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EAN : 9782918767633
222 pages
Asphalte (22/09/2016)
3.23/5   30 notes
Résumé :
À vingt-cinq ans, avec un passé de guérillera et une carrière de tueuse à gages, Ana a tout vu : décapitations, chutes mortelles, exécutions par balle... Mais elle n’a jamais vu Citizen Kane, considéré comme le plus grand film de tous les temps.
Quand son commanditaire habituel lui désigne Orson Welles comme cible, Ana prend conscience de ses lacunes cinématographiques et entreprend, pour préparer cet assassinat, de découvrir la filmographie de sa prochaine ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (19) Voir plus Ajouter une critique
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Ana est un palindrome.
C'est aussi une tueuse professionnelle.
Et on lui demande de tuer Orson Welles.
Xerxenesky retrouve avec une macabre malice un vieux débat né à la Renaissance : qu'est-ce qui sépare l'artiste de l'artisan?
Première thèse possible : pas grand chose. Un grand artiste a un don qui le hausse au-dessus du commun des mortels. Justement Ana est douée et sa précocité fait l'admiration de tous. Mais cela ne dispense pas l'artiste de mettre ses pas dans les pas de ceux qui l'ont précédé. Comme un peintre classique partait en Italie pour apprendre des grands maîtres, Ana part en stage chez les guérilleros. Et, pas plus que Picasso, elle ne croit que l'inspiration suffit: Ana est une bosseuse perfectionniste.
Elle a, sinon des mécènes, du moins des commanditaires, qui savent reconnaître son génie et lui laissent toute latitude pour mener à bien ses chefs-d'oeuvre, car la patte de l'artiste sait jouer avec les contraintes.
Un artiste ne renâcle pas à devenir maudit. Il profite des malentendus : Orson a-t-il vraiment créé la panique avec « La Guerre des mondes »? Ana est-elle responsable de la mort d'Orson ? Il se plante parfois. Orson et Ana en savent quelque chose. Il picole ou se drogue, malmène ses amoureux/ses et fait quelque peu mentir les espoirs qu'on fondait sur lui. Heureusement, l'artiste maudit peut toujours compter sur un Français pour lui sauver la mise.
Oui, mais: à quoi sert l'art, si ce n'est à vaincre la mort? Là, clairement, Ana perd des points. Welles est toujours vivant, comme Elvis. A moins que l'artiste devenu mythique n'ait tué son art: Orson Welles est idolâtré à la mesure de la perte de ses films dont on ne sait trop s'ils ont disparu ou s'ils ont jamais été tournés.
En fait un troisième homme (ahah) compte les points dans cette rivalité entre Orson et Ana: c'est Xerxenesky lui-même qui se demande quand le lecteur se rendra compte que la littérature est en train de lui faire perdre la tête, au point qu'il s'identifie à une salope qui a quand même l'intention de trucider Orson Welles himself.
Si Ana est une artiste, alors elle est adepte de l'art pour l'art, doloriste et irresponsable, qui est capable de de dégommer indifféremment un tortionnaire et un cinéaste, voire sa soeur par excès d'indifférence.
Moralité : Xerxenesky croit que l'art engage et il l'affirme avec beaucoup d'élégance.
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Ana aurait pu avoir pour pseudonyme F comme le suggère le titre du livre . Mais détrompez-vous, rien n'est aussi simple et évident  dans ce nouveau roman d'Antonio Xerxenesky.
Il n'est pas linéaire dans sa construction et associe de manière très habile la réalité à la fiction comme un bon vieux film d'Orson Welles.

L'auteur écrit par flash-back avec des retours en arrière sur les années qu'Ana a passé à Rio de Janeiro pendant la junte militaire et sur un présent intiment lié au passé. Un passé trouble aussi bien dans l'histoire du Brésil que dans l'histoire familiale d'Ana. Les mots ne le disent pas ouvertement mais le suggèrent dans les lignes comme dans un cadrage à plusieurs plans dans les films du réalisateur américain.
Pour Ana, le présent se vit à Los Angeles où elle se trouve après avoir suivi les conseils d'un oncle qui l'initie au maniement des armes.
Elle est une jeune étudiante qui adore la musique et les sons américains des années 80 comme The Cure ou Duran Duran, vit une histoire d'amour épisodique avec Antoine .
Mais derrière cette couverture, elle est à 25 ans une tueuse à gages renommée par ses commanditaires car elle arrive à maquiller ses agissements en accident sans laisser de trace, un virage surprenant pour une jeune femme . Mais le passé est là et avec lui des nuits d'insomnie qu'Ana brûle en regardant en boucle les films d'Orson Welles car chose étrange la prochaine victime d'un accident mortel qu'elle sait si bien mettre en scène, n'est pas moins que le cinéaste lui-même.

