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Citations de Michel Tremblay (476)


La montagne, c'est ma réalité. Je suis entouré depuis mes vingt ans des plus vieilles montagnes du monde - du moins, c'est ce qu'on dit -, elles ont été mon premier sujet quand je me suis mis à pendre sur les conseils du docteur Bazin, qui prétendait que ça me ferait du bien - il avait raison. Sans doute parce qu'elles étaient là, omniprésentes, un rien étouffantes, pas trop parce qu'elles ne sont pas très hautes, et surtout à cause de l'incessante transformation de leurs teintes. Le nombre de verts que j'ai dû inventer pour leur rendre justice, le nombre d'heures que j'ai passées, au début, à essayer de dessiner chaque feuille, chaque branche, chaque nervure de branche ! Avec le temps, j'ai appris à m'éloigner de ce qui est vrai, de ce qui existe, de ce que j'ai sous les yeux pour me contenter - ce n'est peut-être pas le bon mot - de suggérer les choses : ce ne sont pas des portraits de la nature que je fais, mais des interprétations. Pour me faire du bien. M'éloigner des explosions de couleurs que j'ai en dedans de moi et qui ont déclenché tant de crises. Oui,le docteur Bazin avait raison. Je transfère mes explosions sur le papier et je m'en trouve mieux.
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Moi… comment dire ça… J’étais debout comme tout le monde, je hurlais comme tout le monde, mais… j’ai peur de pas trouver les bons mots… Je sais pas si tu peux comprendre, mais… c’était trop ! C’était trop pour moi ! C’était une des plus belles choses que j’avais jamais vues, ça accotait presque l’entrée d’Elizabeth Taylor dans Rome, j’étais là en personne, j’y assistais, comprends-tu, moi, la pauvresse, je me tenais debout devant tant de beauté, mais… J’étais-tu digne de toute ça, j’avais-tu le droit d’assister à toute ça ? J’pouvais-tu faire partie de ceux pour qui toute ça avait été préparé ? C’était impossible que la grande Guilda ait toute fait ça pour moi ! Ça fait que j’ai compris tout d’un coup que la soirée était finie pour moi, que ça s’arrêtait là, que rien de ce qui viendrait après pourrait dépasser ce qui venait de se produire ou me bouleverser autant… J’ai eu un vertige pis j’me suis sauvée comme une voleuse ! J’ai bousculé mes voisins, j’ai pilé sur un pied de la Duchesse, qui a pas eu l’air de s’en rendre compte, chus sortie de la rangée de fauteuils en m’arrachant presque les guénilles de sur le dos, pis j’ai quitté la salle en courant. On aurait dit que c’était ma sortie que le public applaudissait ! J’ai traversé le piano nobile en courant, chus sortie du théâtre en courant pis j’ai couru me réfugier sur la rue Saint-Laurent, sur la « Main », ma vraie place. Le Hawaian Lounge sur la rue Stanley pis la « Main », c’était ça, ma place.
Plus tard, on m’a conté un nombre incalculable de fois l’incroyable spectacle que Guilda avait donné ce soir-là, les lumières, les costumes, les danseurs extraordinaires qu’elle avait faite venir des États-Unis, les numéros drôles, les numéros touchants, le tableau final avec Guilda déguisée en mariée – peux-tu imaginer un homme déguisé en mariée sur la scène de la Place des Arts pis qu’on applaudit debout en hurlant ? – mais jamais, entends-tu, jamais j’ai regretté d’avoir quitté le spectacle après le numéro d’ouverture. Parce que cette image-là, la fierté qu’a’ m’a toujours procurée, était la seule chose dont j’avais besoin pour devenir la vraie Hosanna. Celle qui rêve au plus haut des cieux.
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ALBERTINE À 60 ANS. C'toute des folies, ça... Y nous prennent-tu pour des épais? J'les ai vus débarquer su'a'lune, à la télévision... Voir si ça se peut!
ALBERTINE À 50 ANS. Si y l'ont montré...
ALBERTINE À 60 ANS. Faut pas toute croire c'qu'y nous montrent, t'sais!
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LES CINQ FEMMES (LISETTE DE COURVAL, MARIE-ANGE BROUILLETTE,YVETTE LONGPRE, ROSE
OUIMET, GABRIELLE DUBUC): Là, là, j'travaille comme une enragée, jusqu'à midi. J'lave. Les robes, les jupes, les bas, les pantalons, les canneçons, les brassières, tout y passe ! Pis frotte, pis tord, pis refrotte, pis rince... C't'écoeurant, j'ai les mains rouges, j't'écoeurée. J'sacre. À midi, les enfants reviennent. Ça mange comme des cochons, ça revire la maison à l'envers, pis ça repart ! L'après-midi, j'étends. Ça, c'est mortel ! J'hais ça comme une bonne ! Après, j'prépare le souper. Le monde reviennent, y'ont l'airbête, on se chicane ! Pis le soir, on regarde la télévision ! Mardi !
