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4,14

sur 7433 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Pour être sincère j'ai eu du mal à me plonger dans ce roman, qui me semblait trop terre à terre, d'une vérité dérangeante de cynisme, l'espoir corrompue par cette légèreté de l'être qui devrait être tout bêtement, mais trop chargée d'une histoire sans espoir, ou la recherche du bonheur est la négation de la merde qui nous entoure, bernée par notre individualité, manipulée par notre inconscience, nous vivons chacun notre vie avec un bandeau devant les yeux…

Je n'ai pas cette capacité intellectuelle de disséquer de manière quantique les idées de l'auteur, pourtant j'ai compris bien des choses, sans pour autant être capable de les expliquer, emprisonné malgré moi dans mes propres limites qui se nourrissent d'une vulgarisation assumée …Je n'ai pas cette prétention de… je suis là avec mes réflexions, auxquelles j'essaie d'apporter des réponses, en quête permanente de sens alors qu'il serait plus judicieux de se leurrer, de suivre le troupeau, le poing levé, persuadé de détenir la vérité de ce qui est bandant ou ne l'est pas…

Non j'ai toujours été un lâche, spectateur du monde qui m'entoure, à toujours me poser un tas de questions à la con dont personne ne m'apportera vraiment la réponse…

Alors moi je moi je moi je…

Il y a un deux ans et ce n'est plus un secret, d'ailleurs cela n'a jamais été un tabou pour moi, je me suis réveillé un matin en me disant :

« Tiens je vais être cocu »

Je ne me suis pas réveillé cocu, non j'avais juste deviné que je le serai très prochainement, il suffit d'une maladresse, d'un petit mensonge, j'aurais pu l'arrêter, mais de quel droit, elle ne m'appartient pas, elle devait faire ses propres choix, alors je ne me suis transformé en pleureuse dont le pathétique comportement fut à la mesure de ma brève déchéance, ou tout espoir d'un bonheur éphémère se mesurait à cet acte, et à lui seul, que toute ma vie ne reposait que sur mes rêves de princesse, acquis et non immuable, alors que mon moi était juste manipulé par l'illusion d'un amour égoïste, qui attendait une réciprocité sans individualité…

Mais nous ne sommes pas seuls, nous cohabitons selon une morale érigée par la bienpensante, doué d'une empathie qui se heurte à notre égoïsme, de cette légèreté insouciante ou nous serions le héros de notre histoire, mais il y a les autres qui gravitent autour de nous en vous chiant sur la gueule leur propre existence, essayant de vous convaincre que votre vérité n'est qu'une fiction dont ils peuvent vous libérer, il vous suffit de vous agenouiller devant la majorité sans vous soucier de votre minorité, esseulé, vous ne survivrez pas, soyez sage de penser selon le plus grand nombre, soyez Kitsch…

Quand j'ai su que ma nana se faisait amoureusement tripoté par un autre, mon égo et ma fierté ont crié à la salope, à l'infamie, à la trahison, faites chauffer les buches, ma souffrance se lovait d'une morale assénée depuis mon plus jeune âge, je souffrais d'une éducation, et d'une culture à la majorité absolue, me tripotant le nombril sur ma triste vie qui n'était devenue qu'un mensonge à la con…

Mais je n'étais pas satisfait de toutes ces larmes, de cette amertume, de cette haine viscérale qui vous fait honte, j'avais honte de moi, de ma fragilité, de mon égocentrisme, de m'être rangé si facilement du côté des poings levés, alors j'ai pris le recul nécessaire en quête d'un sens plus profond de l'acte en lui-même et de ma propre réaction, je voulais cheminer vers mes propres réponses…

Il m'a fallu un an pour me comprendre, pour comprendre que mon couple était dans une impasse, mais que notre complicité et notre attachement nous aveuglaient d'un bonheur sincère et bienveillant, mais il ne suffisait plus en tant qu'individu, le « nous » était heureux, mais le « moi » était endormi , anesthésié…Puis un jour ce « moi » en ras le cul de se cacher, il veut un peu d'autonomie, de candeur, de naïveté, le « moi » est égoïste par nature, il veut survivre, s'émanciper, alors il fait ce qu'il a faire avec toute son innocence, il n'a jamais eu pour vocation le « nous », il ne pense pas aux conséquences, à la morale, au bien ou au mal, il veut survivre dans sa vérité à lui et non dans le mensonges des autres, il n'a pas pour vocation de faire du mal, juste de se faire du bien, les conséquences sur le nous sont souvent incomprises et douloureuses, pourtant il s'en branle…

