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EAN : 9782072549410
101 pages
Gallimard (02/10/2014)
3.97/5   105 notes
Résumé :
"En 2008, Michelle Porte, que je connaissais comme la réalisatrice de très beaux documentaires sur Virginia Woolf et Marguerite Duras, m'a exprimé son désir de me filmer dans les lieux de ma jeunesse, Yvetot, Rouen, et dans celui d'aujourd'hui, Cergy. J'évoquerais ma vie, l'écriture, le lien entre les deux. J'ai aimé et accepté immédiatement son projet, convaincue que le lieu ? géographique, social ? où l'on naît, et celui où l'on vit, offrent sur les textes écrits,... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (17) Voir plus Ajouter une critique
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Annie Ernaux revient sur son parcours personnel, ce qui a déterminé son entrée dans le monde de la littérature. Au travers de différents entretiens avec la réalisatrice Michelle Porte qui a réalisé un documentaire sur elle en 2011, elle porte un regard plein de tendresse sur son milieu familial et social.
Elle vient d'un milieu simple, comme elle aime à le rappeler. Ses parents venaient d'un milieu ouvrier et tenaient un bar épicerie en Normandie.
Elle évoque longuement sa motivation pour les études et la fierté de ses parents de la voir réussir dans la vie.
Une réussite qui sera aussi la cause d'une fracture sociale comme le souligne l'auteur: son père, même s'il est fier d'elle, reconnaît qu'elle a en quelque sorte "trahi" son milieu d'origine; comme il le dit par ces mots si terribles : "Les livres c'est bon pour toi, moi je n'en ai pas besoin pour vivre."
Annie Ernaux va rester malgré tout, comme elle le dit, une fille de la terre et une fille de la province, même si l'essentiel de sa vie adulte va se dérouler en région parisienne et notamment à Cergy-Pontoise.
Les personnalités de ses parents, telles qu'elle les décrit, sont très attachantes: le père doux avec ses enfants, la mère, une femme de tête qui avait une réelle vénération pour les livres.
Elle revient ensuite sur ses succès littéraires, le Prix Renaudot pour son roman "La Place", les années d'Education Nationale qui lui ont inspiré le remarquable "La femme gelée", l'engagement pour la cause des femmes, que l'on retrouve dans "Les armoires vides" , ses romans où elle intègre dans l'Histoire l'existence d'une femme ("Les années").
Au coeur de son engagement pour la cause des femmes et pour la littérature, c'est l'affirmation d'une femme fidèle à elle-même et à ses idéaux.
Un ton authentique.
Un livre à lire absolument pour ceux qui veulent découvrir cette auteure ou ceux et celles qui, comme moi, en sont une inconditionnelle.
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Mon Dieu que ça fait du bien de lire un texte pareil...
Que l'on soit emporté par un bon roman, c'est normal. Qu'on ait hâte de le retrouver, durant son trajet de métro, le soir après une longue journée, c'est normal. C'est plus rarement le cas avec un livre d'entretiens. Il y a moins, en tout cas pour moi, cette attente, cette fébrilité quand on se saisit enfin du livre. Et pourtant, c'est bien ce que j'ai ressenti ces quatre derniers jours, à me glisser dans la pensée tellement"éclairante" d'Annie Ernaux.
Bien sûr, je me suis demandé si quelqu'un qui n'a pas lu ses livres y trouverait autant de plaisir. On y retrouve des explications, non, le terme est trop lourd, on y retrouve des chemins qui éclairent, encore une fois ce mot, l'enfance à Yvetot avec des parents cafetiers des "Armoires vides", la soeur morte avant sa naissance de "L'autre fille", la mère de "Une femme", la photographie des "Années".
Mais on y trouve aussi des réflexions très précises, très justes sur la féminité, le féminisme, l'éducation et l'éducation nationale, la nature, la ville, la culture, l'écriture, bien sûr, les mots, et l'art.
C'est très très riche et je ne sais pas pourquoi, très réconfortant, peut-être tout simplement parce que l'intelligence, parfois, et surtout aujourd'hui, lendemain d'un jour si triste pour nous tous en France, c'est réconfortant...
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Je n'ai pas eu besoin d'attendre son prix Nobel de littérature pour lire et aimer l'oeuvre d'Annie Ernaux.
Une fois de plus je suis sous le charme avec ce livre judicieusement intitulé "Le vrai lieu" qui est celui de l'écriture pour la première femme française nobelisée.
C'est avec grand plaisir que je retrouve Michèle Porte pour ces entretiens car elle excelle dans ce domaine. Déjà avec Marguerite Duras j'avais été séduite par ses questions laissant la parole à son interlocutrice. Elle est présente et on le sent mais sait s'effacer dans ses films où on ne la voit jamais à l'image.
Dans sa maison de Cergy où elle se sent à sa place, Annie Ernaux raconte la nécessité d'écrire.
