Michaël, Laure, Rozenn et Julien, libraires à Dialogues, présentent leurs coups de coeur parmi les nouveautés de cette rentrée littéraire 2023.
Voici les romans présentés au cours de cette rencontre :
- Perspective(s), de Laurent Binet (éd. Grasset) : https://www.librairiedialogues.fr/livre/22535980-perspective-s--laurent-binet-grasset ;
- le Grand Secours, de Thomas B. Reverdy (éd. Flammarion) : https://www.librairiedialogues.fr/livre/22534463-le-grand-secours-thomas-reverdy-flammarion ;
- le Colère et l'Envie, d'Alice Renard (éd. Héloïse d'Ormesson) : https://www.librairiedialogues.fr/livre/22541525-la-colere-et-l-envie-alice-renard-heloise-d-ormesson ;
- Trust, d'Hernan Diaz (éd. de l'Olivier) : https://www.librairiedialogues.fr/livre/22507721-trust-hernan-diaz-editions-de-l-olivier ;
- Veiller sur elle, de Jean-Baptiste Andréa (éd. L'Iconoclaste) : https://www.librairiedialogues.fr/livre/22540075-veiller-sur-elle-jean-baptiste-andrea-l-iconoclaste ;
- le Grand Feu, de Léonor de Récondo (éd. Grasset) : https://www.librairiedialogues.fr/livre/22536025-le-grand-feu-leonor-de-recondo-grasset ;
- le Portrait de mariage, de Maggie O'Farrell (éd. Belfond) : https://www.librairiedialogues.fr/livre/22540050-le-portrait-de-mariage-maggie-o-farrell-belfond ;
- Vous ne connaissez rien de moi, de Julie Héraclès (éd. JC Lattès) : https://www.librairiedialogues.fr/livre/22547629-vous-ne-connaissez-rien-de-moi-julie-heracles-jc-lattes ;
- Sauvage, de Julia Kerninon (éd. L'Iconoclaste) : https://www.librairiedialogues.fr/livre/22541172-sauvage-julia-kerninon-l-iconoclaste ;
- le Plus Court Chemin, d'Antoine Wauters (éd. Verdier) : https://www.librairiedialogues.fr/livre/22451137-le-plus-court-chemin-antoine-wauters-verdier ;
- Les Femmes de Bidibidi, de Charline Effah (éd. Emmanuelle Collas) : https://www.librairiedialogues.fr/livre/22507305-les-femmes-de-bidibidi-charline-effah-emmanuelle-collas ;
- le Chien des étoiles, de Dimitri Rouchon-Borie (éd. le Tripode) : https://www.librairiedialogues.fr/livre/22540128-le-chien-des-etoiles-dimitri-rouchon-borie-le-tripode ;
- Les Âmes errantes, de Cécile Pin (éd. Stock) : https://www.librairiedialogues.fr/livre/22542465-les-ames-errantes-cecile-pin-stock ;
- Les Silences des pères, de Rachid Benzine (éd. Seuil) : https://www.librairiedialogues.fr/livre/22508263-les-silences-des-peres-rachid-benzine-seuil ;
- Une odeur de sainteté, de Franck Maubert (éd. Mercure de France) : https://www.librairiedialogues.fr/livre/22344217-une-odeur-de-saintete-franck-maubert-mercure-de-france ;
- Plus jamais, de Megan Nolan (éd. de l'Oliv
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Il y a les adieux, et puis on repêche les corps – entre les deux, tout est spéculation.
Dans les années à venir, Thi Anh laisserait les souvenirs atroces du bateau et du camp s’en aller, goutte à goutte, jusqu’à n’être plus que murmures. En revanche, elle s’accrocherait à cette ultime soirée de toutes ses forces, depuis l’odeur du riz fumant dans la cuisine, jusqu’au contact de la peau de sa mère quand elle la serra dans ses bras pour la dernière fois.