Ce roman est vraiment surprenant et fait frissonner. Il est aussi un superbe hommage au cinéma d'Orson Welles et à ses talents multiples.
Mais attention comme le dit l'auteur, si vous ne connaissez pas la fin des films d'Orson Welles, un conseil allez-les voir avant de lire le livre.

Vous apprendrez aussi à la fin du livre ce que veut dire ce F si mystérieux.

J'ai pour ma part été particulièrement touchée par le personnage d'Ana et à travers elle par le sort de toutes les victimes innocentes.
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F en référence au film « F for fake » du cinéaste Orson Welles.
F surtout pour film, car ce roman va vous donner l'envie de vous plonger dans les films de Welles .De les découvrir, pour mon cas personnelle, ou de les redécouvrir.
Les références à son oeuvre ou au cinéma sont nombreuses.
Normal me direz-vous lorsque l'on demande à une tueuses professionnels d'éliminer le grand réalisateur. Celle-ci doit se renseigner sur son futur contrat. Elle commence donc par visionner tous ces films pour pouvoir connaitre l'homme et rentrer en contact avec lui. En tant que lecteur je me retrouve donc dans la même situation que le personnage principale du roman. Me voilà obliger de découvrir ces films qui sont tant connus sauf pour moi. Je découvre donc les films en même temps et j'apprécie la description et le ressenti que l'auteur fait transparaitre au fil des pages. C'est là le gros point positif du livre. Roman qui faisait tout de même partie de la sélection pout le prix Médicis étranger en 2016.Pas mal pour un jeune auteur brésilien.
Hormis cela, qu'est ce qui manque alors selon moi à ce livre ?
Je pense que c'est surtout la fin du roman qui gâche un peu l'ensemble. Il y a un manque de cohérence et on tombe dans un univers un peu fantastique ou l'auteur nous sort une théorie du complot totalement abracadabrante.
Je sais que c'est un roman avec beaucoup d'éléments de fiction, mais j'aurais aimé plus de réalisme dans la fin du roman ce qui aurait renforcé la qualité.
Un bon petit roman brésilien à découvrir. Pour les cinéphiles, ou ceux qui veulent le devenir.

