Citations de François Cheng (1656)
Ce parfum qui t'arrête
Au beau milieu du sentier
au coeur du bois
Tu l'as connu
Mais en quel été
en quel automne
En une autre vie?
Poussières de vies
Galaxies d'oubli
La terre fidèle seule
garde souvenance
à ceux qui habitent la poésie
Tu ouvres les volets, toute la nuit vient à toi,
Ses laves, ses geysers, et se mêlant à eux,
Le tout de toi-même, tes chagrins, tes émois,
Que fait résonner une très ancienne berceuse.
La poésie est à la pointe du langage humain. Etant à la pointe, elle a pour mission justement de donner une résonance qui permet à notre esprit d’aller au-delà de la mort et par là de rejoindre la source cachée de la vie. Il n’y a que le langage poétique qui répond plus ou moins à notre désir d’aller rejoindre un certain au-delà de notre destin.
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S’abîmer en toi au plus secret
De soi, au creux de ce qu’on n’avait
Osé dire et espéré. Le monde est là,
Tel qu’il était dans l’enfance, jailli
Du dedans, clair et rond, rond le ciel,
Ronde la terre. Plain-chant le fruit.
A l’unisson mésange et cascade.
Chaque jour il faut repartir de la feuille blanche, retourner sous terre, plonger dans les racines de l'être. Je prends cette discipline comme une ascèse et un bonheur. Le livre que j'achève... reflète l'état auquel je suis parvenu. Fruit de longues maturations, il est une invite à partager la saveur de l'instant, lorsque le vrai et le beau ont consenti à laisser leurs fugaces et indélébiles empreintes.
En voyant l'âme d'un autre, chacun est à même de voir la sienne propre dans le reflet que lui renvoie le regard de l'autre. Tel est le chemin secret de la perception de l'âme.
L'immense nuit du monde
semée de tant d'étoiles,
Prendrait-elle jamais sens
hors de notre regard ?
Leur vrai langage est le sourire. Oui, c'est seulement par le sourire que désormais ils pourront communiquer.
Cette ville pleinement exposée au soleil, à la fois distante et ouverte, suffisamment élevée pour dominer la plaine, tout en se laissant protéger par le haut mont auquel elle s'adosse, a atteint un degré d'équilibre miraculeusement juste.
Chang seng-yu, des dynasties du Nord et du Sud , peignit sur les murs du temple An-luo de Nankin quatre dragons géants. Ceux- ci était dépourvus d'yeux. À ceux qui en demendère la raison, le peintre répondit : "Si j'ajoutais les yeux à ces dragons, ils s'envoleraient."
Les gens, incrédules, l'accusèrent d'imposture. Sur leur insistance, le peintre consentit à faire une démonstration . À peine eût-il achevé de dessiner les yeux sur deux des dragons, qu'on entendit un tonnerre assourdissant. Les mûre craquèrent, laissant s'échapper les deux dragons dans un vol fulgurant. Lorsque le calm fut revenu, on constata que, sur le murs, il ne restait plus que les deux dragons sans yeux.
Avoir tout dit
et ne ne plus rien dire
Accéder enfin au chant
par le pur silence
T'ouvrant là
sans retenue
À l'appel d'un geai
Aux cris des cigales
Au pin jailli de toi
te brisant les entrailles
Sous le ciel uni
Qu'effleure seul
un nuage
Qui plante une courge récolte une courge.
(Proverbe chinois)
La vie a la prééminence, disais-je, mais cela n'enlève rien au fait que nous sommes dans le pétrin.
Nous autres humains sur terre, nous sommes pris dans un terrible engrenage : la certitude de mourir sans en connaître ni le jour ni l'heure devient en nous la source de toutes les incertitudes.
Malgré nos mille mesures visant à nous sécuriser, nous vivons sous la menace de maladies, d'accidents, de conflits meurtriers, de perte d'êtres chers. D'où notre permanente angoisse.
Compte tenu de cette situation, il y a bien lieu de parler du miracle d'être là ensemble, de partager ce rare bonheur d'un vrai échange.
A la source du Long Fleuve
Austères glaciers,
Tendre filet d’eau…
Voici que le fleuve retourne à sa source,
Que nous terminons notre grand périple.
Tant de jours à longer le fleuve millénaire,
Toujours à contre-courant, à contretemps,
A sillonner l’aride plateau,
Creusé de ravins, menacé de vautours,
A traquer chairs crues et fruits sauvages,
A dormir à même les herbes virginales,
A traverser le lac aux étoiles, poussant plus loin
Nos corps tatoués de gelures, de brûlures,
Minuscule caravane à bout d’endurance,
En ce point de l’ultime rendez-vous,
Austères glaciers, tendres filets d’eau,
Où toute fin est commencement.
Je pense à l’expression si juste de « la force d’âme ». Car l’âme est bien une force grâce à laquelle tant d’actes héroïques ont été accomplis au sein de l’humanité.
Vraie Lumière,
Celle qui jaillit de la Nuit ;
Et vraie Nuit,
Celle d'où jaillit la Lumière.
Entre équinoxe et solstice, la sève
Montante a bu glaçon et brandons.
au sommet, elle s'offre sans réserve
Au foudroiement, à la floraison.
Au sommet du mont et du silence,
rien n'est dit, tout est.
Tout vide est plein, tout passé présent,
tout en nous renaît.
Au sommet du mont et du silence,
rien n’est dit, tout est.
Tout vide est plein, tout passé présent,
tout en nous renaît.
Derrière les yeux, le mystère
D'où infiniment advient la beauté
D'où coule la source du songe
Bruissant entre rochers et feuillages
Chantant en cascade
Les saisons renouvelées
Chantant les instants
De la vraie vie offerte
Matin du martinet disparu
Midi de la mésange retrouvée
Longues heures à traverser le jour
Un seul battement de cils et mille papillons
prêts à s'enfouir parmi les pétales
prêts à durer tant que dure la brise
Jusqu'à la passion du couchant
où les âmes clameront alliance
Jusqu'à l'immémorial étang
où rayons de lune et onde d'automne
Referont un
( " Le long d'un amour")