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EAN : 9782072921513
416 pages
Gallimard (11/02/2021)
3.87/5   69 notes
Résumé :
« Quand les gens pensent voir la fin de la culture chez un jeune de seize ans qui n’emploie pas le subjonctif, sans remarquer que par ailleurs ce garçon a vu trente fois plus de films que son père au même âge, ce n’est pas moi qui suis optimiste, ce sont eux qui sont distraits. »

Nous voilà immergés dans une nouvelle ère numérique. Et si cette révolution n’était pas tant technologique que mentale ? De l’invention du jeu vidéo jusqu’au premier iPhone, ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (19) Voir plus Ajouter une critique
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Un auteur dont j'aime parcourir la production, variée et qui me surprend à chaque fois.
Un objet, un essai qui reste littéraire, pour aborder les problématiques du monde numérique et y apporter des points de vue personnels, étayés.
Brillant, de la part de cet auteur qui nous fait partager ses réflexions, et qui nous propose son interprétation des faits, positionnée à l'opposé de l'interprétation couramment véhiculée.
Un renversement de paradigme selon le vocabulaire consacré : le monde numérique n'est pas la cause des changements de mentalités, il en est la conséquence.
Une nouvelle forme d'intelligence aurait ainsi émergé, qui a généré cette « insurrection numérique ». Alexandro Baricco n'en élude pas les conséquences : une nouvelle façon pour chacun d'être au monde avec ces outils, le renversement des élites, qui sont avant tout les dépositaires des Vérités, et les risques de manipulation de l'information (outil de pouvoir toujours présent dans toute l'histoire de l'humanité, sous tous les cieux et sous toutes les cultures).
On peut s'interroger sur ce sujet grave, qui aboutit à un conditionnement de notre espèce, et qui érige d'autres murs entre les individus, avec des groupes prêts à s'affronter.
Une lecture passionnante pour qui veut décoder l'histoire (récente) de la mise en place de notre monde numérique, et qui se révèle parfaitement accessible à des non-techniciens du sujet. Un essai, original dans sa construction et sa présentation, éclairé par un réel souci pédagogique, avec un texte accompagné des « cartes du territoire » pour mieux visualiser.
Un essai riche en personnages ; ce sont les évocations des tycoons de cette aventure à travers leurs actes, leurs discours.
Une aventure irréversible. L'antichambre d'un nouveau monde.
C'est la fin du « monde d'hier ».
La nostalgie ne serait plus de mise selon ces propos pétris d'un certain optimisme… auquel on voudrait adhérer,…
Mais il y a 5 ans, les temps changent et … si vite !

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Alessandro Baricco, né en 1958 à Turin est un écrivain, musicologue et homme de théâtre italien contemporain. Après des études de philosophie et de musique, Alessandro Baricco s'oriente vers le monde des médias en devenant tout d'abord rédacteur dans une agence de publicité, puis journaliste et critique pour des magazines italiens. Il a également présenté des émissions à la télévision italienne. Il est un des collaborateurs du journal La Repubblica.
The Game, un essai datant de 2018, vient d'être réédité en poche et se penche sur l'ère numérique, ce nouveau monde dans lequel nous sommes tous plongés. J'ai dévoré ce bouquin avec un intérêt soutenu.
Tout d'abord l'auteur s'attache à nous rappeler les grandes dates de l'histoire de ces moyens technologiques mis à notre disposition et qui débute à l'époque de la contreculture californienne, la création de l'internet, puis du Web (C'est pas pareil), l'arrivée des PC, des smartphones et des applis etc. Ca date d'hier et pourtant ça paraît une éternité, même pour moi qui ai vu débarquer tout cela alors que j'étais déjà adulte. Souvenirs, souvenirs, il y avait donc une vie avant ?
Après ce rappel bienvenu qui recèle quelques révélations - à moins que je n'aie oublié ces points d'histoire ? – l'intérêt réel de l'ouvrage commence à pointer quand Baricco analyse la situation avec un regard vraiment original, en inversant les raisonnements communément admis. Comme ce point de vue : ne croyez pas que c'est la révolution numérique qui produit une révolution dans nos cerveaux, nous incitant à penser autrement, en réalité c'est tout le contraire. « Nous pensons que la révolution mentale est un effet de la révolution technologique, or nous devrions comprendre que c'est le contraire qui est vrai. » Et si nous pensons que les ordinateurs ont généré une nouvelle forme d'intelligence, dites-vous que c'est notre nouveau type d'intelligence qui a généré les ordinateurs et tous les outils dont elle avait besoin, smartphones, Google et tutti quanti.
Tout va y passer, les CD et le Mp3, Google, Facebook, Twitter, YouTube etc. toujours avec cette approche remettant en perspective ce que nous pensions savoir ou ce que nous pensions être la seule manière de considérer ces outils, ces applis et les GAFA. « Dans un monde où Google existe, le monopole de Google n'est pas si dangereux. (…) Google, Facebook, YouTube. Essayez de les imaginer au XXe siècle, à l'époque du nazisme ou en Union soviétique : le drame. »
Certes, Alessandro Baricco laisse de côté certains points, l'argent, l'addiction etc. Il aurait fallu un bouquin deux fois plus long et je ne suis pas sûr que tout soit envisageable dans un seul ouvrage. Toujours est-il que j'ai trouvé ce livre passionnant et il est servi par une écriture rondement menée, toujours humoristique, où l'écrivain s'adresse au lecteur de façon sympathique (« Je pense que je vais aller me chercher une bière »).
Une lecture qui m'a déconcerté, remettant en cause certains de mes préjugés mais qui m'a finalement séduit par son optimisme.
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Je connaissais le romancier, mais aussi l'essayiste ("Next") et je me suis toujours intéressé à la diversité de l'oeuvre d'Alessandro Barico. Certains de ses romans m'ont déplu, d'autres m'ont enthousiasmé.

