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Citations de J.M.G. Le Clézio (1813)


L'harmattan soufflait. Le vent chaud avait séché le ciel et la terre, il y avait des rides sur la boue du fleuve, comme sur la peau d'un très vieil animal. Le fleuve était d'un bleu d'azur, il y avait des plages immenses pleines d'oiseaux. Le bateau à vapeur ne remontait plus jusqu'à Onitsha, il s'arrêtait pour débarquer les marchandises à Degema. A la pointe de l'île Brokkedon, le George Shotton était couché dans la vase, tout à fait semblable à la carcasse d'un monstre marin.
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Ce qui frappe le voyageur qui aborde aujourd'hui ces rivages, c'est leur aspect sombre, hostile. Falaises noires à pic dans l'océan, hautes montagnes cachées par les nuages. Hormis Efaté qui semble avoir concentré toute l'activité d'une destination touristique jusqu'à la caricature (résidences et hôtels de luxe pour les lunes de miel, casinos, bars, boîtes de nuit et magasins hors taxes), règne ici une impression de désolation, d'abandon.
Les premiers explorateurs européens qui approchèrent de ces côtes, le Portugais Quiros, le Français Bougainville ou l'Anglais Cook, ont évoqué la même impression, comme si ces îles étaient restées figées dans la peur depuis des siècles. Ces voyageurs, il est vrai, ne venaient pas en toute innocence. Les premiers contacts furent brutaux. Après de longs mois de navigation, les marins demandaient à assouvir leur manque, de vivres, d'eau douce, de femmes. Toute tentative de résistance de la part des habitants de l'archipel était sévèrement punie. Lorsque les pirogues s'approchent des navires, l'équipage à reçu l'ordre de tirer au mousquet sur les premiers à leur portée. Une couleuvrine, un canon léger, achève de semer la panique chez les curieux. Ils se soumettent, remettent aux arrivants tout ce qui peut calmer leur colère.
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Les petites filles aux cheveux cuivrés grandissaient, apprenaient les gestes sans fin de la vie.
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Les hommes choisissaient sans regarder l'endroit où leurs pieds allaient se poser. C'était comme s'ils cheminaient sur des traces invisibles qui les conduisaient vers l'autre bout de la solitude, vers la nuit.
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Nous voulions entendre résonner les noms que la mère de Jemia lui avait appris, comme une légende ancienne, et qui renait maintenant un sens différent, un sens vivant : les femmes bleues ; l'assemblée du vendredi, qui avait donné son nom à Jemia ; les tribus chorfa (descendantes du prophète) ; les Ahel Jmal, le peuple du chameau ; les Ahel Mouzna, les Gens des nuages, à la poursuite de la pluie.
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[...] c'est une chose de voyager et d'aller au-devant de nouveaux horizons, et une tout autre chose que de rencontrer son passé, comme une image inconnue de soi-même.
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C'est une nuit très longue et belle, une nuit sans fin. Nous sommes au bord de la terre, au bout du monde. Sur notre radeau de basalte, nous glissons lentement vers la vie nouvelle, vers notre mère. Nous sommes enfants du rêve. Nous sommes libres, enfin, nos chaînes sont tombées.
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Aamma Houriya, cette fois-là, a observé un long silence, pour que nous puissions entendre les battements de notre cœur, les bruits légers qui venaient des autres maisons, avant la nuit, la voix des bébés, les aboiements des chiens. Elle savait la valeur du silence.
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Ca me fait quelque chose quand les jours s'allongent, que la lumière grandit et que le soleil se couche de plus en plus à l'ouest, au-dessus des collines, comme s'il allait faire le tour complet de l'horizon.
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Quand on est devant la mer, tout peut apparaitre, disparaitre, comme sur une pierre qui n'a pas été sculptée. C'est peut-être pour cela, parce que tout est possible, comme sur une planète étrangère, que les hommes viennent vers elle.C'est peut-être parce qu'il n'y a pas de murs, pas de barrière. Parce que c'est le lieu du danger.
Alors chaque jour, tandis qu'au dehors, dans les couloirs et les abris des villes, dans les cachettes des montagnes, à la source des fleuves, la vie amoncelle les années et trace ses dessins toujours semblables, ici apparait la nouveauté.
Chaque jour nait ici, puis se détruit puis se refait, au rythme du ressac.