Nos réactions sont définies par nos sentiments, définies par notre vie, sans cesse à la recherche d'un bonheur infini qui n'existera pas, puisque défini en tant que bonheur, c'est qu'il ne sera jamais atteint, il est juste un but qui oriente notre vie de telle ou telle manière…
Je n'ai jamais condamné ma nana, je l'ai laissé cheminé seule, je n'ai jamais élevé la voix, insulté, je ne me suis jamais énervé non j'ai compris :

Ma nana n'a jamais remis en question notre « nous », elle est tombée amoureuse en tant que « moi », c'était sincère, beau, passionnelle, je lui ai laissé le choix de partir, à plusieurs reprises, moi je savais qu'elle me manquerait, que malgré cet acte égoïste et cruelle pour mon égo, je ne serai pas heureux sans elle, ce n'était pas une faiblesse ou un manque de courage, juste un acte d'amour sincère sans rien attendre en retour, elle avait été sincère sur ce qu'elle avait vécue de différent, parfois maladroite, je l'ai imaginé méprisante et indifférente, alors qu'elle était paumée, je restais le bonheur dont elle était pleinement satisfaite en tant que « nous » mais dont elle doutait en tant que « moi »… J'ai mis du temps à comprendre mais j'ai compris aussi douloureux que cela puisse être pour mon « moi » à moi…

Il n'y a pas de brouillon dans la vie, chacun de nos actes ont une conséquence, pas de retour en arrière, il faut être en capacité d'assumer, sans regret, il y toujours une bonne raison d'agir, avec des « si » qui nous feraient tourner en rond, nous pourrions corriger, manipuler notre individualité à l'infini, alors que notre instinct nous a donné son avis sincère la première fois pour trouver les réponses à notre propre bonheur, sans la corruption du « nous.

L'humain est complexe et son instinct de survie n'est pas compatible avec son individualité, notre « moi » est notre démon intérieur, nous faisant souffrir des tourments de la vie, car nous ne sommes pas seuls…

C'est ça pour moi l'insoutenable légèreté de l'être, ce terrible combat intérieur que nous menons chaque jour, entre deux entités incompatibles le « nous » et le « moi », à chacun d'essayer de comprendre l'incompréhensible, de donner un sens à ce qui n'en a pas, nous cheminons selon le « nous » alors que nous ne sommes que « moi… »

Et je ne suis que moi, plein de paradoxes et de négations, mais je veux aimer plus que détester, combattre ce démon qui me ronge en restant ce que je suis, cet homme ordinaire qui un jour ou l'autre finira dans l'oubli d'un passage éphémère sur le chemin de sa vie…

L'insoutenable légèreté de l'être sonne comme une souffrance dont nous ne pouvons échapper.

A plus les copains…
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N'a de valeur que ce qui pèse, c'est pourquoi Tomas - un séducteur qui aime sa liberté - quand il rencontre Tereza, supporte sa jalousie, et d'une certaine manière, par amour, renonce à sa si chère légèreté d'être.

Tereza souffre des infidélités de Tomas comme elle a souffert d'un manque d'amour maternel. Une pesanteur qui oblitère ses relations amoureuses. Peut-être faut-il y voir un lien entre les deux ; à cause d'une mère mal aimante, qui lui a fait penser qu'elle n'était pas assez bien pour être totalement aimée, elle est tombée amoureuse d'un homme qui lui est infidèle. Un homme qui, sans le savoir, partage sa maîtresse Sabina avec Franz, qui de son côté l'ignore aussi.


Avec ce chassé croisé amoureux sur fond de Printemps de Prague, et de l'invasion soviétique de la ville, Milan Kundera se livre à une réflexion sur la légèreté ou la pesanteur engendrées par l'essence même des relations hommes femmes. En se plaçant du point de vue de tous les personnages, c'est une réflexion où chacun a la possibilité de retrouver un peu de son expérience amoureuse dans les situations ou les sentiments décrits par le menu.

