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Critiques de Georges-Olivier Châteaureynaud (100)
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Aucun été n'est éternel

Aymon a 18 ans.

Malgré les suppliques de sa mère, il part en vacances en Grèce, laissant son père mourant.

Rencontre de jeunes, alcool, drogue, sexe, musique........

De Grèce, ils partent au Maroc et continuent leurs errances.

C'est le récit d'une jeunesse des années soixante, des hippies.

Un livre que j'ai survolé, passant de nombreuses pages.

Je n'ai pas été intéressée par cette histoire.

Je n'ai pas trouvé cet Aymon particulièrement sympathique.

Tout m'a semblé long, très long.

Un récit pas fait pour moi.
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Le corps de l'autre

Un vieux réflexe de judéo-chrétien inciterait le lecteur à penser que Louis Vertumne, le critique littéraire à la fois encensé et honni - mais on reconnait que sa méchanceté fait le buzz - mérite ce qui lui arrive dès la page 11* du récit.

Punition divine. Un Dieu païen à n'en pas douter, car le vrai Dieu ne joue pas à ce genre de jeu, il le réserve à ses anges, ses démons et ses Saints.

Or donc, le citoyen Vertumne coutumier des salons luxueux, des femmes vertigineuses, des alcools et des soupers fins, voit, un soir où par exception il emprunte une ruelle déserte et sombre à souhait, son brillantissime esprit bien fait mais pétri de certitudes (nous pensons son âme pour rester dans le divin, mais sait-on jamais !) atterrir dans le corps de Donovan Dubois un skinhead de la pire espèce.

Son problème immédiat est simple, s'il est entré dans ce corps jeune et vigoureux, il ne dispose pas des réflexes pour le conduire encore moins pour le maîtriser.

"Le sort lui avait fait le cadeau de remettre le compteur biologique à zéro mais l'étrangeté de sa situation assombrissait son euphorie."

Cette jeunesse nouvelle, il n'en veut pas. Du moins pas tout le temps.

Le récit est bâti sur cette ambiguïté d'un intellectuel reconnu ne pouvant montrer à ceux qui l'écoutent que l'apparence d'un être qui, selon eux, ne peut tenir les discours qu'il tient.

Déclinaison du proverbe selon lequel l'habit ne pas fait le moine en une version plus proche de la réalité, l'habit fait bel et bien le moine, à n'en pas douter...

Les jours passent. Vertumne ne renonce pas à retrouver ce qu'il considère comme sa gloire passée en se convainquant qu'un jour il quittera ce corps.

En attendant, il en profite, notamment sur le plan sexuel, mais sans renoncer à conquérir celles avec lesquelles il avait vécu dans sa vie antérieure.

Le roman explore à sa façon, les thèmes du déterminisme et de l'ostracisme social et révèle les difficultés du transfuge de classe que devient Vertumne malgré lui.

Jamais le lecteur n'est tenté de le plaindre.

Vertumne est seul. Finira-t-il par trouver la porte de sortie ?

L'auteur lui-même n'en semble pas convaincu et c'est par un artifice inattendu qu'il conduira son personnage (je ne dis pas héros) à se conformer au sort que le destin lui a réservé, s'offrant au passage une belle rédemption et accordant une forme de pardon à tous ceux qu'il avait autrefois détestés.

Une belle boucle !









* Dans l'édition de poche Libretto
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Singe savant tabassé par deux clowns

Ce recueil de Châteaureynaud, publié chez Grasset puis réédité chez Zulma, a obtenu en 2005 le Goncourt de la nouvelle. Il contient onze textes, tous aussi troublants et profonds les uns que les autres. Ils nous racontent les liens qu'on a avec la mort, explorent la frontière entre les mondes, sujet cher à l'auteur. G.-O. Châteaureynaud introduit la mythologie dans le réel ; il nous fait visiter l'entre-deux, fait surgir des images étranges et poétiques dans une langue parfaitement maîtrisée.


