Paradoxal XVIIIe Siècle valorisant le libertinage et tout ce qui pourrait aussi le contrarier : la famille et l'enfant, l'amour maternel, l'éducation et la lecture, autant de thèmes également représentés et célébrés dans l'oeuvre de Fragonard, révélant l'accord profond du peintre avec la culture de son temps. Tel apparaît le Fragonard (réputé surtout pour ses polissonneries) découvert dans ce très attractif petit dictionnaire en seize plaisirs : libertin et chantre de l'amour familial et de la fécondité à la fois, absolument sensible à la mythologie ou à la nature bucolique et idéalisée, autant qu'aux innombrables fêtes et jeux sans doute prisés par la clientèle de son époque. Au-delà de sa peinture érotique allusive ou amoureuse, l'exploration de son oeuvre – aussi variée dans ses sujets que diverse dans les supports utilisés (dessin, gravure, peinture ou aquarelle) – se fait au travers de la littérature (Diderot ou Crébillon père et fils, Nicolas-Edme Rétif de la Bretonne, Marivaux et quelques autres) ou des pratiques imposées par les moeurs bourgeoises et aristocratiques (la dimension du jeu, par exemple, est très forte chez Fragonard). On regarde alors autrement « Le Verrou », « L'escarpolette », « Colin-Maillard », ou « La Bascule », qui se lisent dans un « système de contrôle des effets attendus » mis au point pour amener « une certaine frustration de l'amateur. » Hors de toute obscénité, Fragonard cultive un « art de la parade » où le spectateur devient totalement partie prenante de son tableau.
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[...] Enfin n'oublions pas que Fragonard a illustré, entre autres, le Roland furieux de l'Arioste (1474-1533), les Contes de Jean de la Fontaine, le Don Quichotte de Cervantès. Selon son petit-fils Théophile, Fragonard est passé de mode quand il se consacre pleinement au dessin d'illustration. Ce travail a commencé bien avant cette époque de mutation du goût pictural entraîné par le retour à l'antique des années 1780. L"émigration, le règne de la vertu imposé par Robespierre, ont modifié en profondeur le marché. Les polissonneries ne trouveront plus d'acheteurs avant le Directoire. Le goût du plaisir n'est pas absent dans les années révolutionnaires, mais il n'est pas bon de l'exhiber ou d'en tirer gloire. La bourgeoisie triomphante et les révolutionnaires les plus radicaux dénoncent le libertinage comme un vice aristocratique. [...]
Lecture et livres (p. 56)
[…] « Mais si la lecture est soupçonnée de pervertir, de manifester des désaccords avec l'ordre et la morale établis, elle est source de plaisir et d'évasion. Cet état de grâce que confère la lecture se traduit par des portraits de lectrices, abondants dans l'oeuvre de Fragonard. Le catalogue Rosenberg en propose de nombreux exemples. Tout d'abord le plus rayonnant peut-être, « La Jeune Liseuse », une belle jeune fille de profil, la tête inclinée vers le livre qu'elle tient de sa main droite, la gauche posée sur la table devant elle, le dos appuyé sur un coussin moelleux, tout vise à rendre l'intensité et le plaisir de lire. Pourtant ses joues sont bien rouges. A quoi rêvent-donc les jeunes filles qui lisent ? » [...]
Lecture et livres (p. 52)
Jean Marie Goulemot : L'
amour des bibliothèques
Depuis les salons de Fondation
suisse de la cité universitaire internationale de Paris, devant la
peinture murale du Corbusier,
Olivier Barrot reçoit
Jean-Marie GOULEMOT qui présente son
essai "L'
amour des bibliothèques" (Editions le Seuil).
Jean-Marie GOULEMOT parle de son
amour des bibliothèques et surtout de la lecture. Il explique tout ce que lui a apporté la lecture au cours de sa vie...