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Critiques de Milena Agus (660)
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Mal de pierres

J’ai tourné la dernière page de « Mal di pietre » de Milena AGUS, posé le livre dans la bibliothèque et je me suis rassise sur le canapé avec l’envie, diffuse, d’écouter une chanson de Gaël FAYE. Envie d’écouter « A trop courir » du génial Gaël Faye, qui pourtant n’évoque ni la Sardaigne, ni la passion amoureuse, encore moins les calculs rénaux… Alors pourquoi, pourquoi cette belle histoire sarde me berce vers cette non-moins belle chanson, avec laquelle elle n’a aucun lien ? La voix de Gaël Faye m’emporte.



« … toute ma vie j’ai rempli mon caddie d’illusions… »



Oui, l’histoire de cette jeune femme sarde est aussi une histoire d’illusions, une histoire de rêves, une histoire d’envie féroce de vivre quelque chose de plus fort. Cette histoire, c’est le rejet du tiède, le dégoût du médiocre, la nécessité furieuse de la passion. C’est une femme qui veut brûler, d’amour, ou de colère, ou bien des deux, une femme en qui couve un feu mal éteint, qui attend désespérément le souffle qui viendra l’alimenter, le réveiller, pour brûler, brûler, brûler.



« … À trop courir après mes rêves, j'fais des claquages au cœur… »



Mal di pietre, c’est une femme qui souffre parce qu’on la contraint à l’immobilité froide de la pierre, ces pierres qui empoisonnent son corps, elle qui est tout sauf un caillou, elle qui voudrait être une rivière en crue, sortir de son lit, hurler ses sentiments à la face du monde et surtout ne plus jamais être raisonnée.



Ses calculs, ses pierres, c’est le poids du conformisme d’une vie rangée.



« …. À force des courbes se dessinent sous mon regard somnifère

J'ai voulu décourber l'échine à courir après mes chimères

J'ai envolé mes rêves dans des avions de papiers

Et j'ai voulu la vie d'château en m'endormant dans un clapier… »



Alors elle va écrire, elle va parler, elle va vivre, aimer et raconter.

Aimer follement, désirer ardemment, se confier, écrire, élever un enfant, puis une petite-fille complice, et tenter de laisser vivre ce feu mal éteint, par n’importe quel moyen, il faut pouvoir brûler encore, ou au moins en ressentir l’illusion.



« … à trop courir après mes rêves… »



Car enfin, lorsque la vie ne nous offre que de la pierre, il reste les rêves pour s’échapper. Lorsque la réalité n’est pas à la hauteur de nos flammes intérieures, lorsqu’il devient évident qu’elle ne le sera jamais, il faut évidemment pouvoir s’évader, se créer son propre monde parallèle et s’y accrocher, pour rester feu et ne pas redevenir caillou.



« A trop courir après mes rêves… »



Voilà pourquoi ce livre appelle en moi les vers de Gaël Faye, parce que cette histoire, c’est l’histoire d’une femme qui préfère le monde qu’elle s’est créé à la monotonie de sa vie - et pourtant, sa vie est loin d’être ratée. Mais après tout, pourquoi ne pas laisser vivre nos mondes imaginaires - ils sont l’essence de nos rêves.



Laisser vivre son monde, c’est prendre le risque de passer à côté d’une réalité tout à fait acceptable, c’est vrai, mais c’est aussi assumer l’envie de vouloir bien plus que l’acceptable.



« Fermez vos livres, s'ils vous apprennent à hésiter

Méfiez-vous à vouloir vivre on peut finir par exister »



(Citations extraites de la chanson « A trop courir » de Gaël Faye

Paroliers : Gael Faye / Guillaume Poncelet / Pascal Luvisi / William Harrison Withers

Albums Rythmes et botanique - 2017)

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La comtesse de Ricotta

La comtesse de Ricotta de Milena Agus



Editions Liana Levi



Sur les hauteurs de Cagliari en Sardaigne, les trois sœurs vivent dans leur Palazzo décati.



Héritières d’un faste parti en lambeaux, la demeure a eu ses heures de gloire, il n’en reste qu’un service de porcelaine fine et des appartements qu’elles ont partagés équitablement avant de vendre le reste divisé en appartements.



Les trois sœurs ne sont pas des cadeaux, femmes un brin exaltées et carrément extravagantes, fortes, entières et ... fêlées. C’est un peu la marque de fabrique de Milena Agus de nous offrir des portraits de femmes singulières que leurs fêlures nous rendent particulièrement attachantes !