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À cause de l'éternité

Il s'agit du deuxième volume de la trilogie commencée par L'Autre Rive. J'ai dévoré le premier volume, que je considère comme un chef d'oeuvre. Puisqu'il est difficile de faire mieux, il est naturel dans ce deuxième volume d'essayer de faire 'autre'. C'est un pari bien sûr risqué, et pour moi il n'a pas été gagné. le premier volume prend place dans une ville dont le côté gothique sert surtout d'arrière-plan aux aventures d'adolescents, incluant des sorties en boite, des amours, et des courses de voiture. C'était une forme de roman initiatique. Ce second volume (qui peut se lire seul) met l'accent sur le gothique, avec une forme de huis clos vingt ans après dans un château. Au début, il y a comme un air de Dracula, avec le personnage principal qui se retrouve dans cet environnement étrange, qui déteint sur son humeur. Un château qui s'étend à l'infinie, c'est comme si Harry Potter avait décidé de vivre dans la Salle sur Demande. Malheureusement, les personnages semblent tous neurasthéniques. Ils parlent de la même façon, s'envoyant des répliques alambiquées pouvant former un paragraphe d'une page. le manque d'action est pour moi assez pesant, avec des scénettes répétées sur des centaines de pages : ils mangent, pas grand chose, mais ils le font souvent; ils vont discuter dans le fumoir, encore et toujours, se racontant des histoires pour tromper l'ennui. Ça n'aura pas trompé mon ennui comme lecteur face à cette galerie de personnages tristes et ennuyeux, à peine relevée par de rares événements. Les cinq premières pages sont sympathiques et les cinquante dernières se valent, mais au milieu, ce n'était pas un succès, malgré la qualité de la prose et quelques rares traits d'humours ou sujets potentiellement intéressants (infidélité, viol, civilisation...).
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Le fou dans la chaloupe

"Le fou dans la chaloupe" a été écrit en 1972. Il nous conduit sur des rives inconnues, dans l'imaginaire de son auteur. Il regroupe trois nouvelles : "Ses dernières pages", "Après" et "Là-bas dans le Sud". Leurs narrateurs sont des hommes solitaires, qui vivent entre le rêve et l'écriture.

"Ses dernières pages" raconte l'histoire d'un écrivain, qui semble avoir un peu de mal à écrire et qui découvre un jour, dans la maison qu'il loue à Eparvay (lieu imaginaire, lieu frontière), une armoire fermée. En la forçant, il découvre une vingtaine de volumes écrits par un inconnu dont le style est proche du sien. L'homme est même capable de poursuivre les phrases sans se tromper. Il trouve donc devant lui l’œuvre de sa vie, qu'il n'a pas encore écrite...

Réflexion sur l'inspiration, la création ou la réminiscence, ce texte s'enchaîne parfaitement avec la nouvelle "Après", qui narre ce que nous devenons après la mort : au début , on assiste à une sorte de naissance étrange, un être qui s'extrait d'un puits, rampant, pris entre la paralysie et le mouvement... Puis le lecteur se rend compte que le corps allongé dans la morgue libère une enveloppe, le narrateur de l'histoire. Projeté dans sa mort, il est devenu limbe, mais limbe pensante, qui peut sentir, traverser les murs et les époques... pour l'éternité. Il trouve sur sa route Mangematin, une espèce de père ; celui-ci le guide un temps, jusqu'à ce que le narrateur assiste à un aquelarre, une réunion de sorcières au Pays Basque, au cours duquel il décide de prendre possession du corps de l'une d'elles.

Dans "Là-bas le Sud", un voyageur solitaire gagne Algésiras dans le but de se rendre bientôt au Maroc, pays qu'il ne parvient pourtant pas à atteindre à cause d'un blocus de Franco. Il porte sur lui les Labyrinthes de Borges et, entre les pages de ce livre, il découvre un jour une eau-forte très troublante : elle semble lui parler de sa propre vie. Sujet aux rêves, il suit sa pente onirique et cherche à comprendre ce qui se passe en lui.

La mort, les rêves et la solitude sont le fil conducteur de ces trois textes, aux narrateurs si semblables qu'ils sont sans doute des avatars de l'auteur. Le style, classique et beau, nous mène avec plaisir dans cet entre-deux-mondes.
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Contre la perte et l'oubli de tout

G-O Châteaureynaud commente avec intelligence et finesse ses lectures. Il nous donne envie de relire certains auteurs, comme le maître du genre fantastique, Edgar Poe (Le domaine d'Arnheim) ou l'intense et magnifique Invention de Morel de Bioy Casares.