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« A vingt-cinq ans, avoue Ana, je pensais avoir déjà vu beaucoup de choses dans la vie. J'avais assisté à une décapitation, deux pendaisons, une castration, trois chutes mortelles, une tête détruite par un tir de fusil… »
Ana est tueuse à gages. Oui, c'est sa spécialité, elle est très douée pour ça et elle considère le crime comme un art : il faut que ce soit propre, bien fait, que ça ressemble à un accident : « je me soucie de la beauté de la mort, de l'art de l'assassinat. » Ainsi, élimine-t-elle du monde les derniers nazis réfugiés en Amérique du Sud ou des tortionnaires comme… son père.
Si elle a une certaine expérience de la vie et de la mort, elle n'a quand même pas tout vu. Et notamment, elle n'a pas encore vu Citizen Kane d'Orson Welles. Je vous surprends à crier au scandale alors que vous n'aviez même pas levé un sourcil à l'énumération de tous ses crimes ! Mais bon, passons, je vous le laisse sur la conscience….
Or, la dernière mission qu'elle vient de recevoir est précisément l'assassinat d'Orson Welles. Ok dit-elle mais à une condition : je veux connaître son oeuvre et la voir … au cinéma ! Qu'à cela ne tienne… elle verra les films au cinéma. Et comme il n'y a qu'à Paris, dans les vieilles salles de quartiers, qu'on peut revoir ces films, elle part pour un bref séjour dans la capitale. Un jeune homme est chargé de lui faire découvrir le monde du cinéma, et la façon de faire la différence entre un chef- d'oeuvre et un navet. Il faut qu'elle soit au point car bientôt, elle va entrer en contact avec le grand réalisateur et ne doit surtout pas donner l'impression de ne rien connaître du milieu.
Qui est Ana ? Elle est née à Rio en 1960 de parents très conservateurs, pour l'ordre à n'importe quel prix.
Une nuit, elle surprend son père dans la chambre de sa soeur. Ce qu'il y faisait, on ne le saura pas mais on s'en doute. Peu de temps après, le père fera une chute mortelle dans la douche. Dommage… pensera Ana.
C'est à son enterrement qu'elle rencontrera celui qui va changer le cours de sa vie : José, son oncle, qui n'était pas forcément le bienvenu dans la famille. Elle séjournera chez lui, à Los Angeles, découvrira qu'il est étroitement lié aux opposants à la dictature, s'était entraîné à Cuba à des techniques de guérilla et a fini par s'engager. Il lui dira qui était son père, celui qui portait le surnom de « Docteur Électrochoc » et « qui utilisait son talent incroyable pour l'ingénierie à développer des systèmes perfectionnés de torture par chocs électriques ».
La gamine veut des détails, il lui en fournit. Alors, lorsqu'il prend conscience des talents de sa nièce en matière de tirs, il se dit qu'il pourrait bien en faire quelque chose…
Ana n'agit pas par conviction politique mais parce qu'elle aime l'art : « je ne pensais pas que le monde puisse devenir meilleur, peu importe qui était au pouvoir, je n'avais foi en aucun système, et même pire, je ne ressentais pas l'envie brûlante de parvenir à un monde meilleur. »
Elle imagine que la disparition de Welles serait son « chef-d'oeuvre, son Citizen Kane à elle » et elle veut se consacrer « totalement à son art ».
Ce qui est fascinant dans ce texte, c'est la personnalité torturée et le parcours chaotique de la narratrice, jeune fille sans illusions, marquée à vie par les agissements de son père et finalement n'imaginant qu'une issue possible pour elle et pour le monde : l'art.
« le fait d'avoir vu Citizen Kane aurait-il pu influencer le parcours, disons, professionnel de mon père ?, se demande-t-elle, Un plus grand accès aux prétendues humanités aurait-il empêché mon père d'employer son intelligence au perfectionnement d'appareils de torture ? Un livre de Tolstoï aurait-il été capable d'empêcher mon père d'entrer dans la chambre de ma soeur pendant la nuit ? »…
Autrement dit, « Une oeuvre d'art est-elle capable de changer une vie ? »
Vaste question…
Ana s'interrogera souvent comme Orson Welles à la fin de F for Fake : « It is pretty. But is it art? », comme si cette question devenait quasiment existentielle pour elle.
A-t-elle tenté d'échapper au réel par l'art ? Certainement. A-t-elle espéré être sauvée par l'art ? Sans aucun doute. A-t-elle voulu montrer comme Welles dans F for Fake que l'art est illusion, manipulation, leurre, à travers des crimes passant pour des accidents ? Sentait-elle qu'avec la mort d'Orson Welles, elle réaliserait, à 25 ans, âge du réalisateur lorsqu'il a créé Citizen Kane, son chef-d'oeuvre à elle et qu'il ne fallait surtout pas qu'elle le rate ? Ou bien fut-elle une manipulatrice manipulée dès son enfance par les autres, les hommes au double visage : son père, son oncle, le commanditaire dont elle ne connaît que la voix ?
Un livre qui pose des questions essentielles sur l'art : comment le définir, quel est son rôle, est-il utile, peut-il sauver les hommes, les rendre meilleurs ou bien ne peut-il rien pour nous, sinon nous piéger dans ses filets de l'illusion et nous rejeter au monde encore plus nus et plus démunis ? Est-il salvateur ou dangereux ?
Il nous reste à voir et à revoir l'oeuvre du grand Welles, le magicien.
Peut-être nous apportera-t-il une réponse qui ne soit pas un ultime canular…

Lien : http://lireaulit.blogspot.fr/
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Ce livre fait partie de mes impressions mitigées. Le mystère est grand dès le choix du livre: un titre en une lettre, un auteur brésilien au nom de famille commençant par X, avouez qu'on cumule les sources d'étonnement.