Ce qui, de fait, est la force de ce roman et sa permanence - avec son titre si éternellement magique - dont sa relecture (même si l'écriture m'a semblée marquée par son époque) n'a pas entaché un souvenir positif très lointain.
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Faut-il lire Kundera? "Oui, il le faut! Ja, es muss sein!"
Ne serait-ce que pour suivre l'histoire d'amour entre Tomas et Tereza. Lui est un libertin (c'est le côté "léger" développé dans ce roman et que possède aussi l'une de ses maîtresses, l'artiste Sabrina) mais il est torturé par la douleur insoutenable qu'il génère pour son couple, surtout pour Tereza, déjà marquée par l'éducation et les vexations de sa mère. de lourds fardeaux pour elle.
Toute cette histoire pourrait sembler banale s'il n'y avait pas des ingrédients supplémentaires qui en font un très grand roman.
Tout d'abord un cadre historique fort avec l'arrivée des troupes soviétiques à Prague en 1968, qui emporte peu à peu les différents protagonistes un peu plus vers l'Ouest. Kundera développe alors abondamment le manque de liberté à la suite de cette occupation.
Ensuite et surtout des considérations philosophiques qui m'ont réconciliés avec la matière honnie depuis la terminale. Réconcilié, oui car comment ne pas être séduit par ces concepts de léger/pesant, outils simples et judicieux pour analyser les trajectoires de vie de chacun des protagonistes. Et bien sûr j'ai été emporté par "le kitsch " pour mystifier, un à un l'honnêteté de façade des principales idéologies présentes dans le monde occidental. Et hop, le kitsch du capitalisme et paradoxalement le kitsch du communisme passés à la moulinette. Tout est kitsch finalement, même et surtout Adam et Eve au Paradis... Et ceci n'est qu'une infime partie des idées distillées par Kundera.
D'ailleurs ma perception partielle de cette riche lecture m'inclinerait volontiers à la reproduire. "Es muss sein, il le faut!"
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« L'histoire est tout aussi légère que la vie de l'individu, insoutenablement légère, légère comme un duvet, comme une poussière qui s'envole, comme une chose qui va disparaître demain. »

Nous n'entrons qu'une fois en scène, sans répétition, sans deuxième chance. Alors pourquoi ne pas choisir d'être léger, d'éviter la pesanteur, les fardeaux, puisque nous n'avons qu'une vie à jouer.

Avec pour toile de fond le communisme et l'invasion des Russes à Prague, difficile pour les personnages évoqués dans ce roman d'être légers.

Tomas et Sabina symbolisent la légèreté de l'être. Tomas fuit les responsabilités. Il sait détacher son âme de son corps dans ses aventures amoureuses. Pourtant il va s'attacher à Tereza par compassion. Il va être accablé par la douleur, la terrible pesanteur, quand elle le quittera. Que vaut cet amour né du fruit de multiples hasards et qui aurait pu être tout autre ?

Sabina veut rester légère en trahissant son destin, elle reste libre. Pourtant, fuyant ainsi, faisant le vide relationnel autour d'elle, sa vie lui semble dénuer de sens, elle reconnait le besoin de racines. La légèreté de sa vie lui est finalement insoutenable.

Franz et Teresa symbolisent la pesanteur. Ils sont fidèles. Tereza ne sait pas être légère, elle ne peut pas reconnaitre la futilité de l'amour physique, elle sombre dans la jalousie. Pour elle, le hasard est un signe du destin, c'est ainsi que cela devait se passer. Pourtant, Tereza reconnaitra que l' amour qui la lie à son chien Karénine est meilleur que celui qui la lie à Tomas, bien qu'il ne soit pas plus grand. C'est un amour pur, désintéressé, qui ne demande aucun sacrifice. Une idylle entre un homme et une femme est-elle possible ? N'y a –t-il pas trop de compromis, trop de malentendus.

Franz finit par quitter sa femme et à ne plus penser à sa maîtresse qu'en rêve. Il coupe les liens qui entravaient sa liberté pour enfin s'affirmer.

Chaque personnage a évolué, démontrant l'ambiguïté de la légèreté et de la pesanteur. Laquelle des deux est un fardeau ? L'une d'elles représente-t-elle l'idéal d'une vie ?

Dans ce livre, il y a plein de réflexions philosophiques.
J'ai aimé tout particulièrement le cadre politique ; le kitsch du réalisme socialiste, la négation de l'individualisme, l'adhésion forcée des masses à une idéologie.