Ils viennent la voir. Ils l'aiment. Ils viennent voir ce qui a été inventé, comme cela, chaque jour, rien qu'avec la mer et le ciel.
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Fintan respirait l'odeur. Elle entrait en lui, elle imprégnait son corps. Odeur de cette terre poussiéreuse, odeur du ciel très bleu, des palmes luisantes, des maisons blanches. Odeur des femmes et des enfants vêtus de haillons. Odeur qui possédait cette ville. Fintan avait toujours été là, l'Afrique était déjà un souvenir.
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Ainsi parlent les abeilles, et de bien d'autres choses encore. Elles parlent du sable rouge et gris qui brille au soleil, des gouttes d'eau qui s'arrêtent, prisonnières du duvet de l'euphorbe, ou bien en équilibre sur les aiguilles de l'agave. Elles parlent du vent qui souffle au ras du sol et couche les herbes. Elles parlent du soleil qui monte dans le ciel, puis qui redescend, et des étoiles qui percent la nuit.
Elles ne parlent pas la langue des hommes, mais Petite Croix comprend ce qu'elles disent, et les vibrations aiguës de leurs milliers d'ailes font apparaître des taches et des étoiles et des fleurs sur ses rétines. Les abeilles savent tant de choses !
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"Ainsi commence cette Histoire, par cette rencontre entre deux rêves : le rêve d'or des Espagnols, rêve dévorant, impitoyable, qui atteint parfois l'extrême de la cruauté ; rêve absolu, comme s'il s'agissait peut-être de tout autre chose que de posséder la richesse et la puissance, mais plutôt de se régénérer dans la violence et le sang, pour atteindre le mythe de l'Eldorado, où tout doit être éternellement nouveau. D'autre part, le rêve des Mexicains, rêve tant attendu, quand viennent de l'est, de l'autre côté de la mer, ces hommes barbus guidés par le Serpent à plumes Quetzacoatl, pour régner à nouveau sur eux. Alors, quand les deux rêves se rencontrent, et les deux peuples, tandis que l'un demande de l'or, les richesses, l'autre demande seulement un casque, afin de le montrer aux grands prêtres et au roi de Mexico, car, disent les Indiens, il ressemble à ceux que portaient leurs ancêtres, autrefois, avant de disparaître. Cortés donne le casque, mais il demande qu'on le lui rapporte plein d'or. [...] La tragédie de cet affrontement est tout entière dans ce déséquilibre. C'est l'extermination d'un rêve ancien par la fureur d'un rêve moderne, la destruction des mythes par un désir de puissance. L'or, les armes modernes et la pensée rationnelle contre la magie et les dieux : l'issue ne pouvait pas être autre." (p. 11)

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La littérature, en fin de compte, ça doit être quelque chose comme l’ultime possibilité de jeu offerte, la dernière chance de fuite.
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Etre heureux, c'est n'avoir pas à se souvenir. Ai-je été malheureux ? Je ne sais pas. Simplement je me souviens un jour de m'être réveillé, de connaître enfin l'émerveillement des sensations rassasiées.
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Le soir, la nuit tombait d'un coup, elle sortait de l'épaisseur de la forêt et elle éteignait les reflets sur le fleuve.
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Paysage du vent, du vide.
Pays usé dont l’eau s’est retirée un jour, laissant à nu les fonds, les anciennes plages, les chenaux, les traces de coups des vagues cognant contre les falaises.
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Nous vieillissons tout doucement. Nous ne sommes pas pressés... Personne ne sait bien compter les jours. On attend qu'ils arrivent, l'un après l'autre. Il y a toujours des jours quand on est vivant.
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J.M.G. Le Clézio
Le silence est extrême. Aucun bruit de vie, pas un murmure, pas un chant, pas un bourdonnement d'insecte. Seulement le vent, tantôt aigu, coupant sur les pierres, parfois à peine perceptible, un souffle, une respiration.
.... Ici, près du Rocher, on est entré dans un autre monde où rien ne bouge, comme arrêté entre la vie et la mort ; un poste d'observation sur l'espace, l'éternité.
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Je crois que Salomé frissonne quand je dis ces mots. Pour elle, je le sais, les histoires ne sont pas seulement des histoires, ce sont aussi des sensations qui l'effleurent, qui brûlent sa peau, des coups d'aiguille dans ses jointures, des vagues lancinantes derrière ses yeux. Elle les demande et elle en a mal, elle les craint. Il me semble que j'entends les battements de son cœur à travers la peau de ses avant-bras, je vois les pulsations sur son cou renversé, à la hauteur des jugulaires.
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