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EAN : 9782072969164
112 pages
Gallimard (10/11/2022)
3.8/5   10 notes
Résumé :
" Depuis que j'ai quitté le monde, et que j'ai choisi la voie du renoncement, je me sens libre de toute haine comme de toute crainte. J'abandonne ma vie au destin, je ne désire ni vivre longtemps, ni mourir vite. J'assimile ma vie à un nuage inconsistant, je n'y accroche pas mon espoir et n'éprouve pas non plus de regret. Pour moi le plaisir suprême est celui que j'éprouve sur l'oreiller d'une sieste paisible, et l'ambition de toute ma vie est de pouvoir, selon les ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Ce recueil contient quelques extraits de « Les Heures oisives » de Urabe Kenkô et l'intégralité de «  Notes de ma cabane de moine » de Kamo no Chômei . Les deux ouvrages sont des zuihitsu (« essais au fil du pinceau ») composés par des moines-poètes ermites du moyen-age.

« On naît le matin, on meurt le soir. Telle est la vie : une écume sur l'eau « 
Notes de ma cabane de moine (Hojoki).
Je reprends ici ma chronique à l'édition le Bruit du temps. Il s'agit de la même traduction du R.P Sauveur Candeau.
Ce texte est une merveille. Il touche d'entrée grâce à sa poésie, vous met dans la confidence d'un vécu traversé de souffrances et de doutes et vous amène à réfléchir à votre propre vie de manière concrète, sans prétention doctrinaire.
Kamo no Chômei (1153-1216) était le fils d'un prêtre shintoïste mais à la suite d'une querelle de famille, il ne put prendre la succession du père, ce qui lui resta toute sa vie en travers du gosier. Il se tourne alors vers la poésie et devient un fameux joueur de biwa, il entre comme secrétaire au « Bureau impérial de la poésie » mais la vie de cour le dégoûte. Il devient bouddhiste. Il se retire dans les montagnes, près de Kyoto, s'installe dans une petite chaumière, une « cabane de deux mètres carrés » où il prend l'habitude d'écrire et de méditer. C'est là qu'il compose en 1212 le Hojoki qu'on traduit le plus souvent par Notes de ma cabane de moine.
Le Hojoki appartient à un genre littéraire difficilement classable au croisement de la poésie, de la chronique et de l'essai philosophique : « le zuihitsu » ou « l'écrit au gré du pinceau ». le texte est bref, une vingtaine de pages. La structure vient de Chine mais le fond est singulier, très libre. Chomei écrit à la fin de sa vie après avoir beaucoup vécu et été le témoin de terribles événements. Il débute par de magnifiques images sur l'impermanence. Puis il évoque dans un récit autobiographique toutes les catastrophes dont il a été le témoin quand il vivait dans la capitale impériale. L'incendie terrible de 1177 attisé par un typhon qui ravage un tiers de la ville. L'ouragan de 1180 qu'il compare à l'enfer et qu'il décrit de manière saisissante. La famine de 1181-82 qui s'ensuit avec son funeste cortège d'épidémies. Et le tremblement de terre de 1185 qui est la pire de toutes les calamités. Et puis il tourne en dérision la décision calamiteuse de transférer la capitale de Kyoto à Kobé. Et encore il ne parle pas des pillages ni des massacres liés aux guerres de succession. Après ce récit, on comprend sans peine sa décision de se retirer dans la montagne et de vivre en ermite. Mais il n'est pas facile de trouver la sérénité, de renoncer à attendre quelque chose surtout quand on est attaché à sa petite cabane tranquille.


Les Heures oisives ( Tsurezuregusa) est aussi un classique, plus philosophique mais tout aussi intéressant et agréable à lire. Il a été écrit vers 1330-1332. C'est un ouvrage en prose libre constitué de 243 courts textes de contenu varié : aphorismes, anecdotes, récits, listes etc qui sont numérotés. On y trouve souvent une portée morale. J'ignore ce qui a prévalu au choix des textes dans cette édition.
Urabe Kenko (aussi connu sous le nom Kaneyoshi ou Kenko Hoshi) appartenait à la haute fonction publique impériale du XIVème siècle et lui même servit deux empereurs de l'époque Kamakura, une période très troublée. C'était un fin lettré, un érudit et un poète très prestigieux. Cependant, peu de temps après la mort de l'empereur Go-Uda en 1324, il se retira dans un monastère, sans se désintéresser néanmoins complètement du monde.
Si on en croit son avant propos, le Tsurezureguza contient des « bagatelles » écrites « au gré de ses heures oisives ». le moine-poète se libère des contraintes de ton et de forme et se confie de manière vivante et sincère. Il a vécu, il est père de famille, il a été courtisan, il a observé, il se laisse aller à des réflexions bien universelles. Mais évidemment ses « divagations » apparemment décousues reposent sur des concepts bouddhistes. Kenko relie l'impermanence de la vie à la beauté de la nature. Puisque rien ne dure, il faut apprécier tout ce qui tend à disparaître et considérer comme beau la nature, le vivant et dans l'art, ce qui est inachevé ou irrégulier, comme ses textes.
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Citations et extraits (6) Voir plus Ajouter une citation
Kamo no Chômei : Notes de ma cabane de moine ou le Hôjô-ki (littéralement, « La cabane de dix pieds carrés »), 1212.
     