Le livre mêle réalité et fiction dans une atmosphère un peu irréelle avec un personnage principal à la consistance variable. En effet son passé, détaillé surtout dans la première partie du livre, s'efface petit à petit devant sa mission, et l'héroïne devient un archétype et en même temps un prétexte à des réflexions philosophiques très intéressantes. Tous ces ingrédients devraient faire un chef d'oeuvre... et je n'arrive pas à ce qualificatif. Ma lecture fut très agréable, je pense que j'irais essayer de découvrir le premier livre de ce jeune auteur (à l'initiale intéressante pour certains challenges babeliotes) et que je surveillerais son avenir... mais il a manqué quelque chose pour que l'emballement soit complet. Peut-être que la construction du livre très intéressante en première partie avec l'alternance du passé et du présent pour bien comprendre le personnage, a perdu de sa force ensuite dans une construction plus convenue... et une fin qui parvient à laisser planer ce mystère constant mais de façon trop alambiquée pour être pleinement réussie.

En conclusion, mes réserves ne doivent pas vous empêcher de découvrir un auteur dont on devrait entendre parler dans les prochaines années !
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Citations et extraits (9) Voir plus Ajouter une citation
À vingt-cinq ans, je pensais avoir déjà vu beaucoup de choses dans la vie. J’avais assisté à une décapitation, deux pendaisons, une castration, trois chutes mortelles, une tête détruite par un tir de fusil, une rafale de mitraillette dégommant des personnes importantes et riches au milieu d’une foule, un ancien nazi souffrant d’une crise cardiaque tout sauf accidentelle, un pédophile tombant dans une cage d’ascenseur, une dizaine d’autres visages rigides et froids, quelques litres de sang et des valises pleines d’argent liquide. À cette époque-là, je regardais cet historique avec fierté : combien de filles de mon âge pouvaient en dire autant ? La plupart n’avaient même pas vu le cadavre de leur grand-père reposer tranquillement dans son cercueil. Cependant – et il peut sembler que je change de sujet ‒, je n’avais encore jamais vu Citizen Kane, d’Orson Welles, considéré par de nombreux critiques comme le meilleur film de l’histoire du cinéma. Curieusement, une œuvre réalisée, produite et interprétée par Welles quand il était encore un gamin, à vingt-cinq ans exactement, l’âge qui était le mien quand j’ai été obligée de voir Citizen Kane pour la première fois. Nous étions en 1985 et Orson Welles allait mourir le 10 octobre de cette même année. 
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Et moi ? Même après avoir transcrit mon parcours de vie à partir de ce que me dicte ma mémoire, il me reste plein de questions, qui en réalité n'en sont qu'une seule, sous différentes formes: une oeuvre d'art est-elle capable de changer ma vie ? Une oeuvre d'art est-elle capable de changer une vie ? Les prétendues humanités sont-elles capables d'humaniser quelqu'un ? Pourquoi associons-nous le terme d'humanités à la notion de faire le bien et d'éprouver de la compassion pour autrui ? Pourquoi la mort ne serait-elle pas une sorte d'art ? Ne serait-ce pas la mort, le véritable signe de l'humanité ?
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Les Parisiens n'existent pas, il n'y a que des amants surpris, des Arabes rejetés par la population, des garçons de café de mauvaise humeur et ainsi de suite. Paris n'existe pas, ai-je pensé dans les derniers jours. Paris est une maladie, et elle est sur le point de me contaminer. Je dois quitter Paris, car cet endroit, au fond, est une fiction, et si je reste plus longtemps ici, je vais finir par croire que cette fiction est un endroit possible, je vais finir par croire que cette petite vie faite de cinéma et de vin est possible.
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Faute de croire au ciel ou à l'enfer, il ne me restait plus qu'à croire qu'après ma mort, ce serait la fin du monde.
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Au bout d'une demi-heure, quand je posais le livre et fermais les yeux, je n'entendais plus mes pensées. Je n'entendais pas non plus d'échos de la voix de narrateurs. Tout ce qui existait, c'était le silence ; les livres apaisaient ma conscience. Alors je m'endormais presque instantanément.
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Vidéo de Antonio Xerxenesky
Antônio Xerxenesky présente en français son roman F (à paraître chez Asphalte le 22 septembre 2016).
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