« La vie humaine n'a lieu qu'une seule fois et nous ne pourrons jamais vérifier quelle était la bonne et quelle était la mauvaise décision, parce que, dans toute situation, nous ne pouvons décider qu'une seule fois. »



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Je pensais que ce livre allait être hermétique, fort philosophique donc ennuyeux.Je l'ai trouvé passionnant, très riche, trop même, dans la mesure où l'on aimerait s'arrêter sur telle ou telle réflexion et où le livre nous pousse vers d'autres idées, d'autres thèmes, tout aussi intéressants.C'est vrai que l'empreinte de l'exilé, du tchèque soumis à l'invasion russe, est forte.C'est vrai que le désabusement, l'ironie, sont omniprésents.Il y a un entrelacs des personnages, par couples: Tomas, Tereza, et Sabina, Franz.L'auteur a une volonté fréquente de classifier ses personnages: Franz rêve sa vie, Tereza vit pour et par un seul être: Tomas. Peut-être pour s'interdire tout sentiment à leur égard.Par dérision aussi et pour montrer qu'il ne s'agit que d'êtres de papier; d'ailleurs, il intervient très nettement , en tant qu'auteur, dans le récit.Ses réflexions- même si je n'y adhère pas toujours- sur l'homme, le hasard , les rapports sentimentaux sont séduisantes.
J'avais été attirée par le titre, beau et mystérieux.L'insoutenable légèreté de l'être, dans le livre, est incarnée par Sabina, toujours en quête de liberté, donc de trahisons, qui s'éloigne des fardeaux de la vie et croit y trouver son épanouissement.En fait, comme le démontre Kundera, elle se trompe, le choix de la légèreté l'éloigne du réel et la plonge dans le vide.Avoir un fardeau bien réel, cela peut être , paradoxalement, donner un sens à sa vie.Un livre complexe et profond.
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Ce roman débute tout d'abord à Prague et se déroule dans le contexte de la Tchécoslovaquie du Printemps de Prague, puis de l'invasion du pays par l'URSS. Milan Kundera nous offre ici un roman d'amour et de réflexion grandiose. L'écriture de l'auteur est fluide, aérée et sans fioritures. Nous suivons quatre personnages principaux tout en étudiant les différentes combinaisons amoureuses possibles : Tomas, l'homme volage qui tombe amoureux et tente de devenir fidèle pour Tereza, une photographe amoureuse de lui et angoissée par ses infidélités. D'un autre côté, nous avons Franz, un homme d'une quarantaine d'années qui quitte son couple "traditionnel" pour s'engager conventionnel avec Sabina, une artiste libre. L'analyse des personnages est profonde et originale, ce sont quatre figures métaphoriques représentant l'ambiguïté, la morale, la légèreté mais aussi la pesanteur. Les errances de quatre êtres qui se cherchent et se perdent entre pesanteur et légèreté ne pourront pas vous laisser indifférents.

Certes, le thème principal de l'ouvrage est l'amour dans sa réalité la plus complexe mais l'auteur réalise aussi une interaction avec la philosophie de Nietzsche et la musique de Beethoven tout au long du roman. J'ai trouvé ma lecture particulièrement émouvante par sa poésie, sa douce et légère mélancolie et sa profonde réflexion sur les rapports Hommes-femmes et leurs questions existentielles. Kundera est un des principaux écrivains contemporains, sa vie a été tourmentée par le communisme et il en fait un des thèmes principaux de son roman.

La structure en chapitres courts offre un livre qui passe
d'une scène à l'autre, d'un personnage à l'autre pour faciliter et rendre encore plus agréable la lecture. On a envie de continuer ce livre indéfiniment, c'est une bible du savoir-vivre. de plus, la culture de l'auteur transpire entre les lignes et nous apporte des connaissances d'autant plus importantes. L'insoutenable légèreté de l'être est un roman profond qui alterne entre un roman narratif et la réflexion philosophique, l'absurde du rêve et le réalisme de la vie. Kundera nous transporte vers l'au-delà en nous accordant un moment de bonheur assuré.

L'ouvrage, riche en significations, aborde des thèmes qui nous instruisent au fil des pages. Je recommande ce très beau roman dont la structure narrative est réussie, le style agréable et les personnages tout simplement inoubliables.