On notera que Marcel Aymé est justement cité avec la Vouivre, entre autres, lui dont le fantastique sait se teinter d'humour.

On repart avec l'envie de lire plein de choses, comme L'homme-papillon de Mehis Heinsaar, La Mandragore de la Motte-Fouqué, le seuil du jardin d'André Hardellet...

G-O Châteaureynaud raconte aussi les ateliers d'écriture, ses débuts chez Grasset (il rend hommage à Bernard Privat). Il parle avec passion des livres de son ami Hubert Haddad. Avec modestie et simplicité, il nous offre un livre érudit et sensible.



Article entier sur le Manoir des lettres
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Ici-bas

Écorcheville respire un air de fin des temps : quand les pluies s'abattent sur la ville, ce sont des averses d'oiseaux ou des grenouilles. Depuis presque quarante jours, le ciel ouvre ses vannes, et le fleuve ne cesse de gonfler, faisant surgir des créatures étranges. Parmi elles, des Harpies nichent dans les arbres et s'en prennent à des habitants. On voit aussi apparaître parmi les humains une Hespéride et un homme à tête de taureau. Qu'annonce cette confusion des mondes, séparés par Le Styx et la barque de Charon?



Ici-bas raconte l'histoire de la fin d'Écorcheville, en mettant en scène de très nombreux personnages, que le lecteur a pu découvrir auparavant dans les deux volumes de la trilogie (L'Autre rive, 2007 ; À cause de l'éternité, 2021). de puissantes familles, comme les Bussetin, les Propinquor et les Esteral, règnent sur la cité. Au coeur de la ville, pourtant, l'hybridation a déjà eu lieu : ne va-t-on pas se faire faire ses robes et ses costumes chez Lachésis fashion, boutique tenue par les trois Moires ? Biquet et Angelina cachent, depuis leur enfance, des pieds en forme de sabots, et leurs cornes sont annuellement limées par leurs parents...

Dans ce roman mythologique, on se demande la place des vivants et des morts. Quel est ce monde où on a voulu cacher la force de l'imaginaire, tout en vivant avec ses représentants ? En effet, qui est plus intrigant, plus respecté que le directeur de l'institut Ouranos, ce psychiatre aux deux visages, tel Janus ? de son côté, Strabon Martin, professeur de mythologie, qui s'occupe du musée tératologique, défend ce que d'autres appellent les monstres. Au moment de l'invasion des Harpies, il se désole, en même temps que le lecteur, de l'ordre du Maire de les abattre alors qu'elles sont les preuves précieuses, malgré leur caractère horrifique, d'un au-delà. Les Écorchevillains cherchent à se voiler la face jusqu'au bout...

Le mystère plane. Qu'y a-t-il sur l'autre rive ? Sauf les morts et les créatures mythologiques, personne ne peut traverser Le Styx et revenir pour en parler. On pense par moments, pour l'ambiance et les dynasties, à l'étrange rivière de Blackwater de Michael McDowell, qui charrie aussi une énigme. Ce roman de Georges-Olivier Châteaureynaud nous interroge sur les frontières, le réel et l'imaginaire, ainsi que nos limites.



Article complet sur le Manoir des lettres.
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L'autre rive

Pour commencer l’année, un petit pavé de 750 pages qui a reçu le Grand Prix de l’Imaginaire en 2009. Un prix bien mérité pour ce roman-monde délicieusement étrange !



Bienvenue à Écorcheville !



Bled du bout du monde, ville paumée sur les berges du Styx. Riveraine de l’au-delà, elle charrie un avant-goût des Enfers : cadavres de centaures, pluies de salamandres et de hannetons, terrains vagues hérissés de tessons de verre et de seringues usagées. L’esclavage a toujours cours et des machines à se suicider remplacent les distributeurs de friandises. Écorcheville nous offre un véritable cabinet de curiosités gothique et mythologique.