Incipit
Elle avait eu beau tenter de protéger ses enfants de la tragédie en évitant de leur raconter les moments les plus horribles de ce qu'elle avait vécu, elle comprenait qu'elle leur avait transmis malgré tout certaines choses à travers son comportement, les pores de sa peau, ou bien ce lien invisible qui unit les mères à leurs enfants.
Il existe une manière acceptable de porter le deuil : ni trop ni trop peu. Mais une partie de ce deuil se passe loin du regard des autres, et cette partie concerne seulement la personne et celle ou celui qu'elle a perdue. Et je pense que c'est dans cet instant de communion privée, loin des foules et des jugements, que nous trouvons la paix.
Après avoir appris ce qui s'était passé sur l'île de Ko Kra, je n'ai pas fermé l'œil pendant trois jours, et à nouveau, je me suis interrogée : Pourquoi est-ce que je veux écrire ça?
Il s'agit sans doute plus d'un besoin que d'un désir.
Je veux tout savoir.
Je veux faire vivre cette histoire dans mon esprit.
Et plus je sais de choses, plus je ressens la nécessité de transmettre, comme si cette histoire était mon héritage, qu'elle était désormais placée sous ma responsabilité: je me dois d'en prendre soin.
Je ne peux pas la laisser s'effacer; je ne peux pas la laisser mourir.
Dans les années à venir, Thi Anh lasserait les souvenirs atroces du bateau et du camp s'en aller, goutte à goutte, jusqu'à n'être plus que murmures. En revanche, elle s'accrocherait à cette ultime soirée de toute ses forces, depuis l'odeur du riz fumant dans la cuisine, jusqu'au contact de la peau de sa mère quand elle la serra dans ses bras pour la dernière fois.
Mais j'y reviens toujours, non parce que ces horreurs m'attirent, mais parce que j'éprouve le besoin viscéral de savoir. Savoir permet de se souvenir, et se souvenir c'est rendre hommage. Je veux que tous les morts soient honorés.
Il leur a présenté un système de sonorisation en désignant la jungle toute proche. « Il faut aller là-bas poser l’engin pas trop loin du camp et appuyer sur lecture . » Il a sorti une cassette de sa poche avec une étiquette sur la tranche : « Cassette fantôme n° 10 » . Smith l’a insérée dans l’appareil et a jeté un coup d’œil aux deux soldats riant de leur perplexité.
« Opération Âme Errante » a-t-il dit pour foutre une trouille de tous les diables à ces niakoués. »
Elle s’était inquiétée à propos des drogues et de l’alcool, du racisme et de la violence, mais elle n’avait jamais craint que Platon et Aristote, Kant et Marx puissent lui ravir sa fille. Anh imaginait Jane traînant avec ses amis défoncés, débattant du sens de l’existence, de la vie après la mort, et elle songeait : » Quelle perte de temps incroyable ». À ses yeux, la vie c’était la vie ; ce qu’il y avait après, c’était ce que vous vouliez. Mais elle taisait ses craintes. Elle n’avait pas envie de tomber dans le cliché – la mère immigrée, la mère-tigre. Ainsi encouragée par son mari, Android avait donné à Jane sa bénédiction pour aller faire ses études à Leeds, se préparant mentalement à ce qu’elle soit au chômage pour le restant de ses jours.
on voisin ne connaissait que le début, et bientôt il passa à « Yesterday » et « Hey Jude » puis une fois son répertoire des Beatles épuisé, il retourna dans le bungalow en disant à Thanh de l’attendre. Quelques minutes plus tard, il revint avec un morceau de papier où il avait noté des mots en anglais dont Thanh ignorait le sens : Pink Floyd, Led Zeppelin, Fleetwood Mac.
« Quand tu seras en Angleterre, il faut que tu trouves les disques de ces groupes-là. »
Il semblerait qu’environ cinq-cents pêcheurs Thaïs aient violé à tour de rôle trente-sept femmes sur Ko Kra pendant vingt-deux jours consécutifs ce mois-ci. Ces femmes étaient à bord de quatre bateaux différents et elles ont été amenées sur Ko Kra par les pêcheurs qui ont pris d’assaut leurs embarcations pour les empêcher de fuir.