Avec "The game", j'ai passé un moment formidable.
J'ai eu le sentiment de m'assoir en face d'un professeur anti-conventionnel, passionné et impatient de partager sa proposition sur le sujet.

Face à l'ouragan du numérique et des écrans, j'ai depuis longtemps adopté une position de méfiance, me plaçant malgré moi dans le camp des vaincus, réfractaires et un rien bougons. Bien qu'étant entouré d'outils du numérique, j'ai toujours prêté une oreille aux mises en gardes, sentant que ce bouleversement des usages n'apportait pas que des améliorations à notre vie. Mais cela faisait de moi un sceptique peu enclin à profiter des avantages de ce cette nouvelle donne. Je jouais le jeu, mais sans joie.
L'arrivée du numérique fut soudaine, énorme, et on ne reviendra plus en arrière. Pourquoi alors ne pas essayer de comprendre comment c'est arrivé...

"The game" m'a enthousiasmé car il m'a proposé une vision lumineuse sur le sujet. Barico expose sa théorie avec un remarquable sens du récit, qui fait que j'ai dévoré son livre avec la même excitation qu'un enfant qui découvre les aventures des trois mousquetaires.
Le propos est fulgurant, clair, documenté, parsemé de repères chronologiques propres à remettre en perspective les moments décisifs de cette révolution.

Sans juger, étant même plutôt disposé à démontrer à quel point cette nouvelle ère s'est construite en opposition aux systèmes de cloisonnements du XXème Siècle, Barico décortique les étapes, lève le voile sur les personnalités majeures de cette révolution, et arrive à la conclusion que nous vivons dans une ère imaginée par des créateurs de jeux vidéo.
"Space Invaders", le jeu de salle, constituerait selon lui le socle sur lequel tout serait arrivé. La position homme-clavier-écran est née de là, et se serait ensuite répétée et diffusée dans toute la mécanique d'invention des services du numérique.
Nous vivons dans un monde ludique, parsemé de voyants affichant des scores. Tout est simple, sensuel, instinctif, conçu pour la mise en mouvement, en opposition à l'immobilisme et au cloisonnement caractéristiques du siècle passé (qui a engendré son lot d'horreurs, comme chacun sait)
En ce sens, c'est une révolution, car en proposant un système de mouvement perpétuel, de partage du savoir, de manipulation tactile et ludique, les créateurs du numérique ont piétiné la position dominante des élites du siècle passé.
Barico parle de la post-expérience comme d'un phénomène qui nous pousse, grâce aux nouveaux outils, à multiplier les usages et les actions, dans une sorte de transe créative inédite.
Il souligne qu'une nouvelle élite est en train de s'affirmer, composée de personnes qui savent aller au delà de la simple utilisation pour aller créer de nouvelles expériences, dont la conscience navigue en permanence entre le monde réel et celui du monde dématérialisé.

