Le Cocu magnifique

Le cocu magnifique est une pièce que j'avais étudiée au lycée. J'ai eu envie de la relire.Crommelynck est né en 1886 à Paris de parents belges. Il développe dans ces pièces l'exacerbation des passions comme celle de l'avarice dans Tripes d'or. Pour celle-ci qui parle de jalousie jusqu'à la folie, il s'est inspiré de la pièce de Shakespeare Othello, mais il veut montrer que cette passion n'a nul besoin d'éléments extérieurs pour exister.

Au départ Bruno et Stella forme un couple très amoureux, vivant dans un monde à eux (langage amoureux qui leur est propre) mais voilà qu'un cousin de Stella arrive pour passer quelques mois auprès du couple. Bruno tout à son adoration des perfections de son épouse l'exhibe aux yeux de Petrus. Ce qu'il suppose être un éclair de désir dans le regard de Petrus déclenche sa folie. Il met à la porte le cousin, mais le ver est dans la pomme, désormais il craint d'être cocu. Sans aucune raison, il ne peut plus faire confiance à sa femme que pourtant l'idée d'être infidèle n'a jamais effleuré. Afin de ne plus être tourmenté par la crainte de l'infidélité de Stella, il lui enjoint de coucher avec son cousin. Stella ne supportant pas le chagrin et les reproches de Bruno, se soumet à sa demande. du moins le suppose t-on car l'ami de Bruno, Estrugo, sommé de regarder par le trou de la serrure ne sait que dire “ Petrus et Stella, Stella et Petrus, seuls dans la chambre”.
Estrugo bien que quasiment muet est essentiel, Bruno le consulte sur la conduite de Stella et ce qu'il doit faire, mais enfermé dans sa logique destructrice, il fait questions et réponses.
Toute la pièce est dans une certaine ambiguïté, Stella acceptant tous les hommes du village déclare le faire pour guérir son mari de son mal, jusqu'où est elle soumise ?
C'est une farce avec coups de bâton, masques, bourgmestre ridicule… mais qui parle de l'alchimie étrange qui se créé au sein du couple, parfois comme ici jusqu'à la folie et à la soumission. Toujours d'actualité.

Challenge ABC 2017-2018
Challenge théâtre 2017-2018

Stella est une jolie jeune femme, éperdument amoureuse de son mari, et celui-ci le lui rend bien. Tous les deux filent le parfait amour, jusqu'à ce qu'un cousin revienne d'un lointain voyage et que le mari décèle, dans le regard que ce cousin porte à sa femme, une flamme qui lui ouvre les yeux sur l'attirance qui pourrait exister entre sa femme et les autres hommes. Fou de jalousie à l'idée que sa femme pourrait le tromper, il en devient malade de doute. Pour venir à bout de ce mal, il décide de mettre fin à l'incertitude… le Cocu magnifique est une pièce relativement drôle où l'on se demande jusqu'à la fin jusqu'à quel extrême le mari sera prêt à aller.

Cette pièce de 1921 donnée comme une farce dérive progressivement vers le drame. Si le thème du cocu volontaire est intéressant et correspond à certaines aspirations contemporaines, le traitement qui en est fait est terriblement moralisateur sur le fond et outrancier dans sa forme. Cette forme est plus celle d'une pièce du XVIIIe siècle que d'une tragi-comédie de l'entre-deux-guerres. le personnage principal, Bruno, est outrancier dans son amour et dans sa jalousie ce qui semble être la marque de Fernand Crommelynck tenant d'un théâtre du paroxysme. le principe est de parler (hurler) à la place des autres pour se convaincre qu'on a raison et amener ainsi la situation vers l'inéluctable et le point de non-retour. Dans l'édition d'Espace Nord, la pièce est coincée entre une préface et une postface encensant ensemble la pièce et le théâtre de Crommelynck en général. La postface (lecture) de Paul Emond s'assigne comme tâche de démonter le mécanisme de la pièce (pourtant pas bien compliqué) et de nous prouver combien elle est soi-disant transgressive. Stella, la femme de Bruno, cède à son délire en couchant avec tous les hommes du village (son mari croit qu'elle fait semblant sauf avec un, le vrai amant). Elle le fait par amour, un amour absolu. Dans cette démarche, elle va aussi découvrir une forme de bonheur, celui de la pluralité sexuelle. S'il y avait ambiguïté comme on nous le suggère, Stella aura pris cette liberté à bras le corps pour en jouir plutôt que de s'interroger religieusement sur son infidélité et poursuivre le jeu de son mari.
Ton anachronique du XVIIIe siècle et morale conservatrice (patriarcale) du début du XXe siècle, la coupe est pleine pour moi et j'oublierai rapidement cette pièce où une femme est une fois de plus l'objet sans volonté des tourments masculins.