mettre le feu comme on allume une torche ; mieux encore, mitonner un ragoût de leur bâtard et le servir à son dépravé de père pour fournir à ses reins la force de forniquer encore.
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D’aucuns veulent croire l’âme des princes issue de causes plus puissantes que celle du menu peuple ; qu’ils se détrompent, elles sont de la même main, les mêmes passions les animent, la même raison.
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SCÈNE Ire

Malfi. — Salon de réception dans le palais de la Duchesse.

ANTONIO, DÉLIO

Délio. — Soyez le bienvenu dans votre patrie, cher Antonio. Un long séjour en France vous a transformé en un véritable Français. Comment vous a plu la cour là-bas ?
Antonio. — Je l’admire. Le roi procède sagement en épurant sa propre maison avant de réformer l’État et le peuple.
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