Bismarck de
Jean-Paul Bled
Face à l'agitation croissante, Frédéric-Guillaume donne le spectacle de l'indécision. Ballotté entre des partis contraires, il commence par opter pour la voie des concessions. L'abolition de la censure et le rappel du Landtag uni sont annoncés. Le 18 mars, pourtant, la situation échappe à son contrôle : la troupe tire sur la foule qui s'est rassemblée sur la place du château royal. Loin de ramener le calme, cette intervention déchaîne un embrasement général. L'armée fait bientôt face à une ville livrée à l'insurrection. Des combats sanglants se déroulent toute la nuit. Le matin suivant, le bilan s'élève à 230 morts. Atterré par la tournure tragique des événements, Frédéric-Guillaume opère un revirement complet. Contre l'avis de ses généraux, il ordonne à ses soldats de cesser le feu et de se retirer de Berlin. Allant encore plus loin dans le reniement, il s'incline peu après devant les dépouilles des victimes, puis, deux jours plus tard, arbore les trois couleurs de la nation allemande, noir, rouge et or. S'adressant aux Berlinois, il tient une harangue propre à stupéfier son entourage : "Je porte ces couleurs qui ne sont pas les miennes, mais je ne veux ni couronne ni autorité, je veux la liberté de l'Allemagne, l'unité de l'Allemagne." Dans une proclamation affichée le même jour, il conclut : "La Prusse se fond dorénavant dans l'Allemagne."
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