L’obsessionnelle Noémi, elle est l’ainée, revêche elle fait peur aux hommes, son métier lui permet de rénover le Palazzo, sensible aux maisons de famille, elle entretient le doux espoir de rassembler l’héritage tel qu’il était du temps de leur père.



Maddalena, la cadette n’a qu’une idée, voir son ventre s’arrondir. Pour cela elle laisse libre cours à une sexualité débridée et assumée, matinée d’une pointe de jalousie.



La plus jeune est la Comtesse de Ricotta, à l’image de ce fromage mal dégrossi, un peu grumeleux et branlant, la jeune femme n’est que maladresses, gaffes, étourderies. Gentille mais à côté de sa vie, elle se laisse porter, elle a raté jusqu’à son fils le pauvre Carlino.



Les trois sœurs sont entourées de leur ancienne gouvernante, par loyauté car si elle est dévouée, elle n’est pas gentille. On assiste à leurs péripéties, leurs amours désenchantées, leur lien indéfectible de sœurs en galère, leur farouche volonté de faire perdurer un temps révolu. Et enfin, l’apaisement qui est souvent là où on ne l’attend plus...



J’associe souvent Milena Agus à la Elsa Morante de Mensonge et sortilège, des portraits décalés, un peu foutraques, une écriture brute mais empreinte de nostalgie où la mélancolie côtoie la drôlerie.



Il y a quelques semaines, j’étais en panne de lecture, alors j’ai relu La Comtesse de Ricotta, un des premiers romans de l’auteure. Un de mes préférés.



La magie est toujours intacte !



A lire dans le hamac sous le chêne, un verre de Campidano di Terralba, pas trop loin !
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Une saison douce



Dans un petit village de l'arrière-pays sarde, la vie des habitants se déroule sans secousses, à l'abri des murs des maisons rénovées en parpaings et de celles abandonnées. Beaucoup sont parti et l’économie se réduit à la culture d'artichauts et de biomasse. C’est un pays "perdu", oublié du monde. Jusqu'à l'arrivée des « envahisseurs » : une poignée de migrants venus de loin et d’humanitaires qui les accompagnent. Stupéfaction des habitants et stupéfaction des migrants qui rêvaient d’une autre Europe. Pourtant de cette étrange rencontre, une saison douce va éclore.



Un roman bourré de charme et d’une humanité infinie autour du thème de la rencontre. Ce village va retrouver un sens à une existence qui semblait s'être définitivement évanouie. Agir au lieu de parler, comprendre au lieu d'avoir peur.



Un roman choral qui a la saveur des histoires orales. De ces récits qui se transmettent depuis la nuit des temps, adaptables à toutes les époques". Raconté par le "chœur des femmes », presque comme dans le théâtre grec, ce conte a en même temps quelque chose d'archaïque et d’une profonde actualité.



Le cadre est également très important : une Sardaigne "oubliée", loin de tout et de tous. Loin du tourisme. Une terre qui a perdu ceux qui sont partis, qui ne reviennent jamais, et qui a éteint les espoirs de ceux qui sont restés. Cette terre parvient à être le protagoniste de cette agrégation humaine qui a le goût d'une renaissance, du retour d'un temps bienveillant qui montre que tout n'est pas perdu. Et ce renouveau de vitalité a quelque chose de sacré, car il part de la terre, de la réapparition des vieux vergers et des vieux jardins.

La rencontre avec « les autres » d'aujourd'hui renouvelle le monde d'hier en le déclinant au présent. Les "envahisseurs", en fin de compte, ne sont que le catalyseur d'une renaissance qui n'attendait que d'être déclenchée.



Trop utopique diront certains mais un peu d’idéalisme ne fait pas de mal par les temps qui courent.
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Mal de pierres

Je remercie mes amies AnnaCan, Bruidelo et Sachka pour avoir insisté : ce roman de 2006 m’a beaucoup plu. La narratrice nous conte sa grand-mère, dont on ne saura pas le nom. Le portrait nébuleux au début se dévoile peu à peu, subrepticement, grâce à d’autres regards familiaux jusqu’à la révélation finale qui vous arrachera un sourire doux-amer. Un bel hommage anticonformiste et plein de fantaisie à nos secrètes grands-mères mais aussi à la Sardaigne sauvage et mystérieuse.

