« Toi, tu prends ton élan. Un jour, pas si lointain, ton colosse de vague me projettera sur un arbre. Pas rancunier, il me sauvera la vie. Quand il se relèvera de ta gifle monumentale, je verrai des débris de maisons, de voitures, des débris de routes à perte de vue. Des corps gonflés de toi, désarticulés, échoués, marionnettes exsangues d'une représentation fulgurante qu'ils ne se représentaient pas. Des couples « Just Married » déchiquetés, des familles démembrées, des orphelins, toujours des orphelins, en quête de leurs parents. Ce jour-là, je serai
le dernier amant. »
Le dernier amant,
Oscar Lalo @editionsrecamier #rentreelitteraire2023 sortie le 24/08
Uppercut dès les premiers mots ! c'est violent, dur, bestial… une plume sans concessions, des mots sans filtres : c'est brutal mais efficace !
Passé le premier choc, on est happé par le texte que l'on lit, presque en apnée, jusqu'à la dernière ligne…
Dans ce roman, véritable plaidoyer en faveur de l'écologie, l'auteur présente la Terre comme la femme abusée et l'Humain comme le mari rendu fou, vicieux, théâtral, qui tente le tout pour le tout : quitte à tout perdre autant le faire avec morgue et arrogance !
Au-delà de cette confrontation de tribunal, qui n'est pas sans rappeler l'ancien métier de cet écrivain, il y a aussi un cri d'alarme certain, des vérités énoncées, un message qui se veut percutant !
« Chaque année, j'exige de plus en plus tôt que tu me donnes ce dont tu n'as déjà plus. L'an dernier, ton buffet était vide le 5 mai. Alors, j'ai tapé dans ton frigo. »
Plus que percutant, le message est même clair, limpide, direct !
« Arrêter de croire que ce qui tue la vie, dans les champs préemptés par la malnommée entreprise rebaptisée MonSanté, ne nous décimera pas. Ses poisons atteignent la sève même de nos corps exténués : utérus, testicules, seins. Ses perturbateurs endocriniens, mal nommés eux aussi, font autrement plus que nous perturber. Les leucémies aiguës explosent chez les enfants de viticulteurs. MonSanté boira à la leur. »
Par ailleurs, les références de l'auteur sont multiples et enrichissent son texte, lui donnent une dimension supplémentaire, au-delà du côté brutal primaire de son protagoniste. Références littéraires « Fahrenheit 451 », références musicales (un autre univers de cet écrivain)…
« Il n'est plus question que de te confisquer. T'accaparer, seulement t'accaparer. Voleurs d'amphores au fond des criques, la nuit ils mentent. le jour aussi. »
Mais là où il excelle, c'est dans ses jeux de mots, incomparables !
« Sous les stades à usage unique, des milliers de travailleurs à usage inique, payés en espèces, enterrés en liquide, au black, d'or noir. En revanche, les musées achetés à la France se règlent par cheikhs. Tout comme les armes dernier cri, commandées en rafales par des pays qui s'obstinent à construire des immeubles qui ne savent pas nager. »
Un livre criant de vérité qui mérite d'être lu et partagé ! Je pense d'ailleurs qu'il va détonner dans le paysage de la #rentréelittéraire2023