L'auteur parvient à communiquer son enthousiasme, et nous guide au travers de son analyse originale du sujet.
On en ressort éclairé, et par là même, ce fut mon cas, débarrassé de cette méfiance nourrie durant des années par une réflexion qui manquait de hauteur. Barico ne manque pas cependant d'émettre des réserves quant à une tendance à l'atrophie du phénomène, mais dans l'ensemble, l'approche vise à nous aider à comprendre, et donc à accepter cet immense changement dans nos anciens repères.

Remarquable !
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C'est toujours pour moi une gageure de me lancer dans ce type d'essai. Car je suis une attardée du monde numérique. Je n'adhère pas vraiment. Tout se mélange dans ma tête et, dès qu'on cherche à m'expliquer, mon cerveau se bloque. Je regarde cette jeune génération hyperconnectée, qui ne parle plus mais tweete, qui ne sort plus discuter avec leurs camarades mais les rejoint sur snap ou autres... Je constate leur curiosité qui s'amoindrit, leur appétence qui disparait, leurs yeux qui se ferment par manque de sommeil du fait de leurs veillées digitales, leurs cris dès qu'on leur demande d'écrire... Aussi, ai-je été interpellée par cette réflexion fort juste d'A. Baricco: "Quand les gens pensent voir la fin de la culture chez un jeune de seize ans qui n'emploie pas le subjonctif, sans remarquer que par ailleurs ce garçon a vu trente fois plus de films que son père au même âge, ce n'est pas moi qui suis optimiste, ce sont eux qui sont distraits." J'ai alors décidé de ne pas faire partie de ces personnes qui jugent sans essayer de comprendre, ceux que je traitais de « vieux cons » quand j'étais jeune… Et cette lecture a été pour moi une révélation, essentielle pour éviter de mépriser les adolescents que je côtoie chaque jour.

La première chose que j'ai appréciée, c'est le fait de ne pas me sentir noyée, le fait de comprendre le propos tenu. Je ne dis pas que l'eau ne me passait jamais par-dessus la tête, que je n'étais pas parfois attirée vers le fond : la différence entre Internet et le web, la post-vérité, le storytelling… Mais A.Baricco nous rattrape juste à temps pour nous remettre à flots. Il nous explique les choses par le biais d'images, d'anecdotes (qu'est-ce que j'ai aimé celle du libraire qui n'avait pas le dernier livre de Valérie Trierweiler !) ; A.Baricco a évoqué des choses qui me parlent pour m'expliquer des choses obscures. Il m'a guidée, prise par la main pour m'emmener là où je ne voulais pas aller du fait de mon blocage. Il m'a ouvert l'esprit. Ainsi, pour expliquer l'évolution de notre pensée, il est parti des jeux qui étaient présents dans les cafés : d'abord le baby-foot, puis le flipper, puis le Space Invaders… Les jeux se sont succédés et déplacés en même temps vers l'abstrait, vers un deuxième monde, qui cohabite avec notre premier monde, en même temps qu'il fusionne avec lui.
J'ai aimé la relation instaurée entre l'auteur et le lecteur : j'avais presque l'impression d'être dans le bureau d'A. Baricco, qu'il me tenait une discussion, créant des pauses au cours desquelles il allait « se chercher une bière », faisait une incursion aux toilettes… Une complicité me mettait en confiance, acceptant de recevoir le message. Je sentais l'auteur prendre plaisir à ses explications (il le dit d'ailleurs : « je commence vraiment à m'amuser »), savourer le fait de renverser notre vision des choses (prendre l'iceberg dans l'autre sens). A. Barrico nous explique, sans porter de jugement. On ne sait d'ailleurs pas trop s'il adhère ou pas à l'invasion numérique; il est certainement comme moi, indécis, voyant les bons côtés et regrettant aussi d'autres éléments de notre premier monde qui disparaissent.

J'ai ainsi quelque peu modifié ma façon de voir les choses, j'ai ouvert la porte. Mais j'ai aussi appris beaucoup de choses puisque A. Baricco refait un historique de l'évolution du numérique. J'ai mieux cerné l'idée de navigateur, moteur de recherche… Pour certains très calés, cela parait certainement inutile, ennuyeux… Mais pour moi c'était nécessaire. Et j'ai trouvé amusant de me replonger dans cette ère si proche et pourtant si éloignée où on glissait une cassette dans le walkman, enviant le copain qui avait un MP3… Cet historique était accompagné d'explications sur les mentalités qui nous ont menés à cette omniprésence du numérique. Une chose m'a été révélée: ce n'est pas le numérique qui change l'esprit: c'est parce que notre esprit change que le numérique évolue et devient si présent.