La narratrice trace un premier portrait plein de caractère de sa grand-mère, pendant la deuxième guerre mondiale. A trente ans elle est encore célibataire. Et pourtant qu’est-ce qu’elle est belle avec ses longs cheveux noirs et ses yeux immenses ! Belle, passionnée, exaltée. Elle rêve d’Amour, d’une passion qui illuminerait son existence bien morne. Serait-ce ses calculs rénaux qui feraient fuir les prétendants ? Serait-elle dérangée comme on le prétend au village ? Un démon comme l’appelle sa propre mère qui a mis la main sur ses petits carnets plein de « cochonneries » ? Pauvre fille ! Obligée de se caser avec un réfugié sensuel et taciturne qu’elle n’aime pas. Elle lui offrira finalement des « prestations », par souci d’économie, comme à la maison close à laquelle il était demeuré fidèle. Mais elle n’a toujours pas d’enfant. Alors à l’automne 1950, on l’envoie en cure sur le continent pour soigner ce fichu Mal de pierres. Et là, elle rencontre le Rescapé, L’Amour de sa vie…

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Quand le requin dort

Ce n'est pas de la névrose, ce n'est pas de la psychose mais du malsain on tient ici une sacrée dose, macérée dans un coulis religioso-machiste.

Le journal de ces vies à la petite semaine s'écrit en caractères de naïveté.

On en voudrait presque plus à ces victimes qu'à ces adeptes masculins du self service de cerveau humain emballé dans de la chair fraîche, jugée assez appétissante pour la rendre davantage abêtissante. Parce que ça semble trop bête de subir à répétition parce qu'on est femme.

Et ça fait mal de vivre au jour le jour cet enfermement dans l'aquarium au requin hypnotique. Bien qu'on soit loin du silence de la mère, que la parole se libère continuellement, rien ne permet de tenir la tête hors de l'eau.

Intemporel ce livre donne trop de réalisme pour qu'en Sardaigne on se baigne.



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Mon voisin

L'homme d'à-côté

Nouvelle. Une mère célibataire un peu paumée fantasme sur son voisin. Comme dans ses récits plus conséquents (quoique souvent courts), Milena Agus émeut avec des personnages décalés ancrés dans une terre méditerranéenne caniculaire et sensuelle.
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Mal de pierres

La Sardaigne dans les années 1940/1950, société figée où il est difficile d'être différent, de sortir de la norme.

Histoire d'un amour fou, le seul, l'unique dont les instants passés trop vite suffiront tout de même à remplir le reste d'une vie de par leurs souvenirs. Mais en se réfugiant dans le passé, on occulte le présent et l'on reste insensible à ceux qui nous entourent.

Très beau roman à la fin surprenante, peuplé de personnages attachants, belle écriture, je me souvenais du film avec Marion Cotillard, sublime interprète.

Court, prenant, touchant, humain, allez-y.
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Quand le requin dort

Adepte des personnages étranges et paumés, Milena Agus pousse le bouchon un peu plus loin encore dans ce court roman.



Elle met en scène des personnages monomaniaques, censés formés une famille sarde classique, mais qui constituent plutôt une brochette de solitudes névrosées. Le père, garagiste, est sans arrêt à l'autre bout du monde pour venir en aide aux déshérités tropicaux, abandonnant ainsi ses proches la majeure partie du temps. La mère, peintre, s'enferme dans ses angoisses, tandis que sa sœur, enseignante, cherche un mari mais ne parvient qu'à collectionner des hommes qui la laissent tomber après 2 ou 3 heures de relation. Quant aux enfants, un collégien de 14 ans et sa sœur, la narratrice, plus âgée de 4 ans, ils vivent chacun une passion obsessionnelle et dévorante, qui peu à peu les coupe du monde. Pour lui, c'est la pratique du piano ; pour elle, la pratique de rituels sadomaso.



La loufoquerie n'est pas pour me déplaire, sauf quand elle s'avère, comme dans ce texte, aussi excessive qu'inutile.



L'absurde ou l'ignoble peuvent faire réfléchir ou sourire, ils peuvent révéler des vices ou des travers de l'espèce humaine, à la manière d'une lentille grossissante ; ils peuvent même offrir un exercice de style, voire un parfum de poésie (cf Bison Ravi).



Rien de tout cela ici.



Mais j'aurais quand même appris que pour éviter aux spaghetti de coller, il faut les disposer en éventail. Il n'est jamais trop tard pour s'instruire.
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Quand le requin dort

Je découvre Milena Agus avec son premier roman, écrit en 2005.