... si l'on se conforme aux usages du monde, on ne peut qu'en souffrir ; si l'on n'en tient pas compte, on a l'air d'un fou. Où faudrait-il s'installer, que faudrait-il faire, pour être un peu tranquille, et pour goûter ne serait-ce qu'un instant le contentement du coeur ?
     
     
Si par une soirée tranquille, à ma fenêtre, je pense à de vieux amis tout en contemplant la lune, et si j'entends les cris du singe, je mouille ma manche de mes larmes. Lorsque, sur les buissons, je vois des vers luisants, c'est comme si j'apercevais au loin les feux de pêche de Makishima, et le bruit de la pluie matinale ressemble bien à celui du vent qui secoue les feuilles des arbres. Quand j'entends l'appel des faisans, j'ai l'impression d'entendre mon père, ou ma mère et si je constate que même les cerfs des sommets de la montagne s'approchent tout près de moi sans crainte, je comprends à quel point je suis loin du monde. Quand je m'éveille et ranime le feu qui couvait sous la cendre, j'y vois comme un compagnon fidèle de mes vieux jours. Je ne suis pas dans une montagne bien terrible ni déserte, mais alors que la simple voix du hibou suffirait à m'émouvoir, que dire de ces paysages de montagne, infiniment variés selon les saisons !
     
Traduit du japonais par le R. P. Sauveur Candau - pp. 90 & 95
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Sans que jamais séchât la rosée aux plaines d'Adashi, sans que jamais s'évanouissent les fumées du mont Toribe, s'il fallait vivre ainsi toujours où serait l'émouvante intimité des choses ? c'est son impermanence qui fait le prix de ce monde. A considérer ce qui vit, il n'est rien qui dure comme l'homme. L'éphémère borne même au soir de son attente, et la cigale d'été ne sait ni le printemps ni l'automne. Ne vécût-on une seule année, si on la vivait à loisir, rien ne vaudrait une telle paix. Mais si le regret ronge un coeur insatisfait, dût-on même vivre mille ans, ils sembleront le songe d'une nuit. En un monde où la vie ne saurait se poursuivre à jamais, à quoi sert de vouloir atteindre la vieillesse difforme ? A longue vie, nombreuses hontes. Il conviendrait de mourir à moins de quarante ans. Passé cet âge, l'esprit n'est plus sensible aux disgrâces de la forme ; on songe à se faire valoir dans le monde ; arrivé au couchant de sa vie, on chérit sa postérité, on voudrait prolonger ses ans jusqu'à voir ses fils prospérer, seules veillent au fond du coeur les convoitises des seuls biens de ce monde, et l'on en vient à ne plus goûter l'émouvante intimité des choses : tout cela est fort pitoyable.
(Les Heures oisives, 7).
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Ainsi Tchouang-tseu, qui dans une méditation mythique, se demande tout à trac si le monde perçu par un papillon n’est pas plus réel que le nôtre. Questionnant la « réalité », Tchouang-tseu soudain glisse en un cristal d’abyme étourdissant : ai-je donc rêvé d’un papillon, ou suis-je seulement le rêve d’un papillon, à moins que le papillon ne rêvât de moi qui rêvais de lui, ou bien aurais-je rêvé d’un papillon qui rêvait de moi rêvant d’un papillon…
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Avant-propos
Au gré de mes heures oisives, du matin au soir, devant mon écritoire, je note sans dessein précis les bagatelles dont le reflet fugitif passe dans mon esprit. Étranges divagations !
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Avant l’éveil, la montagne est la montagne
Pendant l’éveil, la montagne n’est plus la montagne
Après l’éveil, la montagne est la montagne –
Dit un célèbre kôan, maintes fois médité en terre nippone.
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