Au cœur de ce sinistre décor évolue notre héros et son petit côté à L’attrape-cœur… Nous suivons en temps réel les déambulations de Benoît Brisé, 17 ans et en quête d’identité, comme un vieux chewing-gum rosâtre collé sous ses croquenots.



Enfant adoptif d’une embaumeuse à l’hygiène douteuse, il vit entouré d’une actrice et d’une prostituée qui sentent la naphtaline. Abonné à l’école buissonnière, Benoît traîne sans but avec ses potes fans de rodéos urbains dans des voitures volées… Sans but, vraiment ? Non, il est à la recherche de son père.



Au fil de ses errances qui lui feront réaliser son destin, nous découvrons Écorcheville et ses luttes de pouvoir, et nous entrons dans un voyage intérieur fait des premiers émois adolescents, d’amitiés et de deuils.



C’est un roman d’apprentissage très dense, sans respiration, mais porté par une plume riche. L’auteur mêle avec brio une écriture soutenue à un argot gouailleur. Il nous transporte sans peine dans ces contrées grises de l’Enfer et de l’adolescence, finalement si proches. Ce roman est à la fois dark et très sensible… et je suis ravie d’apprendre qu’il a un frère dans le même univers, une prochaine lecture assurément !







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Ici-bas

En convoquant nos croyances, récits et légendes, l'auteur dépeint une riche galerie de personnages dans lesquels se reflète l'âme humaine, avec tous les mystères de ses comportements.
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L'autre rive

Un groupe d'adolescents à la dérive vivote dans une ville, alors que le monde des morts est juste de l'autre cote de la rivière. Cette ville n'est nulle part en particulier, et à la fois elle pourrait être partout étant donne ses tropes classiques des petits notables locaux tels que le maire ou le commissaire. Dans ce livre dense, l'auteur peint la vie de cette ville à travers seulement quelques jours, donnant aux personnages et à leurs familles une profondeur rare. Peu d'ouvrages s'adonnent avec autant de détails à la construction d'un monde fictif. L'auteur manie la langue avec élégance, choisissant parfois des termes un peu désuets, mais qui n'entravent pas le plaisir pour un lecteur adulte. Il y a beaucoup de traits d'humour, et de la délicatesse (voire une ironie salvatrice) dans le traitement de sujets tout de même difficiles comme la pédophilie, le suicide, ou l'abandon de son enfant. On sent l'auteur très attaché à ses personnages, bien que j'ai trouvé ses vues sur les personnages féminins parfois moins convaincantes (effacées, lubriques, ou folles). Il y a quelques clins d’œils (appuyés) aux personnages d'autres œuvres du même auteur ; par exemple, Mathieu Chain est le personnage éponyme d'un livre de 1978.



Mon meilleur plaisir de lecture pour 2023. A noter que l'histoire continue sur deux ouvrages, formant une pile de 2000 pages. À cause de l'éternité (2021) est une suite toute aussi épaisse, et Ici-bas (2023) conclut l'histoire avec un livre plus mince.
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Le corps de l'autre

Voilà une histoire fantastique, celle d'un vieux critique littéraire atrabilaire, transmué par le coup de couteau d'un jeune loubard, en un jeune loubard justement.

La pirouette initiale permet donc d'embarquer l'esprit du vieil homme dans le corps de l'autre, ce loubard qui vient de l'assassiner. Point de départ du roman, cette renaissance est un vrai syndrome de Lazare, le héros n'est plus reconnu par les siens, ni ceux d'avant sa mort, ni ceux de sa nouvelle apparence corporelle.

Le roman devient l'histoire des pérégrinations du malheureux héros qui cherche par tous moyens à savoir qui il est vraiment, ce qu'il est vraiment, comment sortir de ce néant où il n'a plus aucun repère, ou au contraire réussir l'impossible synthèse entre son âme inchangée, et son corps qui n'est pas le sien.

Les plus : le prétexte au roman, ce passage dans le corps d'un autre, qu'il fallait imaginer, et une intrigue bien ficelée, l'écriture extraordinaire de G.O. Chateaureynaud, pas seulement sur la forme mais également par un fonds culturel et syntaxique particulièrement riche, l'appui volontaire sur les essentiels de l'existence, la relativité des choses bien exposée.