L’action se déroule en Sardaigne. La narratrice est une jeune lycéenne à côté de ses pompes, comme toute sa famille. Chez les Sevilla-Mendoza, Ils courent tous après quelque chose désespérément et se réfugient dans le ventre du requin. La mère a peur de tout, elle s’est enfuie de la vie comme elle se sauvait du cinéma quand les scènes étaient trop dures ». Elle peint là-haut dans le jardin qu’elle a aménagé sur le toit de l’immeuble. Le père est beau, drôle, séducteur, rassure la mère tout en rêvant de travailler dans l’humanitaire en Amérique du Sud. Il se fait la malle souvent. La belle tante pulpeuse et rigolote collectionne les amants mais ne réussit à en retenir aucun malgré tous ses efforts croquignolets. Le frère adolescent traîne un mal être comme la mère et se réfugie dans la musique. La grand-mère cerne bien ce petit monde avec un humour caustique. Elle est la veuve d’un survivant des camps. Quant à la jeune narratrice, elle se réfugie chez un personnage terrible et plus vieux qu’elle qu’on ne voit pas mais qui ressemble bougrement à un requin baleine.

J’ai aimé surtout le début du roman. L’autrice a le don de portraiturer des personnages haut-en-couleur et fragiles en quelques lignes. Le drame arrive sans prévenir comme dans la vie au milieu du quotidien. J’ai sauté les pages sado-maso de plus en plus épouvantables au fil du récit. Elles n’apportent pas grand-chose et ont un côté fanfaron assez horripilant. Et puis le récit s’essouffle et tourne en rond comme un requin dans un aquarium.



En bref, c’est pas mal mais j’attendrai un peu avant de lire un autre roman de Milena Agus.

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Mal de pierres

Une jeune femme raconte sa famille, et surtout sa grand-mère paternelle, sarde vivant en Sardaigne, et sujette à de fréquentes crises de coliques néphrétiques dues aux calculs rénaux qu'elle supporte depuis toujours; ce qui lui vaut de partir en cure sur le continent.



Court roman, parfois sulfureux, sobre et sensuel, tendre et poétique, qui parle de l'amour; celui que l'on a –ou non- pour les autres, pour son pays, pour sa famille, si difficile à obtenir, si difficile à reconnaître, l'amour avec un petit a, l'Amour avec un grand A.

Des allers-retours entre générations, lieux, personnages, dessinent une terre non encore détruite par le progrès et gardienne des traditions, enluminée par le bleu du ciel et de la mer, embaumée par les senteurs fortes de l'île;

et révèlent une femme sarde, lumineuse, belle, fragile, forte, qui marquera son temps et sa descendance.

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Une saison douce

Comme j’avais aimé Mal de Pierre , je n’ai pas été déçue par la lecture de ce joli récit

Un car remplit de personnes émigrées et leurs accompagnateurs arrivent dans un petit hameau de Sardaigne,les femmes sardes dont les enfants vivent au loin vont petit à petit s’approcher de ces «  étrangers «  et les comprendre et les aimer .Le hameau va sortir pour quelques mois de sa léthargie et finalement les habitants seront peinés par le départ de ces migrants qui continuent leur route vers l’Europe dont ils rêvent .

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Mal de pierres

Ce qui frappe, c’est la simplicité de l’écriture, le style limpide, serein, à l’image de la Sardaigne, théâtre de l’histoire.

La narratrice, petite-fille de l’héroïne du roman, a à cœur de dévoiler la personnalité de sa grand-mère sans ambiguïté, sans fioriture, en nous révélant ses zones d’ombre et de désespoir ou ses moments de bonheur fugace. Cette femme, nous la prenons en affection, tellement elle apparaît entière, assumant ce qu’elle est malgré les convenances de l’époque, ne cherchant jamais à dissimuler son étrangeté.

Lorsque nous nous rendons compte que ce qui lui a permis de continuer à vivre, jour après jour, cette rencontre en forme de parenthèse enchantée, est l’extrapolation qu’elle en a faite, nous nous apercevons qu’il suffit d’un tout petit rien pour nous donner la force de poursuivre notre chemin.

Chacun se construit avec les moyens dont il dispose, sans soucis de la manière. Ce qui compte, c’est l’envie de vivre.



Il est difficile d’en dire plus, tant le récit va de soi. Il est une continuité, à tel point que nous ne pouvons pas fermer le livre avant de l’avoir terminé.
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Une saison douce

Comment vivre avec cette déception de part et d’autre, cette défiance vis-à-vis de l’inconnu ? Ce sont les femmes, comme toujours dans les livres de l’Italienne Milena Agus, qui vont prendre les rênes de ce curieux équipage.






