Difficile de parler de ce livre. Je n'ai pas aimé, mais j'y suis sensible. Pas facile d'expliquer ce paradoxe !
Le roman démarre par le suicide de Thomas Bulot, trente-neuf ans, professeur à l'université aux États-Unis, meilleur ami de l'autrice. Dans une tentative de compréhension, un déversoir de sa culpabilité (de ne pas avoir vu, compris) peut-être,
Catherine Cusset revient sur la vie de son meilleur ami. Elle dresse son portrait : un homme brillant, rongé par des démons qui prennent plus en plus d'importance. Elle examine l'enchaînement d'événements, tous les rouages qui ont conduit à ce geste de non-retour. Et nomme la maladie qui le détruit.
Je suis partagée par ma lecture. Je comprends la démarche exutoire, mais pas la réserve que j'ai sentie à ma lecture. À vouloir éviter le côté larmoyant et pathos, toute l'émotion est muselée et ne m'a pas atteinte. Sans émotion, le livre se résume à une énumération d'échecs, qui dessert son ami plus qu'il ne le sert. Elle écrit qu'il est solaire, mais aucune émotion ne transparaît. Aucune empathie, aucun lien ne se créé avec son personnage principal. Et l'antipathie du narrateur n'aide pas.
Catherine Cusset se contente de rester à la surface. La vie ne se résume pas à des faits, elle se nourrit aussi des interactions sociales, de l'amour des autres. Comme Thomas Bulot lui avait dit, "Tu sais, Catherine, les gens ont quand même une vie intérieure". Et c'est précisément cette vie intérieure qui m'a manquée.
Après, c'est très bien écrit. le style est rythmé, l'écriture est riche, intéressante, précise. L'exercice littéraire du tutoiement est une réussite. C'est une lecture très agréable, un peu longue sur la fin, mais le talent de conteuse de
Catherine Cusset est indéniable.
Je crois qu'ici sont atteintes les limites de l'autofiction. Comment rendre hommage sans dévoiler, comment faire vibrer le lecteur en préservant la vie intérieure du personnage principal ?
Merci Babelio et Gallimard pour cette lecture.
Et vous, vous avez aimé ? le roman était quand même dans la dernière sélection du Goncourt 2016, je dois être à contre-courant, peut-être !