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Quand la « Main » a besoin d’une victime sur laquelle échafauder des théories fumeuses, quand le cancan vicieux et la supposition malveillante se mettent en marche, quand la fée médisance ou sa sœur, la sorcière calomnie, descend parmi nous, il n’y a plus de place pour le bon sens ou la simple décence : tout est permis et on se permet tout.

(Leméac, p.132)
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-Lisette de Courval. J’ai découvert la charade mystérieuse dans le Châtelaine, le mois dernier… C’était bien facile… Mon premier est un félin…
-Rose Ouimet. Un flim ?
-Lisette de Courval. Un félin… bien voyons… ‘’chat’’
-Rose Ouimet. Un chat, c’t’un félin…
-Lisette de Courval. Bien… Oui…
-Rose Ouimet (en riant). Ben tant pis pour lui !
-Lisette de Courval. Mon second est un rongeur… ‘’rat’’
-Rose Ouimet. Mon mari, aussi, c’t’un rat, pis c’est pas un rongeur… Est-tu folle, elle, avec ses folleries !
-Lisette de Courval. Mon troisième est une préposition.
-Des-Neiges Verrette. Une préposition d’amour ?
-Lisette de Courval (après un soupir). Une préposition comme dans la grammaire…’’de’’. Mon tout est un jeu de société.
-Rose Ouimet. La bouteille !
-Gabrielle Jodoin. Farme-toé, donc, Rose, tu comprends rien ! (A Lisette) Le scrabble ?
-Lisette de Courval. C’est pourtant pas difficile… Chat-rat-de… Charade !
-Yvette Longpré. Ah… C’est quoi ça, une charade ?
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Les hommes sont ce qu’il sont et leurs promesses valent ce qu’elles valent. Même les princes Charmant. Si les hommes parfaits recherchent la perfection…

( p. 121)
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Elle retirerait ensuite sa peau qui est aussi un costume, une espèce de déguisement qui cache quelque chose de plus important, elle, qui la cache elle, elle en est convaincue. Elle plierait ses os, les mettrait dans sa valise et laisserait ce qui resterait d'elle... quoi? son âme? ... c'est du moins ce que le gros curé de Sainte-Maria-de-Saskatchewan prétendrait, oui, elle laisserait son âme plonger dans la mer.
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"Mon histoire est pas ben originale. C'est une histoire qui existe depuis que le monde est monde. Depuis que les hommes font des accroires aux femmes, que les femmes s'arrangent pour les croire. Mais c'est pas parce que c'est pas original que c'est pas triste."
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…elle a laissé Albert errer à travers ses souvenirs si semblables aux siens. Il l’a fait rire avec les excentricités , parfois étonnantes, de certains clients, émue en parlant de la solitude d’êtres comme eux, les parias dorés, condamnés par ceux qui les adulent, puissants dans une société souterraine d’intrigues et de trahisons, démunis et désarmés dans les monde officiel où on fait comme s’il n’existait pas. Des fantômes de la nuit — ou du petit matin — dont on oublie l’existence aussitôt qu’on les a quittés.

(Léméac/Actes Sud, p.101)
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LES NEUF PERSONNAGES, à l'unisson très précisément : Promène ta grande hostie rousse ! Promène ta grande hostie rousse à travers le ciel ! Promène ta grande hostie rousse à travers le ciel, pis essaye de m'apporter un peu de paix ! J'te regarde en face ! Ecoute-moi ! Ecoute-moi ! Pose ton oeil sur moi pis écoute moi ! Mon âme part en lambeaux ! Ma vie se désagrège ! J'ai besoin d'aide. Apporte-moi un peu de paix !
MIREILLE : Ah r'gardez, la lune est pus rouge ! A'l a blanchi d'un coup !
LES NEUF PERSONNAGES : Laisse couler la lune blanche sur moi ! Promène ta grande hostie blanche pis laisse-la couler sur moi. Laisse la-couler sur moi ! Laisse-la déverser sa paix ! Sa paix. La paix. La paix. La paix. La paix....
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C'est donc mon père qui m'a fait aimer mon teddy bear. Avec une simplicité qui m'étonne encore aujourd'hui.
Il a commencé par nous asseoir l'un en face de l'autre, l'ours en peluche et moi, il nous a en quelque sorte présentés l'un à l'autre une seconde fois, puis il a parlé tout doucement.