Lien : https://www.telerama.fr/livr..
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Mon voisin

Ce livre a un format très réduit : format poche, une cinquantaine de pages, en gros caractères. En vingt minutes, la lecture est achevée. Pourquoi pas, mais personnellement je n'ai pas été séduite. Le récit et l'écriture m'ont paru trop succincts pour entrer dans la profondeur des personnages : une femme avec un enfant de deux ans qui ne parle ni ne marche dont l'obsession est de se suicider et un beau voisin avec un fils qui ne respecte aucune règle, des discussions sur la mort. Je ne suis pas entrée dans l'histoire et je referme ce livre un peu déçue.
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Une saison douce

Parler de la différence, de l'inconnu, de l'autre, parler de rencontre, de changements que celle-ci provoque, de bouleversements... Milena Agus le fait avec finesse et subtilité, pour mettre à nu nos peurs, et notre capacité à découvrir, se découvrir... ou pas ! Face aux 'envahisseurs', les habitants et la vie du petit village sarde sont secoués, et beaucoup sont remués de l'intérieur...
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Une saison douce

Milena Agus, écrivaine sarde, traite d'une manière originale dans ce roman du thème de l'accueil de migrants par des Européens. Elle place en effet son récit au cœur d'un village pauvre du sud de la Sardaigne ; les narratrices sont des femmes jeunes, mariées pour la plupart, qui s'expriment collectivement à la première personne du pluriel.



Le lecteur (d'autant plus j'imagine s'il s'agit d'une femme) s'identifie rapidement aux "nous" des villageoises par rapport aux "eux" des réfugiés. Ces derniers, dès leur survenue, sont appelés "les envahisseurs", ce qui exprime clairement la perturbation que provoque leur irruption dans la vie locale. Des tensions ne manquent pas d'apparaître rapidement entre, d'une part, le noyau de celles qui peu à peu sympathisent avec les migrants et les humanitaires qui les accompagnent et, d'autre part, les hommes ("nos maris") et d'autres femmes du village ("nos belles-mères"). Sous la forme d'un conte, ce roman est une caricature sympathique des divers comportements possibles des habitants en face d'étrangers avec lesquels il faut cohabiter.



Le désarroi des envahisseurs est grand : ils ont des difficultés à ajuster le rêve qu'ils avaient fait d'une Europe riche avec ce village pauvre où on ne cultive que des artichauts. Pourtant, la distance ne va cesser de diminuer entre les envahisseurs et les jeunes femmes du village ; tout ce petit monde apprendra à vivre côte à côte puis à coopérer.



Le roman exprime le glissement des jugements opéré par la confrontation directe entre démunis et encore plus démunis. Ainsi, quand elles se souviennent de leur vie avant l'arrivée des envahisseurs, les narratrices ne se disent-elles pas : "En ce temps-là, on détestait ceux qui se portaient mieux que les autres, pas comme aujourd'hui, où l'on déteste ceux qui vont plus mal."



Récit naïf ? Sans doute. Mais l'utopie qu'il porte fait du bien.
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Quand le requin dort

C’est un de ces courts romans dans lesquels tient tout un monde : dans la Sardaigne d’aujourd’hui, une jeune fille et sa famille un peu fêlée : tante et ses fiancés, frère, père et ses maîtresses, mère, grand-parents… Tous y sont à la recherche de l’amour ou de l’ailleurs, dans un mouvement qui nous prend, nous lecteurs, et nous entraîne, à la fois amusés et déconcertés, attendris et bouleversés.

Elle, notre héroïne, croit qu’aimer c’est accepter tout de Lui, l’homme marié aux désirs sadomasochistes. Ce qu’il lui offre, n’est-ce pas un peu de l’amour ? N’est-elle pas un vilain petit canard qui ne mérite guère plus ? Il est vrai qu’elle manque de modèle féminin à suivre, entre sa mère si fragile et sa tante, si belle, qui ne parvient pas « à garder un homme ». Le ton de Milena Agus, entre crudité et poésie, est un des grands plaisirs de cette lecture : la crudité des rapports entre Elle et son amant, la poésie d’autres pans de sa vie. Par exemple, le jardin du toit-terrasse collectif, ancien dépotoir métamorphosé par sa mère. Le deuxième plaisir de lecture, est de suivre le parcours de chacun de ces êtres cabossés, tentant de sortir du requin, symbole du malheur, lorsqu’il dort, tels Pinocchio et son père cherchant à s’échapper du ventre de la baleine. Quel défi ! En effet, il paraît que les requins ne dorment jamais…