En moins : parfois le sentiment que les ficelles sont un peu grosses, mais c'est un roman fantastique. Le personnage de Poppée, un peu trop caricatural, qui accompagne le lecteur durant de nombreuses pages, puis qui disparaît un peu trop brutalement ou trop facilement, c'est la même chose. On aurait aimé la quitter autrement.
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Ce parc dont nous sommes les statues

Voilà un recueil de nouvelles que j'ai particulièrement apprécié. Le point commun de toutes ces histoires courtes : des personnages qui ont une vie ordinaire, une journée bien réglée, et un caillou dans la chaussure vient tout déranger, avec un petit côté fantastique en plus. Et des fins qui mettent en situation sans la règler : a toi de laisser libre court à a la suite. Un livre qui fait fonctionner l'imagination c'est pas commun ! Intelligent et très agréable, l'écriture est fluide, les histoires simples, immédiatement addictive ; à chaque fois, avec cette nouvelle motivation : qu'est-ce qui va lui arriver.a celui-là ? Du coup, on en redemanderai presque
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Le corps de l'autre

Inattendu, insolite, et réjouissant ce roman ayant pour départ une transmutation de corps,celui d'un critique littéraire acerbe, septuagénaire,bourgeois,dans celui d'une petite racaille d'une vingtaine d'années,déculturé , quasiment à la rue,sans ressources avouables.

Y aura t'il une rédemption ? Y a t il même une morale ? N'est ce pas le délire d'un fou criminel? L'écrivain nous balade un peu,sa prose est rythmée,alerte,et aussi crédible que peut l'être un roman fantastique. C'est dire qu'il a du talent

Un roman bien agréable à lire,bien écrit,bien structuré, où le doute subsiste à la fin.
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Ce parc dont nous sommes les statues



Georges-Olivier Châteaureynaud compose avec ces nouvelles un ensemble de statues disposées dans son parc imaginaire, dans lequel il nous invite à l’évasion.

Ce parc dont nous sommes les statues de GEORGES-OLIVIER CHÂTEAUREYNAUD est un recueil rassemblant dix nouvelles, paru tout récemment chez Grasset.



Ce qui saisit, de prime à bord le lecteur tout au long de ces nouvelles, c’est l’imagination sans bornes de l’auteur. Les nouvelles nous emmènent de l’aventure au fantastique, en passant par l’absurde. Des thèmes comme les métamorphoses, le destin, le souci de la technique voire la nympholeptie y sont abordés.

L’aventure de Léo, sorte de Énée des temps modernes, à l’histoire d’une tête dans un bidet, les nouvelles qui composent ce recueil abordent des sujets très divers, avec comme fil conducteur une marche progressive vers le fantastique. De surcroit, les personnages principaux sont sans cesse enlevés à leurs situations de départ. Ce fait constitue bien un fil conducteur pour l’ensemble du recueil.

Reste que, tout au long de ces dix nouvelles, le style de l’auteur, clair et toujours à propos, donne à la lecture de chaque nouvelle un rythme singulier.



En définitive, je recommande ce recueil de nouvelles passionnant, et dont l’ensemble à un sens. Quoique les recueils de nouvelles soient régulièrement décriés pour leur manque d’unicité, celui-ci souffre de l’apparente banalité des histoires que l’auteur raconte. Or il serait dommage de s’arrêter à cette impression première, tant le recueil recèle de possibilités de s’évader de son quotidien.

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Aucun été n'est éternel

« On ne croyait plus en rien, en rien d'autre qu'en l'instant et ça jouait d'la musique sur tous les sentiments…Juste une manière de vivre une manière d'être, je me souviens… » *



Je me souviens de mon premier été-liberté, la porte claquée, l'escalier ciré à peine dévalé ma vie allait changer.

Aymon, pourtant bien élevé, lâche ses « vieux », qui sont vraiment vieux, quitte la poussière pour la poudre, éjecte la fumée pour la fumette.

Aucune jeunesse n'est plus éternelle qu'un été ne l'est.

Eté 65, Bob Dylan est déjà en « Freewhellin'», Aymon a 18 ans.