Je le répète, ce ne fut pas une lecture facile à chaque page pour moi ; j'avoue avoir sauté quelques lignes mais cela ne m'a pas empêchée de comprendre la suite. Preuve que l'auteur nous tient vraiment la main, ne nous lâche pas, acceptant néanmoins que notre regard se porte ailleurs à quelques moments. Les éléments, particulièrement, auxquels je n'ai attaché aucune attention furent les cartes qu'A. Baricco a conçues et qui sont glissées au fil des pages. Je n'y ai pas vu d'autre intérêt que le plaisir de l'artiste. Mais ce dernier ayant accepté que je divague de temps en temps, je ne peux qu'accepter que celui-ci ait divagué également !
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Posons le décor : je suis fan absolu de Baricco dont j'ai lu beaucoup de fictions et de « non fictions » ; j'ai même pu interpréter au théâtre le personnage de Savigny - inspiré d'un rescapé du radeau de la méduse - dans son oeuvre majeure « Océan Mer » !
donc je ne suis pas objectif… !
mais qui l'est dans une critique sur Babelio ou ailleurs ??

Je crois aussi que je peux me permettre de comparer entre ses oeuvres. Selon moi, dans cet essai, il réussit parfaitement à marier son talent de conteur, de peintre de l'âme humaine, avec un travail impressionnant de chercheur et de vulgarisateur scientifique (qu'il avait esquissé dans ses précédents essais sur les nouveaux barbares). Et tout ça avec un humour décapant et une pseudo légèreté assez inégalés dans cet exercice à quelques rares exceptions. Je pense à ce que fait Alexandre Astier dans ses exoconférences et avec lequel Baricco partage aussi une formation en musique.

Légèreté, humour, vulgarisation certes … mais aussi de la profondeur, des références nombreuses et une complexité assez impressionnantes. Et cela rend aussi certains passages assez ardus à ingurgiter : je songe aux longs développements des « commentaires » qui concluent et prolongent les différents chapitres.Il faut s'accrocher parfois et parfois relire certains passages ; d'ailleurs Baricco nous y invite régulièrement dans une forme de pédagogie répétitive ou circulaire …

Et sur le fond justement, il y a de magnifiques trouvailles et des thèses défendues qui sont plus que brillantes. lumineuses ! … elles donnent un éclairage sur ces « deuxièmes mondes » numériques qui tournent comme des réalités parallèles mais aussi emboîtées les unes dans les autres. Très surprenante aussi l'hypothèse des origines, des intentions émancipatrices et des ruptures sémantiques voir philosophiques des fondateurs (hélas des hommes,blancs, ingénieurs et américains dans leur immense majorité !)

Fulgurante aussi la trouvaille d'avoir nommé ce deuxième monde The Game (LeJeu pour les anglophobes !!) car ce nom se décline en multiples facettes et ramifications.

Allez voir aussi la description de la « posture zéro » homme/clavier/écran (avec le passage du Baby foot à la console Space Invaders !) , de l'aérodynamique des « vérités-minute », des pyramides inversées que sont les applications avec leurs icônes qui flottent à la surface de nos écrans comme la partie immergée de véritables icebergs technologiques…

j'ai lu que certain-es critiques reprochent à Baricco dans cet ouvrage une forme de complaisance béate, voire d'idolâtrie et de naïveté vis à vis de ce monde numérique dans lequel il semble nager avec bonheur. c'est vrai en partie . mais alors il faut aussi prendre le temps de lire ses développements lucides sur les insurrections indispensables pour lutter contre les dérives constatées : une nouvelle forme d'élite et de concentration de pouvoirs entre quelques milliardaires (principalement les boss mégalo des GAFA…) … Il en appelle d'ailleurs aux plus jeunes générations nées dans le Game qui seules pourront le renouveler en lui apportant notamment une vision plus diversifiée : femmes, jeunes, cosmopolites, artistes

Et pour terminer je ne résiste pas à recopier ici un passage que je pense beaucoup d'entre vous devraient apprécier (pages 391 et 392 de l'éditions poche ! sur 410 pages !).
Baricco y constate et célèbre l'incroyable survie et vitalité d'un objet totalement anachronique dans The Game

