AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations de Jacques Lacarrière (282)


Et comme bleuit le soir...



Et comme bleuit le soir
petit à petit,
mauve puis violet,
voilà aussi la Sainte Vierge
sur la grand-route
à côté des charrettes, des clochettes,
des cruches
et des mouchoirs brodés
la voilà la Sainte Vierge
et dans son tablier d’argent
dix livres de raisin rouge.

Et toi seul,
fier comme un cyprès,
seigneur des sombres palais des eaux,
tu l’assieds à l’écart,
face aux clochers,
sur la crête de la compassion
et de la solitude,
et tu égrènes sur tes genoux
les grosses grappes
des étoiles.


/ Traduit du grec par Michel Volkovitch
Commenter  J’apprécie          71
A Patmos
de Dimitris Papaditsas

VII

Les années revenant
Aux prés de la rêverie
Une lumière montait des herbes
Et les syllabes douces
Des pas emplissaient l'air
Quel ravissement

Blanc pur léger
Oiseau de lumière, tu montais
D'un coup ton chant
Ton élan frappant le simandre
De la poitrine
Fit résonner l'oracle
Des pleurs

Et quand la main avide
Enfermait par sa pourriture
La bouche volubile
Dans l'après-pluie saisi
Tu apparus en arc-en-ciel
Pour unir la déserte
Patmos à l'aphonie

(p. 179)
Commenter  J’apprécie          70
Les forêts n'ont pas du tout l'humeur voyageuse, elles sont de nature sédentaire et ont des goûts très casaniers. Ce qu'elles veulent, ce qu'elles aiment, c'est s'ancrer dans le sol afin de s'en nourrir pour mieux s'élancer vers le ciel et surtout garder toujours à leurs côtés leurs enfants de verdure, les arbres, leurs arbres, pour qu'ils constituent tous ensemble une grande, bruissante et durable famille. Mais cela, ce rêve induré dans la sève, demeure à la merci des humeurs toujours changeantes de l'air, du ciel et des tempêtes qui déciment les frondaisons, dénudent les feuillages, déracinent les rêves. C'est pour cela qu'à certains moments de l'année et en certaines heures de la nuit, les forêts frémissent et frissonnent sans que souffle le moindre vent. C'est leur façon de redouter le pire, de faire ce qu'en pays humain on nommerait un cauchemar.
Commenter  J’apprécie          70
Ce café où la vie s'écoule uniforme au rythme lent des verres d'eau -clepsydres de l'ennui-.
Commenter  J’apprécie          70
D'ancienne matrones maintiennent que si on veut faire un fils, il faut le faire au matin, au jour, et qu'une fille se fera aux vêpres, de nuit.
Commenter  J’apprécie          70
MON PERE VOULAIT
CONSTRUIRE UNE MAISON

Mon père a usé sa vie à construire une maison.
Après-midi, jours fériés dans la petite cuisine
sans gâteaux, sans aller au café.
En mourant il laissait une allée envahie d'herbes
des murs sans charpentes, sans crépi, depuis des années...
La roue tourne, comme disent les gens,
il s'est passé des choses, mon frère et moi
on s'est perdus de vue, on a su que le père était mort...

Voilà pourquoi ce soir je te regarde au fond des yeux.
C'est pour connaître un peu l'humble chaleur
que lui n'a pas connue.
Commenter  J’apprécie          70
UNE LETTRE

Notre vie est désormais une lettre
porteuse d'un important message
dont l'expéditeur et le destinataire
se sont perdus parmi les vagues de réfugiés.
Pourtant la lettre va et vient
d'un bureau de poste à l'autre
sans que nul ne l'ouvre
sans que nul ne la jette
barrée toujours de la mention "urgent'"
avec les noms pâlis des deux côtés
que les postiers seuls prononcent
comme les savants dans les laboratoires
disent les noms d'espèces disparues.

Titos Patrikios
Commenter  J’apprécie          70
Ici, aube et crépuscule n'ont rien de brutal, de soudain. On ne passe du jour à la nuit, de la nuit au jour qu'après un lent rituel d'irisations, de chatoiements, ordonné comme un sacre d'anges. Des milliers d'ailes transparentes se mettent à brasser l'aube et le soir se feuillette comme les pages d'un livre de lumière qu'encrerait peu à peu l'approche de la nuit.
Commenter  J’apprécie          70
Seuls les derniers, c'est-à-dire les Amants, ayant franchi les quatre stades de leur avancement et les quarante degrés de leur initiation (chaque stade ayant dix degrés) pouvaient se prévaloir d'avoir congédié en eux toute traces d'égoïsme, de possession, d'orgueil, d'enfermement dans les fausses certitudes du coeur et de l'esprit, et surtout de tout sentiment d'appartenance à une confrérie. Ils devenaient alors véritablement les Amants et ils pouvaient alors rencontrer Dieu par la seule maîtrise d'eux-mêmes puisque Dieu, pour Haci Bektas, ne réside nulle part ailleurs qu'en nous-même. Voilà pourquoi, parti de l'homme, le chemin d'affranchissement, d'épanouissement revient à l'homme.
Commenter  J’apprécie          70
Jacques Lacarrière
Il y eut un art immédiat de l'espace, un bonheur constant mêlant à tout moment la fantaisie et la raison : art de mettre chaque pierre à sa juste place de lumière, de s'inscrire dans le paysage sans jamais le meurtrir, de prolonger en somme le désordre inconstant de la mer par ce désordre apparent des maisons, blanches comme des vagues pétrifiées.