Les mots ne seront jamais assez forts pour te remercier N. de m'avoir offert ce livre qui a su me marquer pour un très long moment.
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Kundera évoque Nietzsche enlaçant le cheval qu'un cocher fouettait, et ceci de façon très émouvante . D'après lui, sa folie vient de ce "divorce d'avec l'humanité"par écoeurement. Je sens les deux hommes proches, sur ce point de vue.
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Je suis très sensible à cet essai-roman, mais la première moitié me laisse un goût amer. En effet, comme Boileau, je pense que " Ce que l'on conçoit bien s'énonce clairement," mais là, ça me parait fouillis, ça part dans tous les sens, c'est compliqué, ou plutôt c'est un système complexe : au départ, nous avons deux couples, mais on est en 68, et ils pratiquent plus ou moins l'amour libre, d'autres personnages viennent donc se greffer.. Or, nous sommes à Prague, et les chars russes envahissent la ville, la politique vient se greffer là-dessus, la police russe, mais aussi Robespierre, mais aussi Freud, la Genèse, Moïse, Oedipe et Sophocle, Platon, Parménide, Descartes, Beethoven, le massacre cambodgien et les BHL de l'époque qui veulent se faire mousser sur un événement cruel...
MAIS....
Dans ce fourre-tout, j'ai trouvé, à travers une sorte de roman d'amours au pluriel, de splendides analyses sociétales appuyées sur de belles références, mais aussi un solide vécu, puisque Milan Kundera a dû fuir son pays sous la pression de l'URSS : il sait de quoi il parle, et sans doute qu'il peut délivrer, dans ce livre sorti à sa naturalisation française, des messages non diffusés dans la presse tchèque de l'époque.
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On peut entamer cette critique par les esquisses des personnages : Tomas-sa femme-Simon, Tereza, Sabina... Franz-Marie-Claude, Marie-Anne, Sabina encore, l'étudiante... Chaque lecteur peut rattacher une de ses connaissances à un personnage. Mais en fait, l'auteur montre que le plus intéressant est Karenine, non pas le mari d'Anna Karenine, mais le chien de Tomas et Tereza.
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Pourquoi ?
Justement, à cause de la philosophie de Milan Kundera.
Donc, je vais essayer d'évoquer, dans cette critique, quelques aspects philosophiques du livre, livre tellement entropique qu'il en est presque trop riche malgré ses 460 pages.
Il y a d'abord l'insoutenable légèreté de l'être. Qu'est ce que ça veut dire ? j'ai mis du temps à comprendre, mais je pense qu'il s'agit de l'inconséquence et de la non-empathie des gens, tout le système de pensée de l'auteur s'y rattache.
Je vais analyser une dizaine de points.
1- Les mots et les sens sont souvent interprétés à tort : quand Marie-Claire rapatrie son mari, ses pensées sont à l'opposé de ce qu'elle croit. Elle pense ce qui l'arrange, pas forcément la vérité.
L'infidélité des mots et des sens, on le voit aussi chez Saint-Augustin, par exemple.
2 -Doit-on condamner ceux qui ne savaient pas ? Moïse doit-il se crever les yeux parce qu'il ne savait pas qu'il s'unissait à sa mère ? Les communistes tchèques doivent-ils être condamnés, même s'il jurent qu'ils ne savaient pas que les Russes faisaient des atrocités chez eux ? En est-on sûrs ?
3- La vie ne se déroule qu'une seule fois, donc, comment choisir ?...
a ) Je pense qu'en comparant la vie à un jeu de billes sur un plan incliné comme le faisait mon père, en donnant de plus en plus souvent l'impulsion du bon côté quand la bille rencontre un clou, on arrive à peu près où l'on veut au final, en bas du plan incliné.
b) en général, on a plusieurs chances.
Mais bon, il y en a toujours qui se retrouvent dans la m... A ceux-là, je dirais 50/50.
4- Sexe ( Tomas et Sabina ) et amour ( Tomas et Tereza ) sont deux choses différentes. Bien sûr, souvent, pas toujours., et là, la légèreté de l'être Tomas est insoutenable pour Tereza.
5-Tomas doit-il choisir entre le hasard, Tereza, la Moïse apportée dans une corbeille au fil de l'eau, et son travail de chirurgien, qui est la nécessité, sa passion, le "Es muss sein" de Beethoven ?
6- L'homme doit il préférer le progrès linéaire, le "toujours plus" ou le bonheur qui est un rituel en boucle, le désir de répétition ?
7- Lourdeur : comment réagir face au système soviétique lourd qui vous écrase, par un chantage comme si c'était une partie d'échecs ? L'affrontement conduit à la prison ou la mort, il y a aussi la fuite à l'étranger, Tomas et Tereza choisissent une autre solution, un peu du style "aïkido".
8- Légèreté : Paménide choisit la légèreté comme système positif ; Sabina aussi : ça fait souffrir Tomas et Franz, évidemment.
9- le kitsch est synonyme de "mauvais goût", mais pour l'auteur, c'est une dictature du coeur, un épitaphe de l'être entre l'existence et l'oubli, par exemple :