L'appel de l'indépendance l'enverra d'Athènes à Tanger puis à Londres sans autre bagage que sa culpabilité qui viendra en séquence, chatouiller sa calebasse.

Entre un éphèbe talentueux guitareux, un dealer gentil mais calculateur, une anorexique bienveillante, et deux junkies imbibés jusqu'aux yeux, il va déglinguer sa petite face de « propre sur lui », exploser ses traveller-checks à coup de barrettes, miner sa cervelle, vidanger ses bourses neuves et zoner dans ses baskets.



L'itinéraire d'un enfant timoré, paumé dans la Beat génération est séduisant mais relaté sur papier glacé, bien poli et trop raffiné pour pénétrer le côté « sale » des situations, un peu comme à l'extérieur d'un fumoir d'aéroport ou tu vois opaque mais tu respires sain.



Ce petit aréopage est protégé par deux mécènes qui se servent de ces loqueteux célestes comme d'un petit théâtre burlesque et tragique dont ils sont les metteurs en scène tunés de leurs vies de paumés.



Ils mangent, dorment, sniffent, baisent, dans une ambiance musicale, petits pantins ridicules aux questions existentielles à deux balles : Ou est le monde réel ? Doit-on se soucier de l'avenir ? La vie ne mène nulle part qu'à la mort. Mes laitues naissent-elles ? Doit-on faire un plan de carrière ? Oui, mes laitues naissent. Fonder une famille ? Mes laitues naitront !



Lecture d'été-détente de revolver. Mais non, je galèje, le jeune Aymon est un gentil garçon qui va rentrer à la maison de maman si elle lui envoie de l'argent.

Quelle autre solution ? Petit con.



Tu ne savais pas, et si tu n'avais jamais su, comme d'autres grands couillons, ta frustitude t'aurais étranglé plus vite que ta vieillesse.



Lecture d'être et d'avoir été.





* « Balade au mois d'aout 75 », Charlélie Couture







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Singe savant tabassé par deux clowns

Oups, on dirait bien que j'ai la mémoire qui flanche...

Impossible de me rappeler comment cet étrange recueil de nouvelles a bien pu atterir dans ma PAL !

Sans doute ai-je lu quelque part un avis enthousiaste, qui m'aura incité à noter dans mon petit carnet ce titre loufoque ? À moins qu'il ne se soit retrouvé dans ma liste complètement par hasard (mais les plus belles découvertes ne sont-elles pas celles qu'on fait par hasard ?)

Toujours est-il qu'il était là, discrètement planqué sous de trop nombreuses lectures en souffrance, patientant sagement et depuis trop longtemps.

Il attendait son heure.



Et quel bonheur de se pencher enfin sur ce curieux petit livre ! Quel plaisir d'y découvrir ces onze textes troublants, empreints de mystère et de poésie ! Quelle belle expérience que celle entreprise par Georges-Olivier Châteaureynaud, qui par sa prose habile nous conduit en marge du réel, à la lisière de onze univers très voisins du nôtre et pourtant subtilement différents...

L'auteur excelle en effet dans l'art du décalage, du pas de côté fantaisiste, du léger glissement dans l'imprévisible. A coup d'infimes "distorsions du réel", il nous guide en douceur de l'autre côté miroir, à la rencontre de personnages complètement singuliers. Chacun d'eux, dont le quotidien semble de prime abord tout à fait classique, se trouve confronté à des évènements pour le moins étranges (un pêcheur d'ormeaux découvre une maison perdue dans la brume sur un îlot en pleine mer, une ancienne comédienne frappée par la foudre court la campagne dans l'espoir d'attirer sur elle un nouvel éclair, un chauffeur de taxi se retrouve coincé dans une rue qui n'existe pas sur la carte...) et c'est avec grand plaisir que le lecteur se laisse embarquer dans ces situations rocambolesques à souhait.



Sans entrer dans le détail des onzes nouvelles proposées, aux chutes toujours inattendues, je me contenterai de vous assurer qu'elles sont toutes aussi réussies les unes que les autres !