« … Nous ne nous perdrons jamais vraiment tant que nous aurons des livres entre les mains. Pas pour ce qu'ils racontent, non. Pour la façon dont ils sont faits. Ils n'ont pas de liens. Ils sont lents. Ils sont silencieux. Ils sont linéaires, vont de gauche à droite, de haut en bas. Ils n'affichent pas de score. Ils commencent et se terminent. Tant que nous saurons les utiliser, nous serons humains. C'est pourquoi le Game les place entre les mains des enfants. du moins il attend qu'ils posent leur PlayStation, puis il les place entre leurs mains »

Tiens, je vais demander à mon libraire préféré (pour mémoire le Relais de Poche à Verniolle /Ariege !!!) s'il veut l'afficher dans sa vitrine !
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critiques presse (3)
Ricochet
17 juin 2021
Néanmoins, j’ai rarement trouvé une introduction aussi claire et posant aussi bien les enjeux du numérique.
Lire la critique sur le site : Ricochet
Bibliobs
19 novembre 2019
Dans « The Game », l’écrivain italien Alessandro Baricco trace les contours de la « révolution numérique » en dessinant des cartes. L’entreprise est séduisante, mais un peu ratée.
Lire la critique sur le site : Bibliobs
Liberation
07 novembre 2019
Baricco parle à la première personne et, en un style clair, parfois familier, toujours brillant et captivant, livre ses propres réflexions, et nourrit son analyse - sorte de storytelling du temps présent - d’éléments qu’on a peu l’habitude d’entendre, qui excitent l’esprit, et parfois déconcertent.
Lire la critique sur le site : Liberation
Citations et extraits (35) Voir plus Ajouter une citation
Je vais tenter de le dire de la manière la plus synthétique possible et agaçante possible : dans un monde où Google existe, le monopole de Google n'est pas si dangereux. Dans un monde où Facebook existe, il n'est pas inquiétant que Facebook soit partout. Dans un monde qui charge quatre cents heures de vidéo sur YouTube chaque minute, le fait que YouTube existe et que ce soit plus ou moins un monopole est une chose singulière, mais pas tragique.
Google. Facebook. YouTube. Essayez de les imaginer au XXe siècle, à l'époque du Nazisme ou en Union soviétique : le drame.
Mais j'ai une bonne nouvelle : le XXe siècle est terminé.
La question que nous devons nous poser est la suivante : l'écosystème du Game, qui a une certaine tolérance pour les monopoles et a d'une certaine façon besoin d'eux a-t-il développé des le même temps des anticorps qui l'empêchent de dégénérer en un terrain de jeu bloqué, contrôlé par quatre ou cinq joueurs ?
Bonne question.
Tout ce que je sais de la réponse, je l'écrirai dans le dernier chapitre de ce livre, que j'intitulerai, employant une expression que m'ont offerte deux de mes collègues, Contemporary Humanities.