Les îles nues
Commenter  J’apprécie          61
C'est elle, cette prière constante, ce flux orant qui permet à la longue de parvenir à l'hésychia, à la paix intérieure, à la sereine coïncidence de l'homme de chair et de l'homme psychique, de l'homme d'aujourd'hui et de l'homme de demain, cette hésychia qui est sérénité instante et sentiente, plénitude accomplie, ce qu'un solitaire égyptien appelait le silence du cœur et des pensées, silence qui n'est pas indifférence au monde, retrait des turbulences de la vie mais au contraire identification, genèse et possession d'un monde désormais partagé, maîtrisé, excorié de ses phantasmes illusoires.
Commenter  J’apprécie          60
Jacques Lacarrière
Ici,
chaque murmure de feuille est poème .
Le chêne est un livre qui bruit.

(" Trois mėnologues")
Commenter  J’apprécie          65
Les prés sont vénéneux mais jolis en automne
Les vaches y paissant
Lentement s'empoisonnent
Le colchique couleur de cerne et de lilas
Y fleurit...
Commenter  J’apprécie          61
Je n'étais pas naïf au point de croire aux pouvoirs réels d'Athéna, mais, après tout, ce ne sont pas les dieux qui nous créèrent, c'est nous qui les avons créés, et il faut bien alors y croire nous-même, établir avec eux un modus vivendi. Comme le fit Ulysse.
Commenter  J’apprécie          60
Je me disais : moi aussi j'aurai mon livre des chemins, mon bréviaire des sentes, mon évangile des herbes et des fleurs, bref ma bible des routes et La Divine Comédie me parut bien convenir. J'avais depuis longtemps envie de la relire. Mais très vite, je finis par oublier le livre, ne plus penser à lui ou y penser comme à un compagnon présent mais de moins en moins essentiel. Dans la journée, j'aimais m'étendre au pied d'un arbre (chêne ou non, séculaire ou non) sans penser à rien d'autre qu'à la forme changeante des nuages, aux bruits lointains signalant une ferme, un hameau, un village. Et le soir - même quand l'atmosphère du café où j'avais pu trouver refuge rappelait le Purgatoire ou l'Enfer de Dante - je préférais rester là, avec les clients quand il y en avait ou seul, à lire le journal local, écouter les bruits et les silences d'un café, ce temps insidieux, anonyme des lieux qui soudain sont désertés de leur cris vivants, leur brouhaha, et leur rumeur humaine comme un rivage dont la mer vient de se retirer. Car même en ces endroits souvent sinistres, je me sentais plus réceptif qu'en allant m'isoler dans ma chambre pour lire un livre que je pourrais toujours retrouver à la fin du voyage. Les livres et les routes demeurent mais les rencontres, les paroles, elles, sont éphémères. Et c'est l'éphémère que je venais chercher dans la pérennité géologique des chemins ou la mouvance des visages. Cet éphémère égrené dans le fil des jours et qui se mue ainsi en petites éternités, à chaque instant recommencées. »
Commenter  J’apprécie          60
Notre mémoire est courbe. Qu’on la remonte ou la prolonge à l’infini, elle nous permet de rattraper ces bribes de passé qui subsistent sûrement devant nous autant que derrière nous.
Commenter  J’apprécie          60
Enfant, je voulais déjà inventorier toutes les fleurs, toutes les plantes de mon jardin. En surveiller les moindres insectes. Dénombrer l'infini en somme, le grouillement, énumérer la multitude, apurer la profusion des choses. Il m'est resté de cette époque un goût microscopique pour le monde, la passion de l'infime, le désir de devenir un jour le géographe des brindilles.
Commenter  J’apprécie          60
Décomposez la Grèce et vous verrez qu’il ne restera pour finir, qu’un olivier, une vigne et un bateau". Elytis Odysséas cité par Lacarrière
Commenter  J’apprécie          60
Quand il contemple ainsi le ciel, des poèmes, des chansons viennent parfois aux lèvres de Yunus. Parfois aussi, quand il balaie et s'interrompt soudain devant un souffle ou un phénomène imprévu. Ces chansons, ces poèmes, il est le seul à les connaître. Nul, au tekké, n'est au courant de ces compositions. D'ailleurs, nul ne les entend. Yunus les murmure, les fredonne à voix basse, pour lui-même et pour ceux qui l'entourent : les chiens, le vent et le mûrier. Le vent qui les reçoit et les emporte au loin. Vers qui ?
Commenter  J’apprécie          60
Dimanche après-midi
  
  
  
  
Dimanche après-midi, les portes des immeubles me rappellent
d’anciens mausolées oubliés.
Et s’il se trouve à l’entrée un lierre
ou quelque plante grimpante, alors on s’y croirait.

Là s’endormirent nos amies, anonymes, inconnues.
Sans la force de choisir
l’ultime occasion offerte :
rester sentimentales.

Tu allumes la lumière. Tu éteins.
Je veux t’aimer avant tout.
Tu allumes la lumière. Tu éteins.
Dans un recoin une vieille bigote nourrit ses chats.
Tu joues sans te douter de rien. Longs cheveux, longues jambes, nues.

Le vent fait voler ta jupe.


// Yorgos Markopoulos / Γιώργος Μαρκόπουλος (1951 -)

/ Traduit du grec par Michel Volkovitch
Commenter  J’apprécie          50



Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Jacques Lacarrière (959)Voir plus

Quiz Voir plus

Connaissez-vous...😁

La chérophobie est la phobie:

de manger de la viande
de dépenser de l'argent
du péché de chair
du bonheur

1 questions
27 lecteurs ont répondu
Créer un quiz sur cet auteur

{* *}