"Qu'est-il resté des agonisants du Cambodge en 1980 ?
Une grande photo de la star américaine tenant dans ses bras un enfant jaune."
C'est d'une insoutenable légèreté.

10- La Genèse, écrite par un homme, donc pas forcément vraie, dit que l'homme règne sur les animaux. A ce titre, Descartes pense que les animaux sont des machines sans âme.
Or, la septième partie du roman est consacrée au chien de Tomas et Tereza, Karenine, et l'auteur, en 50 pages, démontre bien que le chien, l'animal est tout sauf une machine.... D'ailleurs, Karenine me fait penser à notre Chamallow, surtout quand le chien te regarde ainsi :

"Ce n'était pas un regard désespéré ou triste, non.C'était un regard d'une effrayante , d'une insoutenable confiance. Ce regard était une question avide."
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L'âme humaine est-elle légère ou pesante ? Et d'ailleurs, lequel de ces adjectifs est une qualité ? Vaste question à laquelle tentent de répondre nos protagonistes. Pris dans la tourmente de l'invasion soviétique à Prague, Tomas représente le doute, coincé entre son attirance pour les aventures sans lendemain et son amour indéfectible pour Tereza. Cette dernière représente la pesanteur : elle supporte tous les coups durs sans broncher, persuadée que l'amour pur triomphera quoi qu'il arrive au bout du chemin. Une des maîtresses de Tomas, Sabina, artiste avide de liberté, représente la légèreté.

Le roman est complexe, et aborde une foule de thématique. Durant les premières parties, j'ai pensé que le récit était la simple histoire d'un triangle amoureux, avec toutefois une grande précision d'analyse dans les motivations et les ressorts intimes des différents personnages. le volet politique pointe le bout de son nez dans les dernières parties. La légèreté n'est pas seulement discutée du point de vue de l'être humain, les systèmes politiques sont aussi mis sur le grill.

L'écriture est un vrai régal, et le livre comporte des scènes qui me marqueront durablement. Comme cette marche de protestation d'une vingtaine d'intellectuels, événement couvert par plus de trois cents journalistes, qui tourne à la mise en scène d'un spectacle grotesque. Ou la scène finale, qui provoque une charge émotionnelle impressionnante au vu du caractère finalement anodin de la situation.

Il m'a fallu du temps pour le découvrir, mais Kundera n'usurpe clairement pas sa réputation de grand écrivain du XXe siècle. Son roman continue à me faire réfléchir longtemps après l'avoir terminé.
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Voici bien longtemps que j'avais envie de me plonger dans lecture de ce roman philosophique grandiose qu'est " L'insoutenable légèreté de l'être".
Je le lis et le découvre par petites tranches accompagnées de réflexions.
J'adore le parallélisme entre les faits du roman illustrés par la vie de Tomas et ses choix déroutants et d'autre part les rappels à la philosophie, aux vies antérieures.
C'est soufflant et je n'ai pas fini de m'y replonger de temps à autre.
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Magnifique étude psychologique de l'individu, plus particulièrement des relations amoureuses. Kundera perce ici avec perfection et virtuosité les soubresauts de l'âme et de la pensée à l'image d'un Knut Hamsun avec la faim ou du maître en la matière Fiodor Dostoïevski dans son immense crime et châtiment.

On suit la vie d'un couple Pragois dans les années 70, l'évolution de leur histoire d'amour, les pensées de chacun, sans tabou et tout ceci dans un contexte de montée du communisme. Tout est ici dépeint de manière simple et précise, l'étude psychologique est fine et la description du contexte politique fait également de ce roman une oeuvre sociale.

Un petit bijou à avoir lu.
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