B. Play, p. 278
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On n'aurait pu présenter différemment les premiers navigateurs qui ont ouvert les grandes routes intercontinentales au XVIe siècle. Il s'agit d'une stratégie tout à fait traditionnelle. Une ouverture classique, dirait-on aux échecs. Y compris dans son geste le plus caché et, finalement, le plus important. Il y avait autre chose que les navires marchands du XVIe siècle transportaient à travers le monde: Dieu. Les missionnaires. Un certain style de vie. Une certaine façon d'être au monde. Il en va de même pour la révolution numérique: une certaine façon d'être au monde commence à se mettre en place. Des figures mentales. Des mouvements logiques jusqu'alors inconnus. Une idée différente de l'ordre et de l'emprise sur la réalité. Il ne s'agit pas vraiment d'une religion, mais de quelque chose qui s'en approche: UNE CIVILISATION.
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J'ai voulu revoir cette vidéo, Steve Jobs présentait l'iPhone. Je voulais creuser des fossiles. Il y avait quelque chose à découvrir, quelque chose qui pouvait me conduire loin. Et j'ai fini par me convaincre que ce quelque chose était un fait évident: dans cette vidéo, JOBS S'AMUSE COMME UN FOU. Si je dis qu'il s'amuse, ce n'est pas parce qu'il fait le malin sur scène, non: on voit très bien que c'est l'iPhone qui l'amuse. Il joue à l'utiliser, pas en parler. Dans son comportement, tout vise à transmettre une information bien précise: l'iPhone EST AMUSANT? Je sais aujourd'hui cela doit vous paraître évident, mais il faut revenir à ce moment. A ce qu'il y avait eu auparavant. Au monde d'où nous venions.
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NOUS PENSONS QUE LA RÉVOLUTION MENTALE EST UN EFFET DE LA RÉVOLUTION TECHNOLOGIQUE, OR NOUS DEVRIONS COMPRENDRE QUE C’EST LE CONTRAIRE QUI EST VRAI.
Nous croyons que le monde numérique est la cause de tout, alors que nous devrions, à l’inverse, l’interpréter comme ce qu’il est sans doute, c’est-à-dire un effet : la conséquence d’une certaine révolution mentale. Je vous l’assure : nous regardons la carte à l’envers. Il faut la retourner.
Nous devons inverser cette fichue séquence : d’abord la révolution mentale, puis la révolution technologique.
Nous pensons que les ordinateurs ont généré une nouvelle forme d’intelligence (ou de stupidité, comme vous voulez). Maintenant, inversez la séquence : un nouveau type d’intelligence a généré les ordinateurs. C’est-à-dire qu’une certaine mutation mentale s’est très vite procuré les outils adaptés à sa façon d’être au monde : ce qu’elle a fait, c’est ce que nous appelons la révolution numérique.
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J'essaie de résumer en quelques mots : l'expérience était un geste, la post-expérience est un mouvement. Les gestes mettent de l'ordre dans le monde, les mouvements le déstabilisent. Les gestes raccommodent, les mouvements rouvrent. Chaque geste est un point d'arrivée, chaque mouvement un point de départ. Les gestes sont des ports, le mouvement est le grand large. Mais aussi : les gestes sont fermeté, le mouvement est VIBRATION.

B. Play, p. 197
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Videos de Alessandro Baricco (77) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Alessandro Baricco
Les voies de la narration. Apprendre l'art de raconter des histoires dans le monde contemporain
Avec David Foenkinos, romancier, dramaturge et scénariste, Fanny Sidney, réalisatrice, scénariste, comédienne et Pauline Baer, écrivaine et animatrice d'ateliers d'écriture
Au cours des deux dernières décennies, les histoires, les récits, les narratifs sont sortis du champ strictement littéraire et culturel pour investir d'autres espaces – politique, économique, informationnel. Portée par l'essor des industries créatives et par la multiplication des canaux et des formats, la « fabrique » à histoires s'est développée en réponse à des besoins variés : assouvir une quête de sens, se réapproprier une histoire familiale, fédérer autour d'un projet collectif, incarner une ambition entrepreneuriale, donner du souffle à un projet politique, redonner de la cohérence aux événements du monde, ou tout simplement répondre à notre envie d'être transporté et tenu en haleine… du récit intime qui bouscule au récit politique qui veut marquer son temps, de l'histoire qui captive au narratif d'entreprise qui conjugue stratégie et raison d'être, chacun cherche l'histoire qui fait vibrer, donne du sens, motive, divertit ou répond aux questions du siècle.
Si le besoin de récit est partout, il faut (ré)apprendre à raconter des histoires de manière adaptée aux usages contemporains, sans perdre de vue la vocation humaniste de toute narration et les ponts qu'elle peut jeter entre générations et entre communautés. Une nouvelle génération d'auteurs, ainsi que la demande des industries culturelles interrogent l'idée – très française, et à l'opposé de la mission de la Scuola Holden de Turin fondée à Turin par Alessandro Baricco en 1994 – que l'art du récit ne s'apprend pas, à moins de le faire comme un outil pour accéder à un métier et à un média. Et s'il fallait une « école Holden à la française » pour décloisonner les industries culturelles et les générations ?
Table ronde proposée par Claudia Ferrazzi, fondatrice de VIARTE.
À lire – David Foenkinos, Charlotte, Gallimard, 2014. Pauline Baer, La collection disparue, Folio Gallimard, 2020. Alessandro Baricco, The game, Folio Gallimard, 2019. Alessandro Baricco, Les barbares. Essai sur la mutation, Gallimard, 2014. Yves Lavandier, La dramaturgie : les mécanismes du récit, Les impressions nouvelles, 1994. Maureen Murdock, The heroine's journey, Shambhala Publications Inc, 1990.
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