Au centre de ce roman se trouve aussi la question de la normalité. Quelle vie peut être considérée comme « normale »? Ne sommes-nous pas tous (plus ou moins intégrés, plus ou moins fêlés) des bricoleurs de nos vies ? Il faut faire avec ce que la vie nous offre, une histoire, une famille, des rencontres… et fuir le destin (ou notre propre inertie) entre deux claquements de mâchoires de cette bête qui veut notre peau. Quand le requin dort est le premier roman de Miléna Agus que nous connaissons en France depuis la sortie de Mal de pierres en 2007, qui a fait sa notoriété à la fois en France et en Italie.
Lien : https://liseusesdebordeaux.o..
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Quand le requin dort

J'adore cet auteur. Elle a une écriture tout en finesse. Elle vous fait voyager et elle m'a donné envie de visiter la Sardaigne.



Dans ce roman Sarde, il est question d'une famille dont les membres souffrent plus ou moins. L'adaptation à la vie leur parait à tous difficile. Le père est en voyage incessant pour porter secours au tiers monde mais n'arrive pas à aider sa propre famille. La mère est déconnectée de la réalité et souffre d'une grave maladie. Un garçon passionné par le piano mais incapable de communiquer et de se défendre. Une fille, la narratrice engluée dans une relation très sado-maso. Une belle sœur magnifique mais qui n'arrive pas à garder ses fiancés. Un ami qui est là pour les coups durs mais pas pour le quotidien... Et puis à la fin Maria..



L'art de Mme Agus est de nous faire partager cette ambiance familiale, de nous raconter ces personnages sans poncif. Ils deviennent attachants au fur et à mesure.



Si vous ne connaissez pas Milena Agus, je vous conseille de commencer par "battements d'ailes". Si vous connaissez et aimez Agus " Quand le requin dort" ne devrait pas vous décevoir. Bonne lecture.



"En réalité, nous ne sommes pas la famille Sevilla-Mendoza."
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Terres promises

Comme toujours dans les livres de Milena Agus, elle nous transporte avec elle dans sa Sardaigne natale. Terres promises ne déroge pas à la règle. L’histoire d’une famille issue de la Sardaigne à une heure de route de Cagliari.

Un homme, Raffaele de retour de la guerre, une femme, Ester la femme promise, ils ont en commun l’envie de partir de leur terre natale et de vivre sur le Continent. Une fois sur le Continent, la déconvenue, la vie pour Ester n’est pas celle qu’elle avait imaginée. Ce sera Gênes, Milan et la naissance de leur petite fille, Felicita puis le retour « au pays ». Felicita va s’éprendre de Pietro Maria, le fils de donna Dolores, la femme noble du pays. Felicita est enceinte et part faire sa vie de femme mère à Cagliari, Pietro Maria n’est pas amoureux d’elle. Et les situations s’enchainent ainsi de génération en génération. Chaque génération connait sa félicité et son adversité. D’un petit village d’où tout est parti, les générations suivantes s’en éloignent jusqu’à arriver à New-York. D’un point de départ d’un couple qui s’était promis le mariage durant l’enfance, on passe par une génération qui divorce, une génération qui vit seule, une génération qui s’élève.

Un rythme crescendo enserre le livre. Tout va par deux. L’entraide est constamment présente. Ester se fait aider par sa belle-mère. Marianna aide Felicita qui l’aide à son tour plus tard. Chacun cherche sa place dans ce monde et il y a une place, semble nous dire Milena Agus, pour tous, peu importe qui nous sommes.

C’est aussi l’occasion pour elle de pointer du doigt les difficultés que l’île a connues: la réforme agraire, les plans de redressement, la désertion des villages, le parti Communiste et de conclure : « et si le bien commun, c’était de combattre les injustices ».

Comme toujours dans les livres de Milena Agus, l’histoire n’est pas tout, il s’y infiltre de multiples sous-entendus, de multiples facettes.

A lire !

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La comtesse de Ricotta

Court roman (moins de 120 pages) poétique, sur trois soeurs un peu "folles" dans leur palais délabré de Caligari. C'est très plaisant, poétique, C'est le passé, le présent, l'avenir qui surgissent au fil des pages. C'est l'amour aussi sous toutes ses formes. Mais pour ma part je n'ai pas été totalement séduit...
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