Il a d'abord parlé de moi au teddy bear avec une telle chaleur, me déclarant à travers lui un amour d'une telle force, que j'ai été obligé de m'appuyer contre la tête de mon lit: pour la première fois de ma vie, je pouvais entrevoir la place prépondérante que je tenais dans le coeur de mon père, et j'en étais foudroyé.
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GERMAINE, ROSE, GABRIELLE , THERESE ET MARIE-ANGE . Moé, j'aime ça le bingo! Moé, j'adore ça le bingo! Moé, y'a rien au monde que j'aime plus que le bingo! Presque toutes les mois, on en prépare un dans'paroisse! J'me prépare deux jours d'avance, chus t'énarvée, chus pas tenable, j'pense rien qu'à ça. Pis quand le grand jour arrive, j't'assez excitée que chus pas capable de rien faire dans'maison! Pis là, là, quand le soir arrive, j'me mets sur mon trente-six, pis y'a pas un ouragan qui m'empêcherait d'aller chez celle qu'on va jouer....
... On s'installe aux tables,on distribue les cartes, on met nos pitounes gratis, pis la partie commence! ...Là, c'est ben simple, j'viens folle! Mon Dieu, que c'est excitant, c't'affaire-là! Chus toute à l'envers,j'ai chaud, j'comprends les numéros de travers, j'mets mes pitounes à mauvaise place,j'fais répéter celle qui crie les numéros, chus dans toutes mes états! Moé, j'aime ça le bingo!
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LÉOPOLD. Y reste-tu du beurre de peanuts?
MARIE-LOUISE. Oui.
MARIE-LOUISE. Euh… c’est-à-dire que j’en ai acheté un pot neuf… L’autre était vide…
LÉOPOLD. Ben… sors-lé…
MARIE-LOUISE. Y restait pu de smoothy, Léopold, ça fait que…
LÉOPOLD (donne un coup de poing sur la table). T’as encore acheté du crunchy!
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— Pas votre beau plat à pinottes !
Elles avaient parlé en même temps, sur le même ton de désespoir, et ma mère leur fit signe que oui, un petit oui piteux qui contenait, qui soulignait surtout, qui le sublimait presque, le grand sacrifice qu’elle était sur le point de faire. « Faut ben faire quequ’chose… Si on donne rien à c’te fille-là pour son mariage, ses parents nous regarderont pus jamais ! On va passer pour des sauvages ! On va passer pour des ignorants ! On va passer pour des sans-dessein ! »
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ANGELINE SAUVE: T'as pas remarqué ? Y'avait une habit bleue! Ça se fait pas ! Un mort, c't'un mort ! Une habit bleue, c'est ben que trop pâle ! Si au moins a l'avait été bleu-marin, mais non, c't'ait quasiment bleu pourde ! Un mort, ça doit porter une habit noire !
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J’ai compris assez tôt que j’aimais apprendre les choses à travers des récits qu’on me racontait dans des romans plutôt que dans des livres de physique ou d’histoire... J’ai besoin de l’épaisseur humaine et de l’atmosphère ambiante pour bien comprendre le passé. J’ai besoin que les descriptions fassent partie d’une histoire pour bien saisir les lois de la physique. Ou la vie des animaux. Et, je dois l’avouer, je préfère un beau gros mensonge inventé par un bon conteur comme Alexandre Dumas père aux faits réels platement relatés par un savant historien trop objectif.
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C’était une chandelle usée qui vacille, une horloge démontée qui hoquette, un moteur au bout de son rouleau, un chien trop vieux, une servante qui a fini de servir et qui se meurt d’ennui, une vieillarde inutile, un être humain battu, sa grand-mère. (La grosse femme d’à côté est enceinte, p. 25)
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La mer, c'est un rêve. Je n'ai jamais vu la mer. (...)
J'imagine, j'invente un mer d'un bleu qui n'existe sans doute pas,
toujours calme et apaisante, sans gros rouleaux, sans ressac, sans danger.
Et chaude. J'aimerais que chaque personne qui regardera éventuellement
mon tableau ait envie de s'y baigner. Sous ce ciel infini. Et de ne jamais
en ressortir. (p. 14)
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Mais un double coucher de soleil, quelle aubaine! D'abord le coucher de soleil lui-même, magique, sublime, puis, en plus, son propre reflet brouillé par le mouvement des vagues, ses couleurs transfigurées par l'eau, le rouge devenu or strié de vert, l'or devenu vert bariolé de rouge, les nuages qui se regardent le ventre, qui se comparent et se jaugent les uns les autres en faisant les importants qui rivalisent de lumière, tout ça mêlé, brassé, culbuté, inversé, la moitié supérieure solennelle, impressionnante, la moitié inférieure furieuse et folle. Une fin du monde silencieuse, une symphonie sans musique.
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