Dans chacune d'entre elles, la mort n'est certes jamais bien loin (l'une évoque une jeune fille projetée dans un jardin d'eden aux côtés d'êtres immortels, l'autre revisite le mythe des trois Parques, dans une troisième une bohémienne révèle aux convives d'un restaurant combien de temps il leur reste à vivre, etc...), et pourtant aucune n'est véritablement angoissante. Georges-Olivier Châteaureynaud y distille juste ce qu'il faut de fantastique et de surréaliste pour instaurer une atmosphère envoutânte qui intrigue plus qu'elle n'inquiète, qui surprend plus qu'elle n'effraie.



Seule la nouvelle intitulée "Civils de plomb", nettement plus sombre, déroge un peu à la règle puisqu'elle expose une avancée scientifique (assez perturbante) permettant de "ressusciter" - sous forme de bibelots animés d'un semblant de vie - des défunts de sa famille et de ramener chez soi ces artefacts venus d'outre-tombe.

Si ma mémoire capricieuse m'autorisait à ne retenir qu'un seul texte, peut-être serait-ce celui-là.



Je suis en tous cas ravi d'avoir fait connaissance avec M. Châteaureynaud à travers ce recueil savoureux : grand merci à celui ou à celle par qui cette petite merveille d'imagination et d'extravagance est arrivée jusqu'à moi !

Qu'il ou elle me pardonne d'avoir oublié son nom.
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L'autre rive

Il n’est jamais trop tard pour découvrir un auteur et un grand livre, L’autre rive de Georges-Olivier Châteaureynaud est une petite merveille qui conjugue le fantastique, le roman d’apprentissage et la critique sociale dans une langue superbe et savoureuse.



Benoit Brisé le jeune héros du roman habite Ecorcheville séparée de l’Erèbe par le Styx sur lequel Charron continue à conduire les morts dans l’au-delà, dans cette ville grise où se produisent de curieux évènements climatiques et où apparaissent d’étranges créatures, Benoit tente de passer le cap difficile de l’adolescence.



Si un certain mystère pèse sur sa généalogie il vit heureux avec Louise sa mère adoptive, embaumeuse de profession qui tire le diable par la queue. A Ecorcheville il y a les riches familles qui possèdent la ville et les autres dont fait partie Benoit. Bien que pauvre il est ami avec des jeunes des familles régnantes ce qui lui permet de profiter de leurs nombreux avantages, comme la possession d’esclaves, tout en sachant qu’il n’est pas de leur monde.

Comme tout ado Benoit va se chercher, sécher les cours, tomber amoureux sans espoir, décider qu’il sera musicien et qu’il doit savoir qui sont vraiment ses parents.



Impossible de raconter toutes les folles péripéties de cette quête d’identité dans une ville monde, dans un superbe isolement géographique et financier qui n’est pas sans faire penser à Monaco et à ses super riches.



Si l’on s’amuse beaucoup, si Châteaureynaud distille un humour fin et percutant, le tragique n’est pas absent et la mort rôde, Charron a du travail. La critique sociale est permanente et le pouvoir corrupteur de l’argent démontré jusqu’à la fin du roman qui n’épargne ni la ville, ni notre héros. Parmi toutes les qualités du roman la plus remarquable, à mon sens, et l’intégration des éléments fantastiques à l’intrigue, ce qui pourrait être artificiel ne l’est pas et contribue à une histoire fascinante et finalement assez sombre.

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À cause de l'éternité

La suite de *L’autre rive,* le livre se positionne une vingtaine d’années plus tard.

Alphan, jeune homme brillant qui a quitté Ecorcheville pour des études d’art à l’étranger revient pour se marier à Ecorcheville, sa fiancée doit l’y rejoindre.

Il est le fils de Bételgeuse, grande bourgeoise, ancienne débauchée dans sa jeunesse (c’est ainsi qu’elle est devenue la mère d’Alphan en couchant une nuit avec un sans grade, besogneux camelot, petit repris de justice, Bogue) et devenue punaise de sacristie.

A la demande de Bogue Alphan s’introduit dans les douves du château d’Eparvay (ville voisine d’Ecorcheville) pour y dérober une oeuvre de jeunesse de Rembrandt. Sa première rencontre y sera pour un minotaure caché dans les souterrains du château qui lui sauve la vie, puis Ekaterina, jeune fille qui protège le monstre que l’on sait venir de l’autre rive.