Issue d'un milieu social modeste, elle devient professeure agrégée de lettres modernes. Elle commence à écrire dans les années 1960 en s'inscrivant dans la mouvance du nouveau roman alors que les mouvements de femmes des années 1970 vont constituer un moteur, une incitation à écrire. Mais c'est quand elle questionne son vécu, son avortement clandestin ou la mort de sa mère par exemple qu'on la reconnaît.
Annie Ernaux dit que l'écriture n'est pas une activité miraculeusement séparée des autres. C'est une chose de tout à fait solitaire en pratique mais qui a forcément des liens avec l'époque et avec les autres personnes qui écrivent. Cette idée on la retrouve dans ses livres notamment dans "Les années" dont elle parle beaucoup dans ces entretiens. Elle précise qu'écrire c'est descendre dans la réalité sociale, la réalité des femmes, la réalité de l'Histoire de ce que nous avons vécu de façon collective mais au travers de ce qu'elle a vécu personnellement.
Cette écriture-là me touche profondément.


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Attirée par le bandeau rouge et ses lettres en capitales, j'ai emporté le livre sans me poser de questions et sans regarder la 4ème de couverture (je la consulte rarement, il est vrai). le nom de l'auteur, efficace dans sa sobriété, a agi comme un aimant. S'il s'était agi d'autre chose que d'un livre, j'aurais fulminé longuement sur ma méprise car en l'ouvrant, j'ai réalisé qu'il ne s'agissait pas du dernier roman d'Annie Ernaux mais d'un livre d'entretiens. Je n'ai cependant eu aucune raison d'être déçue. Bien au contraire, j'ai vraiment apprécié les propos de cette femme intelligente qui analyse son rapport à l'écriture et ne se défile pas, même lorsque celui-ci relève de l'intime. Rien de clinquant chez Annie Ernaux mais un regard lucide sur son parcours d'écrivain qui, bien qu'elle explore longuement dans ses livres la question féminine, ne veut pas être considérée comme une femme qui écrit mais comme quelqu'un qui écrit. Et ne lui parlez pas non plus d'autofiction, le sujet la fâche et, pour être au plus juste, je préfère la citer : "Je n'ai jamais eu envie que le livre soit une chose personnelle. Ce n'est pas parce que les choses me sont arrivées à moi que je les écris, c'est parce qu'elles sont arrivées, elles ne sont donc pas uniques. Dans "La Honte", "la Place", "Passion simple", ce n'est pas la particularité d'une expérience que j'ai voulu saisir mais sa généralité indicible".
Mais les questions posées par Michelle Porte s'intéressent d'abord aux lieux, à commencer par la ville où habite Annie Ernaux depuis 34 ans, Cergy Pontoise, qu'elle défend contre les préjugés qui prétendent la qualifier. Cergy entre ville et campagne, "entre deux", un peu comme une disposition idiosyncratique de cette femme, originaire d'un milieu modeste et accédant par les études à un environnement plus bourgeois, plus cultivé. Transfuge social (elle emploie l'expression) Annie Ernaux a mis du temps pour gérer cette déchirure , pour accepter la séparation qui accompagne l'accès au savoir intellectuel. Son premier livre, "Les armoires vides" est empli de cette colère. "Violence exhibée" encore pour les deux suivants "Ce qu'ils disent ou rien" et "La femme gelée". Apaisement sans doute avec "La Place" où elle évoque son père en disant "il" et choisit, pour éviter les écueils du misérabilisme ou du populisme, une "écriture factuelle" expurgée de tout affect. Pour Annie Ernaux, le danger réside avant tout dans la forme choisie ("C'est la forme qui bouscule, qui fait voir les choses autrement"). D'ailleurs, elle reconnaît avoir peiné à trouver celle qui convenait pour "Les Années", une structure très impersonnelle, dont elle était convaincue de la justesse tout en étant persuadée d'avoir rendu le livre "illisible".
A la fin de l'entretien, Annie Ernaux confie à Michelle Porte, avoir surpris un jour, les propos d'un conseiller culturel affirmant qu'elle ne savait pas parler de ses livres. Il est clair que cette femme discrète n'est pas à l'aise avec l'exercice, écrire obéit pour elle à une nécessité et lui donne le sentiment d'un accomplissement. Pour le moins, elle sait parler de son écriture, son "vrai lieu". C'est sans nul doute tout aussi intéressant.

Lien : http://leschroniquesdepetite..
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Livre très intimiste. Annie Ernaux s'est livrée sur certains points qui éclaircissent la raison de l'existence de certains de ses livres. le lecteur se trouve replongé dans ses anciennes lectures, un joli rappel tout en douceur.

Son écriture est parfaite, le livre court se lit très vite. Il peut parfois être dérangeant de rentrer dans l'intimité de l'écrivaine, mais elle se confie sans vulgarité. Un petit brin de condescendance peut agacer le lecteur sur les dernières pages du livre. C'est la raison pour laquelle je ne mets que trois étoiles.
