Depuis une semaine je vis en compagnie du grand Prix Nobel
Albert Camus. Non pas que Camus soit quelqu'un que je viens de découvrir seulement maintenant. Je n'avais pas 14 ans, lorsque est arrivé cet accident tragique de la circulation routière dans lequel est mort à 47 ans un des meilleurs auteurs de son époque. Des décennies trop tôt ! Je vois encore les photos des journaux d'alors de la voiture du neveu de son éditeur et ami, Michel Gallimard, enroulée autour d'un arbre. Pour être honnête, ce qui m'a frappé c'est qu'il s'agissait d'une splendide Facel Vega de fabrication française et que l'écrivain, dont je n'avais encore rien lu, était né un 7 novembre, comme moi.
D'après mes statistiques j'ai lu 'L'Étranger ' en 1965 et '
La Peste' un an après. Plus tard ont suivi '
L'Exil et le Royaume', '
La Chute' et '
Le Mythe de Sisyphe'. Les prochains de lui seront '
Noces, suivi de L'Été' et '
Le Premier homme', dont diverses critiques affirment que ce livre malheureusement pas terminé par lui, n'en demeure pas moins être un de ses meilleurs. Donc, une belle lecture en perspective.
Pour élaborer la présente critique, j'ai pris comme point de départ l'excellente biographie de
Daniel Rondeau '
Camus ou les promesses de la vie', et '
Albert Camus de Tipasa à Lourmarin' publié à l'occasion du centenaire par Hervé et Eva Valentin (Éditions Sisyphe) et le merveilleux Figaro hors-série 'Camus: L'écriture, la révolte, la nostalgie' de 2010. En outre et surtout, j'ai eu la grande chance de pouvoir bénéficier des explications tout à fait expertes de mon guide éclairé 'oran' pour Babelio et Michèle pour les amis, qui nous a fait visiter, mon épouse et moi, la charmante petite ville de Lourmarin, le fief de ce géant, où se trouve toujours sa maison (acquise grâce au
Prix Nobel), le café-terasse - Ollier - qu'il fréquentait et le cimetière où il est enterré.
Pour être complet, je tiens aussi à mentionner 'Le Cahier Camus de L'Herne' dirigé par
Raymond Gay-Crosier et
Agnès Spiquel.
Comme je présume que la vie et l'oeuvre de Camus sont assez connues par les babéliennes et babéliens, je ne ferai pas un résumé biographique à la Wikipedia, mais me contenterai de quelques impressions et considérations personnelles relatives à cet auteur hors pair et homme remarquable à plusieurs points de vue. Il faut que j'avoue avoir appris, en un temps record, tellement d'informations sur sa vie courte mais si incroyablement riche, qu'il m'est difficile de tout filtrer. Peut-être aurait-il été plus sage d'attendre un peu avec ma critique, mais mon enthousiasme pour Camus a apparemment eu le dessus. Il est évident que mes commentaires n'engagent que moi et ne sont donc pas ceux d'oran-Michèle, qui est beaucoup moins radicale que moi et beaucoup plus indulgente et réservée.
Des livres de Camus, j'apprécie tout d'abord la grande variété de sujets : allant de la nostalgie de l'endroit de sa naissance, l'Algérie, en passant par les réalités politiques et sociales de son époque, à la condition humaine et les injustices qui caractérisent notre société et comment s'en sortir.
J'aime également son style précis et son langage direct et relativement simple, bien que fleuri et poétique.
Mais c'est surtout pour l'homme que j'ai une très profonde admiration. Plus spécifiquement son souci permanent de trouver des solutions et remèdes aux maux de la société dans laquelle il a vécu et que nous vivons tous. Comparé à son ami-rival,
Jean-Paul Sartre, qui prônait des solutions presque 'ex cathedra' , du haut de sa célébrité, qui n'étaient pas toujours très claires et, hélas, souvent erronées (comme ses convictions communistes pendant tout un temps que la Russie souffrait de l'arbitraire d'un Staline), Camus, humblement mais honnêtement cherchait. Il aurait été intéressant et très probablement instructif de voir à quelles options politiques et humanitaires, il serait arrivé s'il n'avait pas décédé aussi jeune. Surtout que contrairement à un autre de ses contemporains, le philosophe
Maurice Merleau-Ponty (1908-1961), Camus n'avait pas l'ambition de construire un système logique et théorique de l'homme et de l'humanité, mais, comme homme d'action, préconisait des mesures plus concrètes et réalisables. Contrairement à
Sartre, il n'avait pas ce souci (presque maladif) de l'effet que ces belles formulations pourraient produire.
En regardant les nombreuses photos reproduites dans les publications précitées, il ressort clairement que Camus a dû être quelqu'un, que dans la langue parlée on résume par le qualificatif de 'sympathique' . Pas étonnant que, sans qu'il ait été coureur de jupons, son charme auprès de la gent féminine ait été considérable.
Bref, Camus était un homme d'une pièce, simple, foncièrement honnête, convaincu d'une mission sur terre, tout en étant un écrivain exceptionellement talentueux. Qualité reconnue par l'Académie Suédoise, qui lui a décerné le Prix Nobel Littérature en1957. À l'âge de 44 ans. Presqu'un record, s'il n'y avait pas eu
Rudyard Kipling, qui l'a reçu à 42 ans, mais dans une toute autre ère, exactement un demi siècle avant
Albert Camus.