Les autres habitants de ce château infini, changeant, presque vivant n’en sont pas moins remarquables, de Benoît Brisé le héros du premier opus, devenu célèbre et ayant fui cette célébrité à un ectoplasme éternel et sans consistance (mais pas sans conversation), en passant par Balbir, tigre dans son extrême vieillesse et son ex dompteuse, à un faune (lui aussi rescapé du premier opus) et à un ancien terroriste.

Toute cette compagnie étrange et attachante, survit dans la crainte de la mort imminente de Thétis, dernière duchesse du lieu, et dont l’héritage reçu par un milliardaire japonais dispersera tout le monde.

A la fin, le château disparaîtra à la mort de Thétis.

*L’autre rive* compte pour moi, parmi les oeuvres que je retiendrais sur une île déserte, mais je l’avoue *A cause de l’éternité* est encore plus envoutânt, on s’attache au château univers et à ses occupants, on rêve que ça ne s’arrête jamais, et on pense que les 700 pages du livre sont insuffisantes pour en venir à bout.

Il est des livres dont ne sort jamais tout à fait, c’est le cas ici.

A noter qu’Eparvay apparaît dans quelques nouvelles de Châteauraynaud et que même si ce roman se suffit, la lecture du précédent est fortement conseillée.

Je n’ai pas cité Louise Jacaranda, mais présente dans les deux livres, elle occupe une place privilégiée dans ma mémoire.
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La dernière génération de mortels

Une belle surprise que ce petit recueil de nouvelles qui se dégustent comme des gourmandises fines et succulentes. L’écriture nous plonge dans des récits pourtant très courts, et c’est déjà beau sur l’espace de quelques pages. Personnellement j’ai préféré les 3 premières nouvelles, qui sont pour moi les plus insolites et les plus percutantes (en particulier la toute première qui est une pépite !), et pour sûr que cette qualité de narration donne envie de se jeter sur les autres écrits de cet auteur apprécié.
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La dernière génération de mortels

Certains ont la passion des montres en or, des soirées hype ou des grosses bagnoles, personnellement, j’ai la passion de Georges-Olivier Châteaureynaud. De prime abord, c’est moins clinquant et peu facile à placer dans une chanson, mais les béguins ne se commandent pas. Pourtant, celui-ci est fort recommandable !



J’ai découvert l’homme à la moustache avec son recueil de nouvelles « La fortune et autres textes ». Depuis, je suis ses frasques avec gourmandise (« Singe savant tabassé par deux clowns », « La faculté des songes » etc.), jamais déçu par cet amateur de prose riche, ce créateur de formes, cet artisan du verbe qui oscille aisément entre réalisme et fantastique.



Je remercie vivement les masses critiques Babelio et les éditions « Le beau jardin » pour l’offrande si finement ciblée autour de mes amours littéraires (attention cependant, l’adresse internet au dos de l’édition renvoie sur le site d’un restaurant) (l’adresse exacte n’est pas .fr mais www.lebeaujardin.net).



L’anthologie qui se présente ici est brève (45 pages à peine), intense, incandescente. On y croise des souvenirs d’enfances, des sortilèges, des tables de ping-pong, des femmes fatales, des drogués en rédemption. Une sélection de nouvelles courtes, vives, qui s’avalent en une soirée, mais se dégustent sur le long terme. On s’étonne de repenser trois jours après lecture à un personnage qui n’occupa que quatre petites pages dans ce recueil, mais c’est bien l’art de Châteaureynaud qui touche au vrai, à l’humain, et marque le lecteur en loucedé, sans qu’il ne s’aperçoive de son pouvoir.



Personnellement, je n’échangerais ce recueil contre la moindre montre, ni carriole. Je roule à vélo, un livre à la main, faut bien mourir de quelque chose, non ? Moi, ce sera de passion, littéraire.



Table :

01 - Le Tout-Petit

02 - Les encombrants

03 - L’express Chaumont-Quito

04 - J’arrête quand je veux

05 - Tac… Tac…

06 - Première alerte

07 - La dernière génération de mortels
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