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critiques presse (3)
NonFiction
29 janvier 2015
Autant d’immersions brèves qui représentent de manière particulièrement juste la manière dont Annie Ernaux donne accès à ses lieux : en se faisant le porte-parole d’une réalité commune qui s’adresse à la mémoire de chacun et crée l’illusion délicieuse d’une émotion partagée.
Lire la critique sur le site : NonFiction
Culturebox
14 novembre 2014
"Le vrai lieu" est un livre vif, qui ouvre une porte sur l'intimité de l'atelier d'une grande auteure. Rare. Et passionnant.
Lire la critique sur le site : Culturebox
Lexpress
13 octobre 2014
En écrivant sur son histoire, Annie Ernaux ne raconte pas sa vie : elle éclaircit l'opacité de la vie. La sienne. La nôtre. Loin de se replier sur elle-même, de se fermer au monde, elle partage une expérience qu'elle n'a pas la prétention de croire unique. Et c'est en cela qu'elle est, définitivement, un grand écrivain.
Lire la critique sur le site : Lexpress
Citations et extraits (42) Voir plus Ajouter une citation
Je voyais cette acculturation, particulièrement réussie dans mon cas puisque mon grand-père paternel ne savait pas lire, que mon père avait été garçon de ferme, ouvrier, cafetier, et que je venais d'être admise prof de lettres. Je plongeais dans le gouffre de la séparation définitive avec mon père. Sans possibilité de me racheter.(....) Beaucoup plus tard, la sociologie m'apprendra que ma situation est celle des "transfuges de classe".

(p62)
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L'enjeu, c'était vraiment de saisir cette évolution du monde qui en cinquante ans a basculé de façon extraordinaire pour les hommes et les femmes de ma génération.
Le mode de vie du début des années 1950 ressemble beaucoup à celui de mes parents, et même de mes grands-parents. On vivait encore d'une certaine façon dans l'avant-guerre.
Si l'on compare les villes, l'intérieur des maisons, la différence est certainement plus grande entre 1950 et 2000 qu'entre 1850 et 1950.
Le changement n'est pas dans les choses seulement, il est dans la manière de penser, dans le langage.
La vision de l'avenir elle-même s'est modifiée.
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C'est un lieu, l'écriture, un lieu immatériel. Même si je ne suis pas dans l'écriture d'imagination, mais l'écriture de la mémoire et de la réalité, c'est aussi une façon de m'évader. D'être ailleurs. L'image qui me vient toujours pour l'écriture, c'est celle d'une immersion. De l'immersion dans une réalité qui n'est pas moi. Mais qui est passée par moi.
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Ecrire, ce n'est pas laisser sa trace en tant que nom, en tant que personne. C'est laisser la trace d'un regard, d'un regard sur le monde. Je comprends bien le désir actuel, chez beaucoup de gens, d'écrire leur vie, sans souci artistique, spontanément. Dans un monde incertain, en mutation, il y a une dispersion de soi et aussi un évanouissement de la mémoire collective qui font que chacun a envie de laisser une trace. On a envie de témoigner. De témoigner de son passage sur Terre. Parce que transmettre la vie au sens biologique ne suffit pas. On voudrait que soient conservées des pensées, des images, des choses insignifiantes même, tout simplement parce que ça a eu lieu. Parce que ça s'est passé. J'ai ce besoin moi aussi. Mais je ne le sépare pas d'un besoin de connaissance. Et écrire, écrire vraiment, c'est viser à la connaissance.
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Ce qui me tenait fortement, c'était l'enjeu politique de mon entreprise. Remonter le monde du café-épicerie de mon enfance, c'était en même temps décrire la culture de ce milieu populaire, montrer qu'elle n'était pas, lorsqu'on était façonné par elle, ce qu'un regard cultivé juge avec mépris et condescendance. Et ce qui m'importait, c'était de dévoiler les mécanismes par lesquels on transforme un individu en quelqu'un d'autre, en ennemi de son propre milieu. C'était une mise en question de la culture, ce qu'une forme de culture fait à l'individu, cette séparation-là. Et finalement la violence de l'écriture était ce qui correspondait le mieux pour dire ces choses.
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Vidéo de Annie Ernaux
En 2011, Annie Ernaux a fait don au département des Manuscrits de la BnF de tous les brouillons, notes préparatoires et copies corrigées de ses livres publiés depuis "Une femme" (1988). Une décennie et un prix Nobel de littérature plus tard, elle évoque pour "Chroniques", le magazine de la BnF, la relation qu'elle entretient avec les traces de son travail.
Retrouvez le dernier numéro de "Chroniques" en ligne : https://www.bnf.fr/fr/chroniques-le-magazine-de-la-bnf
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